Théorie d’ida jean orlando pelletier
ETAT DES CONNAISSANCES
Au cours de ce chapitre, nous aborderons l’épidémiologie des personnes âgées, les démences, la douleur, le raisonnement clinique infirmier, les conséquences d’une mauvaise gestion de la douleur et le rôle infirmier auprès des personnes atteintes de démences présentant une douleur. 2.1. Les personnes âgées En Suisse, le pourcentage de personnes de 65 ans et plus atteindra environ 26% en 2045, alors qu’il représente 18% en 2015 (OFS, 2016). De plus, depuis 2013, nous pouvons constater que plus d’un million de personnes se font hospitaliser chaque année avec, en tête de liste, la tranche d’âge des 60-84 ans. A savoir qu’un tiers des personnes de 65 ans et plus l’ont été à plusieurs reprises en 2015 (OFS, 2017). 2.2. Les démences Chez la personne âgée, la démence représente un problème d’envergure parmi les problèmes neurologiques. Il est impératif de s’intéresser à la personne âgée atteinte de démences en regard de la prévalence de cette maladie qui est considérable (Voyer, 2013). En effet, selon l’OFSP (2016), “nous risquons pratiquement tous d‘être confrontés à la démence, que soit en tant que proches ou amis d’une personne malade, voire en tant que patients. Cette maladie implique une réorganisation complète de l‘existence et des relations sociales” (p.14). En effet, l’âge est un facteur de risque direct de cette pathologie et il y a actuellement dans le monde 50 millions de personnes atteintes. Il est également important de noter que d’ici 2030 plus de 82 millions de personnes seront atteintes et d’ici 2050 ce chiffre doublera encore (OMS, 2017). En Suisse, on compte aujourd’hui 148’000 personnes atteintes de démences et ce chiffre sera multiplié par deux également d’ici 2040 (Alzheimer Suisse, 2018). Dans la cinquième version du DSM, la démence se nomme à présent “TNC”. Cependant, le terme “démence” peut être encore utilisé dans la pratique car mieux connu des soignants et des patients. Par ailleurs, le terme “TNC” est préféré chez les jeunes adultes (DSM-5, 2013, traduction libre, p.591). Il existe deux catégories de TNC : léger ou majeur. 13 Le TNC majeur se caractérise par un déclin cognitif significatif d’un niveau antérieur de performance dans un ou plusieurs domaines cognitifs. Ce déclin touche l’attention, la mémoire et l’apprentissage, les fonctions exécutives, le langage, les perceptions motrices et la cognition sociale (DSM-5, 2013, traduction libre, pp. 602-603). Par ailleurs, la conscience n’est pas touchée malgré une détérioration du contrôle émotionnel ou du comportement social (OMS, 2017). Les critères diagnostiques du TNC majeur selon le DSM-5 (2013) : 1. un déclin cognitif significatif 2. une interférence avec l’indépendance dans les activités de la vie quotidienne 3. qui ne se produit pas dans un contexte de délire 4. qui n’est pas mieux expliqué par un autre trouble mental (traduction libre, pp.602-603). Il est spécifié trois stades de gravité : léger, modéré et sévère. Dans le premier stade, le patient a des difficultés dans les activités instrumentales de la vie quotidienne (faire son ménage, …). Dans le stade modéré, ce sont les activités de base de la vie quotidienne qui sont touchées (s’habiller, se nourrir, …) et dans le dernier stade, le patient est complètement dépendant (DSM-5, 2013, traduction libre, p.605). La démence entraîne de larges répercussions sur l’entourage et ce sont souvent les proches qui subviennent à leurs besoins (OMS, 2017). Les stades peuvent également être évalués selon le CDR. Les différents items de ce score sont : la mémoire, l’orientation, la capacité de jugement et de résolution des problèmes, les activités hors de chez soi, maison et passe-temps ainsi que la prise en charge personnelle. Le score de détérioration se cote de 0 à 3. Le niveau 0 “Aucun” correspond à aucun déficit des items. Le niveau 0.5 “Discutable” correspond à des déficits légers et discutables des différents items. Les niveaux 1, 2 et 3 correspondent à des détériorations qui évoluent de légères à sévères selon les items (Mapi Research Institute, 