Synthèse et caractérisation des structures photoniques

Les cristaux photoniques sont des matériaux diélectriques nano-structurés dont l’indice de réfraction varie de façon périodique à l’échelle de la longueur d’onde de la lumière. Cette périodicité provoque l’apparition de bandes interdites à la propagation de la lumière à l’intérieur du cristal sur des plages de longueurs d’onde dépendantes des caractéristiques de celui-ci (dimension et indice du motif de répétition). La lumière ne se propageant pas, elle est réfléchie.

Le concept de bande interdite photonique fût introduit en 1887 par Lord Rayleigh qui démontra que le miroir de Bragg (voir figure 1.2), exemple de cristal photonique unidimensionnel encore très utilisé aujourd’hui, présentait une bande interdite photonique dépendante de l’orientation du miroir. [19]

En 1987, Eli Yablonovitch [21] et Sajeev John [22] mirent en évidence le fait qu’il était possible de réaliser des matériaux permettant l’apparition de bandes interdites sur plusieurs dimensions. C’est à ce moment-là que le terme de cristal photonique fit son apparition. Certains de ces matériaux présentent une bande interdite photonique bidimensionnelle et sont appelés cristaux photoniques à deux dimensions. [23] Ils sont nanostructurés dans deux directions tel que les réseaux de plots nanométriques ou les réseaux de trous nanométriques comme ceux présentés sur la figure 1.3 [24] et ont diverses applications dont la plus connue est la fibre à cristal photonique. [25]

Il existe également de nombreux matériaux présentant une bande interdite photonique à 3 dimensions. Parmi ces matériaux certains sont purement imaginés et synthétisés par l’Homme, comme les woodpiles ou matériaux en piles de bois [26] [27] (figure 1.4) et d’autres sont calqués sur des matériaux naturels, comme les opales.

Les opales sont des cristaux photoniques à 3 dimensions pouvant être naturels ou artificiels. Il s’agit de cristaux colloïdaux composés d’empilements de billes nanométriques auto-organisées selon un réseau cristallin pouvant être hexagonal compact (hc) ou cubique faces centrées (cfc). [8] Les billes étant organisées de façon périodique dans les trois dimensions, les opales présentent une bande interdite photonique tridimensionnelle. Ces billes peuvent être en polymère organique [30] (PMMA ou polystyrène) mais se trouvent naturellement et sont le plus souvent synthétisées en silice. [31] L’inconvénient de ce type de matériau est que son indice optique est relativement proche de celui de l’air, le plus souvent utilisé comme matrice environnante. Comme la différence d’indice des deux matériaux est faible, la bande interdite photonique est incomplète et sa position est dépendante de l’angle d’observation du matériau, ce qui permet de caractériser les échantillons par spectroscopie en réflexion spéculaire .

Il existe deux types d’opales : les opales directes et les opales inverses. Les opales directes sont des agencements de billes d’un matériau d’indice optique supérieur à l’indice optique du matériau de la matrice les englobant (voir figure 1.6 a). Les opales inverses sont des agencements de billes d’indice inférieur à l’indice de la matrice environnante [32] (voir figure 1.6 b). Pour la synthèse d’opale inverse, une opale directe est utilisée comme template. Un matériau est ensuite infiltré dans cette opale de façon à bien englober toutes les billes. Ce matériau est, soit d’indice supérieur à celui des billes de l’opale directe, soit résistant au solvant qui viendra par la suite dissoudre les billes de l’opale directe. Une fois le matériau d’infiltration durcit et les billes dissoutes, lorsque cela est nécessaire, l’opale inverse est obtenue. L’opale inverse présente tout comme l’opale directe, un motif nanométrique périodique selon 3 dimensions, elle présente donc également une bande interdite photonique tridimensionnelle. L’avantage des opales inverses par rapport aux opales directes est qu’il est plus facile de manipuler les écarts d’indices de matériaux et donc il est en théorie possible de réaliser une opale inverse présentant une bande interdite photonique complète .

