TENDON FLÉCHISSEUR SUPERFICIEL DU DOIGT DU CHEVAL ET IMAGERIE ÉCHOGRAPHIQUE
Propriétés mécaniques
La résistance en traction du tendon est parmi les plus élevées de tous les tissus mous de l’organisme humain et de tous les animaux confondus (Fandre, 1999). À l’observation de coupes longitudinales, le tendon a un aspect plissé et ondulé sous forme de zigzag. Cette forme est liée à la structure de la fibrille du collagène et contribue au comportement mécanique du SDFT (Fandre, 1999; Smith et Webon, 1996). Cette caractéristique permet aux fibres du collagène d’être étirées, comme un amortisseur à ressort, de 3 à 5 % de sa longueur initiale sans causer de dommages structuraux. Nous parlons ici d’une déformation élastique où le tendon retrouve sa forme initiale après déformation. Une déformation de 5 à 8% est considérée comme une déformation viscoélastique, i.e. que la courbe contrainte-déformation est non linéaire. Si cette déformation atteint 8 à 12 % d’élongation, elle peut causer la rupture du tendon (nous parlons de la mécanique de la rupture). Par ailleurs, étant donné que ces fibres sont toutes disposées parallèlement à la direction de la force de tension exercée par le muscle, le tendon n’est que légèrement extensible et possède un Module d’Élasticité (ME) très élevé, appelé aussi module de Young (Crevier-Denoix et al., 1996; Crevier-Denoix et al., 1998).
Tendinopathies
Une tendinopathie est définie comme étant une inflammation du tendon due à des blessures qui engendrent une dégradation partielle ou totale des fibres du tendon. Les causes les plus courantes des blessures sont nombreuses : mauvaise qualité des aplombs, poids excessif du cheval, effort excessif, surmenage, mouvements répétitifs ou mouvements soudains inhabituels (Fandre, 1999). Au cours de la maturité du cheval, l’usure des tendons provoque des centaines de déchirures microscopiques qui affectent leur élasticité. Une lésion bénigne affecte seulement les fibrilles alors que des lésions plus importantes peuvent provoquer la rupture totale du tendon (Leblond, 2006). Mais quelle que soit l’ampleur de la lésion, complète ou partielle, l’architecture interne du tendon est modifiée de façon permanente, ce qui influence ses propriétés mécaniques (résistance moindre en traction mécanique (Kuo, Li et Li, 2001)). Tel qu’illustré précédemment à la Figure 1.1(b), la forme extérieure du SDFT varie le long de son axe principal.
Trois sites préférentiels diffèrent par leur forme extérieure : les sites proximal, médial et distal. Le site proximal décrit le point d’attache du tendon au muscle fléchisseur superficiel et il a une forme approximativement circulaire. Le site distal métacarpien décrit le point d’attache du tendon à la phalange proximale et se termine par la gaine manica flexoria ; il est mince, aplati et en forme de croissant. Finalement, le site médial du tendon est plus ou moins elliptique. Les sites proximal, médial et distal occupent respectivement 25%, 50% et 25% de la longueur totale du tendon. Le site distal métacarpien est le plus affecté par les lésions (Crevier-Denoix et al., 1998; O’Sullivan, 2007), sûrement à cause de l’épaisseur moindre de cette région et du fait que la tension y est à son maximum (Webbon, 1977). Suite à une tendinopathie, le processus de la cicatrisation naturelle du SDFT se fait en trois phases (Fandre, 1999). La première phase est l’inflammation. Elle survient pendant les quatre premiers jours qui suivent le trauma. Cette phase, accompagnée généralement par une hémorragie, est un prérequis nécessaire à la cicatrisation et elle est caractérisée par des phénomènes vasculaires et cellulaires. Au cours de cette phase, les cellules du tissu lésé injectent de l’histamine, engendrant une vasodilatation brève des vaisseaux adjacents non lésés. Les cellules inflammatoires sont alors transportées par voie sanguine pour préparer la cicatrisation. La reconstruction tissulaire constitue la deuxième phase et elle s’étend généralement entre le cinquième jour et la septième semaine post-trauma.
