L’hémorragie sous-arachnoïdienne (HSA), plus communément appelée hémorragie méningée (HM), est un épanchement de sang dans les citernes arachnoïdiennes de la base du crâne et de la convexité cérébrale [66]. Les HSA représentent 5 à 10 % des accidents vasculaires cérébraux et sont à l’origine d’une mortalité élevée estimée entre 40 et 50 %. L’anévrisme intracrânien est de loin la cause la plus fréquente des HSA (85 % des causes non traumatiques)[66]. Une hémorragie sous arachnoïdienne est suspectée devant une céphalée d’apparition brutale, d’intensité d’emblée maximale, notée comme un « coup de tonnerre dans un ciel serein ». Elle peut être associée à un syndrome méningé sans fièvre et à des troubles de la conscience. Le scanner doit être réalisé en urgence et permet de poser le diagnostic d’HSA devant la présence d’une hyperdensité spontanée, située dans les espaces sous-arachnoïdiens, intéressant habituellement les citernes de la base, les scissures inter hémisphériques et les scissures latérales [83]. La sensibilité du scanner dépend de l’importance de l’HSA essentiellement, mais aussi du taux d’hémoglobine et décroît avec le délai entre la céphalée initiale et le moment de réalisation du scanner. Le diagnostic d’hémorragie méningée pure peut passer inaperçu lorsque le patient est parfaitement conscient et présente que peu ou pas de signes spécifiques [48]. Il est cependant indispensable car un retard de diagnostic, même de quelques jours, pourrait entraîner des conséquences cliniques graves, parfois mortelles pour le patient. L’évolution de l’HSA est péjorative d’une façon générale. Les complications spécifiques (Ressaignement, ischémie cérébrale retardée et hydrocéphalie) et de la réanimation sont à l’origine de séquelles graves sur le plan neuropsychologique, fonctionnel et d’une lourde mortalité Cette évolution péjorative de l’HSA implique un diagnostic et une prise en charge(PEC) rapide afin d’éviter les complications et d’améliorer le pronostic du patient.
Rappels anatomiques
Système ventriculaire et citernes arachnoïdiennes
Le LCS est en réalité contenu dans deux compartiments : un interne représenté par les ventricules cérébraux situés au centre de l’encéphale, et un externe représenté par les citernes arachnoïdiennes qui entourent la face externe du cerveau et de la moelle.
Système ventriculaire
Les ventricules constituent l’ensemble des cavités creusées dans l’encéphale, ces cavités communiquent entre elles par des orifices et sont tapissées par une couche épendymaire au contact de laquelle se trouve les plexus choroïdes qui sécrètent le LCS. Le système ventriculaire comprend :
Les ventricules latéraux (VL)
Pairs et symétriques, situés dans l’épaisseur des hémisphères cérébraux, ils décrivent chacun une courbe en fer à cheval à concavité antérieure qui circonscrit la convexité du noyau caudé. Chaque ventricule latéral présent à décrire : Une corne frontale, prolongée en arrière par le corps ventriculaire, longue de 6 à 7 cm, Une corne temporale longue de 3 à 4cm ; Une corne occipitale, la plus courte mesurant 2 cm de longueur ; Le Carrefour ventriculaire, portion la plus large du canal ventriculaire, est située à l’union des trois cornes. L’ensemble est disposé dans un plan oblique en dehors et en arrière de telle sorte que la corne frontale est très proche de la ligne médiane alors que la corne occipitale en est distante de 3cm.
Le troisième ventricule
Cavité épendymaire du diencéphale, le V3 est impaire et médian, situé entre les deux thalamus, il a la forme d’un entonnoir aplati transversalement à base supérieure et à sommet inférieur. C’est une cavité très réduite, ne contenant que 3 à 5 ml, elle mesure 3 cm de long, 2,5 cm et 0,5 cm de large.
Le quatrième ventricule
Cavité épendymaire du bulbe et de la protubérance, le V4 a une forme losangique à grand axe vertical avec un triangle supérieur pontique et un triangle inférieur bulbaire. Il présente un plancher et un toit. Le canal interventriculaire ou foramen de MONRO fait communiquer les VL et le V3, il mesure 4 à 5 mm de long et 4 à 6 mm de diamètre. L’aqueduc du mésencéphale ou aqueduc de Sylvius qui fait communiquer le V3 au V4, mesure 15 mm de long. Le compartiment ventriculaire et cisternal communiquent entre eux par le trou de Magendie, situé à la partie médiane du toit du V4, et par les deux trous de Lushka situés de part et d’autre du trou de Magendie. Au niveau de la moelle spinale, il n’y a pas de ventricule mais un canal épendymaire centromédullaire, reliquat embryonnaire qui est partiellement virtuel, car en principe plus ou moins oblitéré pendant l’adolescence.
