Technologie numérique et difficultés d’apprentissage

Technologie numérique et difficultés d’apprentissage

Impact des stratégies métacognitives et cognitives sur les apprentissages Les représentations multiples

Dans un premier temps, je vais présenter les recherches de psychologie cognitive qui se sont intéressées aux effets des représentations multiples sur les apprentissages scolaires et la mémorisation. Dans le cadre du soutien ambulatoire à l’école secondaire, les procédures de mémorisation de l’orthographe doivent souvent être enseignées aux élèves présentant des difficultés d’apprentissage. La procédure d’apprentissage expliquée à mes élèves correspond à peu près à la stratégie donnée par certains auteurs : On favorise la mémorisation en demandant aux élèves d’observer le mot écrit dans ces différentes dimensions : sa prononciation, son découpage en syllabes, en phonèmes, en morphèmes éventuellement, et en reliant ces éléments avec sa graphie. Ensuite on efface le mot et on demande de chercher à voir encore dans leur tête sa structure et la succession de ses graphèmes, avant de le copier, puis de l’écrire sans modèle. (Brissaud, Cogis, Jaffré, Pellat & Fayol, 2011, p. 13) Brissaud, et al. (2011) donnent donc une procédure d’apprentissage passant par les différents sens (auditif, visuel, kinesthésique) pour mieux mémoriser l’orthographe lexicale des mots. Cette méthode de mémorisation s’apparente également à la technique d’épellation de Bradley dans laquelle l’enseignant propose à l’élève de : 10 Lire le mot étudié, discuter de son sens, l’écrire en lettres minuscules tout en prononçant le nom de chaque lettre, relire en vérifiant, répéter l’écriture et l’épellation du mot, cacher le mot et l’écrire de nouveau tout en prononçant les lettres. Le mot est ensuite employé dans une phrase. (Pagnard, 2004, cité par Guilloux, 2009, p. 36) Il convient alors de se demander s’il s’avère pertinent de passer par différents canaux sensoriels pour l’apprentissage de l’orthographe. Il existe dans la conception populaire, reprise par la gestion mentale de La Garanderie, en 1964, « [des] différences à l’école [qui] sont dues à la nature sensorielle de nos mémoires » (Lieury, 2000, p. 10). A propos des mémoires sensorielles, Lieury (2003) indique que : Les mémoires sensorielles existent bien mais sont de courtes durées tandis que les informations visuelles ou auditives sont élaborées dans des mémoires plus abstraites dont les principales pour l’éducation sont la mémoire lexicale (morphologie des mots), la mémoire sémantique (sens) et la mémoire des images (images virtuelles). (p. 186) Dans des recherches récentes, Lieury considère que la mémoire lexicale n’est pas uniquement auditive ou visuelle. Il n’existe pas de dichotomie entre ces deux types de mémoires : la mémoire lexicale est intégrée. La mémoire lexicale est une sorte de dictionnaire de tous les mots acquis au cours de la vie. Un mot est une sorte de « fiche signalétique » intégrant le graphisme et la phonétique. C’est très pratique car le mot lu ou entendu est identifié comme étant le même mot dans cette mémoire intégrée. Si comme certains le croient, il y avait une mémoire visuelle pour les mots lus et une autre mémoire auditive, pour les mots entendus, ce ne serait pas du tout pratique. Car un mot lu ou entendu se retrouverait dans deux mémoires séparées, et nous ne pourrions pas l’identifier comme étant identique ! (Lieury, 2015, p. 18) Selon Ouzoulias (2009), il conviendrait de ne plus parler d’« image photographique des mots », car cela fait penser qu’il existe une hypothétique mémoire visuelle des mots. Cet auteur indique également comme Lieury que « la mémoire orthographique assimile chaque mot écrit sous une forme plus abstraite, son identité alphabétique, c’est-à-dire toutes les lettres qui le composent et dans l’ordre » (p. 2). Selon les chercheurs en psychologie cognitive, la mémoire est formée d’un ensemble de systèmes spécialisés selon les informations à traiter, les modules (Lieury, 1993). Pour expliquer la mémorisation, Lieury (2015) explique les va-et-vient entre la mémoire à long terme et la mémoire à court terme : « Les informations, mots et images sont codés, élaborés dans les différents niveaux de la mémoire à long terme, puis sont combinés dans la mémoire à court terme pour être stockées de façon organisée en mémoire à long terme » (p. 152). Il a également pu observer que « la mémorisation n’est pas une photographie, mais une construction nécessitant plusieurs étages » (Lieury, 1998, p. 79). Pour expliquer cette élaboration complexe en mémoire, il prend l’exemple de l’image d’un ours : 11 En voyant l’image d’un ours, non seulement l’image mentale d’un ours est construite en mémoire imagée, mais cette image va ensuite en mémoire sémantique et, lorsque le sens « ours » est trouvé, le mot est ensuite cherché dans la mémoire lexicale. (Lieury, 1998, p. 79) Selon Lieury (2015), la mémoire à long terme est constituée de la mémoire phonologique, de la mémoire lexicale et de la mémoire sémantique. Le modèle de la mémoire de Lieury distingue la mémoire à court terme de la mémoire à long terme. Lieury (2011) s’est inspiré d’un modèle présenté par Andersen et Bower en 1974, en y intégrant de nouvelles mémoires (imagée, lexicale et sémantique), en précisant toutefois qu’il en existe plusieurs autres. Elles font partie d’un grand ensemble qui est appelé la mémoire déclarative. Dans le modèle de la mémoire de Lieury (2013), « la mémoire à court terme (ou de travail) est un peu comme un écran d’ordinateur ouvrant sur plusieurs fenêtres spécialisées de la mémoire à long terme » (p. 171). Selon Lieury (1993), la mémoire à court terme permet de relier des informations situées dans différents modules de la mémoire à long terme, comme « activer un nom et un visage, grouper plusieurs mots dans une même catégorie (mémoire-fichier), de garder deux chiffres pour les multiplier

