Taux de réalisation du suivi et professionnel concerné
MÉTHODE
Il s’agit d’une étude rétrospective descriptive et non interventionnelle, dans le cadre de l’évaluation des pratiques de soins, réalisées sur la base de données de CAP Santé 49.
Cet organisme recueille, par mail crypté, par fichiers informatisés ou par courrier, la totalité des résultats des frottis des femmes assurées sociales du département via les différents cabinets d’Anatomie et Cytologie Pathologiques qui peuvent être situés dans le Maine-et-Loire ou hors département. Le partenaire le plus important est le Centre de Pathologie de l’Ouest (CPO), qui reçoit 89% des frottis du Maine-et-Loire. Les autres partenaires sont le Centre Hospitalo-Universitaire (CHU) d’Angers, Biomnis, Cerba et l’Institut d’Histo-Pathologie de Nantes.
La population source est celle des femmes concernées par le dépistage du cancer du col de l’utérus en Maine-et-Loire en 2014.
Les critères d’inclusion de l’échantillon sont les femmes âgées de 25 à 65 ans (au 31 décembre 2014), assurées sociales en Maine-et-Loire, ayant un frottis cervico-utérin de dépistage réalisé par un médecin généraliste entre le 1er janvier et le 31 décembre 2014, avec un résultat de frottis classé ASC-US.
Les données colligées par CAP Santé 49 grâce au logiciel ZEUS ont été extraites de la base par un informaticien extérieur à la structure de gestion des cancers.
Une 1ère étape, de décembre 2015 à mars 2016, a permis de collecter de manière anonyme sur un fichier EXCEL les caractéristiques des femmes en ne gardant que les 3 premières lettres du nom et du prénom ainsi que leur date de naissance. Ont été recueillies pour chacune les informations sur le frottis de dépistage (la date, le nom du médecin, la technique utilisée, le nom du cytologiste), puis les informations sur les C1 (la date, le professionnel l’ayant réalisé, l’option choisie et le résultat).
La seconde étape, de mars à mi-juin 2016, a consisté à récupérer les données manquantes du suivi auprès du CPO, grâce à sa base de données contenue dans le logiciel DIAMIC. Pour les C1 non renseignés dans les 2 bases, les médecins généralistes ont été contactés par téléphone à 2 reprises afin de compléter le recueil du 15 au 30 juin 2016. Les frottis sans réponse des médecins ont été comptabilisés comme frottis sans C1.
La dernière étape, de janvier à mi-février 2017, a permis de recueillir et d’analyser les comptes-rendus du C1 transmis aux médecins généralistes. Les frottis anormaux impliquant une prise en charge spécifique indiquée, nous avons étudié uniquement ceux ayant des résultats normaux pour apprécier leur adaptation au suivi. Les comptes-rendus ont été considérés comme « corrects » si l’antériorité du frottis ASC-US était renseignée, et comme « adaptés » si la précision du délai de contrôle était en adéquation avec les recommandations de suivi.
L’analyse statistique a été effectuée sur les variables qualitatives grâce au logiciel BiostaTGV.
L’étude a reçu un avis favorable de la commission d’éthique du CHU d’Angers et a bénéficié d’une déclaration à la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL).
RÉSULTATS
Population
En 2014, la population source concernait 239 785 femmes.
Frottis de dépistage
44 106 frottis ont été réalisés dont 1 141 étaient des ASC-US soit 2,59%.
Parmi les frottis ASC-US, 397 avaient été effectués par les médecins généralistes (34,79%).Ceux-ci ont utilisé la phase liquide pour 71 patientes (17,88%).
Premier contrôle
Taux de suivi
Parmi les 397 femmes, 373 ont eu un suivi soit 94%. 367 ont eu un 1er contrôle et 6 un traitement d’emblée (3 conisations et 3 hystérectomies totales). 10 patientes n’ont pas eu de contrôle : 8 n’ont pas été réalisés et 2 femmes ont refusé. 14 dossiers ne sont pas renseignés : 10 perdues de vue, 2 changements de médecin et 2 non joignables.
Option choisie
Sur 367 C1, on compte 212 frottis (57,76%), 89 tests HPV (24,25%), 40 colposcopies (10,9%). Pour 26 patientes (7,08%) les techniques ont été couplées : 17 frottis et tests HPV, 6 colposcopies et frottis, 3 colposcopies et tests HPV. [Figure 1] 52 tests HPV (73,24%) étaient retrouvés chez les 71 femmes ayant eu des frottis de dépistage en phase liquide.
Le test HPV a été réalisé chez 41,2% des 51 femmes de moins de 30 ans et 19,6% des 346 femmes de plus de 30 ans p<0,05.
Délais de réalisation
Les délais moyens de réalisation des C1 en fonction des techniques étaient de 8 mois pour les frottis (médiane : 6,7 mois, écart-type : 4,94), de 1,1 mois pour les tests HPV (médiane : 0,6 mois, écart-type : 1,52) et de 3,3 mois pour les colposcopies (médiane : 2,3 mois, écart-type : 3,25).
