Définitions et terminologie
Décrite pour la première fois en 1886 [25], cette complication métabolique du diabète a vu sa terminologie anglo-saxonne changer au cours du temps. D’abord de coma hyperosmolaire puis de coma hyperosmolaire non cétosique, de coma hyper glycémique hyperosmolaire non cétosique, d’état diabétique hyperosmolaire, de décompensation diabétique hyperosmolaire non acidosique, de coma hyperosmolaire diabétique non cétosique, de diabète hyperosmolaire non acidosique[25] et enfin de syndrome d’hyperglycémie hyperosmolaire (SHH) ou hyperosmolarité diabétique [39]. Le syndrome d’hyperglycémie hyperosmolaire est un état grave, d’installation insidieuse, défini par une osmolarité supérieure à 350 mosm/l due à une hyperglycémie majeure généralement supérieure à 6 g/l (33 mmol/l) et à une hypernatrémie sans cétose [24,30]. L’osmolarité plasmatique (osmP) ou la concentration osmolaire totale d’une solution, se définit comme des concentrations de particules osmotiques par litre de plasma, exprimée en milliosmoles par litre (mosm/l). L’osmolarité plasmatique normale est d’environ 295 mosm/l. L’osmolalité plasmatique se définit comme la concentration des substances osmotiques par kilogramme d’eau plasmatique, exprimée en milliosmole par kilogramme (mosm/kg). Même si en physiologie il existe une différence entre ces deux paramètres, en pratique clinique courante elle est négligeable. De ce fait, par commodité ces deux termes seront confondus pour utiliser le plus souvent celui d’osmolarité plasmatique [18]. L’osmolarité plasmatique peut être mesurée par le delta cryoscopique au point de congélation de plasma ou par la mesure de la résistivité plasmatique. Elle mesure toutes les substances osmotiques actives et inactives présentes dans le plasma, y compris celles qui ne sont pas dosées par l’ionogramme sanguin. En pratique courante nous calculons habituellement l’osmolarité plasmatique grâce à l’ionogramme par la formule suivante: osmP = 2Na⁺(mmol/l) + glycémie (mmol/l) + urée (mmol/l) L’osmolarité plasmatique mesurée est égale à 290 mosm/l. L’osmolarité mesurée est toujours supérieure à l’osmolarité calculée. Cette différence entre l’osmolarité mesurée et l’osmolarité calculée est appelée trou osmotique (TO) et se calcule par la formule [18]. TO = osmPmesurée – osmPcalculée (normale 10 mosm/l) Lorsque cette différence est supérieure à 10mosm/l, il existe la présence d’autres osmoles non dosés dans le sang [18]: certains augmentent à la fois les osmolarités plasmatiques mesurée et calculée et la tonicité plasmatique : mannitol, sorbitol, glycérol. d’autres n’augmentent que les osmolarités plasmatiques mesurée et calculée sans modifier la tonicité plasmatique, puisqu’elles diffusent librement à travers la membrane cellulaire : urée, méthanol, éthanol, éthylène-glycol. L’osmolarité plasmatique active ou tonicité est définie comme la somme des seules substances osmotiquement actives dosées par l’ionogramme sanguin. Elle ne prend pas en considération des substances qui diffusent librement à travers la membrane cellulaire comme l’urée. Elle peut être calculée [18]. Tonicité = 2 Na⁺ (mmol/l) + glycémie (mmol/l) La tonicité régit le mouvement d’eau à travers la membrane cellulaire. En pratique, c’est l’osmolarité plasmatique active qui détermine et renseigne sur l’état d’hydratation du secteur intracellulaire, y compris au niveau cérébral. Toute variation de la tonicité plasmatique conduit à des mouvements transmembranaires d’eau, donc à une variation de l’hydratation intracellulaire. La natrémie corrigée (Na⁺c) est la natrémie que l’on observerait si la glycémie était normale, permet une évaluation précise des pertes hydriques et donc de l’importance de la déshydratation intracellulaire. Elle est calculée par la formule de Katz [39]: Natrémie corrigée = natrémie mesurée× 2 +1/3glycémie (mmol /l)
Signes biologiques
L’hyperosmolarité plasmatique La valeur la plus communément utilisée est celle de 350 mosm/l. L’hyperosmolarité calculée supérieure à 320 mosm/l signe le diagnostic.
