Télécharger le fichier pdf d’un mémoire de fin d’études
Méthodes d’émulsification à faible énergie
Nanoémulsification spontanée
Cette technique se déroule en trois étapes :
i. La première consiste à préparer une solution organique homogène pouvant contenir une huile, un agent stabilisant, un solvant miscible à l’eau en différentes proportions.
ii. Cette phase organique est dans un second temps injectée dans une phase aqueuse sous agitation magnétique afin de former une émulsion.
iii. Dans un dernier temps, le solvant est évaporé sous pression réduite pour récupérer l’émulsion (Solans and Solé, 2012).
En effet, lorsqu’une solution organique homogène (phase huileuse, agent stabilisant, solvant miscible à l’eau) est mélangée à une phase aqueuse, des gouttelettes d’huile se forment spontanément. Le mécanisme dépend du mouvement que la substance dispersible dans l’eau effectue de la phase huileuse vers la phase aqueuse. Ceci entraîne une turbulence interfaciale et donc la formation de gouttelettes d’huile spontanées (McClements and Rao, 2011a). Cette méthode peut produire des NEs à température ambiante et aucun dispositif spécial n’est requis (Figure 3). Cependant, les conditions expérimentales rapportées dans la littérature afin d’obtenir des gouttelettes dans la gamme nanométrique est liée à l’usage d’un haut ratio solvant / huile (Li et al., 2011). L’émulsification spontanée est essentiellement soumise à la tension interfaciale, à la viscoélasticité de l’interface, à la région de transition de phase, à la structure de l’agent tensioactif et à la concentration en surfactant (Setya et al., 2014). Dans l’industrie pharmaceutique, les systèmes préparés en utilisant cette méthode sont généralement appelés systèmes de délivrance de médicaments auto-émulsifiants (SEDDS) ou systèmes de délivrance de médicaments auto-nano-émulsifiants (SNEDDS) (Çinar, 2017).
Méthodes d’émulsification par inversion de phase
Ces méthodes utilisent l’énergie chimique libérée à cause des transitions de phase pendant le processus d’émulsification (Anandharamakrishnan, 2014). La transition de phase est obtenue en modifiant la composition à température constante ou en modifiant la température à composition constante (Singh et al., 2017).
Température d’inversion de phase (TIP ou PIT)
Dans cette méthode, la température est modifiée à composition constante. Les agents tensioactifs non ioniques qui ont une solubilité dépendante de la température comme les agents tensioactifs polyéthoxylés jouent un rôle important. L’émulsification est obtenue en modifiant les affinités des surfactants pour l’eau et l’huile en fonction de la température (Chime and Attama, 2014; Lovelyn and Attama, 2011) (Figure 4).
Pendant le chauffage des tensioactifs polyéthoxylés, ils deviennent lipophiles en raison de la déshydratation des groupes polyoxyéthylène. Par conséquent, cette circonstance établit le principe de la production de NEs par la méthode PIT (Anandharamakrishnan, 2014). Néanmoins, il a été observé que bien que l’émulsification soit spontanée à la température PIT, le taux de coalescence est très rapide et les émulsions sont très instables (Ee et al., 2008). Il a été rapporté que des gouttelettes d’émulsion stables et fines peuvent être produites par refroidissement rapide de l’émulsion près de la température du PIT (Patil and Waghmare, 2013; Tadros et al., 2004).
Composition d’inversion de phase (CIP ou PIC)
L’inversion de phase est effectuée par variation de la composition du système, à température constante. Les composants (huile ou eau) sont ajoutés progressivement au reste du système (eau et tensioactif ou huile et tensioactif, respectivement). Cette technique est souvent plus utilisée que la précédente car l’addition d’un composé à un grand volume d’émulsion est souvent plus simple que d’opérer un brusque changement de température du système (Gutiérrez et al., 2008; Izquierdo et al., 2002; Sadurní et al., 2005; Solans and Solé, 2012).
Caractérisation des nanoémulsions
Analyse granulométrique
Diffusion dynamique de la lumière (DLS)
Le principe de la DLS repose sur le mouvement brownien des gouttelettes et la diffusion de la lumière par celles-ci. Ainsi, les petites gouttelettes se déplacent plus rapidement que les grosses gouttelettes sous l’effet du mouvement brownien. Les appareils permettant la DLS projettent un faisceau laser sur l’échantillon. Puis, des dispositifs optiques adaptés mesurent la fluctuation de l’intensité de la lumière diffusée (Tscharnuter, 2000). Le diamètre mesuré par DLS est le diamètre hydrodynamique DH et défini comme le diamètre d’une sphère équivalente qui a le même coefficient de diffusion translationnelle que la gouttelette. Il est donné par l’équation de Stokes-Einstein (Bizmark et al., 2014):
Où ηc est la viscosité de la phase continue (Pa.s), D est le coefficient de diffusion translationnelle (m2.s -1), kB est la constante de Boltzmann (J.K-1) et T est la température absolue (K).