Citernes arachnoïdiennes
Les citernes arachnoïdiennes sont des ESA plus vastes de siège intracrânien. Elles correspondent donc à des espaces entre l’arachnoïde et la pie mère. On distingue ainsi :
● Citerne pré-bulbaire : située en avant du bulbe, entre la partie inférieure du clivus et la face antérieure du bulbe d’une part et entre le foramen magnum et la jonction ponto bulbaire d’autre part.
● Citerne pré-pontique : située en avant du pont entre la partie supérieure du clivus et la face antérieure du pont.
● Citerne ponto-cérébelleuse : la face antérieure du cervelet forme un angle profond avec la face antérieure de la jonction bulbo-pontique, il s’agit de l’angle ou trigone ponto cérébelleux.
● Citerne cérébello-médullaire : encore appelée grande citerne ou cérébelleuse inférieure, située entre la face dorsale du bulbe en avant, l’écaille occipitale en bas et en arrière, et la face inférieure du vermis en haut. Elle communique avec le V4 par le trou de Magendie.
● Citerne cérébelleuse supérieure : située entre le sommet du vermis et le sinus droit.
● Citerne inter-pédonculaire
● Citerne ambiante ou circum mésencéphalique : enveloppe les faces latérales et la face antérieure du mésencéphale, cette citerne est connectée avec la citerne supra-sellaire.
● Citerne quadrigéminale : délimitée par le splénium du corps calleux, la glande pinéale et le tectum.
● Citerne inter-hémisphérique.
● Citerne supra-sellaire : encore appelée opto-chiasmatique : c’est l’ESA compris entre la base des hémisphères cérébraux et le plancher du V3 d’une part, et le toit des loges caverneuses et hypophysaire d’autre part.
● Citerne opto-carotidienne.
La vascularisation artérielle du système nerveux central
Vascularisation artérielle du cerveau
La vascularisation du cerveau dépend des deux artères carotides internes (ACI) et des deux artères vertébrales. L’artère carotide primitive gauche naît directement de la crosse de l’aorte, l’artère carotide primitive droite est une branche de division du tronc brachio-céphalique, première branche artérielle naissant de la crosse aortique. Dans la région cervicale, chaque artère carotide primitive se divise en une artère carotide interne et une artère carotide externe, cette dernière destinée à la vascularisation du cou et de la face.
Les artères vertébrales naissent des deux troncs axillaires, elles ont un trajet particulier le long des vertèbres cervicales traversant un canal osseux creusé dans l’apophyse latérale de chaque corps vertébral et se réunissent dans le crâne pour donner le tronc basilaire (TB]. Les branches de division de ces trois artères sont destinées : au cortex cérébral antérieur et médian interne pour l’artère cérébrale antérieure (ACA), au cortex cérébral externe antérieur et moyen pour l’ACM et au cortex cérébral postérieur et inférieur pour l’artère cérébrale postérieure (ACP). Les territoires de chacune de ces artères se recoupent partiellement et la possibilité d’une suppléance existe entre elles. Des branches perforantes destinées aux NGC naissent des artères cérébrales moyennes (artères perforantes lenticulo-striées) et postérieures (artères perforantes thalamiques). Ces artères perforantes sont terminales et n’ont pas de suppléance.
Polygone de Willis
On décrit à la base du cerveau un polygone artériel faisant communiquer le territoire artériel carotidien et le système vertébro-basilaire par un ensemble de trois artères communicantes. Les territoires droit et gauche des ACI communiquent entre eux grâce à une artère communicante antérieure située entre les deux artères cérébrales antérieures. Les territoires carotidiens antérieurs communiquent avec le système vertébro-basilaire par les artères communicantes postérieures droite et gauche qui font communiquer la face postérieure de la carotide interne avec la face antérieure de l’artère cérébrale postérieure. Ces artères communicantes ont un diamètre variable d’un côté à l’autre et d’un sujet à l’autre. La perméabilité du polygone de Willis joue son rôle essentiel de suppléance en cas d’accident vasculaire cérébral.
Vascularisation artérielle du tronc cérébral et du cervelet
La vascularisation du TC et du cervelet dépend du système vertébro-basilaire constitué par les deux artères vertébrales et le tronc basilaire. Le TB qui naît de la réunion des deux artères vertébrales donne au niveau de sa terminaison les deux artères cérébrales postérieures et de chaque côté de son tronc principal les trois artères cérébelleuses destinées au cervelet : artères cérébelleuses supérieure, antéro-inférieure (AICA) et postéro-inférieure (PICA).
