La prise en charge de l’infection à VIH a connu des avancées considérables depuis l’avènement des antirétroviraux. C’est ainsi que, de maladie grave et mortelle, elle est devenue une pathologie chronique, compatible avec une vie normale. Cependant, de nombreuses études, telles que SMART [101] ou VESPA 2 [102] font état de complications de nature cardiovasculaires, qui sont à l’origine de nouvelles causes de mortalité liées à l’infection chronique par le virus. En effet, la mortalité par complications cardiovasculaires est devenue la quatrième cause de mortalité chez ces patients, et il semble que peu de patients et de médecins en tiennent compte avec la vigilance requise [116].
De récentes recommandations de pratique clinique rédigées dans le rapport sur la prise en charge des patients vivant avec le VIH (PVVIH), coordonné par le Professeur Morlat [103] en 2013, ou dans les guidelines EACS de 2013 [104], insistent sur l’importance du dépistage et de la prise en charge de ces complications.
En Afrique l’augmentation exponentielle de l’accès à la trithérapie a eu comme corollaire une baisse importante des décès liés au SIDA. Cependant les désordres métaboliques et les maladies cardiovasculaires qui occupent une part croissante dans la mortalité et la morbidité des patients VIH positifs (PVVIH) sous traitement antirétroviral (TARV), sont peu documentés dans ces pays à ressources limitées. Parmi les facteurs de risque cardio-vasculaires, le syndrome métabolique représente une entité pathologique qui concerne une fraction relativement importante de la population et qui expose les individus à un risque élevé de maladies cardiovasculaires et/ou de diabète de type 2. En Afrique SubSaharienne, il existe peu de données sur le risque cardiovasculaire et il est plus difficile de se faire une idée exacte de l’évolution des questions liées à ces risques dans un contexte aussi hétérogène, 3 études menées au Rwanda, au Bénin et en Côte d’Ivoire trouvaient une prévalence du syndrome métabolique et des facteurs associés chez les personnes vivant avec le VIH sous traitement antirétroviral variant entre 16,7% et 34%, tandis qu’un essai clinique randomisé multi pays (Burkina Faso, Cameroun et Sénégal) a retrouvé une prévalence du syndrome métabolique de 10,8% .
GENERALITES SUR L’INFECTION PAR LE VIH
EPIDEMIOLOGIE DE L’INFECTION PAR LE VIH
La situation mondiale de l’épidémie
Le sida a plus de 30 ans. Les premiers cas ont été décrits aux Etats-Unis d’Amérique en 1981. L’épidémie n’épargne aucune région du monde, cependant, la plupart des personnes infectées par le VIH (PVVIH) vivent en Afrique subsaharienne (22,5 millions) et en Asie (4,9 millions). Même lorsqu’elle touche d’abord des groupes très exposés comme les usagers de drogues ou les travailleuses du sexe, elle a tendance à diffuser ensuite dans la population générale. Après avoir connu un pic au milieu des années 1990, l’épidémie semble se stabiliser dans la plupart des régions du monde. L »évolution de l’épidémie de VIH/Sida dans le monde a résolument pris un nouveau visage au cours de ces dernières années. En 2011 le rapport de l’ONUSIDA a montré que la croissance globale de l’épidémie mondiale de l’infection par le VIH/SIDA semblait s’être stabilisée. Les statistiques ont révélé une diminution du nombre de nouvelles infections par le VIH et du nombre de décès liés au SIDA. En décembre 2010, l’ONUSIDA estimait à 34 millions le nombre de PVVIH, soit une hausse de 17% par rapport à 2001. Au cours de cette même année, le nombre de nouvelles infections par le VIH était estimé à 2,7 millions et le nombre de décès liés au SIDA à 1,8 millions. . Fin 2014, 36,9 millions de personnes vivaient avec le VIH (PVVIH). Cette augmentation du nombre de PVVIH dans le monde est due à la réduction significative de la mortalité liée au SIDA. A la fin de l’année 2014 deux millions de personnes ont été nouvellement infectées, dont 240 000 enfants, 1,2 millions sont décédées de causes liées au sida. De 2000 à 2015, le nombre de nouvelles infections a baissé de 35%, le nombre de décès liés au sida a baissé de 24%. En 2014, plus de 15,8 millions de PVVIH étaient sous thérapeutique antirétrovirale (TARV), soit plus de 40% des 36,9 millions de PVVIH. Environ 7,8 millions de vie ont été sauvées au cours des 15 dernières années. Ces bons résultats ne doivent pas faire oublier que seulement 53% des personnes infectées par le VIH connaissent en 2014 leur statut VIH et que 34 millions de personnes sont décédées depuis le début de l’épidémie.
