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Facteurs infectieux
La ressemblance entre les symptômes de certaines arthrites d’origine virale et la PR a amené les scientifiques à chercher une origine infectieuse à la PR. Les agents infectieux pourraient induire un dysfonctionnement immunitaire et initier la maladie suivant un mécanisme de mimétisme moléculaire. Plusieurs virus et bactéries ont été incriminés :
– Bactéries : mycobactéries ou des bactéries qui colonisent les microbiotes de la cavité buccale, le poumon, l’intestin (Mycobacterium tuberculosis, Escherichia coli, Prevotella et Bacteriodes fragilis, Porphyromonas gingivalis). La virulence de P. gingivalis pourrait induire des réactions immunitaires de l’hôte contre l’α-énolase bactérienne citrullinée dans un contexte inflammatoire, ce qui peut conduire à une réactivité autoimmune croisée contre l’énolase humaine, selon la prédisposition génétique (porteur de l’épitope partagé) [8, 14, 42, 83, 102, 103]
– Virus : le virus de l’hépatite C, le parvoirus B19, le virus de la rubéole mais aussi et surtout le virus d’Epstein-Barr (ou EBV) sont mis en cause. L’EBV est le virus le plus souvent mis en cause [42, 102, 107].
Facteurs toxiques
Les facteurs toxiques sont multiples et variés (tabac, alcool, silice..). Le tabac est le plus étudié. Une méta-analyse des données de la littérature scientifique publiée en 2010 met en évidence un risque relatif significativement supérieur de développer une PR chez les fumeurs et chez les ex-fumeurs par rapport aux patients non-fumeurs [40, 57, 104]. Le risque augmente également avec le nombre de cigarettes fumées par jour et la durée du tabagisme. Il n’a pas été établi de seuil à partir duquel un risque accru devenait mesurable mais quoiqu’il en soit, tous s’accordent à dire que le risque de développer une PR demeure plus élevé chez les fumeurs ou ex-fumeurs pendant près de 20 ans après l’arrêt du tabagisme [40]. Une étude de population, cas–contrôle, incluant des individus atteints de PR récente de moins d’un an d’évolution (cohorte EIRA), a montré que les individus fumeurs ne portant pas d’allèle du HLADRB1*SE (SE négatif) avaient 1,5 fois plus de risque de développer une PR ACPA-positive que les individus non-fumeurs et SE négatifs. Le risque de développer une PR ACPA-positive pour les individus fumeurs portant deux copies du SE étaient 21 fois supérieur à celui des non-fumeurs SE négatif [40].
Facteurs psychologiques
Environ 80 % des patients rapportent un événement traumatisant à l’initiation de leur maladie auto-immune. Certaines études suggèrent qu’un stress anormal (concept de l’immunosénescence) pourrait entraîner un vieillissement accéléré du système immunitaire, avec comme conséquence, une élévation du taux d’IL-6 qui est une cytokine pro-inflammatoire [36].
Le terrain génétique
La PR est une affection polygénique associée à des gènes HLA et non HLA. Cette implication génétique est fondée sur l’existence de cas familiaux, de formes affectant les jumeaux et l’existence de modèles animaux [40, 41, 43, 48]. La région HLA-DR a été la première analysée dans la PR et, selon les populations, plusieurs spécificités DR (DR4, DR1, DR10) ont été associées à la survenue d’une PR [23, 41, 43, 85]. Ces différentes spécificités DR possèdent une séquence commune d’acides aminés en position 70 – 74 de la chaîne DRB1, la séquence QKRAA ou QRRRA dite de susceptibilité à la polyarthrite (shared epitope : épitope partagé) [10, 23, 83]. Les gènes DQB1 ont été particulièrement étudiés en raison de leur déséquilibre de liaison très important avec les molécules DR, en particulier le polymorphisme de la spécificité DQB1*03 (ou DQw3). Des augmentations de différents allèles DP ont été observées dans des PR le plus souvent peu sévères, soit séronégatives, soit non érosives [23, 48, 93]. D’autres gènes non HLA sont impliqués : Le gène PTPN 22 en 1q13, Le gène PAD14 en 1p36, Le gène TCLA4 en 2q33.