La glycémie veineuse La glycémie est souvent supérieure à 33mmol/l (6 g/l) avec des chiffres très variables d’un sujet à l’autre, mais aussi chez un même sujet au cours de la journée [23].
L’ionogramme sanguin La natrémie peut évoluer de différentes façons : Nous pouvons avoir une « fausse hyponatrémie » du fait de l’hyperglycémie responsable d’une dilution du sodium plasmatique en attirant l’eau du secteur intracellulaire vers le secteur extracellulaire. Lorsque la diurèse osmotique est importante, les pertes urinaires sont hypotoniques et la natrémie sera élevée, supérieure à 140 mmo/l. Lorsqu’elle est modérée, la natrémie peut se normaliser. Dans tous les cas, seule la natrémie corrigée permettra d’avoir la bonne valeur [1, 20]. Au début, la kaliémie peut être normale, diminuée ou augmentée, mais dans tous les cas le pool potassique est, lui, abaissé. Une kaliémie souvent élevée, masquant un déficit potassique qui se révélera en cours de traitement [20].
Gaz du sang Dans la forme classique du SHH, il n’existe pas d’acidose métabolique. Le pH est supérieur à 7,30, les bicarbonates plasmatiques supérieurs à 20 mmo/l. Le trou anionique plasmatique (TA) est normal ou discrètement élevé, inférieur à 12mmol/l [20]. Cependant, l’équilibre acido-basique est toujours perturbé lors d’une hyperosmolarité importante, et une acidose métabolique modérée peut être retrouvée dans 50 % des cas [1]. Une élévation franche du trou anionique doit faire rechercher une autre pathologie surajoutée, en particulier une hyperlactatémie en cas d’état de choc associé (infarctus du myocarde, hémorragie, etc.).
Fonction rénale L’insuffisance rénale fonctionnelle est responsable d’une augmentation del’urée et de la créatinine plasmatiques [20].
Autres paramètres biologiques
– L’élévation de l’hématocrite et de la protidémie témoignent de la déshydratation extracellulaire.
– L’hyperleucocytose est habituelle en dehors de toute infection, due au phénomène de démargination [1].
– Une élévation de certains enzymes est fréquente, témoignant de la souffrance tissulaire : élévation de l’amylasémie en dehors de toute pancréatite, élévation des enzymes hépatiques, élévation des CPK en raison d’une rhabdomyolyse [28].
Electroencéphalogramme (EEG) Le SHH peut être responsable des perturbations globales de l’EEG. Elles sont marquées par une activité lente thêta et delta continue ou à renforcement intermittent, associée à des anomalies paroxystiques. Elles sont généralisées ou à prédominance antérieure [25].
La céto-acidose diabétique
La céto-acidose diabétique se définit par une hyperglycémie avec cétose (présence de corps cétoniques dans les urines), puis acidose métabolique. Elle résulte d’une insulinopénie aigue absolue. Dans les cas graves, il s’ensuit un abaissement du pH artériel avec acidose métabolique [11,42]. Il se rencontre surtout, dans le diabète de type 1et touche surtout le sujet jeune [11]. Quatre signes cliniques caractérisent la cétoacidose diabétique : l’odeur acétonique de l’haleine (ou odeur de pomme de rénette ou de vernis à ongle) ; la polypnée acidosique ou polypnée de Kussmaul avec une respiration rapide, ample et bruyante, typiquement à quatre temps ; la déshydratation globale ; les troubles de la conscience de degré variable, mais le plus souvent une simple obnubilation plutôt qu’un coma profond. Il n’y a pas de signes de localisation neurologique, ni de fièvre en principe [11, 42]. Sur le plan biologique, la glycémie est supérieure à 2,5 g/l (13,75 mmol/l), associée à une cétonurie massive (++ ou+++) et une glycosurie; l’osmolarite plasmatique ≤ 290 mosm/l; le pH est inférieur à 7,3 avec une réserve alcaline inférieure 15 mmol/l [11, 42].
