INTRODUCTION
Le tabagisme constitue l’une des principales causes de décès évitables dans le monde. L’Organisation Mondiale de la Santé lui attribue plus de 5 millions de décès par an, chiffre qui pourrait atteindre 8,4 millions d’ici 2020 dont 70% se produiront dans les pays en développement [1]. Bien que l’on dise souvent que les enfants fument leur première cigarette à l’école primaire, le tabagisme débute plus souvent à l’adolescence [2,3].En Afrique, au moins 845000 personnes meurent du fait de tabagisme chaque an [4]. Des investigations récentes indiquent que la prévalence de fumeurs parmi les adolescents est en constante augmentation et l’âge d’initiation de plus en plus précoce. Si cette tendance continue, le tabagisme sera responsable de la mort de 250 millions d’enfants et d’adolescents dont la majorité se trouve dans les pays en développement [5].A Madagascar, les données de l’enquête Global Youth Tobacco Survey menée en 2008 a montré que l’usage du tabac à fumer chez les jeunes de 13 à 15 ans est de 19,3% [6]. L’objectif principal de notre étude est de déterminer la prévalence actuelle du tabagisme chez les adolescents, puis secondairement d’identifier les différents facteurs associés au tabagisme et d’améliorer les programmes de lutte anti-tabac chez les jeunes en milieu scolaire.
Composition du tabac
Parmi les nombreuses substances que la fumée de tabac contient, seulement quatre groupes de constituants seront pris en considération du fait de leur toxicité. Il s’agit de :
La nicotine
C’est un alcaloïde responsable de la dépendance tabagique. La nicotine absorbée dans les alvéoles passe dans le sang et se fixe sur les récepteurs nicotiniques présents dans les jonctions neuromusculaires, ganglions parasympathiques, la médullosurrénale et surtout certaines zones du cerveau, principalement les voies dopaminergiques. La stimulation de ces neurones induit la libération de la dopamine et celle des autres neuromédiateurs expliquant les effets psychoactifs de la nicotine [7].La décharge d’adrénaline entraîne l’accélération du rythme cardiaque, la dépression du système nerveux central et du système respiratoire. Elle est à l’origine de la constriction de petites artères du corps pouvant être à l’origine d’une hypertension artérielle.
Le monoxyde de carbone
Ce gaz issu de la combustion du tabac, une fois dans l’organisme se fixe sur l’hémoglobine. Il diminue à la longue la capacité d’oxygénation du sang. En outre le monoxyde de carbone augmente la teneur en graisse du corps humain et ainsi le risque d’athérosclérose [8].
Les irritants
La présence d’irritants dans la fumée de tabac est à l’origine de nombreux phénomènes allergiques de la muqueuse respiratoire. Il s’agit d’aldéhydes, d’acroléine, d’éthanol etc… Ils sont responsables de l’hypertrophie de la muqueuse, l’atrophie ciliaire et l’inflammation des bronches. Le retentissement bronchique du tabac augmente avec l’inhalation de la fumée la quantité consommée et l’ancienneté du tabagisme.
Les substances cancérigènes
L’action cancérigène du tabac est liée à la présence dans le condensât de la fumée des facteurs chimiques de cancérisation (les hydrocarbures inhérents à la combustion, le 3-4 benzopyrene, les anthracènes etc…) et des facteurs physiques (éléments radioactifs comme le polonium). Ces substances seraient métabolisées par l’organisme en cancérigènes avant de provoquer des lésions du génome [9].Des arguments solides indiquent que l’exposition à la fumée ambiante du tabac est nocive pour la santé des non-fumeurs. L’Agence Américaine pour la protection de l’environnement a classé l’exposition à a fumée ambiante du tabac comme un cancérigène de classe A pouvant être à l’origine de cancer du poumon
Tabagisme et toxicomanie
La toxicomanie est une appétence morbide pour les drogues douées d’effets toxiques, euphorisants ou analgésiques dont l’usage prolongé entraîne toujours un état d’accoutumance préjudiciable à l’individu autant qu’à la société. On a proposé une classification des drogues des toxicomanies majeures (opium, morphine, cocaïne, alcool…) et des drogues des toxicomanies mineures dont font partie les tabacs mais aussi les barbituriques, les amphétamines, le café et le thé.Les associations de divers toxiques sont fréquentes : l’alcool vient souvent aggraver l’état des grands toxicomanes
Aspects psychiques
Les raisons profondes de la toxicomanie sont à rechercher dans une perturbation instinctivo-affective ancienne. La nature de ce déséquilibre intime de la personnalité se révèle variable.On a décrit des toxicomanes déprimés, chroniques, anxieux, schizoïdes, obsédés… En fait le phénomène est complexe et tous les cas de toxicomanie ne peuvent recevoir d’explication.
