Le Burkina Faso est un pays à vocation agricole et pastorale. L’activité d’élevage occupe une place importante dans l’économie du pays et est pratiquée par plus de 80% des ménages qui en tirent tout ou une partie de leurs revenus. Le sous-secteur de l’élevage a toujours constitué un pilier de l’économie nationale avec l’agriculture. Il contribue pour plus de 18% (PNUD, 2012) dont 12% pour les animaux et 6% pour les cuirs et peaux à la formation de la valeur ajoutée nationale. Il représente le troisième sous-secteur le plus important en matière de recettes d’exportation avec une part de contribution moyenne évaluée à 14,2% en 2009 (PNUD, 2012).
L’aviculture est le sous-secteur de l’élevage le plus répandu et pratiqué dans toutes les localités du Burkina Faso. Sa production était estimée à 42 220 421 de têtes en 2014 (MRA, 2014), pour une valeur économique de plus de 93 milliards de FCFA en se référant au prix sur le marché qui était de 2216 FCFA par tête en moyenne (MRA, 2014). Cette aviculture est majoritairement traditionnelle et concerne essentiellement les espèces telles que la poule (Gallus gallus domesticus), la pintade (Numida meleagris galeata) et à moindre degré le canard (Anas sp), le dindon (Meleagris gallopavo), le pigeon (Columba sp) etc. (BERTE, 1987). Néanmoins, depuis plusieurs années nous assistons à l’émergence de la filière avicole « moderne » en zones périurbaines (MDA, 2005). Elle est en plein essor pour répondre à un besoin réel en protéines animales de la population (NDIAYE, 2002). Le développement de cette production intensive permet de faire face à plusieurs enjeux nés du contexte d’urbanisation croissante. Notamment, le développement d’une activité pouvant créer des emplois et la contribution à la sécurité alimentaire des populations urbaines (ZERBO, 2014). Cependant, cette activité se heurte sur le plan sanitaire à des contraintes parmi lesquelles les pathologies émergentes et réémergentes. Parmi ces pathologies, l’influenza aviaire hautement pathogène a constitué une réelle menace pour le secteur avicole burkinabé. En effet, le pays a connu deux épizooties de cette pathologie ravageuse : celle de 2006 et celle de 2015. Ces épizooties ont été à l’origine de nombreuses pertes économiques. Conformément au code sanitaire pour les animaux terrestres de l’OIE, les services vétérinaires du pays ont mené la surveillance active de la maladie après l’épizootie de 2006 afin d’obtenir le statut de pays indemne.
Systèmes de production avicole
Définition de la chaîne de valeur avicole
La chaîne de valeur est l’ensemble des activités nécessaires pour mener un produit à travers différentes phases de sa production à sa distribution aux consommateurs finaux. Selon PORTER (1982), la chaîne de valeur est l’ensemble des étapes déterminant la capacité d’un domaine d’activité stratégique (DAS), d’une entreprise ou d’une organisation à obtenir un avantage concurrentiel. Elle englobe un large éventaild’activités et de services et comprend notamment les prestataires d’intrants, les producteurs, les transformateurs et les acheteurs.
La chaîne de valeurs de la filière avicole au Burkina Faso comprend :
✓ en amont :
➤ les producteurs de poussins d’un jour : il s’agit des accouveurs et importateurs de poussins ou des œufs à couver ;
➤ les commerçants des médicaments vétérinaires : les acteurs de ce maillon de la chaîne de valeur sont les industries et établissements de médicaments vétérinaires ;
✓ en aval :
➤ les producteurs d’œufs de consommation et de viandes de volailles : ce sont les acteurs des fermes d’élevage avicole ;
➤ les transformateurs des produits avicoles : les principaux acteurs sont les abatteurs de volailles dans les abattoirs, les tueries, les charcuteries, …
➤ et les acteurs des marchés et rassemblements de volailles : ils regroupent l’ensemble de grossistes et revendeurs.