Les artères perforantes destinées aux structures du TC naissent perpendiculairement tout le long du TB. Ces artères perforantes, très nombreuses, sont des artères terminales, c’est-à-dire ne reçoivent pas de suppléance.
Epidémiologie
L’hémorragie sous-arachnoïdienne (HSA) représente 1 à 7 % de l’ensemble des accidents vasculaires cérébraux. En France, l’incidence de l’HSA varie de 3 à 8/100000 habitants. Sa mortalité à 28 jours s’élève à 42 %. Elle survient précocement dans la maladie, avec un tiers des décès au cours de 24 premières heures et 70 % au cours de la première semaine. L’HSA est un évènement rare mais grave, avec une mortalité estimée à 40 % dans les 48 premières heures. Dans 85 % des cas, elle est liée à la rupture d’un anévrisme intracrânien. En dehors des anévrysmes, les autres étiologies sont une dissection des artères cervicoencéphaliques, qui peut parfois se manifester uniquement par des céphalées, les syndromes de vasoconstriction réversible, qui ont une clinique apparentée aux céphalées par rupture d’anévrisme, du fait du caractère brutal et intense des douleurs Une méta-analyse a confirmé le rôle prépondérant du tabac (risque d’HSA multiplié par 3), de l’hypertension artérielle (risque multiplié par 2,5) et à un degré moindre d’une consommation d’alcool supérieure à 150 g par semaine (risque multiplié par 1,5) dans l’incidence de l’HSA. La race blanche pourrait être un facteur protecteur, mais il est possible que les autres races soient exposées à des facteurs de risque cardiovasculaires de manière plus importante (notamment tabac et hypertension artérielle] [2]. La contraception orale ne semble pas être un facteur de risque [34]. Un rôle protecteur du diabète était également mis en évidence, sans qu’une explication physiopathologique puisse être avancée. Cependant, cet effet protecteur du diabète était également retrouvé dans une étude récente. L’HSA est une complication fréquente de la polykystose rénale, maladie dont le gène causal a été récemment identifié. Chez les patients portant ce gène, l’anévrysme siège le plus souvent sur l’artère cérébrale moyenne [23]. L’HSA est une maladie à prédominance féminine, la proportion de femmes se situant autour de 60 à 70 % [2].
|
Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
1.1 Rappels anatomiques
1.1.1 Système ventriculaire et citernes arachnoïdiennes
Système ventriculaire
Les ventricules latéraux (VL)
Le troisième ventricule
Le quatrième ventricule
Citernes arachnoïdiennes
1.1.2 La vascularisation artérielle du système nerveux central
Vascularisation artérielle du cerveau
Polygone de Willis
Vascularisation artérielle du tronc cérébral et du cervelet
1.2 Epidémiologie
1.3 Diagnostic
1.3.1 Diagnostic positif
Signes cliniques
1.3.1.1.1 Signes prémonitoires
1.3.1.1.2 La céphalée sentinelle
1.3.1.1.3 Atteinte des nerfs crâniens
1.3.1.1.4 Tableau clinique typique : Hémorragie méningée
1.3.1.1.4.1 Céphalée
1.3.1.1.4.2 Signes d’irritation méningée
1.3.1.1.4.3 La perte de connaissance
1.3.1.1.4.4 Crises convulsives
1.3.1.1.4.5 Déficit neurologique focalisé
Examens complémentaires
1.3.1.2.1 Examens pour poser le diagnostic de HSA
1.3.1.2.1.1 Le scanner cérébral
1.3.1.2.1.2 L’IRM
1.3.1.2.1.3 La ponction lombaire
1.3.1.2.2 Examens à visée étiologique
1.3.1.2.2.1 L’angioscanner cérébral (AngioTDM)
1.3.1.2.2.2 Angiographie par résonnance magnétique (ARM)
1.3.1.2.2.3 L’angiographie cérébrale conventionnelle
1.3.1.2.3 Autres examens complémentaires
1.3.1.2.3.1 Le doppler Trans crânien
