Propagation en espace libre
La structure de la première démonstration d’un métamatériau proposée par Smith (Figure 1.8) était un réseau unidimensionnel ayant une permittivité et une perméabilité négatives. En 2001, R.A Shelby [15] a proposé une version bidimensionnelle de ce milieu (Figure 1.15). La structure est basée sur des SRR carrés en cuivre, imprimés sur l’une des faces d’un substrat en fibre de verre, des rubans fins en cuivre ont été gravés sur la face opposée. Les cellules ont été assemblées pour avoir une structure périodique sur deux dimensions. Un prisme a été fabriqué à l’aide de ces cellules (Figure 1.16.a), la propagation d’une onde électromagnétique à travers ce prisme produit un rayon réfracté d’un angle négatif ce qui a mis en évidence la réfraction négative de cette structure (Figure 1.16.b). Cette expérience a été reproduite par d’autres groupes de recherche [16] [17]. Dans le même sens, la réfraction négative donne la possibilité de focaliser une onde en utilisant une lentille plane. En effet, les métamatériaux font en sorte que les ondes électromagnétiques focalisent sur un point au lieu de dévier vers l’extérieur. Une lentille classique doit normalement être convexe pour focaliser la lumière, ce qui n’est pas le cas d’une lentille à base de métamatériaux. D’un autre côté, les lentilles classiques ne peuvent pas voir des détails plus petits que la longueur d’onde électromagnétique. Par exemple, les atomes sont plus petits que les longueurs d’ondes de la lumière visible et ne peuvent donc pas être vus à l’aide d’un microscope optique. Cependant, comme les métamatériaux font que la lumière subit une diffraction inversée, ils permettent une « super-résolution » : ces lentilles main gauche plates sont capables de focaliser les ondes évanescentes, qui transportent des détails plus petit que les longueurs d’ondes d’un objet, d’où l’appellation « lentilles parfaites » ou « superlentilles » (Figure 1.17) [18]. Une autre application potentielle qui a suscité un grand intérêt de la part des chercheurs est la cape d’invisibilité ou « Cloaking » [19], cette structure vise à rendre un objet invisible en l’entourant d’un réseau de métamatériaux qui va détourner la lumière (où les ondes électromagnétiques en général) et permettre la reconstruction des fronts d’onde en aval de cet objet (Figure 1.18). Cette approche présente beaucoup d’intérêt notamment dans le domaine de la défense pour les applications de furtivité. La caractéristique main gauche a été aussi utilisée dans le domaine des antennes, une structure fabriquée en technologie coplanaire basée sur l’approche CRLH a été présentée en tant qu’antenne. La cellule est composée d’un court-circuit (inductance parallèle) et de gap dans le signal (capacité série), cette cellule supporte la rétro-propagation [14] [13]. Un autre exemple de réfraction négative avec la possibilité de contrôler le diagramme de rayonnement d’une antenne en faisant varier l’indice de réfraction a été présenté [20].
Métamatériaux reconfigurables
Plusieurs équipes ont essayé de combiner l’approche des métamatériaux avec les techniques d’accordabilité connues pour concevoir des circuits micro-ondes accordables. Dans [26], les auteurs démontrent la possibilité de varier la fréquence de résonance d’un SRR en utilisant des diodes varactor. Cette structure a été utilisée pour la conception d’un filtre en technologie micro-ruban, les SRR variables ont été déposés de part et d’autre d’une ligne de signal. En raison de la proximité de la ligne, les SRR sont excités ce qui provoque une bande de réjection, le filtre composé de deux cellules présente sur plusieurs points de polarisation des réjections supérieures à 20 dB (Figure 1.24). Suivant le même principe d’utilisation de diode pour l’accordabilité, d’autres structures ont été proposées comme les déphaseurs [27]. Une ligne CRδH en technologie coplanaire a été contrôlée à l’aide d’un εEMS série [28], le même auteur a proposé une autre structure fabriquée en technologie monolithique sur substrat en verre. Cette structure fournit simultanément un fonctionnement hautes fréquences, de faibles pertes et une bonne compacité, elle pourra servir pour la réalisation de plusieurs dispositifs: déphaseurs, antennes, diviseurs [29]. Un autre auteur a proposé une étude et un design d’un déphaseur à 3 états à base de cellules CRLH [30]. D’autres groupes se sont intéressés à l’accordabilité des circuits main gauche à l’aide des matériaux ferroélectriques, des déphaseurs ont ainsi été proposés [31], [32], [33]. D’autres groupes ont étudié les métamatériaux accordables à l’aide du BST dans les fréquences centimétriques et millimétriques [34][35]. Dans [34], les auteurs ont présenté une structure CRLH équilibrée composée de ligne chargée par des capacités interdigitales en série et des inductances en parallèle. Cette structure présente une bande main gauche entre 8 GHz et 18 GHz suivie d’une bande main droite. La polarisation du BST a permis de varier les valeurs de la constante de propagation complexe de la structure.
