Le secteur du bâtiment est l’un des principaux consommateurs d’énergie avec un taux de 40 % dans le monde et de 45 % en France [1]. Également, ce secteur participe aux émissions de gaz à effet de serre. Les systèmes de chauffage représentent l’essentiel de la consommation dans ce secteur [2,3]. Pour relever les défis climatiques, les autorités gouvernementales adoptent des réglementations visant à réduire la consommation d’énergie. En tant que grand consommateur, le secteur du bâtiment est concerné par ces réglementations. Ainsi des études ont été initiées pour améliorer le comportement du bâtiment, réduire sa consommation en énergie et son empreinte carbone.
Ces recherches sont axées sur l’amélioration des systèmes de chauffage et de climatisation ainsi que sur l’amélioration du comportement des enveloppes pour limiter les besoins en énergie (chauffage/refroidissement) et aboutir à des bâtiments à consommation zéro [4]. Grâce à ces études, de nouvelles techniques émergent comme le béton mousse, les matériaux biosourcés, les systèmes de stockage d’énergie, etc. et d’anciennes techniques sont réexaminées comme la construction en terre. Parmi les réglementations gouvernementales en France, on cite la réglementation thermique 2012, appelée RT 2012. Son objectif est de limiter la consommation énergétique des bâtiments et de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre [16]. Cette réglementation définit les exigences de performance énergétique des bâtiments neufs et favorise le traitement des ponts thermiques et de la perméabilité à l’air dans les bâtiments neufs.
Les actions gouvernementales évoluent. La réglementation environnementale 2020, RE 2020, correspond à la nouvelle réglementation qui remplace la RT 2012 pour les bâtiments neufs [17]. Les objectifs de la RE 2020 sont comme suit : donner la priorité à la sobriété énergétique et à la décarbonation de l’énergie, diminuer l’impact carbone de la construction des bâtiments, garantir le confort en cas de forte chaleur.
La RE 2020 comprend plusieurs indicateurs concernant plusieurs segments dont l’énergie, i.e. Bbio (besoins bioclimatiques), Cep (consommations en énergie primaire : Evaluation des consommations d’énergie primaire du bâtiment pour des fonctionnement définies tel que : chauffage, refroidissement, eau chaude sanitaire, éclairage, ventilation et auxiliaire, etc.) et Cep,nr (consommation en énergie primaire non renouvelable). Des indicateurs relatifs aux émissions de gaz à effet de serre sont également définis, i.e. Icénergie (impact des consommations d’énergie) et Icconstruction (impact carbone matériaux & équipement & chantier). De plus, l’indicateur DH (degrés-heures : nombre d’heures d’inconfort en été) est consacré au confort d’été. A chaque indicateur correspond une valeur seuil servant à vérifier le respect de la RE 2020 par la construction. Pour une construction utilisant des matériaux biosourcés, incluant du PCM, les indicateurs Icconstruction et Icénergie pourraient se trouver considérablement réduits par rapport à une construction conventionnelle.
Techniques de construction en terre
En raison des nombreuses réglementations, de son faible impact sur l’environnement et de sa disponibilité, la terre suscite à nouveau l’intérêt des chercheurs en tant que matériau de construction, bien que la terre ait été très utilisée dans le passé. Les nombreuses solutions de construction en terre ont été systématisées par la définition d’un schéma comprenant dix-huit systèmes anciens et modernes, répartis en trois grandes familles [18,19]. Ce schéma synthétise les solutions possibles pour les techniques de construction utilisant la terre comme matière première. Parmi les trois grandes familles de construction en terre, figurent ainsi les usages de la terre sous forme :
– monolithique et porteuse,
– de maçonnerie porteuse,
– de remplissage ou de protection d’une structure porteuse.