La transmission hétérosexuelle reste le principal mode de transmission dans le monde. De ce fait près de la moitié des personnes vivant avec le VIH dans le monde sont des femmes. On observe une progression inquiétante de l’épidémie en Europe de l’Est, principalement chez les usagers de drogues, en Afrique australe où se trouve l’épicentre de l’épidémie et, dans une moindre mesure, dans les pays d’Europe de l’Ouest et d’Amérique du Nord où les homosexuels restent très touchés par le VIH [1]. L’objectif 6 du Millénaire pour le développement, à savoir « avoir enrayé la propagation de l’infection à VIH/Sida et avoir commencé à inverser la tendance d’ici à 2015 », a été atteint, en particulier en Afrique. La riposte sanitaire mondiale au VIH est l’une des actions de santé publique les plus remarquables de ces dernières années. Mais, la riposte est inégale selon les Régions, le nombre des nouvelles infections et des décès dépendant du pourcentage des PVVIH sous TARV.
La situation de l’épidémie en Afrique Subsaharienne
L’Afrique subsaharienne abritant à peine 12 % de la population mondiale reste la région la plus durement touchée par le VIH dans le monde, et représente plus des deux tiers (67%) de l’ensemble des personnes vivant avec le VIH et près des trois quarts (72%) des décès liés au sida [2].Ainsi nous supportons encore une part démesurée du poids de l’épidémie mondiale de l’infection par le VIH. L’ONUSIDA estime que 22,9 millions de personnes vivaient avec le VIH en Afrique subsaharienne en 2015 soit près de 68% de toutes les PVVIH dans le monde. Les jeunes femmes et les adolescentes continuent d’être exposées de manière disproportionnée au risque d’infection par le VIH. Il faudra cependant noter que le nombre des adultes et des enfants nouvellement infectés par le VIH dans la Région africaine a baissé de 41% entre 2000 et 2014 passant de 2,3 millions à 1,4 million. C’est la seule Région qui a enregistré un recul constant des nouvelles infections après 2010. Le nombre de personnes mortes de causes liées au sida a diminué de moitié cette dernière décennie : 790 000 en 2014 versus 1,5 million en 2004. La prévalence du VIH en Afrique de l’Ouest et du Centre est beaucoup plus faible qu’en Afrique australe ou on trouve les taux de prévalence les plus élevés dans le monde : 27,4 % au Swaziland, 22,9 % au Lesotho, 21,9% au Botswana, 19,1 en Afrique du Sud. Il faut également noter que si la prévalence du VIH chez les adultes est inférieure à 1% dans trois pays de l’Afrique de l’Ouest (Cap Vert, Niger et Sénégal), 3,9% en Côte d’Ivoire et 1,9% de la population générale du Ghana vivent avec le VIH (ONUSIDA, 2008). Les rapports hétérosexuels restent le moteur principal de l’épidémie en Afrique subsaharienne, avec toujours une importante transmission aux nouveau-nés et aux bébés allaités au sein. L’usage des drogues par voie intraveineuse est un vecteur bien connu de l’épidémie due au VIH sur tous les continents, notamment en Asie, où la prévalence du virus chez les personnes qui s’injectent des drogues atteint 28%. La transmission du VIH liée au partage du matériel d’injection n’est bien documentée que dans quelques pays africains comme l’Afrique du sud, le Kenya, le Nigeria, la Tanzanie (Zanzibar), l’ile Maurice, les Seychelles. L’usage de drogues injectables devient une réalité en Afrique de l’ouest. L’axe routier Abidjan- Lagos est une route de la drogue et un axe où se concentrent des populations vulnérables vis-à-vis du VIH : camionneurs, prostituées, migrants. L’infection chez les femmes jeunes explique la fréquence de la Transmission de la Mère à l’Enfant (TME) dans les PED. Elle représente 90% des infections à VIH chez l’enfant. Près de 90% d’entre eux vivent en Afrique subsaharienne. En 2009, l’ONUSIDA avait lancé un appel en faveur de l’élimination quasi-totale de la transmission de la mère à l’enfant à l’horizon 2015. Pour cela, il y avait trois urgences : prendre conscience de la réalité africaine du sida pédiatrique, prendre en charge les enfants infectés par le VIH, mettre en place des traitements médicaux adaptés chez les enfants et les mères. Les progrès sont réels, le nombre d’enfants de moins de 15 ans nouvellement infectés par le VIH a diminué de 58% entre 2000 et 2014. La lutte contre la TME a permis de prévenir l’infection par le VIH chez 1,4 million d’enfants dans le monde, dont 1,2 million dans la Région africaine.
