Thromboses artérielles des membres supérieurs: analyse d’une cohorte de 181 patients

La prise en charge de la pathologie artérielle périphérique est désormais mieux définie tant sur le plan interventionnel que sur le plan pharmacologique . Il en est ainsi des sténoses et dissections carotidiennes, des anévrismes de l’aorte et de l’artérite oblitérante des membres inférieurs. L’atteinte artérielle des membres supérieurs est un champ nosologique moins parcouru et moins défriché par la communauté médicale, du fait de sa rareté et du moindre investissement pour en éclaircir les étiologies et la prise en charge.

Les thromboses artérielles du membre supérieur sont rares. En effet, leur complication principale, les nécroses digitales, sont 40 fois moins fréquentes que les nécroses d’orteils. Leur fréquence est cependant difficile à évaluer, car les principales séries sont chirurgicales et n’incluent pas les patients ayant bénéficié d’un traitement conservateur. L’atteinte des membres supérieurs intéresserait entre 5 et 12 % des ischémies aiguës de membres. L’incidence de ces dernières est estimée à 140 cas par million d’habitants par an , ce qui correspondrait à une incidence de 3,6 à 8,6 cas par million d’habitants par an pour les membres supérieurs. Cette différence entre membre supérieur et inférieur s’explique principalement par la localisation préférentielle de l’athérome aux membres inférieurs, principale étiologie des thromboses artérielles, ainsi que par les embolies qui surviennent plus fréquemment aux membres inférieurs.

Il n’existe pas d’étude randomisée ou contrôlée sur les thromboses artérielles des membres supérieurs. Seules des cohortes sont rapportées, essentiellement issues de services de chirurgie vasculaire . En effet la symptomatologie peut être bruyante avec un pronostic fonctionnel engagé, ce qui nécessite alors un geste de revascularisation en urgence et une hospitalisation en chirurgie. Dans ces séries chirurgicales, l’étiologie étant généralement embolique et responsable d’une ischémie aiguë, la morbidité est élevée, avec un taux d’amputations approchant les 21% pour les membres supérieurs (versus 13% pour les membres inférieurs) dans une cohorte rétrospective de 822 patients.

Ces séries chirurgicales comportent une majorité d’occlusions situées au niveau ou au dessus de l’artère humérale. Les principales étiologies décrites sont cardioemboliques, traumatiques et iatrogènes et concernent des patients dans leur 7ème ou 8ème décade. Le sex-ratio est variable selon les études, allant de 36% à 71% d’hommes . Néanmoins il convient d’interpréter ces résultats avec prudence et de les rapporter aux différentes étiologies. Ainsi, les lésions traumatiques intéresseront plutôt les hommes jeunes, à l’inverse des complications thrombo-emboliques.

La plus grande série publiée comporte 286 patients . Cette série chirurgicale s’attachait à décrire les 176 patients n’ayant pas de thrombose d’origine embolique. Le sex-ratio était en faveur des hommes (n=124, 70,5%) et l’âge moyen était de 41,4 ans. Il existait 126 traumatismes responsables d’ischémie, 33 thromboses de l’artère sous-clavière, 9 syndromes du défilé cervico-thoracobrachial, et 8 artériopathies digitales (activités sportives, professionnelles, injection intra artérielle).

La plus grande série de radiologie interventionnelle comporte 251 patients. Dans cette étude rétrospective s’étalant sur plus de 20 ans, l’étiologie principale était d’origine cardioembolique (80,5%). La moyenne d’âge des patients était de 73 ans et le sex-ratio en faveur des femmes, ce qui contraste avec les données issues des grands essais cliniques sur la fibrillation auriculaire qui montrent une prédominance masculine, entre 60 et 65% . Dans cette série, la ré-occlusion suivant la thrombo-embolectomie à la sonde de Fogarty survenait chez 21 patients (8,8%), avec nécessité de recourir à une amputation dans 5 cas (2%). Le décès pendant l’hospitalisation concernait 14 patients (5,6%).

Ces séries chirurgicales et radio-interventionnelles, bien que comportant un grand nombre de patients, ne présentent qu’un panel limité d’étiologies responsables de thromboses artérielles du membre supérieur et présentent pour la plupart des ischémies aiguës. Il s’agit d’un biais de recrutement car certains patients avec une atteinte distale ou chronique, ne nécessitent pas de geste chirurgical ou de cathétérisme artériel.

Les principales séries médicales comportent peu de patients  ou s’intéressent à une présentation particulière, notamment les nécroses digitales . Ces dernières séries comprennent entre 25 et 86 patients, avec un pourcentage de femmes variant entre 22 et 64%. Cette différence est liée à l’exclusion des patients ayant une sclérodermie dans l’étude de Cailleux , alors que cette étiologie est fréquemment responsable d’ulcérations et nécroses digitales . L’âge moyen des patients était respectivement de 53 et 55 ans dans les études de Cailleux et Abdallah . Dans ces études, on note une prédominance de connectivites pour les femmes, alors que cette étiologie est complètement méconnue des séries chirurgicales, pour les raisons citées plus haut. Le spectre étiologique décrit dans ces études est plus vaste, incluant notamment des néoplasies, des vascularites, des connectivites, des thrombophilies, la thromboangéite oblitérante ou maladie de Buerger et le syndrome du marteau hypothénar. Néanmoins, la présentation clinique de ces séries est la nécrose digitale.