Deux théories peuvent être utilisées pour l’interprétation de la diffusion de la lumière :
La première est la théorie de Rayleigh qui est appliquée pour des tailles de particules plus petites que la longueur d’onde de la lumière utilisée (λ) (typiquement DH < λ/10, λ = 633 nm pour le laser hélium-néon actuellement utilisé dans certains appareils). Les gouttelettes de cette taille diffusent la lumière de façon isotrope, c’est-à-dire que la lumière diffuse avec la même intensité dans toutes les directions. Cette intensité est proportionnelle à DH6 et à 1/ λ4.
La deuxième est la théorie de Mie. Celle-ci suggère que pour les tailles des gouttelettes λ > DH > λ/10, la diffusion devient anisotrope (dépendante de la direction), et quand DH ≥ λ l’intensité de la lumière diffusée montre un minimum et un maximum de diffusion.
La DLS permet également de calculer le PDI de la distribution de taille. Cependant, quand la distribution de taille est bimodale ou polymodale, l’interprétation de la diffusion de la lumière devient compliquée et les résultats deviennent moins représentatifs (Benita and Levy, 1993; Jamting et al., 2011).
Microscopie
La microscopie peut être utilisée comme technique d’imagerie directe pour les NEs. En plus de fournir des informations importantes sur la morphologie et la structure des NEs, les techniques de microscopie peuvent également fournir des informations précieuses sur leur taille. Elles sont souvent utilisées en complément d’autres techniques de dimensionnement (Hosseini et al., 2015). Différentes techniques de microscopie sont disponibles, les plus couramment utilisées pour analyser les NEs étant la microscopie électronique (Li et al., 2017), la microscopie confocale à balayage laser (LSCM) (Su and Zhong, 2016) et la microscopie à force atomique (AFM) (Ghasemi et al., 2018). Ces techniques ont généralement une meilleure résolution et sont plus sensibles que la microscopie optique conventionnelle.
Charge de surface des nano-gouttelettes
Les gouttelettes d’une NE possèdent généralement une charge électrique à cause de l’adsorption de surfactants ioniques, de nanoparticules solides, d’ions minéraux ou de biopolymères à leur surface. La charge des gouttelettes joue un rôle important dans la stabilité des NEs et leur adhésion sur les membranes biologiques lors d’une application thérapeutique (McClements, 2011b). La charge de gouttelettes est reflétée par le potentiel au plan du cisaillement (ou potentiel Zêta) (Figure 5).
La méthode la plus répandue, pour la mesure du potentiel Zêta, est basée sur la mesure de la mobilité électrophorétique (UE) des particules. Dans cette méthode, l’échantillon est soumis à un champ électrique. Les gouttelettes vont alors se déplacer avec une vitesse qui dépend du champ électrique appliqué, de la constante diélectrique (εr), de la viscosité de la phase continue (ηc) et du potentiel Zêta (ζ). L’équation de Henry permet de calculer le potentiel Zêta à partir de la mobilité électrophorétique : = ζ ( ) ( )
où est f(Ka) est la fonction d’Henry qui dépend du rapport du rayon de la goutte et de l’épaisseur de la double couche électrique (Ali, 2016).
Propriétés physicochimiques des nanoémulsions
Les caractéristiques physico-chimiques des NEs, telles que leurs propriétés optiques et rhéologiques, jouent un rôle majeur dans la détermination de leur aptitude à des applications particulières. Les propriétés optiques et rhéologiques des NEs sont principalement déterminées par leur composition et leur structure.
Propriétés optiques
Les propriétés optiques des NEs dépendent à la fois de la manière dont la lumière est diffusée et des effets d’absorption (Mason et al., 2006; McClements, 2002a; Michels et al., 2008). La turbidité ou l’opacité d’une nanoémulsion dépend du profil de diffusion de la lumière, qui dépend de la concentration, de la taille et du contraste de l’indice de réfraction des gouttelettes. La couleur d’une nanoémulsion dépend de la présence de tout chromophore qui absorbe sélectivement la lumière à des longueurs d’onde particulières, et la présence de gouttelettes diffusant la lumière différemment à différentes longueurs d’onde. La diffusion de la lumière par des gouttelettes est généralement très faible lorsque leurs dimensions sont beaucoup plus petites que la longueur d’onde de la lumière, ce qui conduit à un système optiquement clair (Figure 6).
