Systèmes de mesure des émissions polluantes de la combustion

Commercialisation et spécification de l’huile de pyrolyse

D’après ce qui a été indiqué précédemment, l’huile de pyrolyse est différente des huiles minérales vu sa composition chimique ainsi que ses propriétés physiques. Elle se caractérise essentiellement par des teneurs plus élevées en eau, en oxygène et en solides, une viscosité, une masse volumique et une acidité supérieures et un pouvoir calorifique plus faible par rapport aux combustibles pétroliers. Afin de commercialiser l’huile provenant de la pyrolyse de la biomasse comme combustible remplaçant les dérivés du pétrole, une spécification claire définissant les gammes de propriétés (par exemple la teneur maximale en eau et en solides, le pouvoir calorifique minimal, etc.) pour de différentes classes de carburants commercialisés doit être établie. Oasmaa et Czernik (1999) ont exposé les caractéristiques physiques et chimiques propres à l’utilisation des bio-huiles dans les moteurs Diesel et les chaudières e.g. le pouvoir calorifique, la masse moléculaire, l’homogénéité ou la stabilité. Ils témoignent que des essais de longue durée devront être effectués avant que les bio-huiles ne soient acceptées comme combustibles commerciaux. Ces essais nécessiteront un approvisionnement important d’huile ayant des propriétés spécifiées établies par les producteurs et les utilisateurs. Ils ont par conséquent présenté l’exemple des spécifications établies par le fabricant de moteurs automobiles Wartsila et le potentiel utilisateur de ce biocombustible Stockholm Energi (Oasmaa et Czernik, 1999).

Plus récemment, une spécification des bio-huiles a été proposée par l’ASTM. La spécification D7544, en sa version la plus récente 2012, classe les bio-huiles en deux grades D et G. Le premier est destiné aux brûleurs commerciaux et industriels. Le second, tolérant des teneurs plus importantes en solides et en cendres, est destiné aux brûleurs industriels. Cette spécification permettra de guider les consommateurs lors de l’achat de ce type de combustible. Le Tableau 1.2 détaille les méthodes d’analyse des propriétés physicochimiques et établie une classification selon les deux grades.

COx et HC

Le ratio C/H de la bio-huile est plus élevé que celui des combustibles conventionnels pétroliers. Par conséquent, à puissance équivalente la bio-huile a plus tendance à produire du CO et des suies et par ailleurs à exhiber une flamme plus lumineuse. Ceci a été constaté par Shihadeh et al. (1994) suite à une comparaison entre les émissions polluantes de deux biohuiles et celles du diesel à une puissance de 1 MW. Choi et al. ont utilisé un brûleur de type Swirl d’environ 35 kW muni d’un injecteur par pulvérisation d’air à mélange externe afin de caractériser la flamme d’huile de pyrolyse de bois. Selon Choi et al. (2016), la combustion de la bio-huile pure générait une flamme instable présentant beaucoup de fluctuations par rapport à une flamme d’éthanol et des émissions en CO dépassant les 1000 PPM (limite de détection du système d’analyse de gaz utilisé). Un mélange bio-huile/éthanol a par ailleurs été utilisé et ce avec des teneurs en éthanol allant de 10 à 50 %.

Dès l’ajout de 10 % d’éthanol des changements considérables ont été remarqués : les concentrations en CO ainsi que les concentrations en O2 dans les gaz chauds ont diminué et les concentrations en CO2 ont augmenté. De plus, les concentrations en CO enregistrées sont quatre fois inférieures à celle de l’éthanol pur. Ceci peut être expliqué par la nature oxygénée de l’huile pyrolytique qui fait qu’il y a plus d’oxygène pour oxyder la même quantité de carbone. Les concentrations en CO2 et en O2 mesurées ont été par la suite comparées aux valeurs théoriques qui devraient être obtenues en combustion complète. Il a été conclu par Choi et al. (2016) que bien que les composés gazeux peuvent être complètement oxydés (très faible teneur en CO), il peut y avoir une évaporation incomplète des gouttelettes du jet. En supposant que 70 % du combustible s’est évaporé et a réagi, les valeurs calculées des concentrations en CO2 et en O2 sont plus proches de celles mesurées (Choi et al., 2016).

