Télécommunications optiques : la modulation rapide du signal en technologie optique intégrée

Durant ces dernières décennies, la recherche et le développement de composants, à base de matériaux polymères, à propriétés spécifiques (électro-optiques, acousto-optiques, magnéto-optiques) sont en pleine expansion. Leurs processus de fabrication compatibles avec la technologie sur silicium, leurs caractéristiques physiques particulièrement intéressantes ainsi que le bas coût potentiel de leur mise en œuvre les rendent très attractifs dans un grand nombre de domaines. La propriété électro-optique est néanmoins privilégiée car bon nombre d’applications actuelles utilisent le signal électrique comme vecteur de transmission. Parmi celles-ci, une nous intéresse plus particulièrement dans le cadre de ce travail, il s’agit de la modulation d’un faisceau lumineux et encore plus spécifiquement celle nécessaire à la transmission de données à haut débit dans les systèmes de communications optiques. Cette application utilise des modulateurs électro-optiques en technologie intégrée qui permettent d’obtenir les performances requises, d’une part électro optiques (vitesse de modulation, amplitude du signal modulant) et, d’autre part, optiques (pertes d’insertion, compatibilité avec le support de transmission utilisé qui est la fibre optique). Le matériau utilisé majoritairement, si ce n’est exclusivement en ce qui concerne les composants commerciaux, est le niobate de lithium, LiNbO3. Les matériaux polymères laissent entrevoir principalement trois atouts vis-àvis du niobate : un bas coût de production (avéré ou potentiel), une large bande passante de modulation et une faible tension de commande, grâce respectivement, à des indices de propagation des ondes optique et microonde très voisins et à un effet électro-optique plus importants pour (certains de) ces matériaux que celui du LiNbO3. En effet, le coefficient électro optique de ce dernier est de 30,8 pm/V [1], celui de certains polymères électrooptiques développés par l’équipe de Dalton à l’Université de Washington dépasse 208 pm/V à 1310 nm [2]. La faisabilité de modulateurs avec une bande passante au-delà des 100 GHz a aussi été démontrée par une équipe de l’Université de Southern California [3]-[5], alors que celle des modulateurs sur LiNbO3 est plafonnée à 40 GHz.

Outre les modulateurs électro-optiques mentionnés ci-dessus, les applications dans les domaines des télécommunications optiques sont variées. Aussi les composants suivants sont aussi développés à partir de ces matériaux organiques : résonateurs en anneau [6]-[7], convertisseur de mode [8]-[9], des capteurs électro-optiques [10]-[13], etc…

Télécommunications optiques : la modulation rapide du signal en technologie optique intégrée 

Actuellement, la modulation à haut débit est principalement utilisée dans les réseaux cœurs des systèmes de télécommunications optiques. Néanmoins, avec la demande croissante en nombre et en débit au niveau des usagers, demande par ailleurs générée par une offre de service de plus en plus importante, ce besoin de modulation à haut débit se fait ressentir au niveau des réseaux métropolitains voire d’accès. En cela, les matériaux polymères, électrooptiques, pourraient être une solution des plus intéressantes que ce soit en coût qu’en performances. Après une description générale du modulateur électro-optique de type Mach-Zehnder, nous passerons en revue certains éléments nécessaires à la compréhension des phénomènes physiques et des concepts entrant en jeu dans la réalisation et le fonctionnement du modulateur électro-optique à base de polymères. Une partie est aussi consacrée à la propagation guidée de la lumière dans les milieux diélectriques que sont les matériaux polymères. Ensuite la propagation des ondes hyperfréquences est abordée ainsi que les principales structures de guidage utilisées dans ce domaine.

Modulateur de type Mach-Zehnder : généralités

Le modulateur de type Mach-Zehnder est un modulateur d’intensité basé sur les interférences. Le faisceau d’entrée est divisé en deux, un déphasage optique (engendré par effet électro-optique) est généré entre les deux faisceaux recombinés en sortie.

L’onde parcourant le bras de référence (bras du bas) ne subit aucune variation de phase. Mais celle du second bras est soumise à un effet électro-optique qui va entraîner une variation de phase du signal optique. En sortie du dispositif, les deux faisceaux sont recombinés et la modulation d’amplitude est directement liée au déphasage entre les deux ondes : les cas extrêmes en étant, déphasage nul (signal maximal) et déphasage de π (signal minimal). 10 fois le logarithme du rapport de ces deux valeurs défini alors le taux d’extinction du modulateur en dB.