Il débute par la synthèse des sphères de silice, utilisées pour la fabrication d’opales directes et, éventuellement, de défauts planaires. Il se poursuit par la synthèse des opales directes par la méthode dite « par convection » et détaille l’optimisation des différents paramètres de synthèse en vue d’obtenir des opales les plus homogènes et les plus réfléchissantes possible à partir de sphères de différents diamètres. Une méthode efficace, pour intégrer un défaut planaire entre deux opales et ainsi ouvrir une bande de fréquences permises dans la bande interdite, est ensuite décrite. Finalement, la mise au point d’un protocole de synthèse, pour la réalisation d’opales inverses en polymère à empreintes moléculaires à partir des opales directes de silice, est détaillée.

Synthèse des nanosphères de silice

Les nanosphères de silice constituent la brique élémentaire des toutes les structures photoniques synthétisées et étudiées au cours de cette thèse (opales directes, opales inverses, éventuellement opales avec défaut planaire). Leur synthèse a été développée dans l’équipe au cours de la thèse de Phan Ngoc Hong, grâce à une collaboration avec l’Institute of Materials Science de Hanoi. Cette première étape de la synthèse des échantillons est critique : en effet, la faible dispersion en taille des sphères conditionne directement la qualité cristallographique des opales. Il faut donc être capable de synthétiser des sphères du diamètre requis pour obtenir une bande interdite dans le domaine de longueurs d’onde souhaité et présentant une dispersion de diamètre la plus faible possible. Pour cela, la méthode de synthèse, développée par Phan Ngoc Hong au cours de sa thèse [15], a été reprise et l’influence de nouveaux paramètres, tels que la concentration du catalyseur et le temps de réaction, a été étudiée.

Principe de la synthèse des nano-billes de silice

Dans les années 50, afin de développer les aérosols en plein boom industriel, de nombreuses recherches se sont appuyées sur la synthèse de particules solides et sphériques de différentes natures et de différentes tailles. Ainsi, en 1956, Kolbe réalisa au cours de sa thèse la première synthèse chimique de nanosphères de silice basée sur la réaction d’un silicate de tétraéthyle en solution alcoolique en milieu basique. [36] Quelques années plus tard, suivant la théorie selon laquelle la qualité d’une suspension aérosol dépendrait de la faible dispersion en taille de ses particules [37], les chercheurs Stöber, Fink et Bohn s’appuyèrent sur la découverte de Kolbe pour développer une synthèse de billes monodisperses de diamètres compris entre 50 nm et 2 µm. [38] Cette synthèse, aujourd’hui appelée synthèse de Stöber, peut être réalisée à température ambiante et présente deux principales étapes. La première étape est la nucléation des particules réalisée par hydrolyse d’un silicate d’alkyles en milieu alcoolique et basique (1.8(1)). La seconde est la croissance des particules qui consiste en la condensation de l’acide silicique des germes. Cette réaction est catalysée par les ions hydroxydes produits par l’ionisation de l’ammoniaque en milieu aqueux (1.8(2)) ajouté à la solution, favorisant ainsi l’ionisation des acides siliciques (1.8(1) et (2)) et produisant par condensation des particules sphériques de silice ainsi que de l’eau et de l’éthanol (1.8(3) et (4)).

En 1988, Bogush et al. ont montré qu’il était possible de prolonger l’étape de croissance en ajoutant progressivement le réactif silicate, le TEOS (orthosilicate de tétraéthyle) dans leur cas, dans une solution contenant des nanobilles de silice déjà formées. [40] Cette nouvelle méthode permet l’obtention de particules de faible dispersion en taille et une augmentation progressive de la taille des sphères. Ce protocole fût suivi par Phan Ngoc Hong lors de sa thèse pendant laquelle il a principalement étudié l’effet de la concentration en TEOS et obtenu des billes de diamètre maximum de l’ordre de 500 nm. [15] Pour maîtriser la taille des billes, nous avons choisi dans cette thèse de contrôler chacune des deux réactions principales de la synthèse en favorisant l’une ou l’autre en agissant sur le catalyseur. Dans un premier temps, nous allons voir comment une forte concentration de catalyseur, en favorisant la réaction de condensation, permet d’augmenter le diamètre des sphères. Dans un second temps, nous mettrons en évidence que l’ajout tardif du catalyseur à la solution, en favorisant la réaction d’hydrolyse, a pour effet, au contraire, de réduire ce diamètre.