PHYSIOPATHOLOGIE
La survenue d’un panus est la résultante des facteurs étiologiques.
Phase de déclenchement de la maladie
Le primum movens c’est-à-dire la cible initiale de la maladie est inconnue. Les données de la littérature les plus récentes ont démontré que la PR comprend une phase préclinique où le conflit immunologique initial de la maladie est en dehors de l’articulation. Les muqueuses aérodigestives ou pulmonaires, voire génitales hébergent le conflit immunologique initial. Dans un second temps, on assiste à un emballement du conflit immunologique, puis une atteinte de la membrane synoviale à l’origine d’arthrites qui commencent à la jonction cartilage-membrane synoviale [103].
La cavité buccale
Des bactéries spécifiques (Porphyromonas gingivalis), au niveau de la plaque parodontale entrainent, une destruction du tissu de soutien de la dent. Il possède une peptidyl- arginine déaminase (PAD), une enzyme entrainant l’hydrolyse de l’arginine en citrulline [8, 46, 103].
Les autoantigènes
Ils sont d’origine exogène ou endogène. Les antigènes exogènes sont surtout infectieux (bactériens : E Coli, mycobactéries, P gingivalis, viraux : Epstein-Barr) et agissent par divers mécanismes dont le mimétisme moléculaire. Les antigènes endogènes sont des néoantigènes dont la modification post-tranductionnelle de certaines protéines du soi (le fibrinogène, la vimentine, la fibronectine, l’alpha-énolase et le collagène de type II). Elles sont modifiées par citrullination, carbamylation et d’oxydation.
– La citrullination : l’hydrolyse de l’arginine en citrulline modification post-tranductionnelle. Elle résulte de l’action de PAD (peptidyl arginine déaminase) dont deux sont exprimées par la membrane synoviale : PAD2 et PAD4. Les antigènes citrullinés vont induire la production par le système immunitaire d’ACPA [23].
– La carbamylation : fixation non enzymatique d’acide cyanique sur les groupes NH2 libres des protéines, transformant les résidus lysine en homocitrulline [23]. L’inflammation est aussi un facteur de carbamylation par le biais de la myéloperoxydase (MPO) des polynucléaires neutrophiles qui favorise la formation d’acide cyanique à partir d’acide thiocyanique sous l’action du peroxide d’hydrogène. La carbamylation induit la production d’anticorps anti-peptides carbamylés (ACarPA) et la prolifération des TCD4+ avec production d’IFN-gamma, IL17 et IL10. ACPA comme ACarPA précèdent souvent de plusieurs années l’éclosion de la PR [23].
– L’oxydation : consécutive au stress oxydant (augmentation de l’activité enzymatique oxydative et une diminution des phénomènes anti-oxydants) [23].
Les acteurs cellulaires et humoraux de l’inflammation rhumatoïde
Les acteurs impliqués dans l’inflammation rhumatoïde de la membrane synoviale rhumatoïde sont cellulaires et humoraux.
Les cellules impliquées sont les cellules de l’immunité innée et immunité adaptative. L’immunité innée implique : les cellules endothéliales, les synoviocytes, les polynucléaires neutrophiles, les cellules du système monocyte-macrophage-cellules dendritiques, les fibroblastes et les autres cellules des structures articulaires (chondrocytes, ostéoblastes, ostéoclastes) et périarticulaires. Elles reconnaissent par des récepteurs innés tels que les Toll-like receptors (TRL), les autoantigènes PAMPs ou DAMPs [55].
Les cellules de l’immunité adaptative impliquées sont le lymphocyte T (TCD4+, TCD8+) et les lymphocytes B [55].
Les médiateurs humoraux sont : le complément, les cytokines et les protéases, les dérivés de l’acide arachidonique [55].
