Thématique de la qualité de l’air intérieur
La pollution de l’air intérieur
Aujourd’hui, la pollution de l’air est devenue le principal risque environnemental pour la santé dans le monde. Le constat d’une croissance des allergies et des affections respiratoires en France (Bentayeb et al., 2013), et ce particulièrement chez les enfants, a incité les pouvoirs publics à mettre en place un Observatoire de la Qualité de l’Air Intérieur (OQAI) en 2001, placé sous la tutelle des Ministères en charge de la Construction, de la Santé et de l’Écologie. Créé avec le concours du CSTB (Centre Scientifique et Technique du Bâtiment), de l’ADEME (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie), de l’ANSES (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire, anciennement AFSSET Agence Française de Sécurité Sanitaire de l’Environnement et du Travail) et de l’ANAH (Agence Nationale de l’Habitat), l’OQAI a pour missions principales :
• d’approfondir les connaissances liées à la composition chimique de l’air intérieur ;
• de mieux connaître et appréhender les environnements intérieurs en apportant des slutions adaptées à la prévention et au contrôle de la pollution ;
• de sensibiliser les professionnels et informer le grand public.
De 1990 à 2000, un premier inventaire à portée régionale ou locale des données françaises relatives à la QAI a été réalisé dans des immeubles de bureaux et autres établissements scolaires (Mosqueron et al., 2001). Puis, du 1er octobre 2003 au 21 décembre 2005, une première campagne nationale sur la QAI a été menée dans 567 résidences réparties dans 74 communes, 50 départements et 19 régions françaises (OQAI, 2006). Dans cette campagne de grande envergure, chaque logement a été étudié pendant près d’une semaine. Les concentrations des polluants ont été mesurées à l’intérieur des logements, dans les garages attenants et à l’extérieur. L’analyse de ces résultats a permis de faire un état de la pollution de l’air dans les logements en France. Les polluants chimiques, en particulier les composés organiques volatils (COV), sont fortement présents dans les logements puisque leur fréquence d’apparition va par exemple de 2,3% pour le 2-butoxy-éthylacétate à 100% pour l’acétaldéhyde, le formaldéhyde, l’hexaldéhyde, le toluène ou encore les m/p xylènes. Les COV regroupent l’ensemble des molécules formées d’atomes de carbone et d’hydrogène et d’autres molécules où une partie des atomes de carbone est remplacée par des atomes d’azote, de soufre ou d’oxygène ou une partie des atomes d’hydrogène par du chlore (CancerEnvironnement, 2018). Le Tableau 1 rassemble quelques propriétés physiques et chimiques de COV présents dans l’air intérieur. Dans cette catégorie, il faut distinguer les composés volatils (COV) dont la température d’ébullition est comprise entre 50°C et 240-260°C des COV semi-volatils (COSV) pour lesquels la température d’ébullition est comprise entre 240- 260°C et 380-400°C (Observatoire régionale de santé d’Ile-de-France, 2007).
Outre les COV, nous trouvons également des oxydes de carbone, CO2 et CO provenant de l’utilisation de chaudière et de cheminée (Picbleu, 2018), des polluants physiques comme les particules et les fibres (Fédération française du bâtiment, 2017), des polluants biologiques regroupant allergènes (Association Asthme & Allergies, 2012), moisissures et autres bactéries, ces dernières émettant elles-mêmes des COV (INSPQ, 2003 ; Lechner et al., 2005). Même si les concentrations des polluants sont généralement faibles, de l’ordre de quelques μg.m-3 à quelques dizaines de μg.m-3 , une exposition chronique peut conduire à l’apparition de symptômes et pathologies divers.
Impacts sanitaires de la pollution de l’air
Les troubles de la santé potentiellement associés à une mauvaise QAI sont nombreux. Ils peuvent aller de la simple gêne (olfactive, somnolence, irritations des yeux et de la peau) à l’apparition ou l’aggravation de pathologies aigues ou chroniques : allergies respiratoires, intoxications, cancers, etc. L’exposition à des allergènes de l’environnement intérieur peut en particulier provoquer des exacerbations de l’asthme chez les personnes sensibles. De même, les moisissures, ainsi que les composés libérés (mycotoxines, COV), sont également reconnus comme pouvant être à l’origine de pathologies allergiques. Les cardiopathies ischémiques (CPI) recouvrent un ensemble de troubles dus à l’insuffisance des apports d’oxygène au muscle cardiaque pouvant entraîner des lésions du myocarde de gravité variable, de l’ischémie à la nécrose myocardique. D’après des données de l’OMS (OMS, 2014), environ 26% des décès de la pollution de l’air intérieur concernent ce type de pathologies.
Concernant les COV, ils ont des effets très néfastes sur la santé. Quel que soit le polluant, deux types d’effets sont à distinguer : les effets aigus dus à des concentrations élevées en polluants et les effets chroniques relatifs à une exposition continue à de faibles concentrations. Les effets aigus apparaissent surtout en milieu professionnel lors de fuites ou de déversements importants, suite notamment à des rejets accidentels massifs de COV dans des milieux confinés. Ceux-ci peuvent induire de sérieuses conséquences sur la santé : irritations des yeux, des muqueuses des voies respiratoires, troubles cardiaques et du système nerveux, céphalées. La gravité de l’exposition aux risques d’émanations toxiques des COV dépend de plusieurs facteurs : la toxicité de la molécule chimique, la voie d’exposition (respiratoire, cutanée, digestive, oculaire), la concentration, la fréquence, la durée d’exposition, etc.