Aviculture villageoise ou familiale
Le Burkina Faso est réputé dans la sous-région pour son aviculture villageoise. Cette aviculture villageoise représente environ 84,6 % du cheptel national, soit 39 797 000 têtes de volailles (majoritairement poules et pintades et quelques sujets de pigeons, canards, dindes, oies…) (MRAH, 2012).
Elle est pratiquée sur tout le territoire, essentiellement en milieu rural, suivant un système extensif et se caractérise par l’utilisation des races locales possédant une rusticité élevée. Les volailles sont élevées en liberté et se nourrissent d’elles-mêmes autour des concessions (POUSGA et al., 2009). L’aviculture familiale correspond au secteur 4 de la classification de la FAO (FAO, 2007). Elle ne fait l’objet d’aucune surveillance sanitaire, avec des moyens d’élevage rudimentaires, peu d’investissements et la productivité de ce système est relativement faible (HIEN et al., 2005; MRA, 2007). L’élevage traditionnel exploite les races locales surtout la poule et les pintades mais aussi les canards, les dindes, les pigeons, les oies, les cailles…
Niveau de production
Les effectifs du cheptel villageois sont estimés à 36,42 millions en 2009 et à 42,22 millions en 2014 (MRA, 2014). Le tableau I indique l’évolution du cheptel volailles par région de 2009 à 2014 et la figure I met en exerce les régions dont les effectifs sont importants. Les unités de production sont caractérisées par des effectifs très réduits. Le nombre de volailles en moyenne par ménage varie de 1 à 50, avec seulement 5 % des ménages ayant plus de 50 têtes (YAMEOGO, 2003). Les animaux sont généralement élevés à la fois pour les œufs surtout pour les pintades et la chair majoritairement le poulet sous la dénomination de « poulet bicyclette» (ILBOUDO, 2015). Le poids vif du poulet adulte en élevage extensif s’étend de 1,2 à 2,0 kg chez le coq et de 0,9 à 1,2 kg chez la poule (MAE, 1991 ; OUANDAOGO, 1997 ; POUSGA et al., 2005). La productivité est très faible mais les coûts de production sont quasiment nuls. La production est à 37% autoconsommée, seulement 40% sont destinés aux ventes, 15% sont utilisés pour les dons et 8% pour les sacrifices (YAMEOGO, 2003).
Organisation des acteurs
Les principaux acteurs du circuit sont les producteurs, les collecteurs primaires et secondaires, les grossistes et semi-grossistes (cf. figure 2). Ils approvisionnent les différents marchés (primaires, intermédiaires, terminaux ou d’exportation) en produits de l’aviculture familiale (KONDOMBO, 2007). Pour répondre aux besoins des consommateurs, les aviculteurs de la filière volaille locale sont organisés en association ou en groupement (Union nationale des producteurs de la filière volaille locale, Union nationale des commerçants de la filière volaille locale, Union nationale des transformateurs de la filière volaille locale, …). Dans le but d’améliorer la compétitivité globale de la filière volaille locale par une concertation verticale entre les organisations professionnelles des différents maillons de la filière (la production, la commercialisation et la transformation) a vu le jour en 2011 l’interprofession de la filière volaille locale au Burkina Faso (IFVL/BF) (PAFASP, 2013).
Aviculture moderne
L’élevage moderne ou commercial comprend : l’élevage industriel et l’élevage semiindustriel. L’élevage industriel se définit selon LISSOT cité par KOE (2001), comme un établissement qui possède des effectifs importants. Il utilise des poussins d’un jour provenant des multiplicateurs des souches sélectionnées. Dans cet élevage, les volailles reçoivent des aliments supplémentés produits par une industrie spécialisée et des mesures de lutte y sont pratiquées (prophylaxie, traitements). Ce type d’élevage utilise des équipements modernes. Il correspond au secteur 1 qui se rapporte au secteur industriel et intégré dans la classification de la FAO. Ce secteur 1 est rare au Burkina Faso (FAO, 2007). Toutefois, l’élevage industriel est à ses débuts avec l’exemple des exploitations comme les fermes Fadima et Moablouaou à Ouagadougou et la ferme Kouna à Banfora. L’élevage moderne burkinabè reste donc de type semi-industriel. Le secteur avicole semi-industriel se développe surtout autour des grands centres urbains, principalement à Ouagadougou et Bobo Dioulasso (KONDOMBO, 2007). Au Burkina Faso, l’aviculture semi-industrielle est surtout orientée vers la production des œufs de consommation, même s’il existe de nos jours un petit marché de poulet de chair. Elle utilise des poussins de souches améliorées d’un jour, importés des marchés extérieurs notamment la France, la Côte d’ivoire, le Sénégal ou produits sur place par les accouveurs (KONDOMBO, 2007).