Des agrégats et des fibres végétales ont été incorporés dans une matrice de terre dans le but d’en améliorer les performances depuis des milliers d’années, mais de récentes études et recherches ont été de nouveau entreprises sur ces terres fibrées [18,21–40]. Différentes compositions sont proposées par les chercheurs, chacun d’entre eux adapte un type de fibre, un type de sol et fait varier les quantités mises en œuvre afin de comprendre l’effet des constituants sur les caractéristiques d’un matériau biosourcé telles que la conductivité thermique ou le comportement hygroscopique. Les résultats relatifs à la conductivité thermique des différents matériaux à base de terre montrent leur capacité isolante. Plus la conductivité thermique est faible, plus le matériau résiste au transfert de la chaleur donc plus il est isolant. Sur la base de résultats observés à partir de différents essais réalisés [21–40], les mélanges terre-paille peuvent logiquement être utilisés dans l’enveloppe d’un bâtiment pour assurer un niveau d’isolation et d’inertie thermique relativement élevé, mais aussi pour atténuer les fluctuations de l’humidité de la pièce par rapport aux méthodes de construction conventionnelles.
Le type de fibre n’est pas le seul facteur qui peut affecter les mélanges terre-paille. Des études ont été menées à ce sujet afin de déterminer la nature des composants des mélanges la plus appropriée pour l’utilisation prévue [26,34,35]. Différents sols de nature différente (argileuse, limoneuse, sableuse etc.) ont été examinés avec différents types de fibres (paille de blé, paille de lin, chènevotte, roseau, fibres de chanvre, fibres de lin) afin de trouver la meilleure combinaison pour répondre aux exigences structurelles et/ou d’isolation [26,29]. En conclusion de ces études, des formulations optimales, précisant la nature de la terre et de la fibre ainsi que leur dosage, pour des usages structurels et isolants sont proposées [26].
Dans ce qui précède [26], une différence de résultats pour la bauge a été observée entre deux travaux de laboratoire différents avec les mêmes formulations. Cette différence est en partie attribuée à l’effet de la procédure de mise en œuvre et du conditionnement des échantillons dans les laboratoires. La réponse à cette observation est apportée par les travaux de Colinart et al. (2020) [33] dont l’objet était axé sur les propriétés hygrothermiques des matériaux de construction en terre allégée constitués de chènevotte de chanvre et de terre crue. Des expériences ont été menées avec 3 types de chènevotte et 6 terres crues (argileuse, limoneuse et sableuse) et sur 15 mélanges en vue d’évaluer la variabilité des matériaux sur les performances hygrothermiques. En outre, l’attention a été également portée sur les protocoles et les méthodes de confection, sur la répétabilité des mesures et sur l’influence de la température et de l’humidité relative de conditionnement. Comme attendu, les différentes méthodes de caractérisation conduisent à des résultats différents. Notamment les protocoles de conditionnement initiaux ne sont pas strictement identiques i.e. le séchage à 40°C, à 70°C ou à 105°C. De ces travaux, aucune conclusion ne peut être tirée quant à la meilleure méthode à retenir.
La qualité de l’air intérieur, comme la pollution de l’air, sont influencées par le taux d’humidité relative (HR) de l’air dans un bâtiment. L’humidité relative dans les espaces clos peut avoir un impact important sur la santé des occupants [41]. Les micro-organismes recherchent des niveaux d’humidité relative élevés pour proliférer, et l’émission de composés organiques volatils provenant des matériaux augmente dans ces conditions [42]. À l’inverse, une humidité relative sèche sur une période prolongée peut nuire aux muqueuses et accroître les risques d’être soumis à des infections virales [43]. Il y a maintenant un accord sur le fait qu’une humidité relative entre 40 et 60 % est l’intervalle optimal pour une meilleure qualité de l’air intérieur.
Pisé
Le pisé est une technique de construction qui existe depuis des milliers d’années. Sa première utilisation documentée remonte aux Romains, qui l’ont ensuite introduite en France et en Angleterre. Les murs pisés sont construits par compactage (battage) du sol humide placé entre des panneaux de coffrages temporaires. Il est compacté à l’aide d’une pilonneuse pour acquérir sa résistance mécanique. Une fois séché, il en résulte un mur monolithique dense et dur . La pratique de cette technique ancestrale s’adapte à toutes les formes architecturales, qu’elles soient modernes ou traditionnelles. C’est un matériau à base de terre, cependant certains sols ne s’y prêtent pas. Le pisé, pour offrir une bonne résistance mécanique, impose des granulats de différentes tailles selon des proportions bien définies. Le choix de la terre est celui d’un sol faiblement argileux, pour éviter la fissuration, et cette terre est dépourvue de fibres.