2006, p.10). (Cf. annexe 1). Il existe plusieurs types de démences et, selon Alzheimer Suisse (2015) : La maladie d’Alzheimer est la forme de démence la plus fréquente (env. 50%). Elle est suivie, en termes de fréquence, par les démences vasculaires (env. 20%) qui sont liées à des troubles de l’irrigation du cerveau et de petits AVC (accidents vasculaires cérébraux). On rencontre fréquemment des formes mixtes de démence, particulièrement à un âge avancé …. Dans environ 20% des cas, nous sommes en face d’une forme plus rare de démence. En font partie 14 notamment les démences fronto-temporales (dont il existe plusieurs variantes) qui se manifestent souvent avant l’âge de la retraite, la démence à corps de Lewy, la démence liée à la maladie de Parkinson, la rarissime maladie de Creutzfeldt-Jakob, la démence associée au syndrome de Down, le syndrome de Korsakow, dû à l’alcoolisme, ainsi que d’autres formes de démences très rares que nous ne mentionnons pas ici. Au vu du nombre de formes différentes de démences, ce travail ne se focalise pas sur un type de démence en particulier. En résumé et selon l’OMS (2017) : La démence est une réalité méconnue et suscite l’incompréhension, ce qui engendre une stigmatisation et des obstacles au diagnostic et aux soins. La maladie a des conséquences qui peuvent être physiques, psychologiques, sociales et économiques pour les personnes chargées des soins, les familles et les sociétés.
THÉORIE D’IDA JEAN ORLANDO PELLETIER
Ida Jean Orlando Pelletier fait partie des théoriciennes infirmières ayant conçu leurs théories dans la période dite pré-paradigme. Elle est considérée comme étant une pionnière dans le domaine. En effet, elle a été une des premières à souligner le fait que les patients ont leur vision de ce qu’il se passe comme par exemple lors de leur prise en soins. Les infirmières devraient, selon elle, exprimer leur compréhension de la situation et valider le tout avec le principal concerné, le patient (Alligood, 2014). 3.2. Le paradigme et l’école de pensée La théorie d’Orlando se situe dans le paradigme de l’interaction réciproque selon Fawcett et DeSanto-Madeya (2013). Ce dernier possède une vision holistique, l’entité est non divisible et les interactions entre l’être humain et son environnement sont réciproques. La réalité est multidimensionnelle, dépendante du contexte (l’environnement) et relative (Fawcett & DeSanto-Madeya, 2013). Cette théorie fait partie de l’Ecole de l’interaction. Elle met l’accent sur le processus d’interaction et sur le développement de la relation entre les patients et les infirmières (G. da Rocha, communication personnelle [Support de cours], 22 septembre 2015). Dans la hiérarchie des connaissances, elle se situe dans les théories intermédiaires et a donc un niveau d’abstraction relativement bas. Ces dernières découlent d’un modèle conceptuel et sont plus limitées à un cadre que les grandes théories (après plusieurs recherches, nous ne sommes pas en mesure de préciser de quel modèle découle cette théorie). Elles sont composées d’un nombre limité de concepts et de propositions qui sont écrits à un niveau relativement concret et spécifique (Fawcett & DeSanto-Madeya, 2013, traduction libre, p.15). Ce paradigme tient compte de divers éléments comme l’influence du contexte sur le phénomène observé. Pour ce travail, il semble pertinent de s’intéresser à un cadre théorique approuvant l’importance de la relation entre la personne soignée et l’infirmière car son rôle est de promouvoir la santé et le bien-être, et pour cela, il est essentiel de connaître le patient. En effet, afin de pouvoir détecter un changement de comportement dû à la douleur chez la personne atteinte de démences, il est important que l’infirmière puisse créer un lien de confiance réciproque avec cette dernière. 