Pratiquement, le modulateur est constitué de deux jonctions Y et de deux bras de longueur identique. La première jonction divise, en part égale, la puissance lumineuse incidente entre les deux bras. Dans une configuration à électrode de commande unique, un bras sert de référence et n’est soumis à aucune interaction électro-optique. Dans une configuration « push-pull », le signal optique traversant chacun des deux bras subit un déphasage de sens opposé, doublant ainsi l’efficacité de modulation ou réduisant la tension demi-onde du dispositif d’un facteur 2 à la longueur d’interaction constante [14] (Figure 2). En sortie du dispositif, les faisceaux, issus des deux bras, se recombinent et l’intensité totale en sortie varie en fonction de leur déphasage relatif et donc du signal de commande qui a créé l’effet électro-optique.

Pour la configuration « push-pull », soit les polarités respectives des signaux électriques de commande de chacune des électrodes sont opposées, soit l’orientation des chromophores est inversée dans les deux bras.

Pour un matériau donné (indice de réfraction et coefficient électro-optique connus à la longueur d’onde de travail), il est possible de diminuer cette tension demi-onde en ajustant les paramètres géométriques du composant (c’est-à-dire soit en réduisant la distance interélectrode soit en ajustant la longueur d’interaction entre les signaux optique et électrique). Cet ajustement des paramètres physiques du modulateur peut pénaliser, dans une certaine mesure, le bon fonctionnement du composant. Une distance interélectrode trop faible va engendrer des pertes optiques dues à l’absorption partielle de l’onde optique au niveau du métal des électrodes. L’allongement de la zone d’interaction va aussi engendrer des pertes optiques dues à l’absorption et des pertes du matériau électro-optique à la longueur d’onde de travail. Il est primordial de trouver un compromis judicieux entre faible tension demi-onde et faibles pertes optiques afin d’optimiser la conception du modulateur électro-optique pour qu’il soit le plus performant que possible.

Les guides optiques 

Propagation guidée de la lumière 

L’optique guidée est basée sur le confinement du champ lumineux dans un matériau (cœur) entouré de matériaux d’indice de réfraction plus faible (gaines). En première approximation et de manière quantitative, on peut expliquer ce confinement de champ lumineux par le principe de réflexion totale aux interfaces cœur/gaine qui contrebalancent la diffraction. Néanmoins, la propagation des ondes en optique guidée est principalement calculée par la résolution des équations de Maxwell. Des solutions analytiques sont possibles soit pour des guides de géométrie et de profil d’indice simple (guides plans qui confinent suivant une seule dimension transverse par exemple), soit par des guides confinant le champ lumineux suivant les deux dimensions transverses moyennant des approximations valables sous certaines conditions (guides cylindriques à faible guidage par exemple). Pour des guides à largeur limitée, comme la majorité si ce n’est la totalité des guides d’optique intégrée, il faut recourir à des solutions numériques des équations de Maxwell .

Structures des guides optiques 

Le confinement de la lumière selon certains axes est lié aux paramètres optogéométriques de la structure. Les milieux, constituant le guide d’onde optique, sont supposés homogènes, transparents, isotropes et linéaires. Cela permet de simplifier la représentation des équations de propagation de la lumière. Mêmes si l’utilité pratique des guides plans est limitée, la solution analytique permet de bien comprendre les relations entre leurs paramètres opto-géométriques et leurs propriétés de guidage. Ces relations et la signification des grandeurs associées restent d’ailleurs qualitativement valables dans le cas des guides à largeur limitée.

Guide plan 

Le guide plan est constitué de trois matériaux, le cœur a une épaisseur d et un indice de réfraction n2, les gaines sont respectivement d’indice n1 et n3, avec n2 > n3 ≥ n1. Ils sont invariants suivant les axes y et z. Le champ lumineux monochromatique se propage suivant l’axe z avec une constante de propagation β.

La propagation guidée de la lumière diffère selon sa polarisation. On parle de polarisation TE lorsque seule la composante y du champ électrique est non nulle. On parle de polarisation TM dans le cas inverse où la composante y du champ magnétique est non nulle, donc les composantes x et z du champ électrique sont non nulles. On résume ci –après les propriétés du guide plan en polarisation TE [16].