Les expositions chroniques de la population à un cocktail de polluants présents dans l’air intérieur peuvent fortement varier d’un foyer à un autre selon le mode de vie des habitants. La présence de fumeurs, le bricolage, l’usage de produits de nettoyage, de parfums d’ambiance, d’insecticides ou encore les effluves de cuisine sont autant de sources d’émission d’une grande diversité de polluants. Outre les émissions dues aux activités humaines, les matériaux de construction (mousses isolantes, cloisons, etc.) et de décoration (revêtements muraux et sol, peinture, vernis, mobilier en pin ou bois contreplaqué, etc.) peuvent également émettre des polluants.
Les conclusions des campagnes de mesures de l’OQAI croisées avec les données du groupe de travail européen INDEX (Critical Appraisal of the Setting and Implementation on Indoor Exposure Limits in European Union) ont alors conduit l’ANSES à définir une liste de 56 polluants d’intérêt devant faire l’objet d’une valeur guide de qualité d’air intérieur (VGAI) classés par ordre de priorité (ANSES, 2007). L’objectif est de proposer des concentrations de polluants dans l’air intérieur visant à protéger la population d’effets sanitaires liés à une exposition par inhalation.
Stratégies de régulation des polluants gazeux dans l’air intérieur
Notions de valeurs guides de qualité d’air intérieur
Les trois objectifs majeurs du Plan National Santé-Environnement (PNSE 2004 2008) sont de « garantir un air et boire une eau de bonne qualité », de « prévenir les pathologies d’origine environnementale et notamment les cancers » et de « mieux informer le public et protéger les populations sensibles (enfants et femmes enceintes) » (Ministère de la transition écologique et de la santé, 2017). Ces objectifs se déclinent en 45 actions, celles relatives à la pollution de l’air intérieur étant de :
• mieux connaître les déterminants de la QAI et renforcer la réglementation ;
• réduire les émissions polluantes provenant des installations de chauffage du secteur résidentiel tertiaire ;
• réduire l’exposition au radon dans les bâtiments à usage d’habitation et mieux évaluer le risque ;
• limiter l’exposition de la population aux fibres minérales artificielles ;
• renforcer les capacités d’évaluation des risques sanitaires liés aux substances chimiques ;
• réduire les expositions professionnelles aux agents cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques (CMR), notamment celles concernant les poussières de bois, le benzène, le plomb et les fibres céramiques réfractaires, en renforçant et en modernisant les moyens de contrôle et les services de santé et sécurité au travail.
Depuis 2004, l’ANSES travaille à l’élaboration de VGAI fondées exclusivement sur des critères sanitaires, pour apporter aux pouvoirs publics des éléments utiles à la gestion du risque sanitaire que pourrait subir la population (ANSES, 2018). Les VGAI ont été définies comme les concentrations dans l’air d’une substance chimique en dessous desquelles aucun effet sanitaire ou aucune nuisance ayant un retentissement sur la santé n’est attendu pour la population générale. Elles peuvent être révisées en tenant compte de l’état des connaissances actuelles.
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre I. Contexte et objectifs de l’étude
A. Thématique de la qualité de l’air intérieur
A.1. La pollution de l’air intérieur
A.2. Impacts sanitaires de la pollution de l’air
A.3. Sources d’émission des COV
A.4. Stratégies de régulation des polluants gazeux dans l’air intérieur
B. Techniques d’analyse et de mesure des COV en air intérieur
B.1. Méthodes d’échantillonnage et d’analyse des COV dans l’air
B.2. Méthodes de mesure des émissions en COV des matériaux
B.3. Les limites des méthodes de mesure
C. État de l’art sur les matériaux émissifs
C.1. Processus d’interaction entre les matériaux et les COV
C.2. État de l’art sur les matériaux émissifs pour le relargage contrôlé
C.3. Cas particulier des matériaux de référence émissifs en COV
D. Présentation du travail de thèse
D.1. Objectifs
D.2. Méthodologie appliquée
Chapitre II. Matériaux massifs émissifs en polluants cibles
A. Matériaux massifs : de l’élaboration à la caractérisation
A.1. Élaboration de matériaux poreux dans la littérature
A.2. Préparation des matrices sol-gel
A.3. Procédés de séchage
A.4. Caractérisations des matériaux
B. Méthodes de dopage des matrices
B.1. Principe du dopage statique par pression de vapeur saturante
B.2. Principe du dopage dynamique sous un flux de mélange gazeux
B.3. Dopage des matrices sol-gel pour l’étude du relargage des polluants cibles
C. Relargage des matériaux sol-gel dopés en polluants cibles
C.1. Dispositif optique pour un suivi de l’absorption du polluant relargué
C.2. Cellule FLEC pour une mesure de la concentration en polluant
D. Étude du relargage direct
D.1. Vitesses de relargage en mode statique
D.2. Vitesses de relargage en mode dynamique
E. Étude du relargage différé
E.1. Conservation des matériaux émissifs
E.2. Vitesses de relargage en mode statique
E.3. Vitesses de relargage en mode dynamique
E.4. Influence du débit d’air humide et du pourcentage d’humidité sur le relargage
E.5. Tests d’étanchéité
Bilan et conclusions
Chapitre III. Élaboration des matériaux textiles avec dépôt sol-gel
A. Choix et présentation des supports textiles utilisés
A.1. Étoffe en coton
A.2. Feutres
A.3. Fibres de verre
A.4. Mat de carbone
B. Synthèses et caractérisations des textiles enduits
B.1. Préparation des textiles et du sol-gel
B.2. Dépôt d’une ou plusieurs couches de sol-gel
C. Tests de dopage et relargage : exemple du toluène
C.1. Méthode de dopage des textiles enduits par pression de vapeur saturante
C.2. Relargage des textiles enduits via le foulard
C.3. Relargage des textiles enduits via la Jeannette
Bilan et conclusions
Conclusion générale
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