Au cours de cette phase, on observe la réparation et la synthèse du collagène. Le site de la lésion se transforme en un tissu fibrovasculaire (ou tissu de granulation) composé principalement du collagène de type III. Les fibres ont une orientation aléatoire et isotrope affaiblissant la résistance du tendon en traction. Puis la dernière phase, la maturation, s’étend entre la septième semaine et le quatrième mois post-trauma. Durant cette phase, le collagène de type III est remplacé progressivement par celui de type I et les fibres s’orientent longitudinalement selon l’axe principal du tendon. Après la cicatrisation complète, les fibres sont pour la plupart orientées selon l’axe principal du tendon. Dans certains cas, l’organisation fibreuse originale est perdue à jamais, ce qui implique une faiblesse permanente du tendon (Terzian, 2003). Le retour du cheval à la compétition est conditionné par l’état du tendon et il se fait d’une façon progressive. La rééducation du tendon qui dure normalement jusqu’à six mois se fait par une combinaison d’exercices optimaux à faire subir au cheval (Fandre, 1999; Leblond, 2006; Terzian, 2003). Des exercices non appropriés peuvent engendrer une réhabilitation plus lente et non optimale (Gillis, 1996; Terzian, 2003).
Échographie musculo-tendineuse
L’échographie musculo-tendineuse a fait d’énormes progrès depuis son introduction comme outil de diagnostic dans le domaine vétérinaire (Rantanen, 1982). Les caractéristiques du matériel utilisé, en particulier les sondes, ont en effet été grandement améliorées. L’imagerie par échographie, peu coûteuse, non invasive et mobile, est propice à l’exploration de la structure interne du SDFT, très réfléchissante des ondes ultrasonores (US). Cette technique est habituellement employée dans la pratique vétérinaire quotidienne à des fins de diagnostic pour l’évaluation périodique de la cicatrisation des lésions et pour l’évaluation des traitements. À l’aide d’une sonde échographique, les cliniciens peuvent qualitativement et subjectivement évaluer l’intégrité ou la rupture des tendons. Toutefois, ils n’ont pas d’outil fiable permettant de quantifier objectivement les structures internes (quantification de faisceaux fibreux). Sur une image échographique en mode brillance (mode B)1 d’un tendon normal, les faisceaux fibreux ne sont pas directement visibles. Seules des structures hyperéchogènes qui correspondent probablement et hypothétiquement à une portion du contour des interstices entourant les faisceaux fibreux sont observables selon l’axe de propagation des ondes US (Crevier-Denoix et al., 1998; Garcia, Hornof et Insana, 2003; Martinoli et al., 1993; Van Schie et al., 2003) [voir la Figure 1.4(a)-(b)]. Les régions du tendon où les faisceaux fibreux se sont rompus lors du trauma apparaissent sur l’image échographique sous forme de zones hypoéchogènes ou anéchogènes (voir la Figure 1.4(c)-(d)). Ces zones correspondent à des hémorragies, à du tissu fibrovasculaire ou à du tissu de granulation, très riches en fibroblastes (Van Schie et al., 2001). La quantification du nombre de faisceaux fibreux encore intacts au sein du tendon permet d’évaluer objectivement l’intégrité du tendon (normal ou lésé).
Les ondes US sont des ondes mécaniques qui se propagent dans un milieu biologique ayant des fréquences comprises entre 2 et 100 Mégahertz (MHz) pour le domaine de l’application médicale (EDICERF, 2010). Les ondes US se propagent (longitudinalement et transversalement) en faisant vibrer les molécules présentes dans le milieu, nous parlons alors de la propagation de l’énergie sans transport de matière. Les ultrasons en médecine sont utilisés à des fins diagnostiques ou thérapeutiques. Nous connaissons davantage les applications diagnostiques des ultrasons, mais il est à noter que les effets mécaniques des ondes US (onde de choc, cavitation) sont utilisés pour la destruction des calculs rénaux tandis que les effets thermiques (absorption de la chaleur) le sont pour l’ablation des tumeurs (Laugier et al., 2008). Les ondes US pénètrent facilement dans les tissus biologiques, cela permet l’exploration de la plupart des organes à l’exception du squelette et des poumons. Des images échographiques sont obtenues en analysant les échos réfléchis par les tissus. L’analyse des tissus en mouvement en mode Doppler, quant à elle, permet de réaliser une imagerie fonctionnelle de l’appareil cardiovasculaire et une évaluation des écoulements du sang dans l’arbre vasculaire (Laugier et al., 2008).