Les acteurs cellulaires (immunité innée et adaptative)
Les synoviocytes :
Les synoviocytes sont les cellules de la membrane synoviale qui tapisse la face interne de la capsule et recouvre les surfaces articulaires. Ils sont de deux types : synoviocytes macrophagiques (type A) et fibroblastiques (type B) [18, 55]. Au cours de la PR la synovite va adopter un aspect prolifératif avec hyperplasie des assises synoviales, une hypertrophie des franges synoviales qui adoptent un aspect pseudo-tumoral appelé pannus. Les synoviocytes produisent de multiples médiateurs délétères qui vont amplifier le processus inflammatoire: dérivés de l’acide arachidonique (prostaglandines, leucotriènes), dérivés du stress oxydant, les cytokines pro-inflammatoires (IL1, IL6, TNF, IL8) et les protéases qui vont participer à la destruction tissulaire notamment cartilagineux et osseux [55, 108].
Les cellules endothéliales :
Les cellules endothéliales et hématopoïétiques expriment des molécules d’adhésion, d’abord des sélectines, puis des intégrines, qui interagissent entre elles, ce qui permet la diapédèse des cellules sanguines qui passent alors dans la membrane synoviale. La prolifération vasculaire au sein du pannus permet son développement et sa croissance, favorisant secondairement la destruction cartilagineuse et osseuse, ainsi que le remodelage articulaire [28, 109]. Il existe une angiogenèse c’est-à-dire la croissance de nouveaux capillaires sanguins à partir des vaisseaux préexistants.
Les cellules du système monocyte-macrophage-cellule dendritiques
Les cellules dendritiques sont de type myéloïde ou plasmacytoïde. Elles sont capables de présenter un antigène aux lymphocytes T et expriment, à la surface de leurs membranes, des molécules HLA de classe II [90].
Les lymphocytes B :
Le LB est responsable de la sécrétion des anticorps dont les FR et ACPA détectés au cours de la maladie. Il peut aussi jouer le rôle de CPA au LT en utilisant des molécules de co-stimulation CD80 et CD86 qui se lient à CD28, liaison inhibée par CTLA4 [13,78]. Le LB peut sécréter de nombreuses cytokines dont le TNF. Le LB exprime le récepteur de BAFF ou BLyS (BAFF ou B cell activating factor belonging of TNF familly est médiateur de la famille du TNF). BAFF en se liant à BAFF-R active le LB et assure sa survie. Les BREGS sont les LB régulateurs, homologues des TREGS, comme pour les TREGS, la fonction suppressive des BREGS est altérée au cours de la PR [13, 15, 78].
Les chondrocytes :
Ils sont activés par les cytokines pro-inflammatoires et produisent des enzymes protéolytiques responsables de la chondrolyse. Ce sont essentiellement des MMP dont il existe une vingtaine, classées en 5 catégories : collagénases, stromélysines, gélatinases, MMP membranaires et agrécanases. Les 4 premières font partie des MMP matricielles, tandis que les agrécanases font partie des ADAMTSs (à desintegrin and a metalloptease with thrombospondin motifs) [97].
Les ostéoclastes (OC) :
Les OC jouent un rôle majeur dans la survenue d’érosion osseuse et de la destruction articulaire. La différenciation, activation et survie des OC est sous-tendue par plusieurs facteurs dont celui de RANKL-OPG-RANK. RANK est un récepteur sur les OC, cellules dendritiques, lymphocytes T et B ainsi que les fibroblastes [54, 71]. RANKL est le ligand de RANK produit par les OB mais aussi d’autres cellules dont les lymphocytes activés. La liaison à RANK assure la différenciation des OC. L’ostéoprotégérine (OPG) est une protéine produite par l’OB mais aussi par d’autres cellules (cardiaques, pulmonaires, rénales, CD et lymphocytes) dont la fonction est de se lier sur RANKL ce qui inhibe l’interaction RANK-RANKL [54, 71, 95]. La résorption osseuse au cours de la PR est essentiellement due à une production excessive de cytokines pro-inflammatoires comme le TNF, l’IL1, l’IL6, l’IL17 ainsi qu’une hyperproduction de RANKL par les cellules inflammatoires, à l’origine d’une rupture du système RANKL-RANK-OPG. De plus, l’OPG est inhibée [71, 95].
