Systèmes nucléaires du futur

Systèmes nucléaires du futur

Les réacteurs nucléaires de quatrième génération sont actuellement à l’état de concepts faisant l’objet de recherches coordonnées au niveau international ; la mise en service d’un réacteur commercial fondé sur l’un de ces concepts n’est pas envisagée avant 2040. Lancé en 2000 par le ministère américain de l’énergie, le Forum International Génération IV (Generation IV International Forum – GIF), qui regroupe aujourd’hui 13 pays parmi lesquels la France, a permis dans le cadre d’une coopération internationale le développement de ces systèmes nucléaires de nouvelle génération, avec les objectifs suivants : améliorer la sûreté nucléaire, améliorer la résistance à la prolifération, minimiser les déchets, optimiser l’utilisation des ressources naturelles, et diminuer les coûts de construction et d’exploitation des réacteurs. Six systèmes nucléaires ont été sélectionnés :

• les réacteurs à neutrons rapides refroidis au sodium (« sodium fast reactors » – SFR),
• les réacteurs à neutrons rapides refroidis au gaz (« gas fast reactors » – GFR),
• les réacteurs à neutrons rapides refroidis au plomb (« lead fast reactors » – LFR),
• les réacteurs à sels fondus (« molten salt reactors » – MSR),
• les réacteurs à (très) hautes températures (« very high or high temperature reactors » – V/HTR),
• les réacteurs à eau supercritique (« supercritical water reactors » – SCWR).

La France s’implique préférentiellement dans les trois systèmes SFR, GFR et VHTR. D’une façon générale, les partenaires majeurs (USA, Japon, Russie, Chine) du Forum Génération IV s’investissent en priorité dans les systèmes SFR et VHTR. Parmi les différentes options envisagées, la filière des Réacteurs à Neutrons Rapides refroidis au Sodium liquide (RNR-Na) est celle qui bénéficie du retour d’expérience le plus important grâce aux nombreux réacteurs expérimentaux, comme Phénix (France), EBR II (USA), Joyo (Japan) et BOR60 (Russie) [Dubuisson, P., et al. – 2012]. Compte tenu de cette expérience, la filière RNR-Na apparaît dans un état de maturité permettant d’envisager à moyen terme (2020 2030) la réalisation d’un nouveau prototype industriel. Plusieurs projets sont en cours, avec un degré d’avancement variable :
• le projet japonais JSFR (« Japan Sodium cooled Fast Reactor »), d’une puissance de 1500 MWe ; l’avant-projet sommaire est prévu en 2015,
• la construction en Russie du réacteur BN 800 (800 MWe), arrêtée après l’accident de Tchernobyl en 1986, qui a été reprise ; la Russie envisage ensuite une version commerciale de 1200 MWe (BN 1200),
• l’achèvement du réacteur prototype indien PFBR (un réacteur semblable au réacteur français SuperPhénix fermé en 1998) de 500 MWe en 2013,
• le projet chinois de réacteur CDFR (« Chinese Demonstration Fast Reactor ») d’une puissance unitaire comprise entre 600 et 900 MWe, préfigurant l’étape commerciale du CCFR (« Chinese Commercial Fast Reactor ») de 1000-1500 MWe,
• le projet sud-coréen KALIMER (« Korean Advanced LIquid MEtal Reactor ») d’une puissance unitaire de 1200 MWe,
• le projet français ASTRID, d’une puissance de 600 MWe ; l’une des spécifications pour ce réacteur est que les solutions techniques qui seront retenues devront pouvoir autant que possible être extrapolées à un réacteur de puissance plus importante.

L’ensemble de ces réacteurs utilise des oxydes d’uranium appauvri et du plutonium, connus sous le nom de MOX, comme combustible.

Matériaux de gainage dans un RNR-Na

La gaine est la première barrière de confinement du combustible. Elle doit rester étanche depuis la fabrication de l’aiguille jusqu’au début du retraitement du combustible, dans toutes les situations de fonctionnement nominales et incidentelles. Vue les conditions de service envisagées, les tubes de gainage dans un RNR-Na doivent répondre aux exigences suivantes :

➤ Supporter une très forte dose d’irradiation
Dans le cœur du réacteur RNR-Na, la dose maximale vue par la gaine sera comprise entre 150 et 180 dpa (déplacement par atome). Ces fortes doses sont supérieures à celles admissibles par les matériaux de gainage commercialisés jusqu’à présent. Même les plus avancés d’entre eux, les aciers austénitiques de type 15/15 Ti utilisés dans le réacteur Phénix, ne sont utilisables que jusqu’à des doses légèrement supérieures à 100 dpa. Au-delà, leur gonflement sous irradiation dépasse le seuil admis de 3% . Il existe une autre grande classe d’aciers dont le comportement sous irradiation est bien connu : les ferritomartensitiques de type Fe-9/18Cr (alliages composés majoritairement de fer, avec entre 9 et 18 % de chrome (Cr) et quelques pourcents d’éléments d’addition). Grâce à leur structure cubique centrée, ils offrent de nombreux atouts pour le gainage des éléments combustibles.

