Synthèse bibliographique sur les arbovirus

Synthèse bibliographique sur les arbovirus

Généralités

Les arbovirus (terme dérivé de l’anglo-saxon arthropod-borne-virus) sont des virus transmis à un hôte récepteur par un arthropode hématophage : moustique, tique, phlébotome ou culicoïdes. Ces virus se multiplient dans l’arthropode vecteur avant d’être transmis à un hôte vertébré. Le virus est ainsi entretenu dans le milieu naturel grâce à un cycle permanent entre le vecteur et l’hôte (Dussart et al., 2012).

Epidémiologie des arbovirus

Les arbovirus constituent un fardeau sanitaire profond et croissant, causant plus d’un milliard de cas et un million de décès annuellement, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS, 2020). La mondialisation croissante, les migrations et l’évolution de l’utilisation des terres permettent plus d’opportunités pour la propagation des infections. De plus, le réchauffement de la planète élargit la répartition géographique des virus endémiques et de leurs vecteurs (Pingen et al., 2017). La fréquence et l’ampleur des épidémies d’arbovirus ont augmenté dans l’ensemble des régions géographiques où les virus étaient déjà ou nouvellement établies. Dans le monde, jusqu’à 400 millions de personnes sont infectés chaque année par le virus de la dengue, et plusieurs millions par d’autres arbovirus qui causent des épidémies, comme les virus Zika, de la fièvre jaune et chikungunya ( Dussart et al., 2012;Bhatt et al., 2013; Guzman and Harris, 2015; Gatherer and Kohl, 2016).

Classification des arbovirus

Les arbovirus sont génétiquement très divers et représentent l’un des plus grands groupes de virus, avec plus de 600 membres, dont au moins 80 sont des agents pathogènes humains connus (Conway et al., 2014). Les arbovirus les plus importants transmis par les moustiques se trouvent dans trois familles distinctes : les Flaviviridae, qui comprennent les virus de la dengue (DENV), Zika (ZIKV), fièvre jaune (YFV) et West Nile (WNV) ; les Togaviridae composés des virus du chikungunya (CHIKV), de la forêt de Semliki (SFV) et de l’encéphalite équine vénézuélienne (VEEV) ; et les Bunyaviridae dont le virus de la Crosse et de la fièvre hémorragique à Crimée Congo (Gould and Solomon, 2008; Ryman and Klimstra, 2008; Burt et al., 2012).

Cycle de transmission des arbovirus

Un cycle typique d’arbovirus est présenté à la figure 2. Les arbovirus circulent naturellement dans un cycle enzootique entre les arthropodes hématophages et un hôte amplificateur ou réservoir (Wu et al., 2019). L’Homme peut constituer un hôte accidentel ou un cul de sac épidémiologique de ce cycle. C’est le cas du virus West Nile (Weaver and Barrett, 2004) qui n’entraîne pas une virémie suffisamment importante pour permettre à un moustique de se contaminer à partir d’un Homme virémique. Pour d’autres arbovirus comme le virus de la Fièvre de la Vallée du Rift, il existe un cycle épizootique intermédiaire en milieu rural avec une transmission entre des animaux domestiques et des vecteurs. L’Homme peut se contaminer soit à partir du cycle enzootique soit à partir du cycle épizootique et initier un cycle épidémique avec les vecteurs en milieu urbain (Failloux and Moutailler, 2015). Tous les moustiques ne peuvent pas transmettre les arbovirus aux humains. Il y a quatre critères principaux qui font qu’un moustique puisse transmettre un agent pathogène donné : (1) il doit y avoir une forte densité de moustiques dans l’environnement humain ; (2) le moustique doit piquer principalement les humains, donc être anthropophile ; (3) après l’infection, le moustique doit survivre assez longtemps pour transmettre le virus par piqûre. Ces trois critères peuvent être observés grâce à des études entomologiques sur le terrain. Et le quatrième critère, que l’on observe en laboratoire, est la compétence vectorielle. La compétence vectorielle, ainsi que d’autres paramètres, sont inclus dans la même formule, appelée « capacité vectorielle », qui donne la capacité d’un insecte à jouer un rôle de vecteur dans la vraie vie, sur le terrain (Shaw and Catteruccia, 2019). Elle est déterminée à partir de l’analyse de la salive du moustique (Heitmann et al., 2018).

Chez l’hôte vertébré
La réplication du virus chez l’hôte vertébré commence au niveau du site local d’injection de la salive infectée, et les virus sont systématiquement propagés par le système lymphatique et le sang vers différents organes. La réplication du virus dans l’organisme et sa présence dans le sang (virémie) peuvent entraîner chez l’hôte des taux de virus suffisants pour infecter un vecteur sensible lorsqu’il prend son repas sanguin, ce qui permet d’initier un cycle de transmission épidémique (Warrilow, 2017).