Professionnels concernés
Parmi les C1, 235 soit 64,03% ont été réalisés par les médecins généralistes, 130 soit 35,42% par les gynécologues et 2 par les sages-femmes soit 0,54%. 24,25% 57,76% 10,9% 7,08%
Type de C1 Frottis Tests HPV Colposcopies Techniques couplées Concernant les médecins généralistes, l’option choisie s’est répartie ainsi : 166 frottis (70,64%), 62 tests HPV (26,38%) et 7 techniques couplées associant frottis et HPV (2,98%).
Pour les gynécologues : 44 frottis (33,85%), 40 colposcopies (30,77%), 27 tests HPV (20,77%), 19 techniques couplées (14,61%) (10 frottis et tests HPV, 6 colposcopies et frottis, 3 colposcopies et tests HPV).
Résultats
Pour les 212 frottis : 134 étaient normaux, 39 à refaire (24 inflammatoires, 6 vaginoses bactériennes, 7 non satisfaisants, 2 candidoses), 39 anormaux (21 ASC-US, 9 LSIL, 5 HSIL, 3 ASC-H, 1 AGC).
Pour les 89 tests HPV : 59 étaient normaux, 30 retrouvaient des HPV à hauts risques. Pour les 40 colposcopies : 31 étaient normales, 4 CIN 1, 2 CIN 2, 3 CIN 3.
Analyse des comptes-rendus d’anatomopathologie des frottis C1 normaux reçus par les médecins généralistes comptes-rendus ont été analysés.
89 soit 70,63% renseignaient l’antécédent d’ASC-US, ils ont été considérés comme corrects.
Parmi ceux-là, 14 soit 15,7% indiquaient un délai conforme et ont été considérés comme adaptés : 8 concluaient de renouveler le frottis à 1 an et 6 selon protocole approprié.
Les 75 autres précisaient un délai non adapté : 69 entre 1 et 3 ans, 2 à 6 mois et 4 sans précision.
la méthodologie que l’étude de 2011 a été appliquée concernant les C1, ce qui permet la comparaison des résultats. Le taux de frottis ASC-US est superposable à la norme nationale ce qui prouve la représentabilité de l’échantillon, 2,59% pour notre étude contre 2,3% selon le rapport du dépistage organisé du cancer du col de l’utérus entre 2010 et 2014 publié par Santé Publique (5) p=0,98.
Limites
Il s’agit d’une étude rétrospective transversale donc avec un faible niveau de preuve selon l’HAS.
Il n’existe pas de recommandation concernant le contenu des comptes-rendus d’anatomopathologie des frottis, l’interprétation des résultats a donc été créée pour l’étude.
Discussion des résultats
Frottis de dépistage
Parmi les frottis ASCUS, 1/3 a été effectué par les médecins généralistes, ce qui est stable par rapport à 2011.
Le taux de frottis de dépistage réalisé avec la technique liquide est passé de 13,21 à 17,88% en 3 ans. Cependant la différence n’est pas significative p=0,1079. Le frottis sur lames reste majoritaire. Les freins à la phase liquide pourraient être son développement récent et son surcoût. Cette technique n’est développée par le CPO que depuis 2012 ; antérieurement elle était déjà utilisée par d’autres cabinets d’anatomopathologie et surtout réalisée par les gynécologues. Elle n’a été proposée aux médecins généralistes qu’en juillet 2013. Il n’y a pas de recommandation privilégiant une technique par rapport à une autre et aucune différence de résultat n’a été mise en évidence (7). La phase liquide a un surcoût de 7,25 euros en Maineet-Loire et n’est remboursée que sur la base du frottis conventionnel (8). Cependant il a l’avantage de permettre de réaliser un test HPV réflexe. D’ailleurs dans notre étude, quand la technique de dépistage était la phase liquide, 73,24% des C1 étaient des tests HPV ; ceux-ci étant possiblement réalisés sur le même prélèvement.
C1
L’option préférentielle du premier contrôle reste le frottis (57,76%), cependant il y a une hausse significative du nombre de tests HPV depuis 2011 passant de 12,05 à 24,25% p=0,0002. Cette différence est majeure et significative chez les médecins généralistes qui réalisaient 93% de frottis et 5,3% de tests HPV en 2011 contre respectivement 70,64% de frottis p<0,05 et 26,38% de tests HPV p<0,05 en 2014. Par contre il n’y a pas d’évolution chez les gynécologues concernant ces 2 options.
Test HPV
Sa supériorité par rapport à la répétition de la cytologie a été prouvée. Une méta-analyse concluait à sa sensibilité significativement plus élevée pour classer les ASC-US dans la détection des CIN2+ (sensibilité relative de 1,27 (IC à 95% 1,16 à 1,39 ; p <0,0001)). Il n’y avait pas de différence significative pour la spécificité (spécificité relative : 0,99 (IC à 95% 0,97 à 1,03 ; p = 0,98)) (9).