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 TENDON FLÉCHISSEUR SUPERFICIEL DU DOIGT DU CHEVAL ET IMAGERIE ÉCHOGRAPHIQUE
1.1 Introduction
1.2 Le tendon fléchisseur superficiel du doigt du cheval
1.2.1 Anatomie
1.2.2 Propriétés mécaniques
1.2.3 Tendinopathies
1.2.4 Échographie musculo-tendineuse
1.2.5 Limites du diagnostic par échographie musculo-tendineuse
1.3 Imagerie échographique
1.3.1 Interaction des ondes US et de la matière
1.3.2 Modes de représentation des échographies
1.3.3 Notion de diffuseurs cohérents et non cohérents et qualité de l’image
1.3.4 Le speckle
1.4 Conclusion
CHAPITRE 2 REVUE DE LA LITTÉRATURE
2.1 Introduction
2.2 Travaux sur le SDFT
2.2.1 Analyse des échographies des tendons
2.2.1.1 Analyse des échographies du SDFT
2.2.1.2 Analyse des échographies d’autres tendons que le SDFT
2.2.2 Quantification de faisceaux fibreux du SDFT par histomorphométrie et macromorphométrie
2.2.3 Évaluation des propriétés mécaniques du SDFT
2.2.4 Évaluation des propriétés acoustiques des composants du SDFT
2.2.5 Modélisation 3D et cinématique des articulations : application sur le SDFT
2.2.6 Conclusion des travaux sur le SDFT
2.3 Traitement des échographies générales dans la littérature
2.3.1 Filtrage du speckle
2.3.2 Opérations morphologiques mathématiques
2.3.3 Diffusion non linéaire anisotrope
2.3.4 Méthodes variationnelles
2.3.5 Filtre de chocs
2.3.6 Analyse des échographies par simulation
2.4 Synthèse générale
CHAPITRE 3 PROBLÉMATIQUE DE RECHERCHE ET OBJECTIFS DE LA THÈSE
3.1 Problématique de recherche
3.2 Hypothèses
3.3 Objectifs de la recherche
CHAPITRE 4 DESCRIPTION SOMMAIRE DES MÉTHODES D’ANALYSE DES ÉCHOGRAPHIES DU SDFT
4.1 Introduction
4.2 Base de données
4.2.1 Base de données des échographies
4.2.2 Base de donnée des macrophotographies
4.3 Simulation
4.3.1 Équation de la propagation des ondes US à travers le tissu SDFT
4.3.2 Modèle de formation linéaire de Bamber et Dickinson
4.3.3 Résumé de l’analyse par simulation des échographies du SDFT
4.4 Méthodes de segmentation
4.4.1 Décompression logarithmique et opérations morphologiques
4.4.2 Algorithme d’amincissement et opérations morphologiques
4.5 Présentation sommaire des articles
4.5.1 Article no1
4.5.2 Article no2
4.5.3 Article no3
CHAPITRE 5 ULTRASOUND B-SCAN IMAGE SIMULATION, SEGMENTATION, AND ANALYSIS OF THE EQUINE TENDON
5.1 Introduction
5.2 Methods
5.2.1 Simulation strategy
5.2.1.1 Microstructure and B-scan features of the SDFT
5.2.1.2 Data collection of B-scan and macrophotograph images of the SDFT
5.2.1.3 Simulation model : The 2D acoustic wave equation propagation through a SDFT tissue
5.2.1.4 SDFT tissue modeling for Wave2000 Pro implementation
5.2.2 Image quantification method
5.2.2.1 Decompression process of B-scan images
5.2.2.2 Binary operations
5.2.2.3 Watershed closing operation