Les ostéoblastes :
Les ostéoblastes sont des cellules d’origine mésenchymateuse responsables de l’ostéoformation qui implique les protéines TGF-bêta, les BMP et les protéines de la famille Wingless (Wnt). Les protéines Wnt agissent sur leurs cibles dont l’ostéoblaste en se liant à Frizled (Fz) ou à des complexes de récepteurs (LRP) [95]. L’activation de Fz ou LRP5/6 induit une ostéoblastoformation. Les inhibiteurs de la voie Wnt sont Dickkopf (DKK1) et la sclérostine qui se lient sur LRP5/6. Au cours de la PR, les cytokines pro-inflammatoires, principalement le TNF-alpha, tout en potentialisant l’ostéoclastogénèse responsable comme décrit ci-dessus de la résorption osseuse, va inhiber la différenciation ostéoblastique par expression de DKK1. DKK1 bloque la voie Wnt et donc la différenciation ostéoblastique [95].
Les acteurs humoraux :
Ce sont essentiellement les cytokines qui agissent comme des messagers intercellulaires dont il existe 4 grandes familles : les interleukines, les interférons, les chimiokines et les facteurs de croissance. Les cytokines sont de deux types : les cytokines pro-inflammatoires et les cytokines anti-inflammatoires. Les deux doivent être « en équilibre». Au cours de la PR, on note une prédominance de l’action des cytokines pro-inflammatoires sur les cytokines anti-inflammatoires. Les principales cytokines pro-inflammatoires impliquées sont : IL1, TNF, IL6, IL12, IL15, IL17, IL18, IL23 et les chimiokines CXCL8, CCL3 et CCL2 [18, 19, 63, 108].
Les acteurs intracellulaires (l’activation cellulaire) :
Ce sont les voies de signalisation intracellulaire qui permettent la transmission et la modulation d’un signal de la membrane cellulaire au noyau. Le signal est déclenché le plus souvent par la fixation d’un peptide (une cytokine) sur un récepteur membranaire. Le signal chemine dans la cellule par une succession d’étapes d’activation sous forme de phosphorylations induites par des kinases ou d’inhibition sous l’action de phosphatases. Les principales voies de signalisation intracellulaire sont : NF-KB, JAK-STAT, SYK, MAPK et PI3K [82, 83, 111].
ANATOMIE PATHOLOGIE
La membrane synoviale est une membrane fine qui s’attache au pourtour de l’articulation pour former une cavité close, la cavité articulaire, contenant le liquide synovial. Elle possède de nombreuses cellules spécialisées, de multiples vaisseaux sanguins, des lymphatiques et des nerfs [11]. Ses fonctions principales sont : la fabrication du liquide synovial ; la sécrétion des nutriments nécessaires au cartilage ; la filtration du fluide synovial, pour le débarrasser de ses déchets ; le glissement de la capsule sur les surfaces cartilagineuses de l’articulation et parfois aussi gaine de glissement pour les tendons [11].
La membrane synoviale est présente dans les articulations diarthrodiales principalement :
– Les articulations périphériques des mains (carpe, MCP, IPP), pieds, poignets, épaules, hanches, genoux et chevilles,
– Le rachis, en particulier l’articulation atloïdo-axoïdienne, les articulaires du rachis cervical et lombaire.
Elle est également présente dans les gaines tendineuses et certaines bourses séreuses.
Les signes cliniques
L’atteinte des mains est la plus évocatrice :
On trouve l’atteinte typique des métacarpo-phalangiennes (MCP) et des interphalangiennes proximales (IPP), les interphalangiennes distales (IPD) sont respectées.