L’Institut National du Cancer (INCa) a mis en application ces résultats en publiant de nouvelles recommandations en décembre 2016. Le test HPV devient la seule option de contrôle après un frottis ASC-US. Cette étape est simplifiée par la disparition du frottis et de la colposcopie.
Il peut se faire soit par un test HPV réflexe si le frottis initial a été réalisé en milieu liquide, soit à l’aide d’un second prélèvement en milieu dédié si le frottis initial était sur lames. Pour éviter une 2ème consultation, le médecin peut aussi prescrire sa réalisation en laboratoire de biologie médicale. Si le test est positif, le contrôle est fait par colposcopie, s’il est négatif, le suivi reprend avec un frottis à 3 ans (10).
Dans notre étude, le test HPV est plus utilisé chez les femmes de moins de 30 ans. La prévalence de l’infection à HPV à haut risque oncogène est très dépendante de l’âge : 36% avant 30 ans, 2,8% à 45 ans (11). Dans la plupart des cas, les infections sont transitoires. Le taux de persistance à 24 mois est de 10% chez les femmes de moins de 30 ans et de 19% pour les autres (12). Une seconde infection avec le même type viral semble rare et les femmes immunodéprimées éliminent moins rapidement le virus. Ceci suggère la mise en place d’une immunisation (13).
Différentes études ont présenté les performances du test HPV selon l’âge. Elles montrent une augmentation de la spécificité avec l’âge. Les valeurs prédictives positives (VPP) et négatives (VPN) sont stables. La sensibilité est variable en fonction des études.
L’INCa recommande le test HPV à tout âge mais propose en option un double immunomarquage p16INK4A/Ki67 réflexe pour les moins de 30 ans si le frottis initial a été réalisé en milieu liquide [Figure 2]. Ce double marquage dans une même cellule identifie une dérégulation du cycle cellulaire secondaire à un HPV de haut risque. Deux études ont montré que sa spécificité était supérieure au test HPV ( 78,7 % contre 60,4 % ; p < 0,001). Par contre il n’y avait pas de différence statistique de sensibilité (10) (14)
En France le test HPV devient donc le test de référence de contrôle des ASC-US mais sa place est très variable en fonction des pays. Il est utilisé en dépistage primaire aux Pays-Bas à partir de 30 ans, aux Etats-Unis à partir de 25 ans depuis 2014 et il est effectué au Royaume-Uni après un frottis retrouvant des lésions douteuses ou de bas grade. Le virus peut aussi être recherché au niveau du vagin et dans les urines par auto-prélèvement.Ces techniques sont en cours d’évaluation (15).
Autres techniques
Le nombre de colposcopies n’a pas évolué, 7,2% en 2011 et 10,72% en 2014 p=0,11. Il y a un taux non négligeable de techniques couplées (6,97%), plus fréquent chez les gynécologues (14,61%) que chez les médecins généralistes (2,98%), ce qui n’est pas recommandé.
Taux de réalisation du suivi et professionnel concerné
Le taux de suivi reste élevé à 94%, ce qui prouve que les médecins réagissent après un frottis ASC-US et cela dans des délais corrects majoritairement inférieurs à 8 mois. Dans 64,03% des cas, le suivi est effectué par les médecins généralistes. Pour les autres, le recours aux gynécologues peut s’expliquer par une dénomination ASC-US perturbante puisque sa correspondance histologique va du col normal au cancer et par la complexité du suivi avec 3 options (16). Ceci devrait s’améliorer avec les nouvelles recommandations.
A noter que 2 C1 ont été réalisés par les sages-femmes ce qui est hors recommandation.
Depuis 2009, l’exercice de la profession de sage-femme comporte la réalisation de consultations de contraception et de suivi gynécologique de prévention notamment la réalisation de frottis, sous réserve que la femme soit adressée à un médecin en cas de situation pathologique (17).
|
Table des matières
INTRODUCTION
MÉTHODE
RÉSULTATS
1. Population
2. Frottis de dépistage
3. Premier contrôle
3.1. Taux de suivi
3.2. Option choisie
3.3. Délais de réalisation
3.4. Professionnels concernés
3.5. Résultats
4. Analyse des comptes-rendus d’anatomopathologie des frottis C1
normaux reçus par les médecins généralistes
DISCUSSION
5. Forces et limites de l’étude.
5.1. Forces
5.2. Limites
6. Discussion des résultats
6.1. Frottis de dépistage
6.2. C1
Test HPV
Autres techniques
6.3. Taux de réalisation du suivi et professionnel concerné
6.4. Analyse des comptes-rendus des frottis C1 normaux reçus par les médecins
généralistes
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
LISTE DES FIGURES
TABLE DES MATIERES
Télécharger le rapport complet