Correction de l’hypokaliémie
Les besoins en potassium sont importants. La correction doit être commencée dès le début du traitement à raison de 1 mmol/l de potassium pour 1 UI d’insuline. Il est recommandé d’utiliser un mélange de deux tiers de chlorure de potassium et d’un tiers de phosphate de potassium [35] afin d’éviter une hyperchlorémie et de corriger l’hypophosphatémie souvent présente. Elle doit être adaptée en fonction de la kaliémie qui est suivie toutes les quatre heures [15].
Infections nosocomiales
Elles sont fréquentes sur ce terrain, il peut s’agir :
– d’infections urinaires : les entérobactéries (E. coli) sont les germes les lus rencontrés, on peut également retrouver le pseudomonas sp, les entérobacter sp. Ces germes sont le plus souvent multirésistants. Le diagnostic est suspecté devant la persistance d’un syndrome infectieux associé à des urines troubles. La confirmation bactériologique se fera par des ECBU et des hémocultures répétées qui sont positives seulement dans 30% des cas.
– Pneumopathies nosocomiales : Les pneumopathies d’inhalation peuvent se développer s’il existe des troubles de la conscience. Il peut aussi y avoir une surinfection d’une pneumopathie déjà existante. Chez le malade intubé, les prélèvements bronchiques protégés seront multipliés pour identifier le ou les germes responsables. Ces germes sont multirésistants le plus souvent.
– Il peut survenir une infection sur cathéter.
L’évolution de ces infections nosocomiales peut se faire vers un état de choc se pratique [22].
Autres mesures thérapeutiques
Une antibiothérapie a été instaurée chez 93,33%, elle était probabiliste au début associant une céphalosporine de 3ème génération et une quinolone puis réadaptée en fonction des résultats de prélèvements et des antibiogrammes. L’oxygénothérapie avait été mise en route chez tous les 15 patients. L’intubation et la ventilation artificielle avaient été faites chez 2 patients. Une transfusion a été effectuée chez 2 patients dont l’un avait une anémie sévère avec un taux d’hémoglobine inférieur à 6g/dl et l’autre en préopératoire avec un taux d’hémoglobine à 9g/dl. La prévention de la maladie thromboembolique par des héparines de bas poids moléculaires a été quasi systématique chez tous les 15 patients en dehors de contre-indications majeures. La prévention de l’ulcère de stress était systématique chez tous les 15 patients par un IPP. Tous les 15 patients avaient bénéficié d’un nursing quotidien et d’une asepsie rigoureuse dans les gestes thérapeutiques. Le traitement de l’HTA a été effectué chez 5 patients. Deux patients ont subi un traitement chirurgical, les gestes consistaient à une gastrectomie d’environ 2cm sur la partie antérieure de la grande tuberosité permettant d’évacuer un hématome vieilli sous cardial suite à un ulcère gastrique hémorragique chez l’un et chez l’autre à une amputation du membre inférieur droit.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE: RAPPELS
I. GÉNÉRALITÉS
I.1. Définitions et terminologie
I.2. Historique
I.3. Epidémiologie
I.4. Physiopathologie
I.4.1. Facteurs favorisants
I.4.2. Mécanismes
I.4.2.1. Mécanisme du syndrome d’hyperglycémie hyperosmolaire
I.4.2.2. Mécanisme de l’acidose mécanique
I.4.2.3. Mécanisme des troubles neurologiques
I.4.3. Conséquences
I.4.3.1. Pertes électrolytiques
I.4.3.2. Déshydratation
I.4.3.3. Insuffisance rénale
II. DIAGNOSTIC
II.1. Diagnostic positif
II.1.1. Signes cliniques
II.1.2. Signes biologiques