L’onde évanescente dans les gaines décroît d’autant plus vite, donc le confinement de la lumière dans le cœur est d’autant meilleur, que :
– le contraste d’indice entre le cœur et les gaines est grand
– l’épaisseur du cœur est grande par rapport à la longueur d’onde .

Cette onde évanescente mérite quelque attention particulière en fonction des électrodes situées de part et d’autre du guide et appliquant la tension de commande de l’effet électrooptique. Les épaisseurs de gaines inférieure et supérieure doivent être suffisamment grandes afin d’éviter que le profil de mode ne vienne effleurer ces électrodes et qu’une partie du signal ne soit ainsi absorbé. La connaissance de la profondeur de pénétration de l’onde évanescente dans les gaines nous permettra d’optimiser les choix des épaisseurs de gaines dans la conception d’un modulateur électro-optique.

Guides à cœur structuré 

En pratique, le guide plan a très peu d’utilité, le parcours du faisceau optique n’étant pas contrôlé dans la direction y, il est difficile d’agir efficacement sur sa propagation. On utilise des guides à largeur limitée pour confiner la lumière suivant les deux directions transverses. La résolution analytique de l’équation d’onde devenant impossible, on a recours alors à des méthodes numériques . Dans nos travaux, nous avons utilisé le logiciel de simulation numérique commercial d’optique intégrée OptiBPM qui est basé sur la résolution des équations de Maxwell par la méthode des faisceaux propagés. Les relations entre les caractéristiques des guides et leurs paramètres opto-géométriques tirées des guides plan restent qualitativement valables pour les guides à largeur limitée et le calcul de l’indice effectif pour une structure de confinement bidimensionnelle peut être encore utilisé sous certaines réserves.