Acteurs de la filière
Au Burkina Faso, des milliers d’aviculteurs modernes sont dénombrés.
Les acteurs de la filière sont :
➤ en amont : les fournisseurs d’intrants zootechniques ou vétérinaires, les services de vulgarisation et les programmes et projets de soutien à la production.
➤ en aval : les acteurs de la commercialisation(collecteurs, semigrossistes et grossistes) auxquels il faut ajouter les restaurateurs, les hôteliers et les grilleurs.
Une faible organisation des acteurs et un faible niveau de concertation dans les actions sont observés. Certains aviculteurs sont organisés en association. Nous avons l’exemple de la maison de l’aviculture (MDA) qui est une association professionnelle du secteur de l’aviculture moderne au Burkina Faso. Elle compte à ses actifs 204 membres soit 90% des aviculteurs modernes du Burkina Faso (MDA, 2005).
Ses activités portent principalement sur des encadrements techniques en matière de santé, d’alimentation et de conduite de l’élevage. Elle approvisionne également les aviculteurs semi-industriels en intrants zootechniques et vétérinaires et du matériel avicole. Depuis sa naissance en 2015, l’interprofession de l’aviculture moderne est impliquée dans les activités de plaidoyer auprès du gouvernement et des partenaires techniques et financiers pour le traitement spécifique de la situation de l’aviculture moderne au Burkina Faso.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I : PRESENTATION DE L’AVICULTURE AU BURKINA FASO
I. Systèmes de production avicole
I.1.Définition de la chaîne de valeur avicole
I.2. Aviculture villageoise ou familiale
I.2.1. Niveau de production
I.2.2. Organisation des acteurs
I.3. Aviculture moderne
I.3.1. Acteurs de la filière
I.3.2. Différents types de production
I.3.2.1. Races et souches exploitées
I.3.2.2.Types de spéculations
II. Contraintes majeures au développement de l’aviculture
II.1. Contraintes économiques et financières
II.1.1. Contraintes liées à la commercialisation
II.1.2. Contraintes liées au financement
II.2. Contraintes zootechniques
II.2.1. Contraintes liées à l’approvisionnement en intrants
II.2.2. Contraintes alimentaires en aviculture moderne
II.2.3. Contraintes liées à la conduite d’élevage
II.3. Contraintes sanitaires
CHAPITRE II : CONTRAINTES SANITAIRES MAJEURES DE LA FILIERE AVICOLE AU BF : CAS DE L’IAHP
I. Généralités sur la maladie
I.1. Définition
I.2. Espèces affectées
I.3. Importance de la maladie
I.4. Etiologie
I.5. Etude clinique
I.6. Epidémiologie
II. Présentation des situations épizootiques de la maladie au Burkina Faso
II.1. Epizootie de 2006
II.2. Epizootie de 2015
III. Moyens de lutte mis en œuvre
CHAPITRE III : DEFINITIONS GENERALES DE LA LEGISLATION ET DE LA REGLEMENTATION SANITAIRES EN AVICULTURE
I. Quelques définitions
I.1. Législation
I.2. Règlementation
I.3. Droit
I.4. Devoir
I.5. Norme
I.6. Loi
I.7. Décret
I.8. Arrêté
I.9. Circulaire ou note de service
II. Législation communautaire de l’UEMOA
II.1. Organes de l’UEMOA
II.2. Régime juridique des actes pris par les organes de l’union
III. Législation nationale
III.1. Code de la santé publique
III.2. Code de la santé animale
III.3. Police zoo-sanitaire
III.4. Code de santé publique vétérinaire
CONCLUSION