20 3.3. Métaconcepts Un métaparadigme, synonyme de métaconcept, est défini comme les concepts globaux qui identifient les phénomènes d’intérêt central d’une discipline et les propositions globales qui décrivent ces concepts et qui font état des relations entre eux. Il est le premier élément et la composante la plus abstraite de la hiérarchie des connaissances (Fawcett & DeSanto-Madeya, 2013). Il existe quatre métaconcepts selon Pepin, Kérouac et Ducharme (2010) qui sont : le soin, la santé, l’être humain et l’environnement (p.77). Cependant, la théorie du processus de soins infirmiers délibératifs est basée uniquement sur les deux métaparadigmes de l’être humain et du soin (Fawcett & DeSanto-Madeya, 2013, traduction libre, p.365). 3.3.1. La personne Dans la théorie d’Orlando, le terme patient est utilisé pour parler d’être humain. Elle voit la personne comme un être unique et ayant sa propre vision de la situation (Forchuk, 1991, p.41 citée par Fawcett & DeSanto-Madeya, 2013, traduction libre, p.366). Les patients ne savent pas toujours pourquoi ils sont impuissants et peuvent avoir des besoins qu’ils ne sont pas capables de satisfaire de manière indépendante. Ils ne sont donc pas en mesure de prendre soin d’eux-mêmes et parfois, ils sont dans l’incapacité de communiquer leurs besoins. C’est dans ces cas-là que les patients requièrent de l’aide de la part des professionnels de la santé (Fawcett & DeSantoMadeya, 2013, traduction libre, p.366). 3.3.2. Le soin Orlando explique qu’il est nécessaire que l’infirmière apprenne à comprendre ce qu’il se passe entre elle et ses patients. En effet, cela représente le noyau central de sa pratique professionnelle et englobe le cadre de base d’aide qu’elle apporte aux patients. Ce qu’une infirmière dit ou fait est le mode exclusif par lequel elle sert le patient. De plus, les soins ont pour but de fournir l’aide nécessaire au patient afin que ses besoins immédiats soient satisfaits (Orlando, 1961, p.8 citée par Fawcett & DeSanto-Madeya, 2013, traduction libre, p.366). Bien qu’Orlando ne définisse que deux métaconcepts, Pepin et al., quant à eux, donnent leurs définitions en regard de cette théorie des deux métaconcepts manquants. 21 3.3.3. La santé La santé est caractérisée comme un “sentiment de compétence et de bien-être ainsi qu’un confort physique et mental” (Pepin et al., 2010, p.77). 3.3.4. L’environnement Selon Pepin et al. (2010), Orlando définit l’environnement comme un “temps et espace, c’est-à-dire un contexte entourant la situation des soins infirmiers” (p.77). 3.3.5. Les concepts clés Orlando décrit trois concepts dans sa théorie : le comportement des patients, la réaction de l’infirmière et l’activité de l’infirmière. Ceux-ci sont en interaction et constituent le processus de soins infirmiers délibératifs. Attardons-nous sur chacun d’eux : 1. Le comportement du patient : observé par l’infirmière dans une situation de soin entre l’infirmière et le patient, il comprend deux dimensions : • le besoin d’aide : exigence du patient qui, si elle est satisfaite, soulage ou diminue la détresse du patient et peut améliorer le bien-être (Orlando, 1961, p.5 citée par Fawcett & DeSanto-Madeya, 2013, traduction libre, p.367). • l’amélioration : modification du comportement du patient suite à un soulagement de la détresse ou des symptômes Ces deux dimensions peuvent être exprimées par le patient sous forme verbale et non verbale. Orlando précise qu’il ne faut pas rejeter ou ignorer de telles manifestations, car c’est un signal possible de détresse ou de besoin non satisfait (Orlando, 1961, p.79 citée par Fawcett & DeSanto-Madeya, 2013, traduction libre, p.368). 2. La réaction de l’infirmière : réponse non observable de l’infirmière au comportement du patient, qui se compose de trois dimensions : • la perception : stimulation physique de l’un des cinq sens d’une personne • la pensée : idée qui vient à l’esprit d’une personne • le sentiment : état d’esprit qui oriente une personne vers ou contre une perception, une pensée ou une action (Orlando, 1972, p.59 citée par Fawcett & DeSanto-Madeya, 2013, traduction libre, p.368). 22 Orlando explique que, dans une situation de soins, la perception est construite à partir du comportement du patient, elle stimule une pensée automatique et la pensée stimule le sentiment. Elle souligne que le sentiment doit être exprimé et validé avec le patient pour lui être bénéfique.