➤ Avoir de bonnes propriétés mécaniques à haute température
La température de service envisagée est proche de 650°C. Les conditions accidentelles ne sont pas encore définies mais devraient conduire à une température maximale de gaine de l’ordre de 930°C. Outre ces températures de service élevées, les tubes de gainages sont soumis à des contraintes internes, exercées par les gaz de fission, qui peuvent atteindre en fin de vie 100 MPa. Le matériau doit donc présenter de bonnes propriétés en fluage thermique à 650°C afin d’éviter des déformations excessives perturbant l’écoulement du fluide caloporteur. Une des propriétés limitant actuellement l’utilisation des aciers ferritomartensitiques est leur résistance au fluage. Cependant, lorsqu’ils sont renforcés par une dispersion d’oxydes nanométriques très stables, leur résistance mécanique se trouve considérablement améliorée, même à très haute température (1000 – 1100 °C). Ce type de matériaux est couramment appelé ODS (Oxide Dispersion Strengthened).

➤ Interaction avec l’environnement
En plus des sollicitations mécaniques appliquées à la gaine, différents phénomènes liés à l’environnement sont à considérer. Cela concerne essentiellement la corrosion du gainage en service sous environnement sodium, et durant l’étape de retraitement du combustible qui consiste à séparer le combustible de la gaine. Cette étape de séparation se fait par la dissolution du combustible dans un bain d’acide nitrique concentré. Il est donc nécessaire que la gaine résiste bien à la corrosion afin de permettre un recyclage efficace du combustible.

En l’état actuel, aucun matériau commercialisé ne répond à l’ensemble de ces spécifications. Les alliages ODS, en voie de développement depuis 20 ans, sont des candidats prometteurs comme matériaux de gainage. Ils sont potentiellement plus performants que les aciers austénitiques de dernière génération qui avaient été conçus pour les réacteurs Phénix et SuperPhénix.

Élaboration des aciers ODS

Les aciers ODS sont caractérisés par une dispersion homogène des précipités d’oxydes de taille nanométrique renforçant la matrice métallique. La technique classique d’élaboration des métaux par fonderie ne permet pas d’obtenir un matériau contenant de fins oxydes distribués d’une manière homogène. Lorsque les oxydes sont introduits pendant la fusion, soit ils réagissent avec le creuset du four et ne sont plus présents après la coulée, soit ils coalescent dans le bain liquide et forment des oxydes de taille très grande pour provoquer un effet de renfort. De plus, leur distribution au sein de la matrice est trop hétérogène. Il est donc nécessaire de passer par une synthèse par voie mécanique issue de la métallurgie des poudres, appelée couramment mécanosynthèse, qui permet d’obtenir une précipitation présentant les caractéristiques voulues. L’élaboration des gaines en aciers ODS fait appel à la métallurgie des poudres, et se fait selon trois étapes principales : le cobroyage, la consolidation et une étape de mise en forme à froid.

Cobroyage

La première étape consiste à réaliser un co-broyage d’une poudre métallique avec une poudre d’oxyde d’yttrium. La poudre métallique est constituée soit d’une poudre pré-alliée (FeCrWTi) avec la composition chimique du matériau visé, excepté l’oxyde d’yttrium, soit de plusieurs poudres métalliques avec des compositions chimiques différentes qui vont, lors du broyage, former une poudre avec une répartition homogène de tous les éléments.

Lors de la thèse de M. Brocq, une nouvelle voie de synthèse inspirée du broyage réactif a été développée sur un broyeur instrumenté de faible capacité. L’yttrium et le titane sont alors introduits sous la forme d’intermétalliques YFe3 et Fe2Ti, tandis que l’apport d’oxygène se fait par ajout de Fe2O3. Ainsi, le taux d’oxygène est plus facilement contrôlé, et n’est plus corrélé à l’ajout d’yttrium. Cette étude a mis en évidence, pour la première fois, le début de la précipitation pendant l’étape de broyage. Des particules très fines (1 nm de rayon) riches en Y, Ti et O sont observées en Sonde Atomique Tomographique (SAT) dans la poudre broyée [Brocq, M., et al. – 2011]. Dans le cadre de sa thèse, [Loyer-Prost, M. – 2014] a exploité ce nouveau procédé pour élaborer des aciers ODS et faire le lien entre les conditions de broyage, la composition des poudres et la microstructure des aciers élaborés.