Les processus métacognitifs

Le développement des processus métacognitifs est considéré par de nombreux auteurs depuis les années 70-80 comme très important pour les apprentissages. La perspective métacognitive, vue selon les définitions de Flavell (1979) et de Brown (1987), c’està-dire en tant que connaissance et maîtrise de ses propres processus cognitifs, est considérée comme une composante importante dans les processus d’apprentissage dans le cadre scolaire et formatif. (Albanese, et al., 2010 ; Albanese, Doudin & Martin, 2003 ; Cornoldi, De Beni & Gruppo, 2001 ; cités par Pieri, Businaro & Albanese, 2014, p. 48) Flavell a donné en 1976, une première définition de la métacognition un peu floue, qui pouvait se résumer à de l’introspection, ce qui donnait la possibilité de la décliner de diverses façons (Noël & Cartier, 2016). Pour de nombreux chercheurs, « deux notions au moins sont incluses dans la définition de la métacognition : la connaissance de sa connaissance, de ses propres processus cognitifs, et la capacité de les contrôler, les réguler consciemment et délibérément (Noël, 1991, 1997 ; Noël, Romainville & Wolfs, 1996 ; Romainville, 1993 ; Grangeat & Meirieu, 1997) » (Noël & Cartier, 2016, p. 13). Ces deux aspects sont également dans la définition de la métacognition de Büchel (2010) : 13 D’une part, un modèle des connaissances de l’individu par rapport à son propre fonctionnement cognitif, aux spécificités de la tâche et aux stratégies (les métaconnaissances). D’autre part, un modèle du contrôle des activités cognitives (les stratégies métacognitives, initialement appelées fonctions exécutives). (p. 86) La métacognition peut ainsi être subdivisée en deux parties : « La métacognition fait référence à deux composantes séparées mais interdépendantes. La première est celle des connaissances métacognitives […]. La seconde composante se rapporte aux processus métacognitifs » (Brown, 1987; Pintrich, 2002) » 5 [traduction libre] (Hessels-Schlatter, Hessels, Godin & Spillman-Rojas, 2017, p. 110). Dans la suite de ce travail, je m’intéresserai aux deux aspects de la métacognition, c’est-à-dire aux métaconnaissances, ainsi qu’à l’aspect procédural de la gestion métacognitive ou stratégies métacognitives. Il faut aussi noter que la notion de stratégies métacognitives6 est équivalente à celle de fonctions exécutives. Le terme exécutif provient des études effectuées sur le cerveau durant la seconde guerre mondiale, qui a permis de situer les fonctions exécutives dans les lobes frontaux et préfrontaux (Gagné, Leblanc & Rousseau, 2009). Plusieurs auteurs, comme Büchel, mais aussi Gagné, Leblanc et Rousseau (2009), considèrent en effet que les fonctions exécutives correspondent à la métacognition : Les fonctions exécutives permettent à l’individu de s’investir dans une activité cognitive intentionnelle et structurée ; c’est pourquoi elles sont fréquemment associées aux fonctions supérieures, ellesmêmes couramment désignées par le terme métacognition […] Ces processus se traduisent chez l’élève qui apprend par la gestion cognitive ou le « apprendre à apprendre ». Le terme de fonction exécutive est générique : il regroupe plusieurs habiletés nécessaires à l’exécution de tâches orientées vers un but. (p. 4) Les fonctions exécutives ou stratégies métacognitives permettent à l’apprenant d’exercer de l’autorégulation. Brown a défini plus précisément l’aspect procédural de la gestion métacognitive d’une tâche par des processus spécifiques, qui « regroupent l’anticipation (par exemple, prévision d’étapes dans la résolution d’une tâche), le contrôle (monitoring qui consiste à surveiller que l’on ne dévie pas du but à atteindre, à repérer ses erreurs) et la régulation (par exemple corriger ses erreurs quand c’est nécessaire) » (Noël & Cartier, 2016, p. 11). Les compétences procédurales de la métacognition agissent comme « un mécanisme de rétroaction incorporé permettant la régulation d’activités de résolution de problèmes et d’apprentissage avec comme mécanismes sous-jacents le monitoring et le contrôle (Veenman, 2006 ; Nelson & Narens, 1994) » (Colognesi & Van Neuwenhoven, 2016, p. 114). Hessels- 5 « Metacognition refers to two separate but interrelated components. The first is metacognitive knowledge […]. The second component refers to metacognitive processes (Brown, 1987; Pintrich, 2002) » (Hessels-Schlatter, Hessels, Godin & Spillman-Rojas, 2017, p. 110). 6 Les régulations métacognitives peuvent se retrouver sous plusieurs dénominations, qui indiquent toutes un même processus : « Brown (1987) parle de processus exécutif, Flavell (1979) et Deschêne (1991) parlent de stratégies métacognitives alors que Veenman (2006, 2012) et Efklides (2008) évoquent des compétences métacognitives » (Colognesi, 2015, p. 91). 14 Schlatter, et al. (2017) divisent également les processus métacognitifs en trois parties : « Les seconds processus sont généralement divisés en trois sous-catégories : la planification, le monitoring et l’évaluation » 7 [traduction libre] (p. 110). Les stratégies métacognitives s’avèrent donc cruciales dans les apprentissages : « Différentes études montrent que la métacognition joue un rôle tout aussi important pour les apprentissages scolaires que les aptitudes intellectuelles » (Blair & Razza, 2007 ; Swanson, 1990 ; Veeman, Van Hout-Wolters & Afflerbach, 2006 ; Wang, Haertel & Walberg, 1990) » (Hessels-Schlatter, 2010, p. 99).