|
Table des matières
Déclaration
Remerciements
Résumé
Liste des abréviations
Liste des tableaux
Liste des figures
Table des matières
Introduction
1. Problématique
1.1. Question de recherche initiale
2. Etat des connaissances
2.1. Les personnes âgées
2.2. Les démences
2.3. La douleur
2.3.1. La définition et les types de douleurs
2.3.2. L’évaluation de la douleur
2.3.3. La douleur comme symptôme en soins palliatifs
2.3.4. Le raisonnement clinique infirmier
2.3.5. Les conséquences d’une mauvaise gestion de la douleur
2.3.6. Le rôle infirmier auprès des personnes atteintes de démences présentant
une douleur
3. Théorie d’ida jean orlando pelletier
3.1. La théorie des processus de soins infirmiers délibératifs d’Orlando
3.2. Le paradigme et l’école de pensée
3.3. Métaconcepts
3.3.1. La personne
3.3.2. Le soin
3.3.3. La santé
3.3.4. L’environnement
3.3.5. Les concepts clés
3.4. Les liens entre la théorie d’Orlando et la thématique
3.5. Question de recherche finale
4. Méthode
4.1. Sources d’information et stratégie de recherche documentaire
4.1.1. Equations de recherche
4.2. Diagramme de flux
5. Résultats
5.1. Analyse critique des articles retenus
5.1.1. Les types d’études retenues
5.1.2. La qualité et les types des revues scientifiques
5.1.3. La répartition géographique et le milieu professionnel des études retenues
5.1.4. L’année de publication et l’échantillon
5.1.5. La composition des articles sélectionnés
5.2. Les barrières à la prise en charge de la douleur
5.2.1. Les challenges du diagnostic de la douleur et de l’administration des
antalgiques
5.2.2. Les outils d’évaluation de la douleur
5.2.3. La communication et le travail interprofessionnel
5.2.4. Les contraintes de temps et la charge de travail
5.2.5. La formation et l’éducation
5.2.5.1. Les croyances
5.2.5.2. Les comportements et les attitudes de l’infirmière
5.3. Les stratégies pour surmonter ces obstacles
5.3.2. L’éducation et la formation
5.3.3. Des outils adéquats
5.3.4. La communication et le travail interprofessionnel
5.3.5. Les futures recherches
6. Discussion
6.1. Les barrières et les stratégies à la prise en charge de la douleur
6.1.1. Le comportement du patient
6.1.2. La réaction de l’infirmière
6.1.3. L’activité de l’infirmière
7. Conclusion
7.1. Apports et limites du travail
7.2. Recommandations
7.2.1. Recommandations pour la formation de base
7.2.2. Recommandations pour la pratique
7.2.3. Recommandations pour la recherche
8. Références
8.1. Bibliographie
9. Annexes
9.1. Annexe 1
9.2. Annexe 2
9.3. Annexe 3
9.4. Annexe 4
9.5. Annexe 5
9.6. Annexe 6
9.7. Annexe 7
9.8. Annexe 8
9.9. Annexe 9
9.10. Annexe 10
9.11. Annexe 11
9.12. Annexe 12
9.13. Annexe 13
9.14. Annexe 14
9.15. Annexe 15
9.16. Annexe 16.
Télécharger le rapport complet