Les destructions articulaires et ligamentaires vont aboutir à des déformations caractéristiques :
– « coup de vent cubital » ou déviation des doigts en dehors ;
– déformations en « boutonnière » : flexion des IPP, extension des IPD ;
– déformation en maillet : flexion IPD simple ;
– déformation du pouce en « Z » avec luxation MP ;
– ruptures tendineuses, surtout tendons des extenseurs.
L’atteinte des poignets :
– les ténosynovites sont fréquentes avec risque de rupture ;
– le gonflement dorsal du carpe avec aspect en « dos de chameau » est évocateur ;
– la destruction peut aboutir à une subluxation antérieure du carpe et une attitude abduction du poignet ;
– on remarque la saillie de la tête cubitale (mobilité en touche de piano) liée aux destructions ligamentaires.
Les formes extra-articulaires
Elles sont graves car susceptibles d’engager le pronostic vital. Elles imposent une intensification thérapeutique.
Les nodules rhumatoïdes
Les nodules rhumatoïdes sont de grande valeur diagnostique : ce sont des masses fermes, indolores, mobiles, de taille et de consistance variables. Elles siègent en arrière de l’olécrane, aux crêtes cubitales, à la face dorsale des doigts et aux tendons d’Achille [10, 22].
Manifestations cardiaques
En dehors des cardiopathies ischémiques, la PR peut également atteindre toutes les tuniques cardiaques. Les atteintes péricardiques sont en général asymptomatiques. Les atteintes myocardiques se traduisent par des troubles du rythme et ou de la conduction. Les atteintes endocardiques sont plus rares. Une HTAP complique souvent les fibroses pulmonaires [14, 84].
Manifestations pleuro-pulmonaires
Les atteintes respiratoires de la PR sont les deuxièmes en fréquence après les atteintes articulaires. En effet, la moitié des patients porteurs de PR présenteront au cours de l’évolution de leur maladie une manifestation respiratoire aigüe ou chronique. Elles sont d’origine spécifique, infectieuse ou médicamenteuse ; à type de pleurésies sérofibrineuses, de pneumopathies infiltrantes diffuses, de bronchites [10, 14, 85].
Manifestations neurologiques
– Les atteintes périphériques sont les plus fréquentes à type : compressions périphériques tronculaires (syndrome du canal carpien, mono neuropathies multiples) [85].
– Les atteintes centrales sont le plus souvent secondaires à une luxation atloïdo-axoïdienne. Elles sont caractérisées par des compressions médullaire et basilaire.
Manifestations Rénales
L’atteinte rénale est peu fréquente. Elle est dominée par l’amylose de type AA et les néphrites interstitielles secondaires aux thérapeutiques utilisées dans la PR.
Les manifestations hématologiques
L’anémie : c’est la manifestation hématologique la plus fréquente. Elle répond à de multiples causes, au premier rang desquelles figurent l’anémie inflammatoire, puis l’anémie par carence martiale. Cette dernière est le plus souvent secondaire à un saignement digestif lié à la prise chronique d’anti-inflammatoires [10, 22]. D’autres causes existent mais sont plus rares : déficit en acide folique ou en vitamine B 12, toxicité médullaire médicamenteuse et, exceptionnellement, une hémolyse chronique auto-immune.
Les adénopathies sont fréquentes. La splénomégalie est habituellement modérée sinon elle peut rentrer le cadre d’un syndrome de Felty qui associe à la PR une splénomégalie et une leuco neutropénie [84, 85].
Syndrome d’hyperviscosité sanguine : le syndrome d’hyperviscosité sanguine peut exceptionnellement compliquer la PR, associé à un syndrome de Felty dans 1/3 des cas. Dû à un taux élevé de complexes immuns de taille intermédiaire, il peut être responsable d’anomalies de l’hémostase, de troubles de la vue ou de la vigilance.