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Table des matières

Remerciements
Résumé et mots-clés
Liste des tableaux et figures
Liste des annexes
Introduction
Chapitre 1 – Problématique
1.1 Définition et importance de l’objet de recherche par rapport à l’enseignement spécialisé
1.2 Cadre théorique
1.2.1 Technologie numérique et difficultés d’apprentissage
1.2.2 Impact des stratégies métacognitives et cognitives sur les apprentissages
1.2.3 Médiation et métacognition
1.3 Question de recherche et objectifs de recherche
Chapitre 2 – Méthodologie
2.1 Fondements méthodologiques
2.2 Participants de l’étude
2.3 Présentation du dispositif
2.3.1 Médiation métacognitive
2.4 Outils de collecte de données
2.5 Analyse des données
2.6 Faiblesses de la démarche
Chapitre 3 – Analyse et résultats
3.1 Analyse et résultats des pauses métacognitives
3.1.1 La connaissance de soi
3.1.2 La connaissance de la personne
3.1.3 La connaissance de la tâche
3.1.4 La connaissance de stratégies
3.1.5 La planification
3.1.6 Le contrôle
3.1.7 La régulation
3.1.8 La prise de conscience
3.2 Autres observations
3.2.1 L’aspect affectif
3.2.2 Les effets du dispositif sur l’engagement des élèves
3.3 Les conflits socio-métacognitifs entre pairs
3.4 Analyse de l’évolution des performances en grammaire
3.5 Limites et difficultés rencontrées
3.5.1 Le choix imposé du sujet
3.5.2 Un dispositif pédagogique chronophage
3.5.3 La difficulté de classer selon la catégorie métacognitive
3.5.4 La métacognition et les mécanismes de défense
3.5.5 Une utilisation peu efficace des outils numériques 3.6 Perspectives et prolongement de la recherche
Conclusion
Références bibliographiques
Annexes

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