Parmi les facteurs déclenchant, citons les maladies ou accidents aux conséquences douloureuses, dévalorisantes ou invalidantes, tous les échecs familiaux, conjugaux et professionnels, les deuils etc… L’OMS estime qu’à moins d’un changement de comportement en ce qui concerne l’usage du tabac, d’ici trois décennies les décès prématurés provoqués par le tabac dans le monde en développement dépasseront le chiffre escompté de décès dus au SIDA, à la tuberculose et aux complications de l’accouchement combinés [13]. Le tribut prélevé par le tabac s’élèvera à 10 millions de décès par an d’ici les années 2020 ou 2030 et 70% de ces décès prématurés surviendront dans les PED.
Quelques pathologies induites par le tabagisme
Les maladies cardio-vasculaires
Bien que certaines études n’aient pas retrouvé de corrélation stricte entre le fait de fumer et l’importance de l’athérosclérose coronaire, il existe une relation entre le tabagisme et la maladie coronaire [14].La maladie coronaire est une cause importante de décès dans les pays développés.Une étude prospective parisienne [15] a montré que le risque relatif de maladie coronaire chez les fumeurs de plus de 20 cigarettes par jour est multiplié par 3 par rapport aux non-fumeurs ; quant au risque relatif d’infarctus du myocarde ou de mort subite, il peut atteindre 5,2. Le tabagisme n’est pas en soi un facteur d’HTA, mais il augmente le risque de complications y compris le développement de néphro-angiosclérose et la progression vers une HTA maligne [16]. La cigarette est aussi associée à un risque accru d’anévrisme de l’aorte. Le taux de mortalité par anévrisme de l’aorte abdominal chez les fumeurs est de 2 à 8 fois supérieures aux taux constaté chez les non-fumeurs.
L’activité sur le système nerveux central
L’analogie de la structure de la nicotine avec l’acétylcholine rend compte de ses effets cholinergiques. Elle a des effets excitateurs et inhibiteurs. Elle est en outre responsable de la dépendance tabagique.
L’action sur l’appareil respiratoire
Le tabagisme favorise la survenue de broncho-pneumopathies chroniques obstructives. Les composants irritants de la fumée de tabac sont à l’origine d’une hypersécrétion de mucus et de la lésion des cellules épithéliales des voies respiratoires. En effet, les aldéhydes de l’acide cyanhydrique entraînent une altération du mouvement des cils bronchiques, facteur de stase du mucus bronchique et d’obstruction [17]. La paralysie des cils des voies respiratoires et les altérations tissulaires qui en résultent sont à l’origine, chez les fumeurs de laryngites chroniques rebelles et de trachéites chroniques.
L’action sur l’appareil digestif
L’habitude du fumeur se manifeste au niveau de la bouche par une mauvaise haleine, la perte du goût et une denture inesthétique. Le risque de cancer des lèvres, de la langue et du larynx est élevé aussi bien pour les fumeurs de cigarettes que pour les fumeurs de cigares ou de pipes [15]. L’action du tabagisme est aussi retenue dans les ulcères de l’estomac.
Le cancer du foie
Les documents publiés sur le tabagisme et le cancer du foie montrent une association positive avec une relation dose effet dans la plupart des études.
Le cancer de l’estomac
Des études bien conçues indiquent que le tabagisme actif constitue un facteur de risque pour le développement d’un cancer de l’estomac. Les deux études rapportent que les fumeurs ont environ 1,8 fois plus de risque de développer un cancer de l’estomac que les non-fumeurs.