Dimensionnement des éléments
Les éléments de la structure sont choisis pour atteindre la condition d’équilibre. Considérons une fréquence centrale fixée à f0 = 1.2 GHz et une impédance caractéristique Zc = 50 Ω. On va concevoir les éléments main gauche (CL et LL) de la structure à l’aide d’une IDC et d’un stub court-circuité. Les éléments main droite (CR et LR) sont des éléments parasites non contrôlables qui seront une conséquence de la géométrie de notre structure. On va imposer la valeur de CL en prenant en compte les contraintes technologiques de la géométrie d’une capacité IDC, plus complexe par rapport à un stub court-circuité. Puis, à l’aide des équations (2.2), (2.3), (2.4), on trouve la valeur de LL nécessaire pour concevoir le stub court-circuité. Cela permet dans un premier temps d’avoir un dimensionnement préliminaire de la cellule. Il reste nécessaire d’effectuer une optimisation par la suite pour atteindre la condition recherchée.
Choix de l’approche de Conception
Le but de cette étude n’est pas de concevoir ce filtre à partir de la théorie classique des filtres mais d’explorer de nouvelles pistes et techniques pour étudier la faisabilité de ce circuit. Nous avons donc choisi de se baser sur l’approche des métamatériaux et proposé une démarche de conception pratique basée sur l’utilisation complémentaire de plusieurs outils de conception. Nous rappelons que l’approche des métamatériaux basée sur les lignes CRLH permet de concevoir des filtres passe bande dans le cas équilibré. Ces filtres sont en général large bande. En revanche, les difficultés d’équilibrer expérimentalement les bandes main gauche et main droite provoquent des défauts de planitude dans la bande de transmission. De plus, les rejections en haute fréquence de cette approche n’est pas suffisante par rapport à notre cahier des charges. D’un autre côté, l’approche basée sur les résonateurs est adaptée à la conception des filtres à bande étroite de fait leur caractère résonnant. Or, nous avons ici un filtre large bande. Notre choix s’est donc tourné vers une approche hybride qui regroupe les CRLH et les résonateurs. Cela permet de concevoir des filtres large bande tout en ayant de bonnes rejections hors bande et une bonne planitude. Nous rappelons qu’une ligne main gauche (LH) idéale correspond à un filtre passe haut. La rejection en basse fréquence de cette approche est assez bonne. Nous proposons alors d’utiliser des cellules δH pour concevoir le filtre passe haut puis d’ajouter des résonateurs SRR coupe bande qui vont permettre de créer un zéro de transmission pour délimiter la bande passante du côté hautes fréquences. De cette manière on pourra concevoir un filtre passe bande avec de bonnes rejections.
Avantages et inconvénients des switches MEMS RF
Dans certains circuits RF les MEMS ont pris la place des diodes PIN et des FET. Les avantages des switches MEMS sont nombreux [54][59]:
– Une consommation proche de zéro: l’actionnement électrostatique exige une tension mais ne consomme pas de courant.
– Une très bonne isolation et de faibles pertes d’insertion (<0.1-0.2 dB).
– Une très bonne linéarité.
– Un facteur de qualité élevé qui pourra atteindre 50 – 400 de 2 à 100 GHz.
– Une puissance qui peut atteindre 10 W.
– Un faible coût de fabrication car les MEMS RF sont fabriqués en utilisant les techniques de micro-usinage de surface classique.
Les MEMS RF ont aussi des défauts [54] [59]:
– Un temps de commutation relativement faible (typiquement entre 2-40 us). Toutefois, il est possible d’avoir des temps de commutation inférieur à 1 µs en augmentant la tension de commande.
– Une tension de commande importante ; entre 20 et 100 V ; ce qui nécessite des circuits de commande à haute tension.
– La fiabilité des MEMS matures est de 0,1 – 10 milliards cycles. Toutefois, des limitations restent encore pour des systèmes travaillant dans des conditions spécifiques nécessitant puissance ou haute température.
– Packaging : les MEMS nécessitent d’être isolés dans une atmosphère inerte (azote, argon…) et avec un très faible taux d’humidité [60]. Le packaging joue un effet considérable sur la fiabilité des MEMS, actuellement, les coûts d’un bon packaging sont encore élevés.