Propriétés rhéologiques et viscosité des nanoémulsions
Propriétés rhéologiques
La rhéologie est la discipline scientifique qui traite de la déformation et de l’écoulement de la matière (Mehrnia et al., 2017; Rao, 2013). La rhéologie d’une nanoémulsion déterminera sa capacité à traverser un tuyau, l’efficacité des processus de mélange et ses attributs sensoriels (tels que la douceur, l’onctuosité ou la sensation en bouche). Les propriétés rhéologiques des NEs peuvent varier considérablement en fonction de leur composition, de leurs interactions et de leur structure, allant des liquides à faible viscosité aux matériaux semi-solides (Berli et al., 2005; Genovese et al., 2007). Les propriétés rhéologiques d’une NE sont caractérisées par la mesure de la relation entre la contrainte de cisaillement appliquée et la vitesse résultante de la contrainte de cisaillement (liquides ou solides). Les paramètres les plus couramment mesurés sur les NEs sont généralement la viscosité apparente du cisaillement (η) ou le module de cisaillement dynamique (G), mais d’autres paramètres peuvent être plus importants pour certaines applications (Mehrnia et al., 2017). Les mesures des propriétés rhéologiques des NEs peuvent fournir des informations précieuses sur l’organisation structurelle et les interactions des gouttelettes qu’elles contiennent (Quemada and Berli, 2002; Tadros, 2011). Les facteurs les plus importants qui déterminent la rhéologie des NEs sont les interactions entre la viscosité de la phase continue, la concentration en gouttelettes et la taille des gouttelettes (McClements and Jafari, 2018).
Viscosité
Nanoémulsion diluée et nanoémulsion concentrée
Dans les NEs diluées ( <5%), les gouttelettes peuvent être considérées comme agissant indépendamment les unes des autres, c’est-à-dire que le profil d’écoulement autour d’une gouttelette n’a pas d’impact sur le profil d’écoulement autour d’une autre gouttelette. En première approximation, la viscosité d’une nanoémulsion diluée peut être décrite par l’expression de Albert Einstein (Hunter, 2001): = ( + . ) ( )
Ici, η est la viscosité de la nanoémulsion, η0 est la viscosité de la phase continue, et est la fraction volumique de la phase dispersée. Cette équation prédit que la viscosité d’une nanoémulsion diluée devrait augmenter linéairement à mesure que la concentration des gouttelettes augmente. Cependant, lorsque dépasse environ 5%, les gouttelettes commencent à interagir par des interactions hydrodynamiques et colloïdales qui peuvent avoir un impact marqué sur la viscosité de cisaillement (Tadros, 2011). Dans ces circonstances, la viscosité de cisaillement est généralement nettement supérieure à celle prédite par l’équation d’Einstein en fonction de la nature des interactions colloïdales entre les gouttelettes (Figure 7).
|
Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I : GENERALITES SUR LES NANOEMULSIONS (NEs)
I.1. Méthodes de formulation et de caractérisation des nanoémulsions
I.1.1. Méthodes de formulation
I.1.1.1. Méthodes d’émulsification à haute énergie
I.1.1.1.1. Homogénéisation à haute pression
I.1.1.1.2. Emulsification par ultrasonication
I.1.1.1.3. Microfluidisation
I.1.1.2. Méthodes d’émulsification à faible énergie
I.1.1.2.1. Nanoémulsification spontanée
I.1.1.2.2. Méthodes d’émulsification par inversion de phase
I.1.1.2.2.1. Température d’inversion de phase (TIP ou PIT)
I.1.1.2.2.2. Composition d’inversion de phase (CIP ou PIC)
I.1.2. Caractérisation des nanoémulsions
I.1.2.1. Analyse granulométrique
I.1.2.1.1. Diffusion dynamique de la lumière (DLS)
I.1.2.1.2. Microscopie
I.1.2.2. Charge de surface des nano-gouttelettes
I.2. Propriétés physicochimiques des nanoémulsions
I.2.1. Propriétés optiques
I.2.2. Propriétés rhéologiques et viscosité des nanoémulsions
I.2.2.1. Propriétés rhéologiques
I.2.2.2. Viscosité
I.2.2.2.1. Nanoémulsion diluée et nanoémulsion concentrée
I.2.2.2.2. Nanoémulsion et émulsion
I.3. Phénomènes d’instabilité des NEs
I.3.1. Sédimentation et crémage
I.3.2. Floculation
I.3.3. Coalescence
I.3.4. Mûrissement d’Ostwald
I.3.5. Inversion de phase
CHAPITRE II : SYNTHESE DE NANOPARTICULES A PARTIR DES NANOEMULIONS (NEs)
II.1. Nanoparticules polymériques
II.1.1. Définition des nanoparticules polymériques
II.1.2. Techniques de préparation de nanoparticules polymériques à partir des nanoemulsions
II.1.2.1. Dispersion de polymères
II.1.2.1.1. Méthode d’évaporation de solvant
II.1.2.1.2. Effet Ouzo ou émulsification spontanée
II.1.2.2. Polymérisation de monomères
II.1.2.2.1. Polymérisation en nanoémulsion
II.1.2.2.2. Polymérisation interfaciale
II.2. Nanoparticules inorganiques
II.2.1. Intêrets des nanoparticules inorganiques
II.2.2. Techniques de préparation de nanoparticules inorganiques à partir des nanoémulsions
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Télécharger le rapport complet