Consolidation

La consolidation a pour but de transformer une poudre en un matériau dense en exerçant une importante contrainte mécanique à haute température. Elle est réalisée soit par filage à chaud, soit par Compaction Isostatique à Chaud (CIC). D’autres procédés plus récents, comme le Spark Plasma Sintering (SPS), sont également étudiés.

Pendant la consolidation des ODS, les oxydes Y2O3 dissous durant le co-broyage précipitent sous forme d’oxydes complexes Y-Ti-O d’une façon fine et homogène dans la matrice. [Ratti, M. – 2009] a étudié la précipitation sous recuit à différentes températures dans un acier ODS Fe-18Cr-0,8Ti +0,3Y2O3 (% en masse). Il montre que la température définit la taille des nano-renforts ; elle est d’autant plus grande que la température est élevée . Ces nano-renforts présentent une stabilité thermique remarquable grâce à leur forte cohérence avec la matrice. Cette cohérence existe entre les symétries cubique centrée et cubique à faces centrées, et n’est pas perdue pendant la croissance des particules sous recuit [Ribis, J., et al. – 2013]. La coalescence est alors très lente et la taille reste nanométrique, ce qui confère une grande stabilité à ces matériaux qui ne recristallisent qu’à des températures très élevées (1400°C) après filage à chaud [Zhong, S. Y. – 2012]. Ces nano-précipités sont aussi stables sous irradiation aux ions jusqu’à 45 dpa à 500°C [Lescoat, M. L., et al. – 2012].

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Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
PARTIE I. Chapitre 1. DÉVELOPPEMENT DES ACIERS ODS ET PHÉNOMÈNES MÉTALLURGIQUES LIÉS À LA DÉFORMATION À CHAUD
1.1 Systèmes nucléaires du futur
1.2 Matériaux de gainage dans un RNR-Na
1.3 Élaboration des aciers ODS
1.4 Propriétés mécaniques des nuances ferritiques
1.5 Rôles des joints de grains dans les aciers ODS
1.6 Endommagement à haute température des aciers ODS
1.7 Effet d’une seconde phase
1.8 Texture des structures BCC
1.9 Simulation du développement des textures pendant la déformation des structures BCC par un modèle viscoplastique auto-cohérent, VPSC
1.10 Évolution de la microstructure lors de la déformation à chaud
1.11 Critères de distinction entre la RDD, RDC, RDG
1.12 Transition RDC/RDD
1.13 Cas des aciers ferritiques
1.14 Évolution de la microstructure après déformation
1.15 Bilan
Chapitre 2. MATÉRIAUX ET MÉTHODES DE CARACTÉRISATION MICROSTRUCTURALE43
2.1 Matériaux de l’étude
2.2 Caractérisation de la microstructure par EBSD
2.3 Diffraction des rayons X
2.4 Moyens de caractérisation complémentaires
2.5 Préparation des échantillons
PARTIE II. ÉTUDE DU PROCÉDÉ DE FILAGE À CHAUD
Chapitre 1. DÉTERMINATION DU CHARGEMENT THERMOMÉCANIQUE LIÉ AU PROCÉDÉ DE FILAGE PAR LA SIMULATION NUMÉRIQUE
1.1 Généralités
1.2 Procédé de filage au CEA
1.3 Simulation numérique du procédé par la méthode des éléments finis
1.4 Bilan du chapitre
Chapitre 2. ÉVOLUTION DE LA MICROSTRUCTURE LORS DU FILAGE À CHAUD
2.1 Prélèvement et préparation des échantillons
2.2 Caractérisation de la nuance ODS de référence
2.3 Caractérisation de la nuance renforcée Ti
2.4 Caractérisation de la nuance non renforcée
2.5 Étude de différents états filés de la nuance ODS de référence
2.6 Bilan du chapitre
PARTIE III. ESSAIS THERMOMÉCANIQUES
Chapitre 1. DISPOSITIFS EXPÉRIMENTAUX
1.1 Torsion à chaud
1.2 Compression à chaud
Chapitre 2. RHÉOLOGIE À HAUTE TEMPÉRATURE
2.1 Courbes contrainte déformation
2.2 Calcul des paramètres rhéologiques
2.3 Bilan du chapitre
Chapitre 3. ANALYSE DE LA MICROSTRUCTURE DE DÉFORMATION
3.1 Microstructure de torsion
3.2 Microstructure de compression
3.3 Synthèse et discussion
3.4 Conclusion
CONCLUSION GÉNÉRALE
PERSPECTIVES
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES

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