Kowalewski (2015) a étudié la combustion de l’huile de pyrolyse dans un brûleur à Swirl muni d’un injecteur par pulvérisation de gaz naturel. Lorsque la quantité de ce dernier est insuffisante pour soutenir l’inflammation, la flamme se détachait de la buse. Ces instabilités faisaient que la flamme s’éteignait globalement ou localement laissant passer des hydrocarbures imbrûlés (HC) en dehors de la zone de réaction vers une zone où la température est insuffisante pour assurer une combustion complète (Kowalewski, 2015). Une comparaison des émissions polluantes de la combustion de l’huile de pyrolyse de bois en régime permanent avec et sans Swirl et en régime transitoire (en basculant entre bio-huile et éthanol) a été faite par Krumdieck et Daily (1998) et a montré que la flamme stable de l’huile de pyrolyse avec recirculation des gaz chauds produit jusqu’à huit fois moins de CO et trois fois et demi moins d’hydrocarbures imbrûlés. Cette étude a été réalisée dans un brûleur de 5 kW dont la configuration de Swirl peut être modifiée et un injecteur par pulvérisation d’air à mélange interne (Krumdieck et Daily, 1998).

Quand les bons paramètres de combustion sont utilisés, entre autres la qualité d’atomisation, la richesse, le bon mélange combustible-air et le temps de résidence suffisant, les émissions en CO de l’huile pyrolytique sont faibles et comparables à celles des combustibles pétroliers. En augmentant l’air de combustion introduit (à 35 % d’excès d’air), les résultats de mesures des gaz émis de Ji-Lu et Yong-Ping (2010) indiquent une diminution jusqu’à une valeur presque nulle de CO, ainsi a remarqué Khodier et al. (2009). Shihadeh et al. (1994) ont comparé les émissions de CO de la bio-huile d’ENSYN Technologies (Ottawa, Canada) avec celles du diesel et ce pour une flamme diffusion de 1MW (correspondant à 64 kg/h de diesel et à 163 kh/h de bio-huile). Lorsque l’excès en O2 dans la cheminée est supérieur à 3 %, les émissions en CO de la bio-huile sont faibles (inférieures à 20 PPM) et comparables à celles du diesel. Quand l’excès en O2 diminue audelà de 3 %, les quantité de CO émises par la bio-huile augmentent de façon rapide.

NOx

Les NO et NO2, connus sous le terme de NOx, sont produits à partir du diazote N2 contenu dans l’air à haute température (NOx thermiques) et/ou à partir de l’azote N contenu dans le combustible (NOx du combustible). Une investigation sur les mécanismes de formation des NOx à pression atmosphérique lors de l’utilisation d’huile pyrolytique a été effectuée par Stamatov, Honnery et Soria (2006). Les taux de formation des NOx thermiques selon le mécanisme de Zeldovich (NOx thermiques) ont été calculés. Les résultats montrent que la bio-huile et le mélange 80 % bio-huile et 20 % éthanol produisent approximativement la même quantité de NOx thermiques que le diesel N°2. Or les résultats expérimentaux démontrent que les indices d’émission de NOx de ces combustibles (la bio-huile et le mélange 80 % bio-huile 20 % éthanol) sont bien supérieurs à celui du diesel N°2 (respectivement 2.4 et 1.9 fois supérieurs). Ainsi et contrairement aux combustibles dérivés du pétrole qui émettent majoritairement des NOx thermiques, il s’avère que la source qui gouverne la formation des NOx dans le cas de la bio-huile est reliée à l’azote qui y est présent (Stamatov, Honnery et Soria, 2006). Baxter, Jenkins et Winter (1994) ont étudié les émissions de NOx pour deux huiles pyrolytiques produites selon le même processus mais ayant des teneurs en azote différentes. Les résultats des émissions des NOx en fonction de la concentration d’oxygène dans les gaz chauds indiquent une rapide augmentation jusqu’à une certaine valeur et puis une stabilisation.

