Les systèmes hamiltoniens à ports représentent un paradigme comprenant des techniques de modélisation, de simulation et de contrôle (cf. [41]). Le nom système hamiltonien à ports (SHP) exprime deux idées majeures du paradigme :
— Port : L’approche de modélisation est basée sur des ports de connexions conservatives (c’est à dire préservant un bilan de puissance). Elle peut être liée à la méthode des Bond Graphs[16] (Graphe des liaisons en français) qui permet de composer des systèmes complexes multi domaines. Un port peut relier plusieurs composants d’un système, ou le système au milieu extérieur.
— Hamiltonien : le cadre Mathématique employé est une extension de la formulation hamiltonienne géométrique de mécanique. Il utilise la représentation d’état et la fonction hamiltonienne (énergie totale stockée exprimée en fonction de l’état du système) comme concept de base pour la modélisation des systèmes multi physiques.
De plus, le concept des systèmes hamiltoniens à ports permet l’incorporation de composants dissipatifs et l’utilisation de ports d’entrées libres pour la commande des systèmes. Depuis les travaux de B. Maschke et A. Van der Schaft [96, 95], les systèmes Hamiltoniens à ports n’ont cessé d’être étendus aux systèmes issus de différents domaines physiques [41, 124, 127]. Ce formalisme, particulièrement adapté aux graphes [127], a aussi bien été appliqué à des problèmes de mécanique, d’électronique, de robotique, de magnétique [93, 151, 21, 101], mais également de chimie [125] et de thermodynamique. Ce dernier point a été abordé en étendant le concept des SHP aux échanges irréversibles comme présenté par Ramirez [122]. La formulation hamiltonienne à ports a été généralisée au cas des systèmes de dimension infinie (cf. [94, 126, 63, 150, 64]) en intégrant les variables aux frontières, mettant en relation l’évolution de l’énergie interne et les flux de puissance à la frontière. Ils ont montré leur efficacité pour l’analyse des solutions et la synthèse des lois de commande stabilisantes de type commande frontière [63].
L’approche énergétique dans la description de la dynamique a été utilisée pour adapter et développer des méthodes de « synthèse énergétique ». La commande par IDA-PBC (pour Interconnection and Damping Assignement Passivity Based Control) est une approche permettant le modelage de l’énergie d’un système par interconnexion [114, 111, 113]. L’extension de ce concept aux cas des systèmes à temps discret a récemment été étudiée par [8, 7]. Enfin, les systèmes hamiltoniens à ports ont également été utilisés pour construire des observateurs basés sur la passivité [141, 101].
Rappels sur les systèmes dynamiques
Cette section est dédiée à rappeler quelques généralités à propos de systèmes dynamiques et de leur stabilité. Les définitions et propriétés exposées ici peuvent être retrouvées dans l’ouvrage [84].
Représentation d’état et condition d’existence et unicité
Nous nous intéressons aux systèmes dynamiques qui sont modélisés par un nombre fini d’équations différentielles ordinaires du premier ordre couplées.
x˙ 1 = f1(t, x1, …, xn, u1, …, up) (1.1)
x˙ 2 = f2(t, x1, …, xn, u1, …, up) (1.2)
x˙ n = fn(t, x1, …, xn, u1, …, up) (1.4)
où x˙i représente la dérivée temporelle de xi par rapport à la variable de temps t et u1,…, up sont les variables d’entrée du système. Nous utilisons la notation en vecteur définie par x = [x1, …, xn] T , u = [u1, …, up] T et f(t, x, u) = [f1(t, x, u), …, fn(t, x, u)]T afin de réécrire le système d’ordre n sous la forme
x˙ = f(t, x, u) (1.6)
Définition 1 (Représentation d’état) On appelle l’équation 1.6 représentation d’état en définissant x comme l’état du système et u comme l’entrée.
L’équation d’état est souvent associée à une équation supplémentaire :
y = h(t, x, u) (1.7)
Cette équation définit un vecteur de sortie y de dimension q correspondant en général à des variables d’intérêt pour le système (variables mesurables dans la réalité ou présentant un comportement d’intérêt). En général, nous pouvons considérer des systèmes sous une forme n’incluant pas explicitement des entrées :
x˙ = f(t, x). (1.8)
Cela ne signifie pas nécessairement que les entrées du système sont considérées comme nulles, mais qu’elles peuvent être écrites comme une fonction du temps u = γ(t), ou comme un retour d’état u = γ(x), ou les deux u = γ(t, x).
Certaines propriétés, comme l’existence et l’unicité sont fondamentales pour les solutions d’équations différentielles ordinaires. Elles sont essentielles pour qu’un modèle mathématique sous forme d’équation d’état puisse être utilisé. En effet, pour qu’un modèle mathématique puisse prédire les états futurs d’un système, à partir d’un état x0 au temps t0, le problème aux valeurs initial
x˙ = f(t, x), x(t0) = x0 (1.9)
doit avoir une unique solution.
Théorème 1 (Existence et unicité globale ([84], Page 93)) Supposons que f(t, x) est continue par morceau en t et k-lipschitzienne en x pour tout t ∈ [t0, t1]. Alors, l’équation d’état x˙ = f(t, x), avec x(t0) = x0, a une unique solution sur t ∈ [t0, t1].
Nous ne considérons dans la suite que des fonctions supposées comme k-lipschitziennes et continues par morceau en t.