Données épidémiologiques
. La fréquence
La PR est le plus fréquent rhumatisme inflammatoire chronique au monde. D’une manière générale, la prévalence de la PR au niveau de la population mondiale varie de 1 à 3% [10, 49]. Cette prévalence varie cependant, d’une région à une autre. Cela est probablement lié au caractère multifactoriel de la PR qui relève de facteurs étiologiques multiples notamment, génétiques et environnementaux. Les enquêtes de population dans les pays d’Europe et d’Amérique ont retrouvé des taux de prévalence avoisinant 1% [31]. En Asie, à Taïwan, Lai. CH a démontré récemment que la prévalence est passée de 0,57% en 2000, à 0,996 presque 1% en 2007. La prévalence hospitalière globale de la PR dans notre étude était de 4,22%. Cette prévalence ne peut pas être comparée avec les prévalences occidentales déterminées dans la population générale. En Afrique centrale, la prévalence est de 1% au Congo Brazzaville [17] en milieu hospitalier. En Afrique de l’ouest les chiffres retrouvés sont fortement variables selon les études. Au Togo, sur une série de 13517 patients atteints de maladies rhumatismales, il y avait 62 cas de PR soit une prévalence de 0,45% [80, 81]. Au Burkina Faso, elle est de 2,2% dans une étude hospitalière [91], au Nigéria 12,13% [1, 2]. Au Sénégal, une étude faite en 2009 estimait la prévalence à 9% [96]. Il faut signaler qu’en Afrique occidentale les séries, en général, sont faiblement représentées par conséquent, elles peuvent ne pas refléter le vrai visage de la maladie.
. Le genre
La PR est une maladie de la femme que l’homme confirmée par notre série avec un sex-ratio de 6,27 à peu près soit 86,3% des cas. Cette prédominance féminine est décrite dans la littérature [45]. Selon certains auteurs, une imputabilité des facteurs hormonaux serait établie. Une influence de la grossesse (risque de développer une PR est faible durant celle-ci), de l’allaitement et des facteurs hormonaux sur l’apparition ou l’activité de la maladie. L’allaitement a été incriminé comme étant un facteur de risque responsable de l’incidence plus élevée dans le post partum. Des études ont montré une hypoandrogénie relative chez les femmes et les hommes atteints de PR, avec des taux de testostérone et de déhydroépiandrostérone plus bas.
. L’âge
L’âge moyen de nos patients était de 44,45 ans avec des extrêmes de 12 ans et 90 ans. La tranche des 41 à 50 ans était la plus représentée (23,7%). Ces résultats sont superposables aux données de la littérature et aux études effectuées en Afrique, en Occidents en Asie. L’âge de prédilection de la PR est entre la 4ème et la 6ème décennie [31, 62, 94]. Cet âge, entre autres facteurs, correspond chez la femme à la pré-ménopause. La diminution du taux des hormones stéroïdiennes qui survient à cette période explique en partie la survenue de la PR. Chez l’homme un tel parallélisme ne peut être fait, il y aurait certainement d’autres facteurs qui entrent en jeu tel que le tabagisme. Dans notre cohorte nous n’avons noté que 14 cas d’intoxication au tabac avoués.
. Statut matrimonial
Dans notre série les mariés étaient prédominants 64,9% suivis des célibataires 23,2%, le reste (11,9%) était composé de veuf (ves) et de divorcé(es). Dans l’étude de Yacoub portant sur 185 femmes, les célibataires représentaient 42%. Ils avaient une qualité de vie altérée comparée aux autres groupes associée à des troubles mentaux et physiques. D’une manière générale, la PR a un important retentissement psycho-social [70, 90]. L’atteinte psychique a été confirmée par Tekaya en Tunisie qui avait rapporté 45% de dépression dans une série de 60 patients. Parmi les facteurs favorisants qu’il a cités, étaient inclus le sexe féminin, l’altération de la qualité de vie et l’absence de soutien social. En effet, l’absence de conjoint pourrait se traduire par un défaut de moyens financiers surtout chez la femme et un manque de soutien social chez l’homme.