Les produits utilisés pour la synthèse de ces particules de silice sont les suivants : un mélange d’alcools utilisé comme solvant et composé d’éthanol absolu (AnalaR NORMAPUR, VWR Chemicals) et de butan-2-ol (99% Acros organics), le réactif principal, l’orthosilicate de tétraéthyle (TEOS, 99% Alfa Aesar), et le catalyseur de la réaction de condensation l’ammoniaque, (25% AnalaR NORMAPUR, VWR Chemicals).

Rôle de la concentration du catalyseur dans la synthèse

La première étude porte sur la concentration en catalyseur ajouté au début et à différents instants de la synthèse. Le but est d’ajouter de l’ammoniaque en forte concentration pour avantager la condensation, c’est-à-dire la croissance, et ainsi arrêter instantanément ou empêcher l’hydrolyse formant les noyaux. Chacune des différentes synthèses a été répétée 3 fois pour que les résultats soient confirmés.

Billes de 343 nm de diamètre avec ajout du catalyseur en une seule fois au
début de la synthèse.
Dans un premier temps, nous avons donc cherché à synthétiser des billes de diamètre proche de 350 nm en reprenant une synthèse de la thèse de Phan Ngoc Hong en diminuant le volume de TEOS et en augmentant la concentration en ammoniaque. En effet, la synthèse initiale consistait à réaliser 4 ajouts de 3 mL de TEOS espacés de 2 heures dans 80 mL d’éthanol, 20 mL de butan-2-ol, 8 mL d’eau désionisée et seulement 7 mL d’ammoniaque alors que notre synthèse ne comporte qu’un seul ajout de 3 mL de TEOS et 14 mL d’ammoniaque. Cette synthèse nous a permis de trouver une méthode simple, comportant une seule étape pour réaliser des billes de 343 nm (voir figure 1.10), diamètre que nous devons utiliser pour la réalisation de nos opales. Nous avons donc réalisé toutes les billes de silice de 343 nm de diamètre utilisées au cours de cette thèse de la façon suivante : dans 100 mL de solvant alcoolique (80 mL d’éthanol et 20 mL de butan-2-ol), 3 mL de TEOS sont ajoutés rapidement puis mélangés fortement pendant 10 minutes. Après ces 10 minutes, un mélange de 14 mL d’ammoniaque à 25% et 8 mL d’eau désionisée est ajouté tout aussi rapidement. Le tout est agité pendant 2 h avant que la réaction soit fortement ralentie (presque arrêtée) avec 200 mL d’éthanol absolu.

Billes de 600 nm de diamètre avec ajout du catalyseur en une seule fois au
début de la synthèse.
Afin de poursuivre la croissance des billes jusqu’à des diamètres de l’ordre de 600 nm, nous avons réalisé cette synthèse en plusieurs étapes suivant la méthode de Bogush et al. en ajoutant du réactif toutes les deux heures au goutte à goutte pour qu’aucun nouveau noyau se forme par hydrolyse. Ainsi à partir des paramètres utilisés pour la synthèse de billes de 343 nm, nous avons réalisé une synthèse en plusieurs ajouts de réactif pour obtenir des billes de grand diamètre. Pour cela, dans 100 mL de solvant alcoolique (80 mL d’éthanol et 20 mL de butan-2-ol), 3 mL de TEOS sont ajoutés rapidement puis mélangés fortement pendant 10 minutes. Après ces 10 minutes, un mélange de 14 mL d’ammoniaque à 25% et 8 mL d’eau désionisée est ajouté tout aussi rapidement. Le tout est agité pendant 2 h puis, après un prélèvement de 50µL de cette solution de billes (qui permettra de contrôler la taille des billes à cette étape de la synthèse par l’intermédiaire d’images MEB), 3 mL de TEOS sont ajoutés au goutte à goutte (10 mL/h) avant que la solution soit agitée à nouveau pendant 2 h. Ces dernières étapes de prélèvement, d’ajout de TEOS et d’agitation pendant 2 h sont répétés 3 fois au total avant que la réaction soit fortement ralentie (presque arrêtée) avec 200 mL d’éthanol absolu.