Ce comportement est observé pour les deux bio-huiles. La différence réside dans le maximum de NOx atteint qui est deux fois plus important dans le cas de la bio-huile ayant une teneur en azote 2.7 fois plus importante. Ainsi le taux de conversion d’azote combustible en NOx diminue en augmenant la teneur en azote du combustible (la concentration de NOx émis augmente mais l’efficacité de conversion de l’azote en NOx diminue). Le même constat a été présenté par Martin et Boateng (2014).

En augmentant l’air total introduit dans la chambre de combustion, les résultats de mesure des gaz émis par la combustion de l’huile de pyrolyse indiquent une augmentation des NOx (jusqu’à 370 PPM) pour Ji-Lu et Yong-Ping (2010). La même tendance a été remarquée par Choi et al. (2016). Shihadeh et al. (1994) ont trouvé que les émissions en NO de la bio-huile d’ENSYN Technologies, Ottawa, Canada, sont comparables à celles du diesel N°2 pour de faibles poucentages d’excès d’air (108 comparées à 80 PPM respectivement). Au-delà de 3 % d’oxygène dans les échappements, les NO de la bio-huile augmentent de façon très rapide par rapport à ceux du diesel N°2. Ceci est expliqué par une teneur d’azote plus élevée dans la bio-huile (0.06 comparée à 0.02) amplifiée par le plus faible pouvoir calorifique. En effet, pour atteindre la même puissance thermique il faut introduire un débit plus élevé de biohuile (163.4 comparé à 64 kg/h). En conséquence, en brûlant à la même puissance la biohuile à la place du diesel N°2, 5.4 fois plus d’azote est introduit (Shihadeh et al., 1994).

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 REVUE DE LITTÉRATURE
1.1 Introduction
1.2 Valorisation de la biomasse et pyrolyse rapide
1.3 Propriétés caractéristiques des bio-huiles
1.3.1 Généralités sur les propriétés caractéristiques des bio-huiles
1.3.2 Teneur en eau
1.3.3 Teneur en oxygène
1.3.4 Teneur en solides
1.3.5 Viscosité
1.3.6 Structure macroscopique et homogénéité
1.3.7 Durée de vieillissement
1.3.8 Commercialisation et spécification de l’huile de pyrolyse
1.4 Combustion de l’huile de pyrolyse
1.4.1 Procédures de mise en marche et d’arrêt spécifiques
1.4.2 SOx
1.4.3 COx et HC
1.4.4 NOx
1.4.5 Particules solides
1.5 Sommaire, contexte et objectifs du projet
CHAPITRE 2 CHOIX, CONCEPTION ET ASSEMBLAGE DU BRÛLEUR
2.1 Introduction
2.2 Montage expérimental
2.2.1 Description générale
2.2.2 Brûleur à écoulement Swirl
2.2.2.1 Caisson d’air et chambre de combustion
2.2.2.2 Swirl
2.2.2.3 Injecteur
2.2.2.4 Flamme pilote
2.2.3 Systèmes d’alimentation et instrumentation du montage
2.3 Systèmes de mesure des émissions polluantes de la combustion
2.3.1 Analyse des polluants gazeux
2.3.2 Analyse des particules
2.4 Mélange huile de pyrolyse-diesel
2.4.1 Valorisation de l’huile de pyrolyse
2.4.2 Préparation de l’émulsion
2.5 Procédure expérimentale
2.6 Sommaire
CHAPITRE 3 ÉTALONNAGE DU MONTAGE EXPÉRIMENTAL
3.1 Introduction
3.2 Débit du ventilateur
3.3 Débit de combustible
3.4 SMD
3.5 Correction du taux d’oxygène
3.6 Mesures de répétabilité
3.7 Analyse de particules
3.7.1 Influence des paramètres de fonctionnement du SMPS
3.7.1.1 Débit d’échantillonnage
3.7.1.2 Temps de balayage
3.7.2 Influence des émissions des mesures de combustion précédentes
3.8 Sommaire
CHAPITRE 4 COMBUSTION DU DIESEL
4.1 Introduction
4.2 Paramètres variables – Paramètres fixés
4.3 Effet de la variation du débit d’air d’atomisation
4.4 Position de prise des échantillons
4.5 Effet de variation du Swirl
4.6 Effet de la variation du débit du diesel
4.7 Vérification de l’effet du Swirl et bilan
4.8 Analyse des particules
4.9 Sommaire
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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