. Les profils ethniques et Origine géographique
L’ethnie Wolof était la plus représentée dans notre série avec 40, 3%, les Peulhs 23,7% et les Sérères étaient 11,8% ce qui est conforme à la population sénégalaise composée dans sa majorité de Wolofs 43,8%, de Peulh (23,8%) et de sérères (14,7%) [86, 87].
Les patients provenaient dans 48,8% de la région de Dakar et de ses départements ceci peut s’expliquer par le fait que le lieu de l’étude est au coeur de Dakar et est un centre de référence en rhumatologie d’une part et d’autre part 25% de la population Sénégalaise vie à Dakar.
. La profession
La PR, de par son retentissement fonctionnel notamment, articulaire demeure un facteur de risque de survenue de chômage. Dans une étude transversale menée en France concernant 1629 cas de PR avérées, 29% avaient un emploi rémunéré. Parmi ces 29%, 44% étaient en congé de maladie dont 36% liés à la PR. Après une durée d’évolution de 6 ans de la PR, 19% des patients ont cessé définitivement de travailler. Le coût de la prise en charge est élevé [12,76, 90]. Par conséquent, le faible niveau socio-économique reste un facteur favorisant les poussées et la sévérité de la pathologie. Nos patients sont majoritairement des ménagères (45,5%), nous avons noté seulement 15,2% d’employés et 9,5% de commerçants. Les restants étaient composés d’étudiants, de retraités, des sans-emplois qui ont des professions à faibles revenus. Ainsi, nous pouvons conclure globalement que le niveau socio-économique était bas dans notre série.
. Les antécédents
Onze pourcent des malades étaient hypertendus. Le risque de présenter une HTA est augmenté de 15 % dans la PR [95]. La prévalence des hypertendu dans la série de Badji était de 34% plus important la nôtre. Trois pourcent étaient diabétiques. Les patients atteints de PR ont un risque accru de maladies cardiovasculaires inflammation et néoangiogénèse seraient impliquées dans le défaut de réparation de l’endothélium des artères, ce qui est un facteur de l’autre atteinte vasculaire de la PR qui est l’atteinte macrovasculaire. Celle-ci est aggravée par l’athérome, qui est une maladie inflammatoire aux mécanismes parallèles à la PR. La maladie macrovasculaire est responsable de morbidité et mortalité par elle-même dans ce contexte [104]. La fréquence de l’insulino-résistance, facteur favorisant de rigidité artérielle est très augmentée dans la PR [91]. L’inflammation systémique impliquant le TNF, l’IL-1 et l’IL-6 selon les études, prédispose au développement de l’insulinorésistance. Ces cytokines, dont le TNF, favorisent le processus athéromateux et l’insulino-résistance. L’association entre PR et diabète de type 1(DT1) est estimée à 2,8 % et augmente en présence d’anticorps anti-peptides citrullinés avec un odds ratio à 7,3.
Les données clinico-biologiques
Le délai au diagnostic était en moyenne de 72,42 mois dans notre étude avec des extrêmes de 1 mois et 720 mois soit environ 6,5 ans. Les délais diagnostiques dans la littérature sont disparates. Dans les séries Sénégalaises les délais sont à peu près concordants avec un retard de 72 mois chez Niass [90], de 54 mois la série de Ndongo [86, 87]. En Afrique de l’Ouest et centrale Ouédraogo [92] et Ntisba ont respectivement eu des délais de 86,2 et 48 mois par contre Zomalhèto et al [86, 87, 90, 92, 98] étaient à 36 mois. En Afrique du Nord le délai était plus court de 6 mois chez Benbouzza et al. [13] mais beaucoup plus tôt chez les Occidentaux qui était de 74,8 jours en moyenne pour la consultation d’un rhumatologue et de 26 jours pour un généraliste chez Combe et al. [31] alors qu’il était de 116 mois dans la cohorte de Sparsa et al. Ce retard diagnostique important en Afrique pourrait être la résultante de différents facteurs parmi lesquels : le retard à la consultation, la méconnaissance de la maladie par certains praticiens, un plateau technique limité. A noter aussi que dans nos contextes africains, du fait du caractère évolutif par poussées et rémissions de la PR, parfois les patients manquent de confiance aux médicaments modernes et s’adonnent au traitement traditionnel.