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Table des matières

Introduction générale
1 Synthèse et caractérisation des structures photoniques
1.1 Introduction
1.2 Synthèse des nanosphères de silice
1.2.1 Principe de la synthèse des nano-billes de silice
1.2.2 Rôle de la concentration du catalyseur dans la synthèse
1.2.3 Rôle de la durée de l’étape d’hydrolyse
1.3 Synthèse des opales
1.3.1 Introduction sur les méthodes de synthèse d’opales directes
1.3.2 Caractérisation par mesures de réflectivité spéculaire
1.3.3 Synthèse d’opales à partir de billes de 343 nm de diamètre
1.3.4 Synthèse d’opales à partir de billes de 240 nm de diamètre
1.4 Réalisation de défauts planaires intégrés dans les opales
1.4.1 Introduction
1.4.2 Simulations de l’intégration d’un mode de défaut en silice pulvérisée.
1.4.3 Réalisation et caractérisation d’opales avec défaut en silice pulvérisée.
1.5 Synthèse d’opales inverses
1.5.1 Introduction
1.5.2 Etapes de synthèse des opales inverses
1.5.3 Réduction du temps d’inversion
1.5.4 Optimisation de l’homogénéité et des propriétés optiques des opales
inverses
1.6 Conclusion
2 Manipulation de la fluorescence de nano-émetteurs par des hétérostructures à base d’opales directes.
2.1 Introduction
2.2 Spectroscopie de fluorescence résolue en angle
2.2.1 Principe des mesures de fluorescence résolues en angle
2.2.2 Un exemple de mesures
2.3 Modification du diagramme d’émission de nanocristaux par des
opales directes de billes de silice
2.3.1 Nanocristaux infiltrés dans une opale directe de billes de silice :
travaux de thèse de Céline Vion
2.3.2 Nanocristaux déposés sous une opale directe de billes de silice
2.4 Modification du diagramme d’émission de nanocristaux par des
hétérostructures composées d’une couche de silice entre deux
opales directes de billes de silice
2.4.1 Nanocristaux déposés dans une hétérostructure d’opale avec défaut
planaire : travaux de thèse de Phan Ngoc Hong
2.4.2 Diagramme d’émission de nanocristaux déposés sous l’hétérostructure
2.4.3 Elimination de l’effet de bande interdite de l’opale
2.5 Application : caractérisation spectrale sans spectromètre d’une
source inconnue
2.5.1 Largeur spectrale maximale de la source mesurable sur les diagrammes d’émission
2.5.2 Différenciation de deux sources
2.6 Conclusion
3 Polymères à empreintes de nanocristaux
3.1 Introduction
3.2 Nanoparticules cibles : Nanocristaux fluorescents avec fonctionnalisation carboxyle
3.2.1 Propriétés de surface des nanocristaux
3.2.2 Propriétés optiques des nanocristaux
3.2.3 Principe des mesures d’intensité par spectroscopie de fluorescence
3.3 Réalisation du polymère à empreintes de nanocristaux carboxyle
3.3.1 Synthèse du polymère à empreintes de nanocristaux carboxyle
3.3.2 Efficacité de l’extraction des nanocristaux cibles
3.4 Caractérisation du capteur
3.4.1 Étude de la sensibilité du capteur
3.4.2 Étude de la spécificité du capteur
3.4.3 Étude de la sélectivité du capteur
3.4.4 Étude de la résistance du capteur
3.5 Conclusion
4 Opales inverses en polymère à empreintes pour la détection de nanoparticules.
4.1 Introduction
4.2 Réalisation du capteur en opale inverse à empreintes de nanocristaux
4.2.1 Synthèse et caractérisation de l’opale inverse
4.2.2 Caractérisation des empreintes
4.3 Conditions de mesures de réflectivité pour la détection des nanocristaux
4.3.1 Mesures sans déplacement de l’échantillon
4.3.2 Mesures après 4 heures de séchage
4.3.3 Gonflement du capteur en fonction du pH
4.4 Caractérisation du capteur de nanocristaux
4.4.1 Mesures à différentes concentrations en nanocristaux
4.4.2 Étude de la spécificité du capteur
4.4.3 Étude de la sélectivité du capteur
4.4.4 Étude de la résistance du capteur
4.5 Conclusion
Conclusion générale

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