La transmission par les travailleuses du sexe et la contamination des camionneurs est connue depuis le début de l’épidémie en Afrique subsaharienne. Les travailleuses du sexe sont 13,5 fois plus susceptibles de vivre avec le VIH que les autres femmes. L’épidémie de l’infection à VIH est un fléau chez les homosexuels : le risque pour un homosexuel masculin d’être contaminé par le VIH est 19 fois plus élevé que celui de la population générale. C’est un fait récent en Afrique, alors que ce mode de transmission est connu depuis longtemps en Asie et en Europe. Le sida gagne actuellement du terrain au sein des communautés homosexuelles des pays d’Afrique du nord et du Moyen-Orient. La majorité des hommes qui ont des rapports avec les hommes seraient dans ces pays des bisexuels. Les homosexuels séropositifs sont des utilisateurs peu fréquents du préservatif.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE GENERALITES
I.GENERALITES SUR L’INFECTION PAR LE VIH
1.1.EPIDEMIOLOGIE DE L’INFECTION PAR LE VIH
1.1.1.La situation mondiale de l’épidémie
1.1.2. La situation de l’épidémie en Afrique Subsaharienne
1.1.3. La situation de l’épidémie au Sénégal
1.2.ASPECTS VIROLOGIQUES
1.2.1.Aspects structuraux du virus
1.2.2.Organisation génomique du VIH
1.2.3.Variabilite genetique du VIH
1.2.4.Mécanismes immunopathologiques
1.2.4.1.Modes de transmission du VIH
1.2.4.2.Cellules cibles du VIH
1.2.4.3.Cycle de réplication virale
1.3.HISTOIRE NATURELLE DE L’INFECTION PAR LE VIH
1.3.1. La primo-infection
1.3.2. La phase asymptomatique (latence clinique)
1.3.3. La phase symptomatique/infections opportunistes (SIDA)
1.4.STADES CLINIQUES DE L’INFECTION PAR LE VIH ET CLASSIFICATION
1.4.1.Classification de l’OMS, 1990
1.4.2.Classification CDC, révisée en 1993
1.5.1.Diagnostic Direct
1.5.2.Diagnostic indirect (Sérologie)
1.5.3. Attitude pratique
1.6.TRAITEMENT ANTIRETROVIRAL
1.6.1.Objectifs du traitement antirétroviral
1.6.2.Les moyens thérapeutiques
1.6.3.La politique de prise en charge des PVVIH au Sénégal
1.6.4.Les schémas thérapeutiques
1.6.5.La prévention
II. LE SYNDROME METABOLIQUE
2.1. Historique
2.2. Définition
2.3. Epidémiologie
2.4. Physiopathologie
2.5. Prise en charge du syndrome métabolique
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
I. CADRE D’ÉTUDE : HOPITAL DE MBOUR
1.1. Présentation du Sénégal
1.2. Caractéristiques géophysiques de l’hôpital de M’bour
1.3. Caractéristiques sociodémographiques et religieuses
1.4. Découpage administratif et sanitaire
1.5. Caractéristiques économiques
1.6. Configuration interne du l’établissement public de sante de Mbour
1.6. Organisation de la prise en charge des PVVIH
II. MATERIEL ET METHODES
2.1.Type et période d’étude
2.2. Population d’étude
2.2.1. Critères d’inclusion
2.2.2. Critères de non inclusion
2.3. Le recrutement
2.4.Variables étudiés
2.4.1. Les données épidémio-cliniques
2.4.2. Les données paracliniques
2.5. Définitions opérationnelles
2.6. Analyse des données
2.7. Ethique
2.7.1. Aspects règlementaires
2.7.2. Bénéfices escomptées et risques potentiels
III. RESULTATS
3.1. le sexe
3.2. Présence du syndrome métabolique au sein de la population étudié
Le syndrome métabolique était noté dans 14 cas
3.3.Caractéristiques sociodémographiques des patientes présentant un syndrome métabolique
3.3.1. Le sexe des patientes ayant présenté un syndrome métabolique
3.3.3. Le statut matrimonial des patientes ayant présenté un syndrome métabolique
3.3.4. Le niveau scolaire des patientes ayant présenté un syndrome métabolique
3.3.5. Le salaire mensuel des patientes ayant présenté un syndrome métabolique
3.4. Caractéristiques comportementaux des patientes avec un syndrome métabolique
CONCLUSION