Chez l’hôte invertébré
En tant que vecteur naturel, un moustique peut acquérir accidentellement un virus dans le sang d’un hôte infecté. Les virus établissent ensuite une infection dans les cellules épithéliales du moustique en franchissant la barrière physique et immunitaire de l’épithélium, puis se propagent dans l’hémocœle du moustique. Après cela, les virus infectent d’autres tissus, tels que les ovaires, le système nerveux, les glandes salivaires et la salive. Ainsi, le moustique infecté devient compétent pour transmettre les virus à des hôtes naïfs par l’alimentation sanguine (Wu et al., 2019). Le temps qu’il faut entre l’infection initiale de l’arthropode et la progression vers la salive est appelée période d’incubation extrinsèque. Certains arthropodes infectés sont capables de maintenir des arbovirus sans implication d’hôtes vertébrés par la transmission transovarienne ou verticale.

Piqûre et salive des moustiques vecteurs d’arbovirus 

Seules les femelles de moustiques se gorgent de sang et le repas sanguin est nécessaire à la maturation de leurs œufs. Lors d’un repas de sang, les insectes sont soumis à des réponses défensives du vertébré, y compris l’hémostase et la réponse immunitaire. Dans ce contexte, la salive injectée par le moustique joue plusieurs rôles. En effet, les protéines de la salive ont des propriétés angiogéniques, anti hémostatiques, anti-inflammatoires et immunomodulatrices (Gillespie et al., 2000). Parmi ces protéines salivaires, certains comme l’ Aegyptin (Chagas et al., 2014) et la triplatine (Ma et al., 2011) sont identifiées comme des inhibiteurs de la coagulation sanguine. Il a également été rapporté que la salive est capable d’augmenter les infections virales (Schneider et al., 2006). Dans certains cas, la co-injection de virus et de salive potentialise l’infection virale du vertébré (Surasombatpattana et al., 2014). Dans d’autres cas, la pré-exposition à la salive augmente la mortalité due à une infection virale ultérieure par piqûre de moustique (Reagan et al., 2012). Ainsi, certains de ces composants salivaires ont pu être identifiés. En effet, il a été démontré qu’une protéine de 34 kilodaltons (kDa) provenant du moustique Aedes aegypti peut favoriser la réplication de la dengue dans les kératinocytes humains ( Surasombatpattana et al., 2014; Conway et al., 2016). Récemment, les protéines LTRIN et AgBR1 d’Ae. Aegypti ont également été identifiées comme des protéines facilitant la transmission du virus ZIKA (Jin et al., 2018 ;Uraki et al., 2019), de même que la protéine AaSG34 dans le cas de transmission du sérotype 2 de la dengue (DENV2). Enfin, il a été montré que la protéine AaVA-1 facilite la transmission du virus de la dengue et du virus Zika en activant l’autophagie dans les cellules immunitaires de l’hôte de la lignée des monocytes (Sun et al., 2020). La caractérisation de ces protéines salivaires pourrait aboutir à une identification de cibles vaccinales dans un contexte où il n’existe ni traitement symptomatique ni vaccin pour la plupart des arboviroses. Sachant que lors de la piqûre de l’hôte vertébré par le moustique, la salive est inoculée avec le virus, cette salive est utilisée au laboratoire après infection artificielle pour prouver la compétence vectorielle de plusieurs espèces de moustiques (Ndiaye et al., 2016). Vu l’importance de ce liquide biologique, plusieurs méthodes ont été développées pour collecter la salive des moustiques. Les méthodes comprennent l’utilisation de tubes capillaires remplis de différents types de milieux tels que le sang défibriné (Aitken, 1977), l’huile d’immersion (Colton et al., 2005; Smith et al., 2005), l’huile minérale (Hurlbut, 1966) ou le sérum bovin fœtal (Mores et al., 2007). Toutefois, dans la plupart des cas, la présence des marqueurs salivaires n’est pas constatée dans le contenu des tubes capillaires après l’expérience de salivation des moustiques. Par ailleurs, il a été montré que l’utilisation de molécules telles que la pilocarpine ou la cevimeline, peut induire la salivation chez les mammifères mais également chez les arthropodes (Boorman, 1987). L’utilisation de ces molécules au laboratoire pourrait donc améliorer les rendements de salivation des moustiques et faciliter ainsi les études de compétence vectorielle ou de protéomie.

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Table des matières

Introduction
Chapitre 1 Synthèse bibliographique sur les arbovirus
Généralités
Epidémiologie des arbovirus
Classification des arbovirus
Cycle de transmission des arbovirus
Chez l’hôte vertébré
Chez l’hôte invertébré
Piqûre et salive des moustiques vecteurs d’arbovirus
Chapitre 2 Matériel et Méthodes
Espèces de moustiques utilisées
Origine des moustiques
Technique d’échantillonnage
Elevage des moustiques
Technique de collecte de salive
Préparation du dispositif de salivation
Collecte de salive de moustique
Technique de Dot blot
Analyse des données
Chapitre 3 Résultats et discussion
Résultats
Analyse des échantillons de Cx. quinquefasciatus collectées sans stimulateur
Analyse des échantillons de Cx. quinquefasciatus collectées avec isopto-pilocarpine
Analyse des échantillons de Cx. quinquefasciatus collectées avec le chlorhydrate de pilocarpine
Analyse des échantillons de Cx. quinquefasciatus collectées avec le chlorhydrate de céviméline hémidrate
Analyse des échantillons d’Ae. aegypti collectées sans stimulateur
Analyse des échantillons d’Ae. aegypti collectées avec le chlorhydrate de pilocarpine
Discussion
Conclusion
Références bibliographiques

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