Il est vrai que tous les problèmes relatifs à la technologie MEMS RF ne sont pas encore totalement réglés, notamment en terme de fiabilité sur du long terme. Cependant les avancées récemment accomplies sur d’autres problématiques comme le packaging, l’accroissement des vitesses de commutation ou la tenue en puissance laissent envisager de nombreuses applications dans le domaine des micro-ondes.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE 1 THEORIE DES METAMATERIAUX ET DOMAINES D’APPLICATION
1.1 INTRODUCTION
1.2 PROPAGATION ELECTROMAGNETIQUE DANS UN MILIEU HOMOGENE
1.3 CAS D’UN MILIEU DOUBLEMENT NEGATIF (METAMATERIAUX)
1.4 SYNTHESE DES METAMATERIAUX
1.4.1 Approche résonateurs et fils minces
1.4.1.1 Milieu à permittivité négative
1.4.1.2 Milieu à perméabilité négative
1.4.1.3 Milieu doublement négatif
1.4.2 Approche lignes de transmission
1.5 DOMAINES D’APPLICATION
1.5.1 Propagation en espace libre
1.5.2 Propagation guidée
1.5.3 Métamatériaux reconfigurables
1.6 CONCLUSION
CHAPITRE 2 CONCEPTION DE STRUCTURES METAMATERIAUX PLANAIRES
2.1 INTRODUCTION
2.2 CONCEPTION DE STRUCTURES CRLH : DEMONSTRATION DE LA CONDITION D’EQUILIBRE
2.2.1 Exemple d’une Cellule CRδH unitaire
2.2.2 Conception d’une structure CRδH avec diagramme équilibré
2.2.2.1 Conditions d’équilibre, procédure d’analyse théorique
2.2.2.2 Procédure de conception
2.2.2.3 Simulation et extraction du diagramme de dispersion
2.2.2.4 Réalisation technologique et résultats expérimentaux
2.2.3 Conception d’une structure CRδH avec diagramme non équilibré
2.3 CONCEPTION D’UN FILTRE MINIATURE POUR APPLICATION SPATIALE
2.3.1 Exemples de la littérature d’utilisation des métamatériaux pour la conception des filtres
2.3.2 Cahier des charges
2.3.3 Choix de l’approche de Conception
2.3.4 Etapes de la conception du circuit idéal
2.3.5 εise en œuvre technologique
2.3.5.1 Choix du substrat et de la topologie
2.3.5.2 Choix du résonateur
2.3.5.3 Choix de la capacité série
2.3.5.4 Choix de l’inductance parallèleμ
2.3.6 Méthode de la conception du circuit réel et résultats des simulations
2.3.6.1 Conception de la cellule 1
2.3.6.2 Conception de la cellule 2
2.3.6.3 Conception de la cellule 3
2.3.6.4 Le filtre complet
2.3.7 Etude de la sensibilité du diélectrique à la température
2.3.8 Discussion et prospectives
2.4 CONCLUSION
CHAPITRE 3 : STRUCTURES METAMATERIAUX EN TECHNOLOGIE SILICIUM, AGILITE EN FREQUENCE A L’AIDE DES MEMS
3.1 INTRODUCTION
3.2 CHOIX TECHNOLOGIQUE ET PROCESSUS DE FABRICATION
3.3 OPTIMISATION DE LA CELLULE CRLH PAR L’AJOUT D’UN STUB CAPACITIF
3.3.1 Principe
3.3.2 Procédure de conception
3.4 OPTIMISATION DE LA CELLULE CRLH PAR L’UTILISATION DES MEMS : FONCTION D’AGILITE
3.4.1 Généralités sur les MEMS RF
3.4.2 Principe de l’idée et procédure de conception
3.5 SIMULATIONS ELECTROMAGNETIQUES
3.5.1 Ajout du stub ouvert
3.5.1.1 Variation de la longueur du stub ouvert
3.5.2 Ajout du MEMS
3.6 RESULTATS DES MESURES ET DISCUSSION
3.6.1 Mesures DC sur les MEMS
3.6.2 Mesures RF sur les différentes structures CRLH (IDC, MEMS)
3.7 LES PERTES
3.8 CONCLUSION
CHAPITRE 4 CARACTERISATION DU BST EN DC ET HYPERFREQUENCES, METAMATERIAUX AGILES A L’AIDE DU BST
4.1 INTRODUCTION
4.2 LES MATERIAUX FERROELECTRIQUES
4.2.1 Historique, cycle d’hystérésis
4.2.2 Classification cristallographique, Structure pérovskite
4.2.3 Propriétés physiques
4.2.4 Couches minces, matériau massif
4.2.5 Les méthodes de dépôt et de croissance
4.2.5.1 Méthode sol-gel
4.2.5.2 Méthode MOCVD
4.2.5.3 Méthode PLD (Ablation laser)
4.2.5.4 Pulvérisation cathodique RF
4.3 LE BST
4.4 PREPARATION DES ECHANTILLONS
4.5 CARACTERISATIONS DU BST ET DISCUSSIONS
4.5.1 Caractérisation en basses fréquences : Capa MIM DC
4.5.2 Caractérisations en hyperfréquences : Lignes coplanaires
4.5.2.1 Lignes non polarisées
4.5.2.2 Lignes polarisées
4.5.3 Caractérisation en Hyperfréquences: Capacités interdigitales
4.5.4 Caractérisations en Hyperfréquences : Capacités MIM RF
4.5.5 Discussion
4.6 BST ET METAMATERIAUX RECONFIGURABLES
4.6.1 Conditions d’implémentation technologique
4.6.2 Méthodologie et contraintes de simulation
4.6.3 Structure CRLH reconfigurable à base de BST
4.6.4 Résonateur SRR en technologie coplanaire pour filtres coupe bande
4.6.5 Discussion
4.7 CONCLUSION
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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