PATIENTS ET METHODE 

Inclusion des patients

Il s’agit d’une étude observationnelle, rétrospective et bi-centrique, menée dans le service de médecine vasculaire de l’hôpital européen Georges-Pompidou de l’Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (AP-HP) ainsi que dans le service de médecine interne de l’hôpital de Bois Guillaume (CHU Hôpitaux de Rouen).

L’analyse de la base PMSI (programme de médicalisation des systèmes d’information) de ces deux CHU a permis l’extraction des données des patients hospitalisés entre le 1er janvier 2000 et le 30 mai 2013 avec « Thromboses artérielles des membres supérieurs » (codage CIM-10 I74.2) comme diagnostic principal ou associé.

Données recueillies

La revue systématique des dossiers a permis de colliger les caractéristiques démographiques des patients (âge, sexe), la présence de facteurs de risque cardio-vasculaires (FDRCV) ou d’une atteinte cardio-vasculaire.

Les FDRCV considérés sont définis comme suit :
– Un tabagisme actif ou sevré depuis moins de 3 ans.
– Une obésité, définie par un indice de masse corporelle (IMC) ≥ 30 kg/m2.
– Une dyslipidémie, en présence d’un traitement par statines ou si ce FDRCV était mentionné dans les antécédents.
– Un diabète, en présence d’un traitement insulinique ou antidiabétique oral, ou si ce FDRCV était mentionné dans les antécédents.
– Une hypertension artérielle, en présence d’un traitement anti-hypertenseur ou si ce FDRCV était mentionné dans les antécédents.
– Une hérédité cardiovasculaire, s’il était mentionné dans les antécédents un infarctus du myocarde (IDM) ou une mort subite chez un apparenté du premier degré âgé de moins de 55 ans pour les hommes et moins de 65 ans pour les femmes.
– Un âge supérieur à 50 ans pour les hommes et 60 ans pour les femmes comme cela est mentionné dans les recommandations de l’AFSSAPS de 2005 pour la prise en charge des dyslipidémie .

Les atteintes cardio-vasculaires suivantes ont été considérées : 

– Un accident ischémique transitoire (AIT) ou accident vasculaire cérébral ischémique (AVC), s’il était mentionné dans les antécédents.
– Un athérome coronarien, si le patient présentait un antécédent d’angor stable, de syndrome coronarien aigu (SCA) ou de revascularisation coronaire.
– Un anévrysme de l’aorte abdominale (AAA), si les explorations réalisées montraient une perte du parallélisme des parois de l’aorte abdominale, avec une augmentation de diamètre d’au moins 50% par rapport à son diamètre normal, ou si il était mentionné dans les antécédents.
– Un athérome des membres inférieurs, si les explorations montraient la présence de plaque(s) d’athérome des artères des membres inférieurs ou un index de pression systolique (IPS) inférieur à 0,9 ou supérieur à 1,3, ou s’il était mentionné dans les antécédents.

Les artères occluses des membres supérieurs ont été notifiées, quelle que soit la modalité d’imagerie. Le bilan étiologique (morphologique et biologique) ainsi que le traitement de sortie ont également été recueillis. L’utilisation d’ilomédine pendant l’hospitalisation a été recherchée. La nécessité de recourir à une amputation ainsi que le décès des patients ont été systématiquement notés. Enfin, nous avons interrogé le système informatique sur le dernier passage du patient dans le service ainsi que dans l’hôpital et recherché si une imagerie de contrôle de la thrombose avait été effectuée.

Analyse statistique

Les variables continues sont exprimées en moyennes ± écart-type si elles suivent une loi normale ou médianes (25-75ème percentile) dans le cas contraire. Les variables discrètes sont exprimées sous forme d’effectifs (pourcentage). Les variables continues ont été comparées par test de Mann Whitney ou t-test de Student lorsqu’applicable et les variables discrètes par test exact de Fisher ou test du Chi2 lorsqu’applicable. Les résultats étaient considérés significatifs pour un p bilatéral inférieur à 0,05. Toutes les analyses statistiques ont été réalisées avec le logiciel SPSS (version 13.0; SPSS Inc., Chicago, Illinois).

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Table des matières

I. INTRODUCTION
II. OBJECTIF DE L’ETUDE
III. PATIENTS ET METHODE
1. Inclusion des patients
2. Données recueillies
3. Analyse statistique
IV. RESULTATS
1. Population étudiée
2. Caractéristiques de la population étudiée
3. Etiologies
4. Localisation de l’atteinte
5. Examens réalisés
6. Prise en charge
6.1. Prise en charge médicamenteuse
6.2. Prise en charge interventionnelle
7. Délai de suivi et imagerie de contrôle
8. Patients décédés
9. Thrombose d’origine indéterminée
V. DISCUSSION
1. Caractéristiques de la population
2. Etiologies
2.1. Généralités
2.2. Description des principales étiologies
2.2.1. Syndrome du marteau hypothénar
2.2.2. Causes cardio-emboliques et athéromateuses
2.2.3. Connectivites
2.2.4. Iatrogénie
2.2.5. Maladie de Buerger
2.2.6. Cancer
2.2.7. Thrombophilie
2.2.8. Défilé cervico-thoracobrachial
2.2.9. Embolie paradoxale
2.2.10. Vascularites des gros vaisseaux
2.3. Thromboses d’origine indéterminée
3. Bilan réalisé
4. Traitement
5. Limites de l’étude
VI. CONCLUSION
VII. ANNEXES
1. Annexe 1 : critères de classification
2. Annexe 2 : tableau 69 du régime général
3. Annexe 3 : vascularisation artérielle du membre supérieur
VIII. REFERENCES
IX. SERMENT D’HIPPOCRATE

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