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Table des matières
PREMIERE PARTIE
I. HISTORIQUE
II. EPIDEMIOLOGIE
II.1. Fréquence
II.1.1. La prévalence
II.1.2. Incidence
II.2. Le genre
II.3. Facteurs hormonaux
II.4. L’âge
II.5. Facteurs infectieux
II.6. Facteurs toxiques
II.7. Facteurs psychologiques
II.8. Le terrain génétique
III. PHYSIOPATHOLOGIE
III.1. Phase de déclenchement de la maladie
III.1.1. La cavité buccale
III.1.2. Le poumon
III.1.3. L’intestin
III.2. Les autoantigènes
III.3. Les acteurs cellulaires et humoraux de l’inflammation rhumatoïde
III.3.1. Les acteurs cellulaires (immunité innée et adaptative)
III.3.2. Les acteurs humoraux
III.3.3. Les acteurs intracellulaires (l’activation cellulaire)
IV. ANATOMIE PATHOLOGIE
V. SIGNES
V.1. TDD la forme polyarticulaire prédominante de la femme adulte en dehors de la grossesse
V.1.1. Période de début
V.1.1.1. Signes cliniques
V.1.1.2. Signes paracliniques
V.1.2. La période d’état
V.1.2.1. Les signes cliniques
V.1.2.2. Les signes paracliniques
V.1.3. Evolution
V.1.3.1. Eléments de surveillance
V.1.3.2. Les modalités évolutives
V.2. Les formes cliniques
V.2.1. Formes symptomatiques
V.2.2. Les formes extra-articulaires
V.2.2.1. Les nodules rhumatoïdes
V.2.2.2. Manifestations cardiaques
V.2.2.3. Manifestations pleuro-pulmonaires
V.2.2.4. Manifestations neurologiques
V.2.2.5. Manifestations Rénales
V.2.2.6. Les manifestations hématologiques
V.2.3. Les formes associées
V.2.4. Les formes selon le terrain
VI. DIAGNOSTIC
VI.1. Diagnostic positif
VI.2. Diagnostic différentiel
VI.3. Diagnostic étiologique
VII. PRONOSTIC
VIII. BILAN PRE-THERAPEUTIQUE
IX. TRAITEMENT
IX.1. But
IX.2. Moyens
IX.2.1 Les moyens non pharmacologiques
IX.2.2. Les moyens médicaux
IX.2.3. Les moyens physiques
IX.2.4. Les moyens chirurgicaux
IX.3. Indications
DEUXIEME PARTIE
X. Patients et méthodes
X.1. Cadre d’étude
X.2. Le type et la période de l’étude
X.3. La population d’étude
X.3.1 Critères d’inclusion
X.3.2 Critères de non inclusion
X.4. Méthode d’étude
X.4.1. Recueil des données
X.4.2. Analyse des données
XI. Les résultats
XI-1 Etude descriptive
XI- 1-1 Données épidémiologiques
XI.1.2. Données diagnostiques
XI.1.2.1. Données cliniques
XI.1.2.2. Données paracliniques
X.1.3. Pathologies associées
XI.1.4. Activité et retentissement de la maladie
XI.1.4.1. L’évaluation de l’activité de la maladie
X.1.4.2. L’évaluation de la qualité de vie
X.1.5. Données thérapeutiques
XI.1.6. Données évolutives
XI.2. Etude analytique
XII. Discussion
XII.1 Données épidémiologiques
XII.2 Les données clinico-biologiques
XII.3 Activité et retentissement de la maladie
XII.4 Données thérapeutiques
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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