Le cancer du poumon
Le cancer du poumon est la première maladie associée au tabagisme. Le risque relatif moyen est de 3.0, ce qui signifie qu’un fumeur a trois fois plus de risque de développer un cancer du poumon qu’un non-fumeur du même âge. Le cancer du poumon continue d’être le meneur dans le décès par cancer en Amérique du Nord.Le cancer du poumon est le plus fréquent à travers le monde entier, comptant pour environ 12% des nouveaux cancers diagnostiqués chez les femmes et les hommes.Les facteurs affectant le risque de cancer du poumon lié au tabagisme sont : la nature des produits du tabac (le risque par rapport au non-fumeur est d’environ 10 pour les cigarettes et 2 pour les cigares et les pipes) et la durée du tabagisme [18]. Le risque de cancer du poumon lié au tabagisme est modifié par d’autres produits susceptibles d’avoir des effets cancérigènes ; c’est le cas de l’exposition à l’amiante
Relation entre âge et tabagisme
L’adolescence est une période de transformation physique, psychologique et socioculturelle mais également de curiosité, d’expérimentation et d’acquisition. Il est unanimement reconnu que les bonnes habitudes acquises durant l’adolescence ont une chance de durer toute la vie. D’un autre côté, les comportements à risque, acquis à l’adolescence, sont souvent difficiles à modifier à l’âge adulte. La consommation de tabac figure parmi ces habitudes à risque. Ainsi, les adolescents qui commencent à fumer à un âge précoce sont plus enclins à devenir des fumeurs réguliers et dépendants et, auront moins de facilité à arrêter .Quatre-vingt pourcent des fumeurs commencent à fumer avant l‘âge de 18 ans .Le pourcentage de fumeurs augmente significativement avec l’âge et nous avons pu constater cette influence de l’âge sur le tabagisme dans notre étude (p=0,005188).La majorité des fumeurs soit 55% était âgés de 14 à 15 ans avec un âge moyen de 14,45 ans dans notre échantillon.
Une étude réalisée au Portugal a retrouvé un âge moyen de 13,4 ans. Cette situation pourrait s’expliquer par le fait que c’est généralement à ces âges que le jeune veut s’affirmer, se faire passer pour un « adulte », s’identifier à ses modèles. Le jeune est convaincu que la cigarette est une preuve de parfaite intégration dans le monde moderne, de l’élégance, de la détente du passage de l’âge de l’adolescence à l’âge adulte, de la virilité. Elle lui donne de l’assurance, un sentiment de valorisation.
Aussi, il est fortement recommandé de :
– Initier l’éducation pour la santé axée sur ce thème dès les classes primaires, notamment dès les classes de 8e et de 7e (classes d’âge des 10-11 ans).
– Renforcer ces programmes de lutte chez les plus âgés (école secondaire et lycée).
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Table des matières
INTRODUCTION
Première partie : RAPPELS
1. Définition des concepts
1.1 Le tabac
1.2 Le tabagisme
1.3 Le tabagisme passif
1.4 Le sevrage tabagique
2. Rappels sur le tabac
3. Composition du tabac
3.1 La nicotine
3.2 Le monoxyde de carbone
3.3 Les irritants
3.4 Les substances cancérigènes
4. Tabagisme et toxicomanie
5. Aspects cliniques
6. Aspects psychiques
7. Quelques pathologies induites par le tabac
7.1 Les maladies cardio-vasculaires
7.2 L’activité sur le système nerveux central
7.3 L’action sur l’appareil respiratoire
7.4 L’action sur l’appareil digestif
7.5 Le cancer du poumon
8. Tabac et médicaments
9. Sevrage tabagique
9.1 L’aide à la motivation et à la décision
9.2 Une évaluation de la dépendance
10. Traitement du tabagisme
10.1 Règles générales
10.2 Pharmacothérapie
11. Lutte contre le tabagisme
Deuxième partie : METHODES ET RESULTATS
1. METHODES
1.1 Période d’étude
1.2 Cadre de l’étude
1.3 Population d’étude
1.4 Paramètres analysés
1.5 Technique et outil de collecte
1.6 Déroulement
1.7 Analyse statistique
1.8 Considérations éthiques
1.9 Limites de l’étude
2. RESULTATS
2.1 Résultats descriptifs
2.1.1 Caractéristiques sociodémographiques des élèves
2.1.2 Caractéristiques socio-économiques des élèves
2.1.3 Tabagisme dans l’entourage des élèves
2.1.4 Tabagisme chez les élèves
2.1.5 Niveau de connaissance des élèves sur les risques liés au tabac
2.1.6 Motivations ayant poussé les élèves à fumer
2.1.7 Comportement des élèves vis-à-vis des autres habitudes toxiques
2.2 Résultats analytiques
2.2.1 Age
2.2.2 Genre
2.2.3 Relation entre tabagisme du père et celui de l’élève
2.2.4 Relation entre tabagisme de la mère et celui de l’élève
2.2.5 Relation entre tabagisme des amis et celui de l’élève
2.2.6 Relation entre connaissance des dangers du tabac et le tabagisme des élèves
2.2.7 Relation entre le niveau d’étude et le tabagisme chez les élèves
2.2.8 Relation entre structure familiale et tabagisme des élèves
2.2.9 Relation entre niveau socio-économique et tabagisme des élèves
2.2.10 Relation entre lieu d’habitation et tabagisme des élèves
2.2.11 Relation entre tabagisme et autres habitudes toxiques
Troisième partie : DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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