5.3 Results
5.3.1 Simulation model and assessment of its validity
5.3.1.1 Simulation of a pathological SDFT
5.3.1.2 Effect on the insonification frequency on simulations
5.3.2 Segmentation results
5.3.2.1 Quantification of fiber bundles on two SDFT simulated specimens
5.3.2.2 Quantification of fiber bundles on the whole in vivo B-scan data sets
5.4 Discussion and conclusion
5.5 Acknowledgments
CHAPITRE 6 TISSUE CHARACTERIZATION OF EQUINE TENDONS WITH CLINICAL B-SCAN IMAGES USING A SHOCK FILTER ALGORITHM
6.1 Introduction
6.2 Previous shock filter models
6.3 Segmentation method
6.3.1 The thinning shock algorithm
6.3.1.1 One-dimensional thinning shock algorithm
6.3.1.1.1 The shock function of the classical deconvolution algorithm
6.3.1.1.2 The shock function of our original thinning algorithm
6.3.1.2 Two-dimensional thinning shock algorithm
6.3.2 Complementary morphological closing operations
6.4 Validation
6.4.1 Simulated B-scan image dataset
6.4.2 Clinical B-scan image dataset
6.5 Results
6.5.1 Segmentation results
6.5.2 Quantification of fiber bundle densities
6.5.2.1 Fiber bundle densities in simulated B-scan images
6.5.2.2 Discrimination of in vivo normal versus injured SDFTs
6.5.2.3 Fiber bubdle densities at three sites along the metacarpal of normal SDFTs
6.6 Summary and conclusion
6.7 Acknowledgements
CHAPITRE 7 : 3D INTERNAL STRUCTURE CHARACTERIZATION OF THE EQUINE TENDON WITH MACRO-PHOTOGRAPHIC AND B-SCAN ULTRASOUND IMAGES
7.1 Introduction
7.2 Materials and Methods
7.2.1 Macro-photograph data collection
7.2.2 Segmentation technique
7.3 Results
7.3.1 Segmentation performance
7.3.2 Differentiating normal from injured SDFTs
7.3.3 Density distribution of fiber bundles at different sites of normal SDFTs
7.4 Discussion and summary
7.5 Aknowledgments
CHAPITRE 8 DISCUSSION GÉNÉRALE
8.1 Résumé et originalité du travail
8.2 Limites de l’analyse
8.3 Travaux futurs
8.3.1 Optimisation et amélioration de la segmentation
8.3.2 Classification du processus de cicatrisation
8.3.3 Relation entre la densité des faisceaux fibreux et les propriétés mécaniques du SDFT
8.3.4 Généralisation de la quantification
8.4 Travaux publiés en annexes
CONCLUSION
ANNEXE I : SIMULATION DES ÉCHOGRAPHIES PAR RÉSOLUTION DE L’ÉQUATION DE PROPAGATION DES ONDES ULTRASONORES À TRAVERS UN TISSU BIOLOGIQUE
ANNEXE II SIMULATION DES ÉCHOGRAPHIES PAR LE MODÈLE LINÉAIRE DE BAMBER ET DICKINSON
ANNEXE III : RÉSULTATS DE SIMULATION COMPLÉMENTAIRES PAR LE MODÈLE WAVE2000 PRO ET PAR LE MODÈLE DE BAMBER ET DICKINSON
ANNEXE IV BREVET PUBLIÉ EN RELATION AVEC LE PROJET DE RECHERCHE
ANNEXE V ARTICLES DE CONFÉRENCE PUBLIÉS EN RELATION AVEC LE PROJET DE RECHERCHE
ANNEXE VI : RÉSUMÉS PUBLIÉS DANS DES COMPTES RENDUS DE CONFÉRENCE EN RELATION AVEC PROJET DE RECHERCHE
BIBLIOGRAPHIE
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