II.1.2.1. L’hyperosmolarité plasmatique
II.1.2.2. La glycémie veineuse
II.1.2.3. L’ionogramme sanguin
II.1.2.4. Gaz du sang
II.1.2.5. Fonction rénale
II.1.2.6. Autres paramètres biologiques
II.1.2.7. Electroencéphalogramme (EEG)
II.2. Diagnostic d’association
II.3. Diagnostic différentiel
II.2.1. La céto-acidose diabétique
II.2.2. Coma hypoglycémique
II.2.3. L’acidose lactique
III. TRAITEMENT
III.1. Buts
III.2. Moyens
III.2.1. Moyens éthiopathogéniques
III.2.1.1. Réanimation hémodynamique
III.2.1.2. L’insulinothérapie
III.2.1.3. Correction des désordres électrolytiques
III.2.2. Moyens symptomatiques
III.3. En pratique
III.3.1. Mise en condition et mesures de sécurité
III.3.2. Prise en charge
III.4. Surveillance du traitement
IV. EVOLUTION
IV.1. Favorable
IV.2. Complications
IV.2.1. Complications liées au traitement
IV.2.2. Complications liées à la maladie
IV.2.3. Complications liées à la réanimation
V. PRONOSTIC
DEUXIEME PARTIE: TRAVAIL PERSONNEL
METHODOLOGIE
I. CADRE D’ÉTUDE
II. PATIENTS ET MÉTHODE
II.1. Type de l’étude
II.2. Critères d’inclusion
II.3. Critères de non inclusion
III. Recueil des données étudiées
III.1. Données épidémiologiques
III.2. Co morbidités
III.3. Données cliniques
III.4. Données paracliniques
III.5. Modalités thérapeutiques
III.6. Modalités évolutives
IV. PRONOSTIC
V. LA CHARGE DU TRAVAIL INFIRMIER
VI. ANALYSES STATISTIQUES
RESULTATS
I. ETUDE DESCRIPTIVE
I.1. Aspects épidémiologiques
I.1.1. Incidence
I.1.2. Co morbidités
I.1.3. Répartition selon le genre
I.1.4. Répartition selon l’âge
I.1.5. Répartition selon le type de diabète
I.1.6. Répartition selon l’origine géographique
I.1.7. Répartition selon les délais d’admission à la réanimation
I.1.8. Durée d’hospitalisation
I.2. Aspects cliniques
I.2.1. Mode d’installation
I.2.2. L’examen clinique à l’admission
I.2.3. Le score de Glasgow
I.2.4. Constantes cliniques à l’admission
I.3. Les éléments paracliniques
I.3.1. A visée diagnostique et retentissement
I.3.1.1. La glycémie
I.3.1.2. La natrémie corrigée
I.3.1.3. L’osmolarité plasmatique calculée
I.3.1.4. Cétonurie et glycosurie
I.3.1.5. La kaliémie
I.3.1.6. La clairance de la créatinine
I.3.1.7. La gazométrie artérielle
I.3.2. Autres examens à visée étiologique
I.4. Gravité des patients
I.4.1. Indice de gravité simplifié (IGS II)
I.4.2. Le score de défaillance d’organe selon Fagon et al
I.5. Charge de travail infirmier : score OMEGA
I.6. Aspects thérapeutiques
I.6.1. Mise en condition
I.6.2. Réanimation hydro électrolytique
I.6.3. L’insulinothérapie
I.6.4. Autres mesures thérapeutiques
I.7. Aspects évolutifs
I.7.1. Durée de normalisation de l’osmolarité plasmatique
I.7.2. Evolution favorable
I.7.3. Complications
I.7.4. Mode de sortie
II. ETUDE ANALYTIQUE
II.1. Comparaison des différents paramètres
II.1.1. Corrélation entre les différents paramètres et la survenue du SHH
II.1.1.1. La fréquence
II.1.1.2. L’âge
II.1.1.3. Le genre
II.1.1.4. Le type et mode de découverte du diabète
II.1.2. Corrélation entre les différents paramètres et l’évolution du SHH
II.1.2.1. Score Glasgow à l’admission
II.1.2.2. Selon les délais d’admission
II.1.2.3. Selon les paramètres cliniques
II.1.2.4. Selon les paramètres biologiques
DISCUSSION
I. Aspects épidémiologiques
II. Aspects cliniques
III. Aspects paracliniques
IV. Gravité
V. Traitement
VI. Complications
VII. Décès
CONCLUSION
RECOMMANDATIONS
REFÉRENCES
BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES
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