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Table des matières
Introduction générale
Chapitre 1 : Etude bibliographique
1.1. Contexte
1.2. Techniques de construction en terre
1.2.1. Pisé
1.2.2. Adobe
1.2.3. Blocs de terre comprimée
1.2.4. Bauge
1.2.5. Terre allégée
1.3. Stockage de l’énergie thermique
1.4. Matériaux à changement de phase
1.4.1. Application et produit de construction
1.5. Introduction des PCM dans les matrices cimentaires
1.5.1. Effet de l’incorporation de PCM sur le comportement physico-mécanique et au jeune âge des matrices cimentaires
1.5.2. Effet thermique de l’ajout de PCM dans la matrice cimentaire
1.5.2.1. Chaleur spécifique
1.5.2.2. Conductivité thermique
1.5.2.3. Application hivernale et estivale
1.5.3. Durabilité et comportement à long terme, au feu et au gel/dégel
1.5.3.1. Effet de la température et réaction au feu
1.5.3.2. Gel/dégel et attaque ionique
1.6. PCM et matériaux à base de terre
1.6.1. Incorporation de PCM dans les sous-couches de chaussées
1.6.2. Incorporation de PCM dans des matériaux de construction à base de terre
1.6.2.1. L’incorporation de PCM dans le pisé
1.6.2.2. L’incorporation de PCM dans la bauge
1.6.2.3. L’incorporation de PCM dans les enduits en terre
1.7. Bilan de l’état de l’art
CHAPITRE 2 : Matériaux et méthodes
2.1. Caractérisation des matériaux
2.1.1. Sols
2.1.1.1. Caractérisation géotechnique
2.1.1.2. Caractérisation chimique et minéralogique
2.1.2. Fibres végétales : pailles de lin et pailles de roseau
2.1.3. Matériaux à changement de phase (PCM)
2.2. Méthodologie de préparation des échantillons
2.2.1. Préparation et traitement des matières premières
2.2.2. Préparation des échantillons
2.3. Technique de caractérisation des échantillons
2.3.1. Propriétés hygroscopiques
2.3.1.1. Isotherme de sorption/désorption
2.3.1.2. Perméabilité à la vapeur d’eau
2.3.2. Propriétés thermiques
2.3.2.1. Conductivité thermique
2.3.2.2. Capacité thermique massique
2.3.3. Propriétés physico-mécaniques
2.3.3.1. Propriétés physiques
2.3.3.2. Résistance à la compression non confinée
2.3.4. Dispositif d’étude de la réponse thermique d’un matériau avec des conditions aux limites variables
2.4. Conclusion
Chapitre 3 : Effet de l’incorporation de PCM sur les propriétés de la terre allégée
3.1. Introduction
3.2. Propriétés physico-mécaniques
3.2.1. Porosité
3.2.2. Résistance à la compression
3.3. Propriétés hygroscopiques
3.3.1. Isotherme de sorption /désorption
3.3.2. Perméabilité à la vapeur d’eau
3.4. Propriétés thermiques
3.4.1. Conductivité thermique
3.4.2. Capacité thermique massique
3.5. Réponse thermique à des conditions aux limites variables
3.6. Conclusion
Chapitre 4 : Effet de l’incorporation de PCM sur les propriétés de la bauge
4.1. Introduction
4.2. Propriétés physico-mécaniques
4.2.1. Porosité et masse volumique apparente
4.2.2. Résistance à la compression
4.3. Propriétés hygroscopiques
4.3.1. Isotherme de sorption/désorption
4.3.2. Perméabilité à la vapeur d’eau
4.4. Propriétés thermiques
4.4.1. Conductivité thermique
4.4.2. Capacité thermique massique
4.5. Réponse thermique à des conditions aux limites variables
4.6. Conclusion
Conclusion générale