1.3.1.2.3.2 Bilan biologique
1.3.1.2.3.3 Electrocardiogramme (ECG)
1.3.2 Formes cliniques
Forme frustre
Forme foudroyante
Formes trompeuses
1.3.2.3.1 Forme convulsive
1.3.2.3.2 Forme pseudo-psychiatrique
1.3.2.3.3 Formes vues tardivement
1.3.3 Diagnostic différentiel
1.4 Evolution-Pronostic
1.4.1 Eléments de surveillance
1.4.2 Modalités évolutives
Les Complications spécifiques
1.4.2.1.1 Le ressaignement
1.4.2.1.2 Hydrocéphalie aigue
1.4.2.1.3 Ischémie cérébrale retardée (ICR)
Les complications non-spécifiques
1.4.2.2.1 Convulsions
1.4.2.2.2 Lésions ischémiques aiguës
1.4.2.2.3 HTA
1.4.2.2.4 Insuffisance cardiaque aigue
1.4.2.2.5 Complications pulmonaires
1.4.2.2.6 Atteinte ophtalmologique
1.4.2.2.7 Complication infectieuses
1.4.2.2.8 Complications métaboliques
1.4.2.2.8.1 Troubles hydro électrolytiques
1.4.2.2.8.2 Hyperglycémie
1.4.2.2.8.3 Hyperthermie
1.4.3 Pronostic
1.5 Traitement
1.5.1 Buts
1.5.2 Moyens
Moyens généraux
Moyens de réanimation
1.5.2.2.1 . Mesures vitales
1.5.2.2.2 . Sédation
1.5.2.2.3 . Lutter contre ressaignement
1.5.2.2.4 . Lutter contre l’HIC
1.5.2.2.5 . Prévention et traitement de l’ICR
1.5.2.2.6 . La prise en charge hémodynamique
1.5.2.2.7 . Lutter contre l’hyperglycémie
1.5.2.2.8 . Lutter contre l’hyperthermie
Moyens interventionnels
1.5.2.3.1 . Traitement étiologique
Traitement des complications
1.5.2.4.1 . Hydrocéphalie
1.5.2.4.2 . Hémorragie intra-ventriculaire
1.5.3 Indications
DEUXIEME PARTIE : MATERIELS ET METHODES
1.1 Objectif de l’étude
1.2 Cadre d’étude
1.3 Patients
1.3.1 Population d’étude
1.3.2 Les critères d’inclusion
1.3.3 Les critères de non inclusion
1.4 Méthode
1.4.1 Type d’étude
1.4.2 Méthode d’analyse
1.4.3 Paramètres étudiés
RESULTATS
2.1 Etude descriptive
2.1.1 Aspect épidémiologique
Fréquence
Age
Sexe
Facteurs de risques
Antécédents
2.1.2 Aspects clinique
Délai d’admission en service de neurochirurgie
Durée d’hospitalisation
Motifs de consultation
Circonstances de survenue
Signes cliniques
Echelles de gravité clinique
2.1.2.6.1 Echelle WFNS
2.1.2.6.2 Echelle de gravité de Hunt et Hess
2.1.3 Examens complémentaires
Scanner cérébral
Angioscanner
Localisation des anévrysmes
Forme des anévrysmes
Angio-IRM
Ponction lombaire
Bilan pré opératoire
2.1.4 Aspect thérapeutique
Traitement médical
Traitement chirurgical
2.1.5 Aspect évolutifs
2.1.6 Mortalité
2.2 Etude analytique
2.2.1 Rapport entre le score WFNS et le délai d’admission en service de neurochirurgie
2.2.2 Étude croisée du score de Rankin des patients opérés et du délai d’admission en service de neurochirurgie
2.2.3 Etude croisée de la survenue de décès en fonction du délai d’admission en service de neurochirurgie
2.2.4 Etude croisée du score de Rankin des patients opérés et du délai d’intervention chirurgicale
2.2.5 Etude croisée du délai d’intervention et de la survenue de décès
DISCUSSION
3.1 Aspects épidémiologiques
3.1.1 Fréquence
3.1.2 Age
3.1.3 Sexe
3.1.4 Facteurs de risques
3.1.5 Antécédents
3.2 Aspects cliniques
3.2.1 Délai d’admission en service de neurochirurgie
3.2.2 Durée d’hospitalisation
3.2.3 Motifs de consultation
3.2.4 Circonstances de survenue
3.2.5 Signes cliniques
3.2.6 Echelles de gravité clinique (WFNS ; Hunt et Hess)
3.3 Examen complémentaires
3.3.1 Scanner cérébral
3.3.2 Angioscanner
3.3.3 Localisation des anévrysmes
3.3.4 Angio-IRM
3.3.5 Ponction lombaire
3.3.6 Bilan biologique
3.4 Aspect évolutifs
3.4.1 Les complications
3.5 Aspects thérapeutiques
3.6 Score de Rankin
3.7 Mortalité
3.8 Facteurs pronostiques
CONCLUSION