Système autonome, stabilité de Lyapunov, et principe d’invariance de LaSalle
Dans cette partie, nous présentons quelques rappels sur la stabilité au sens de Lyapunov pour des systèmes dynamiques autonomes, de la forme
x˙ = f(x) (1.10)
où f : D → Rn est localement lipschitziennes et où le domaine de définition D est un ouvert de Rn . Contrairement aux systèmes linéaires, il existe plusieurs définitions de stabilité de plus en plus contraintes. Ces notions de stabilité se définissent autour d’un point d’équilibre xeq ∈ D tel que f(xeq) = 0. Sans perte de généralité, nous pouvons nous ramener à l’étude d’un système tel que le point d’équilibre est zéro. En effet, en posant le changement de variable z = x−xeq, nous pouvons ainsi définir un système z˙ = g(z) dont le point d’équilibre est le point à l’origine :
z˙ = x˙ = f(z + xeq) = g(z), où g(0) = 0. (1.11)
Des systèmes physiques aux systèmes hamiltoniens à ports
Physique : composants, lois et bilans
Les systèmes physiques peuvent être décomposés en composants passifs connectés à des sources actives externes, de sorte que le bilan de puissance élémentaire suivant soit respecté : la puissance absorbée par un système P est égale à celle fournie par les sources externes PE. Un système peut absorber une puissance pour deux raisons : la stocker par le biais des composants stockants, et la dissiper par le biais des composants dissipatifs. Chaque composant stockant absorbe une puissance pour la stocker sous forme d’énergie élémentaire Hi ≥ 0 qui pourra être restituée par la suite. Ainsi, la puissance absorbée s’écrit H˙ i et peut aussi bien être négative que positive. D’un autre côté, chaque composant dissipatif absorbe une puissance Di pour la dissiper de manière instantanée.
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Table des matières
Introduction Générale
Contexte
Instruments de type cuivre
Une plateforme d’étude : le banc de test robotisé
L’approche à passivité garantie
Objectifs de la thèse
Organisation du manuscrit
Articles de revue et de conférence
I Systèmes Hamiltoniens à ports pour la modélisation passive d’un instrument auto-oscillant de type cuivre
1 Modélisation passive : formulation hamiltonienne à ports
1.1 Introduction
1.2 Rappels sur les systèmes dynamiques .
1.2.1 Représentation d’état et condition d’existence et unicité
1.2.2 Système autonome, stabilité de Lyapunov, et principe d’invariance de LaSalle
1.2.3 Système entrée/sortie et passivité
1.3 Des systèmes physiques aux systèmes hamiltoniens à ports
1.3.1 Physique : composants, lois et bilans
1.3.2 Graphes de connexion et systèmes hamiltoniens à ports
1.4 Exemples
1.4.1 Circuit électronique linéaire (Système S1)
1.4.2 Système mécanique non linéaire (Système S2)
1.4.3 Transducteur électromécanique : système multi-physique (Système S3)
1.4.4 Réservoir à volume variable en mouvement : Hamiltonien non séparable (Système S4)
1.4.5 Connexions des systèmes (S1-3)
1.5 Formulations hamiltoniennes utilisées dans la thèse
1.5.1 Formulation algébro-différentielle
1.5.2 Réalisation différentielle
1.6 Conflit de causalité : détection et résolution
1.7 Conclusion et perspective
2 Modèle auto-oscillant d’instruments de type cuivre
2.1 Introduction
2.2 Article : « Energy Balanced Model of a Jet Interacting With a Brass Player’s Lip »
Avant-propos
2.2.1 Introduction
2.2.2 Problem statement
2.2.3 Energy-balanced model of a flow (F)
2.2.4 Complete instrument
2.2.5 Simulation
2.2.6 Results, interpretation and discussion
2.2.7 Conclusion
2.3 Raffinements
2.3.1 Lèvre : modélisations classiques et forme proposée
2.3.2 Résonateur : modélisation paramétrique et estimation
2.4 Modèle utilisé dans la thèse
2.5 Conclusion
II Méthodes numériques passives et application à la simulation d’un cuivre
3 Méthode de simulation passive pour les systèmes hamiltoniens à ports
3.1 Introduction
3.2 Méthode du gradient discret
3.2.1 État de l’art
3.2.2 Analyse numérique
3.2.3 Méthode à consistance du second ordre
3.3 Méthode directe d’ordre supérieur
3.3.1 Quadratisation du Hamiltonien
3.3.2 Méthode directe à consistance d’ordre 1
3.3.3 Méthode multi-étape directe de consistance d’ordre supérieur
3.4 Conclusions et perspectives
4 Simulation de l’instrument complet
4.1 Introduction
4.2 Réduction d’ordre exacte et quadratisation
4.2.1 Réduction d’ordre du jet connecté à la lèvre (J+L)
4.2.2 Formulation différentielle et quadratisation de l’excitateur
4.3 Gestion numérique de la fermeture du canal
4.4 Résultats de simulation et étude comparative
4.4.1 Oscillation périodique et discontinuité
4.4.2 Sélection des modes
4.4.3 Influence de la longueur du canal sur la hauteur de note et sur l’intensité
4.4.4 Oscillations apériodiques
4.5 Conclusion
III Développement d’une plateforme expérimentale robotisée et confrontation théorie/expérience
5 Bouche artificielle robotisée pour le jeu des cuivres
5.1 Introduction .
5.2 Présentation du banc de test
5.2.1 Parties mécaniques
5.2.2 Parties informatiques
5.3 Protocole de mesure et cartographies automatisées
5.3.1 Protocole expérimental, calibrage de la machine et répétabilité
5.3.2 Résultats pour une paire de lèvres vibrantes
5.4 Modification du système : modèle à une lèvre vibrante
5.4.1 Modifications de la machine
5.4.2 Résultat
5.5 Conclusion
Conclusion Générale
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