Les principaux guides structurés sont le guide à cœur enterré, le guide ruban, le guide ruban inversé et le guide diffusé. Nous passerons brièvement en revue les trois premiers types de guide qui sont les plus adaptés à la réalisation de modulateurs sur matériaux polymères, le dernier étant, quant à lui, beaucoup plus spécifique au LiNbO3. Le guide enterré est constitué d’un cœur à section rectangulaire ou carrée. A une longueur d’onde donnée, il est possible de dimensionner ce guide pour être monomode en connaissant le contraste d’indice des matériaux de cœur et de gaines. Le caractère monomode du guide est nécessaire afin d’éviter, d’une part, des pertes supplémentaires dues à la propagation de modes d’ordre supérieur et, d’autre part, une diminution de la valeur du taux d’extinction, chaque mode subissant un déphasage différent.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction générale
Chapitre I – Télécommunications optiques : la modulation rapide du signal en technologie optique intégrée
I. 1 – Introduction
I. 2 – Modulateur de type Mach-Zehnder : généralités
I. 3 – Les guides optiques
I. 3. 1 – Propagation guidée de la lumière
I. 3. 2 – Structures des guides optiques
I. 3. 2. 1 – Guide plan
I. 3. 2. 2 – Guides à cœur structuré
I. 4 – Les guides microondes en technologie planaire
I. 4. 1 – Propagation guidée des microondes
I. 4. 2 – Structures des guides microondes
I. 4. 2. 1 – Guide microruban
I. 4. 2. 2 – Guide coplanaire
I. 4. 3 – Permittivité effective
I. 5 – Bande passante et type de commande électrique
I. 5. 1 – Electrode en constante localisée (capacitive)
I. 5. 2 – Electrode en constantes réparties (à ondes progressives)
I. 6 – Les matériaux électro-optiques
I. 6. 1 – Anisotropie des matériaux
I. 6. 2 – Effets électro-optiques non linéaires du second ordre
I. 6. 2. 1 – Effet Pockels
I. 6. 2. 2 – Génération de second harmonique
I. 7 – Outils et méthodes de simulations numériques
I. 7. 1 – La méthode des éléments finis
I. 7. 2 – La méthode des faisceaux propagés
I. 8 – Modulateurs d’amplitude utilisant l’effet électro-optique de type Mach-Zehnder
I. 8. 1 – Etat de l’art sur les différents types de modulateurs électro-optiques
I. 8. 1. 1 – Modulateurs à base de semi-conducteurs
I. 8. 1. 2 – Modulateurs à base de LiNbO3
I. 8. 1. 3 – Modulateurs à base de polymères
I. 8. 2 – Avantages et inconvénients des modulateurs à base de polymères
I. 9 – Conclusion du chapitre
Chapitre II – Les polymères électro-optiques : généralités, mise en forme, orientation et caractérisation
II. 1 – Structure des polymères électro-optiques
II. 1. 1 – La matrice polymérique
II. 1. 2 – Les chromophores
II. 1. 2. 1 – Structure du chromophore
II. 1. 2. 2 – Le chromophore DR1
II. 1. 2. 3 – Le chromophore CPO-1
II. 1. 2. 4 – Comparatif de performance de quelques chromophores
II. 1. 3 – Configuration des systèmes électro-optiques
II. 1. 3. 1 – Polymères de type hôte/invité
II. 1. 3. 2 – Polymères greffés
II. 1. 4 – Réalisation des films de polymères
II. 1. 4. 1 – Trempage (« dip-coating »)
II. 1. 4. 2 – Centrifugation («spin-coating »)
II. 1. 4. 3 – Méthode Langmuir-Blodgett
II. 2 – Les méthodes d’orientation des chromophores
II. 2. 1 – L’orientation photo-assistée
II. 2. 2 – L’orientation par effet Corona
II. 2. 3 – L’orientation par électrodes de contact
II. 2. 4 – Suivi in-situ par génération de second harmonique
II. 3 – Caractérisation des propriétés électro-optiques des polymères électro-optiques
II. 3. 1 – Mesure du coefficient électro-optique
II. 3. 2 – Banc expérimental pour l’orientation des chromophores
II. 3. 3 – Protocole d’orientation des chromophores
II. 3. 4 – Banc de mesure simple réflexion de Teng et protocole de mesure associé
II. 4 – Détermination des caractéristiques hyperfréquences des polymères
II. 4. 1 – Protocole de détermination des paramètres des matériaux pour la réalisation de la ligne microonde
II. 4. 2 – Protocole de caractérisation de la permittivité des matériaux polymères
II. 5 – Conclusion du chapitre
Chapitre III – Caractérisation des matériaux polymères utilisés
III. 1 – Introduction
III. 2 – Orientation de polymères par effet Corona
III. 2. 1 – Orientation de films de PMMA/DR1 réalisés sur wafer de silicium
III. 2. 2 – Etude de l’influence de la structure des échantillons sur l’efficacité de l’orientation par effet Corona
III. 3 – Etude de l’orientation par électrodes de contact
III. 3. 1 – Orientation du copolymère PMMA-co-DR1
III. 3. 2 – Orientation du matériau de cœur : PMMI/CPO-1
III. 3. 2. 1 – Mesures réalisées à l’IETR (Nantes)
III. 3. 2. 2 – Mesures complémentaires à l’IPCMS de Strasbourg
III. 3. 2. 3 – Orientation d’échantillons en structure tricouche
III. 4 – Mesure de la permittivité diélectrique des matériaux polymères
III. 4. 1 – Réalisation des jeux de lignes nécessaires à la mesure des paramètres S
III. 4. 2 – Détermination de la permittivité diélectrique des matériaux polymères
III. 5 – Bilan du chapitre
Chapitre IV – Etude des structures optique et hyper-fréquence en vue de la réalisation de modulateurs Mach-Zehnder
IV. 1 – Introduction
IV. 2 – Optimisation de la structure optique
IV. 2. 1 – Avec guide enterré de section carrée
IV. 2. 2 – Avec guide ruban inversé
IV. 2. 3 – Structure optique des modulateurs dans le cadre du projet ModPol
IV. 3 – Etude de l’électrode de commande microruban et des transitions coplanaires en vue de la mise en boitier du dispositif
IV. 3. 1 – Influence de l’épaisseur des métallisations sur les performances de la transition
IV. 3. 2 – Influences des pertes des matériaux sur les performances de la transition
IV. 3. 3 – Etude des coudes pour minimiser les pertes
IV. 3. 4 – Etude du dimensionnement des tapers en vue de la connectorisation de la transition avec des connecteurs disponibles dans le commerce
IV. 4 – Conclusion du chapitre
Conclusion générale

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *