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Évolution du virus
Le virus de la grippe échappe au système immunitaire grâce à deux processus d’adaptation, la dérive génétique et le réassortiment génétique.
La dérive génétique
La dérive génétique correspond à l’accumulation de mutations ou « glissements » au cours du temps. A l’origine de ce lent processus, une faible fidélité de l’ARN monocaténaire-ARN-dépendante (RdRp) responsable de mutations ponctuelles au sein du génome viral (4). Ces souches échappent au vaccin et nécessitent donc sa mise à jour annuelle.
Le réassortiment génétique
Le réassortiment génétique est un mécanisme imprédictible pouvant entrainer des pandémies. La cassure et la redistribution aléatoires des brins d’ARN viraux, après une co-infection d’une cellule par différents virus, entraine la formation de nouveaux motifs antigéniques HA ou NA.
Cette évolution virale est donc responsable des pandémies, avec notamment la grippe espagnole A/H1N1 de 1918-1919, et des épidémies saisonnières d’intensité variable.
La grippe
Présentation clinique
La grippe est une maladie respiratoire aiguë très contagieuse, se caractérisant le plus souvent par une variété de symptômes aspécifiques tels qu’une fièvre, une toux sèche, des myalgies, des céphalées et une forte asthénie. La période d’incubation est de 1 à 3 jours.
Cependant, 5 à 10% des patients présentent une atteinte sévère nécessitant une admission en réanimation (5).
Facteur de risque de gravité
Les facteurs de risque de développer ces complications sont un âge > 65 ans, les comorbidités (maladie pulmonaire chronique, cardiovasculaire, rénale, hépatique, métabolique et neurologique), patient immunodéprimé, la grossesse, le tabagisme (actif et sevré), une obésité avec un IMC > 40kg/m2 et les résidents d’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et centres de long séjour (6).
Complications respiratoires
La pneumopathie virale est la complication la plus fréquente et majore le risque d’hospitalisation en réanimation, d’intubation orotrachéale et la durée du séjour (7). Parmi les autres complications pulmonaires, on retrouve les co-infections ou surinfections bactériennes, virales et fongiques apparaissant après une amélioration clinique.
Les bactéries les plus fréquemment rapportées sont Streptococcus pneumoniae (35%) et Staphylococcus aureus (28%) (8)(9). D’autres germes peuvent être en cause, notamment fongiques, avec Aspergillus fumigatus responsable d’aspergillose invasive pulmonaire et Pneumocystis jirovecii (10)(8)
Les surinfections sont plus souvent observées chez les patients admis en réanimation, qui sont probablement plus immunodéprimés par l’infection grippale (11). Le virus de la grippe favorise les surinfections par des actions directes, en perturbant la barrière épithéliale, supprimant la production de peptides antibactériens et stimulant l’adhésion des molécules bactériennes, ou indirectes par action sur les effets immunomodulateurs (5)(9).
Le virus de la grippe peut donc de lui-même, ou lors d’une surinfection bactérienne, être à l’origine d’une atteinte alvéolaire avec effraction de la barrière alvéolo-capillaire responsable d’un œdème alvéolo-interstitiel exacerbant la réponse inflammatoire et pouvant aller de la simple pneumopathie virale jusqu’au syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA). En conséquence, il y a une diminution des échanges gazeux avec apparition d’une hypoxémie voire d’une hypercapnie. A partir de la deuxième semaine, la phase exsudative initiale laisse place à la phase proliférative pouvant aboutir à un stade de fibrose pulmonaire en cas d’infection non contrôlée (12).
La définition du syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) repose sur la définition de Berlin et repose sur 4 critères : 1) une insuffisance respiratoire aigüe évoluant depuis une semaine ou moins, 2) l’absence d’argument pour une participation cardiaque, 3) des opacités bilatérales sur la radiographie ou le scanner thoracique, 4) une hypoxémie définie par un rapport PaO2/FIO2 inferieur à 300 mmHg pour une pression expiratoire positive à 5cmH2O minimum. Selon ce rapport, trois stades de gravités sont définis : léger de 201 à 300mmHg, modéré de 101 à 200mmHg et sévère en dessous de 100mmHg (13).
Complications extra-respiratoires
On distingue principalement les complications cardiologiques et neurologiques. Parmi les complications cardiaques, les myocardites sont retrouvées chez 10% des patients et apparaissent entre J4 et J7 du début des symptômes. Le diagnostic repose sur des symptômes cliniques, une augmentation des enzymes cardiaques et des signes écho-cardiographiques. Dans le cas d’une atteinte sévère, on peut observer des troubles du rythmes de haut grade, des tamponnades et des arrêts cardiaques (14). La mortalité reste élevée à 23%, ce qui souligne l’importance d’un diagnostic précoce.
D’autres complications moins fréquentes peuvent être observées avec notamment des péricardites, des syndromes coronariens aigus et des arythmies (15).
Les encéphalites représentent les principales complications neurologiques observées en cas de grippe, avec comme manifestations cliniques de la confusion et des crises d’épilepsies (16).
Alors que le mécanisme sous-jacent n’est pas encore complétement connu, plusieurs études ont mis en évidence le lien entre la grippe et l’apparition secondaire d’un syndrome de Guillain-Barre (17).
Des complications plus rares ont été rapporté dans la littérature, avec au niveau rénal une insuffisance rénale aigue d’origine multifactorielle, et sur le plan hématologique des thromboses veineuses ou encore l’apparition d’un purpura thrombotique thrombocytopénique, d’un syndrome hémolytique et urémique ou d’un syndrome d’activation macrocytaire (18).
Méthodes diagnostic
Devant la diversité et la généralité des symptômes, plusieurs études, qui se sont intéressées à la sensibilité et la spécificité du diagnostic clinique, ont démontré que la fièvre, la toux et la rhinorrhée sont les plus prédictifs d’une infection grippale (19).
De plus, en se basant sur les critères de SDRA, la sensibilité du diagnostic varie de 57,1% à 64,1% selon l’âge des patients (20).
Ces symptômes étant similaires à ceux causés par d’autres pathogènes respiratoires, une confirmation virologique est nécessaire.
Parmi les tests permettant de faire le diagnostic, on trouve les tests antigéniques rapides, la culture virale et l’amplification génique (RT-PCR). Cette dernière est, par sa sensibilité et sa spécificité proches de 100%, aujourd’hui le gold-standard (4). Des écouvillonnages naso-pharyngés sont à réaliser dès que possible, de préférence dans les quatre jours suivant le début des symptômes. Chez les patients hospitalisés en réanimation et sous ventilation mécanique invasive, des prélèvements distaux protégés ou des lavages broncho-alvéolaires doivent être réalisés, même en cas d’écouvillonnages négatifs. (21)
Traitements disponibles
Antiviraux
Théoriquement, un traitement antiviral précoce permettrait de diminuer les lésions pulmonaires et le risque de complications (4).
Il existe trois classes médicamenteuses dans le traitement de la grippe, les inhibiteurs des canaux ioniques transmembranaires, les inhibiteurs de la neuraminidase et les inhibiteurs de la polymérase.
L’Amantadine et la Rimantadine, deux inhibiteurs des canaux ioniques transmembranaires, ne sont plus recommandé devant l’importance des résistances du virus A.
L’Oseltamivir et le Zanamivir, deux inhibiteurs de la neuraminidase, sont recommandés en première intention et doivent être administrés précocement chez les patients avec une atteinte sévère et ceux à risque de complications. Le traitement est administré pendant 5 jours, par voie orale pour l’Oseltamivir (75mg deux fois par jour) et par voie inhalée pour le Zanamivir (10mg deux fois par jour) (6).
Traitements adjuvants
Concernant le risque de surinfection bactérienne et malgré l’absence de données concernant l’efficacité et la sécurité d’une antibioprophylaxie préventive, les recommandations s’accordent pour une antibiothérapie empirique en cas d’atteinte sévère (hypotension, fièvre, détresse respiratoire ou pneumopathie étendue) conduisant à une hospitalisation en réanimation et/ou en cas de détérioration secondaire après une amélioration initiale ou de l’absence d’amélioration après 3 à 5 jours de traitement antiviral (6). Streptococcus pneumoniae et Staphylococcus aureus étant les pathogènes les plus fréquemment rencontrés, le traitement empirique doit se composer d’une céphalosporine de troisième génération (C3G) pouvant être associée à un macrolide ou une fluoroquinolone anti pneumococcique (22).
De plus, la corticothérapie, les immunoglobulines intraveineuses ou autres immunomodulateurs ne sont pas recommandés comme thérapies adjuvantes quelle que soit la symptomatologie et la gravité (6).
Traitements des complications
La détresse respiratoire aiguë (DRA) nécessite une prise en charge ventilatoire mécanique qui peut être non invasive ou invasive. Parmi les méthodes non invasives, on retrouve l’oxygénation nasale à haut débit (ONHD) et la ventilation non invasive (VNI) qui doivent être privilégiés dans le cas de SDRA légers. (23) Leur risque principal est d’allonger les délais de recours à l’intubation orotrachéale (IOT). (24) En cas de DRA sévère, avec une hypoxémie profonde, une polypnée > 40/min ou des signes de lutte respiratoire ou en cas d’échec des méthodes non invasives, une IOT doit être réalisée sans tarder.
Dans le traitement du SDRA, l’objectif de la ventilation mécanique est de maintenir une oxygénation tout en prévenant le volotrauma. Dans le cadre d’une ventilation protectrice, un volume courant réglé à 6ml/kg de poids idéal diminue la mortalité de 9% en comparaison à des volumes courants plus élevés (8-12ml/kg) (25). Concernant les pressions ventilatoires, la pression expiratoire positive (PEP) est un élément essentiel au recrutement alvéolaire permettant une meilleure oxygénation et quel que soit la technique de titration utilisée, les études s’accordent pour conclure à un bénéfice d’une PEP élevées dans les SDRA modérés et sévères (26)(27). Alors que pendant longtemps et suite à l’étude multicentrique randomisée de Papazian et al, les recommandations s’accordaient sur l’utilisation de la curarisation dans le SDRA modéré et sévère afin d’améliorer la survie, les résultats d’une étude récente remettent en question les pratiques (28)(29). Cette dernière n’a pas retrouvé la différence de mortalité précédemment observée mais nécessite une analyse plus fine du P/F, du recours au DV et des inclusions dans chaque groupe. Les nouvelles recommandations suggèrent alors une utilisation des curares, pendant 48 heures, pour les patients présentant un SDRA modéré ou sévère et des difficultés ventilatoires malgré une sédation adaptée (30).
Quand les stratégies précédentes ne suffisent plus, d’autres thérapeutiques peuvent aider à la prise en charge.
– Le monoxyde d’azote (NO), pourrait par ses fonctions de vasodilatation de la circulation pulmonaire, être un candidat thérapeutique intéressant, cependant à ce jour aucune étude a démontré son bénéfice pour ces patients (31). Les recommandations françaises suggèrent son utilisation en cas d’hypoxémie profonde malgré l’implémentation des stratégies thérapeutiques et avant le recours à l’assistance veino-veineuse (32).
– Alors qu’une corticothérapie est recommandée en cas de SDRA modéré à sévère, en l’absence d’amélioration, dans les 14 premiers jours, une surmortalité en cas d’infection grippale a été rapportée dans une méta analyse récente (33)(34). Bien que ce résultat doive être interprété avec certaines précautions, cette étude remet en question la place des corticoïdes dans le SDRA secondaire au virus influenza.
– Le décubitus ventral (DV) améliore l’oxygénation sanguine par redistribution de la ventilation pulmonaire vers les zones dorsales alors que la perfusion reste prédominante dans ces régions, homogénéise les contraintes mécaniques au sein du poumon et réduit les lésions de volotrauma. Au cours du SDRA, le DV réduit la mortalité lorsqu’il est pratiqué précocement (dans les 7 premiers jours) chez les patients les plus sévères (PaO2/FiO2 < 200mmHg) (35)
Bien que la définition du SDRA sévère soit basée sur un rapport PaO2/FiO2 < 100mmHg, le DV est indiqué dès que le rapport PaO2/FiO2 est inférieur à 150mmHg. La procédure consiste à mettre le patient sédaté et curarisé sur le ventre pendant une durée moyenne de 16 heures (36). Une réponse au DV est définie par une majoration de la PaO2 de 10mmHg ou une amélioration de la compliance pulmonaire se traduisant par une diminution de la pression de plateau. L’amélioration peut être vue dans la première heure, ou plus tardivement jusqu’à 20 heures.
– L’ExtraCorporeal Membrane Oxygénation (ECMO) veino-veineuse est une option thérapeutique dans le SDRA réfractaire aux thérapeutiques citées précédemment, qui permet l’oxygénation et la décarboxylation tout en autorisant une ventilation ultra-protectrice. Alors que les deux grandes études s’intéressant au bénéfice de l’ECMO ont des résultats discordants, une revue de la littérature publiée récemment suggère qu’un recours précoce à une ECMO veino-veineuse chez les patients présentant un SDRA sévère permet une diminution de la mortalité à 90 jours (37)(38)(39). Son efficacité étant indiscutable, l’ECMO pose un problème d’indication avec comme principale inconnue son niveau d’efficacité selon les patients. Les complications liées à l’ECMO, sont nombreuses et comprennent l’hémorragie au point d’insertion des canules, les complications thromboemboliques avec les accidents vasculaires cérébraux notamment, les complications ischémiques au niveau du membre inferieur et les complications infectieuses. D’après les recommandations de la Société de réanimation de la langue française (SRLF) de 2018, il faut probablement considérer l’ECMO lors d’un SDRA sévère avec un rapport PaO2/FiO2 < 80mmHg malgré l’optimisation de la prise en charge incluant les thérapeutiques précédemment citées et/ou lorsque la ventilation mécanique devient dangereuse du fait de l’augmentation de la pression de plateau (32).
Les complications cardiologiques et neurologiques restant rares, il n’y a pas de recommandations spécifiques concernant leur prise en charge. Plusieurs études de cas mentionnent le recours à des traitements de support tel que le ballon de contre pulsion intra-aortique et l’oxygénation par membrane extracorporelle artério-veineuse en cas de myocardite aigüe avec choc cardiogénique (18).
Épidémiologie
Surveillance mondiale et nationale
La première pandémie grippale en 1918-1919 fut responsable de plus de 50 millions de décès. Depuis, d’autres pandémies ont pu être observées, en 1957-1958, 1968-1969 et 2009-2010, entrainant moins de morts (entre 100 000 et 4 millions) grâce aux progrès médicaux. Lors des épidémies annuelles, le virus de la grippe est responsable de maladies sévères notamment chez les personnes âgées, les enfants, les femmes enceintes et les personnes atteintes de pathologies chroniques (40). Cela se traduit chaque année par une atteinte mondiale estimée à 1 milliards de patients parmi lesquelles 3 à 5 millions ont une présentation sévère avec 290 000 à 650 000 décès pour insuffisance respiratoire.
Le GISRS (Global Influenza Surveillance and Response System), créé en 1947, est un système mondial de surveillance de la grippe coordonné par l’OMS (Organisation Mondial de la Santé). Sa mission principale est de protéger de la menace grippale en détectant les virus et leur évolution, en agissant selon le risque associé à chaque souche et sur la production vaccinale et en progressant sur les outils diagnostiques et thérapeutiques (41).
En France, la surveillance de la grippe saisonnière par Santé Publique France repose sur plusieurs sources de données qui sont le réseau SOS médecins, le réseau Sentinelles, les hospitalisations au sein du réseau d’Organisation de la surveillance coordonnée des urgences (OSCOUR) et la surveillance des cas graves admis en réanimation. Elle est effectuée d’octobre à avril de chaque année,
Surveillance des cas graves admis en réanimation
La surveillance des cas graves admis en réanimation, mise en place en 2009, a changé en 2018 passant d’un système à visée exhaustive à un mode sentinelle basé sur un réseau de 194 services de réanimation adulte et pédiatrique. Les chefs de service signalent auprès de la cellule d’intervention en région (Cire), les cas graves de grippe admis en service de réanimation sous forme d’une fiche standardisée (42). Ces fiches sont ensuite complétées par les données virologiques. Le nombre d’hospitalisation en réanimation pour grippe est variable selon les années et les sous-types de virus grippaux circulants.
En ce sens, un bilan épidémiologique analysant les hospitalisations avec diagnostic de grippe en France entre 2012 et 2018, a rapporté une augmentation du nombre de passages en réanimation pendant la saison 2017-2018, probablement due à la circulation successive de 2 virus influenza, A (H1N1) puis un virus B de la lignée Yamagata (43).
Campagne de vaccination
La meilleure prévention contre la grippe reste la vaccination annuelle, particulièrement pour les populations à risques définies par l’OMS. Ces dernières sont, par ordre de priorité, les agents de santé, les personnes âgées au-delà de 65 ans, les femmes enceintes tout au long de la grossesse, les enfants de 6 mois à 5 ans et les personnes souffrant d’affections chroniques (44).
Le groupement interrégional pour la recherche clinique et l’innovation (GIRCI) est responsable de l’élaboration des vaccins depuis 1973. L’évolution permanente du virus de la grippe rend obsolète la protection vaccinale au-delà d’un an, alors que la nécessité d’une vaccination annuelle et la variation de son efficacité, sont responsables de la méfiance générale.
Entre la sélection des souches virales et la production vaccinale s’écoule une période incompressible de 5 à 6 mois. La composition des vaccins est réévaluée deux fois par an selon les souches circulantes.
Il existe deux types de vaccins, les trivalents inactivés injectés en intramusculaire et les vaccins vivants atténués quadrivalents administrés en intra-nasal. Les vaccins trivalents inactivés contiennent 2 sous-types du virus A et une souche du virus B alors que les vaccins quadrivalents comportent une souche B supplémentaire (45). En 2015, 486 millions de doses vaccinales ont été distribuées au niveau mondial, cependant le Center for disease control (CDC) estime qu’aux États-Unis, seulement 47% des adultes et enfants de plus de 6 mois ont été vaccinés sur cette période (46)(47).
En France, les données Datamart Consommation Inter-Régimes (base DCIR, issue du Système National des Données de Santé (SNDS)) de 2018-2019, rapportent une couverture vaccinale insuffisante à 46,8% des sujets à risque de forme grave de grippe pour un objectif à 75% (48).
D. Problématique
L’objectif de cette étude observationnelle épidémiologique multicentrique rétrospective est de décrire les caractéristiques des séjours et des patients hospitalisés pour infection grippale dans quatre réanimations de la Basse Normandie pour grippe entre le 1er décembre 2017 et le 31 décembre 2020, soit sur trois saisons grippales.
Recueil des données
Les données étaient collectées sur un tableur Excel scindé en 8 parties :
– Données démographiques (âge, poids, taille, sexe, saison)
– Comorbidités (respiratoire, cardiovasculaire, hépatique, immunodépression connue…)
– Le statut vaccinal
– Caractéristiques à l’admission (SOFA, IGSII, cause admission, bilan biologique…)
– Établissement du diagnostic et le bilan des défaillances associées
– Administration d’un traitement antigrippal
– Complications lors du séjour en réanimation
– Thérapeutiques administrées en réanimation (amines vasopressives, anti-infectieux, ventilation mécanique, décubitus ventral, ECMO…)
– Pronostic (survie en réanimation, survie hospitalière)
Définitions
Les comorbidités recueillies dans cette étude étaient celles connues pour être des facteurs de risques de grippe grave d’après plusieurs études.
Concernant les pathologies respiratoires, celles d’intérêts furent la mucoviscidose, la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) et l’asthme. Pour le type d’immunodépression, nous avions différencié les hémopathies maligne, l’immunodépression cellulaire et la prise d’un traitement immunosuppresseur dans l’année.
L’origine de l’infection grippale était nosocomiale si apparue 48 heures après le début de l’hospitalisation.
Concernant les prélèvements biologiques, les valeurs recueillies étaient les plus sévères sur les 24 premières heures et le P/F était calculé uniquement pour les patients intubés en ventilation assisté contrôlé.
Une pneumopathie acquise sous ventilation mécanique (PAVM) était d’après les définitions nationales une « pneumonie survenant chez un malade dont la respiration est assistée par une machine soit de manière invasive par l’intermédiaire d’un tube endotrachéal ou d’une trachéotomie soit de manière non invasive par l’intermédiaire d’un masque facial ou d’un autre procédé dans les 48 heures précédant la survenue de l’infection » (49) Le délai retenu pour définir une PAVM tardive était de 5 jours de ventilation mécanique invasive.
Une surinfection bronchique ou pulmonaire était définie par une dégradation respiratoire après une amélioration clinique nécessitant un recours à une antibiothérapie, ainsi que par la mise en évidence d’un germe à taux significatif sur un prélèvement distal associé à une symptomatologie respiratoire.
Le critère ventilation mécanique regroupait la VNI, l’ONHD et la ventilation mécanique invasive (VMI). Pour qu’une curarisation soit retenue comme thérapeutique active, il fallait que le patient soit curarisé plus de 24 heures d’affilées.
De plus, le traitement par Oseltamivir était considéré comme une prise en charge thérapeutique si débuté dans les 48 heures après la confirmation diagnostique.
Analyse statistique
Compte-tenu de la méthodologie utilisée, il n’y a eu pas lieu de procéder à un calcul du nombre de sujet nécessaire puisqu’il était espéré inclure un maximum de sujet afin d’obtenir une représentation des manifestations sévères de la grippe en réanimation en Basse-Normandie.
Les analyses réalisées sont descriptives et les données catégorielles sont décrites en effectif et pourcentage, les données quantitatives en médiane et intervalle interquartile ou moyenne et écart-type.
Pour répondre à l’objectif principal de l’étude, une régression logistique uni variée a été réalisée. Les données ont d’abord été analysées avec le logiciel R, version 1.2.5033, puis un test chi2 de Yates ou un test exact de Fisher ont été effectués selon les fréquences attendues pour les variables catégorielles, et un test de Mann-Whitney a été réalisé pour les variables continues. Une valeur de p < 0,05 a été considéré comme statistiquement significatif.
Une analyse secondaire des facteurs de risque de mortalité a été réalisée sur certaines caractéristiques recueillies.
Le critère de jugement principal était de décrire les caractéristiques des séjours pour grippe entre 2017 et 2020 dans quatre réanimations de la Basse-Normandie.
Les critères de jugement secondaires sont la comparaison de l’évolution par saison du nombre de cas, de la virulence et de la circulation des différentes souches virales.
Considérations éthiques et réglementaires
Cette étude a été menée conformément aux principes éthiques énoncés dans la Déclaration d’Helsinki et a reçu l’accord du Comité Local d’éthique de la Recherche en Santé du CHU de Caen (n°ID 2493).
Conformément à la législation en vigueur, il était décidé de remettre systématiquement d’une feuille d’information concernant la recherche en cours à chaque patient. C’est une recherche en santé n’impliquant pas la personne humaine, prospective, se basant sur les dossiers médicaux et donc hors du cadre de la loi Jardé.
Résultats
Entre le 1er décembre 2017 et le 31 décembre 2020, 105 patients ont été hospitalisés dans une des quatre réanimations pour une grippe.
Parmi ces 105 patients, 61 représentaient la saison 2017-2018, 30 la saison 2018-2019 et 14 la saison 2019-2020. Les caractéristiques des patients inclus sont disponibles dans le tableau 1.
La répartition de ces patients entre les différentes réanimations participants à l’étude était la suivante, 53 ont été hospitalisés au CHU de Caen, 19 en réanimation à Lisieux, 18 à Cherbourg et enfin 15 à St Lo. Sans différence de répartition entre les trois saisons (p=0,048). La répartition de la saison grippale sur l’année était elle aussi sans différence significative sur l’ensemble de l’étude. La proportion d’hommes et de femmes était similaires sur les trois périodes et l’âge médian des patients quant à lui était à 64, 67 et 54 respectivement.
Concernant les caractéristiques cliniques, au moins un facteur de risque était rapporté chez 70,5% des cas (n=74), principalement un indice de masse corporelle (IMC) supérieur à 25kg/m2 (n=63) dont 32 patients avec un IMC supérieur à 30kg/m2. Venait ensuite un âge supérieur ou égal à 65 ans pour 45 patients, puis les pathologies chroniques : majoritairement respiratoires pour 43 patients dont 17 avec une BPCO de stade 3 ou 4, les néoplasies (n=15), l’immunodépression (n=14), le diabète de type 2 (n=13) et l’insuffisance rénale chronique (n=9).
Le nombre de patients ayant un tabagisme actif était de 34 patients dont 25 avec une consommation supérieure à 20 paquets-année.
Seulement 10 patients sur 105 ont rapporté être vaccinés contre la grippe sur les trois saisons étudiées, sans différence de répartition (p=0 ,86). Cependant, 57% des patients n’étaient pas vaccinés (n=60) et pour 35 le statut vaccinal n’était pas connu soit 33% du nombre de cas total.
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Table des matières
I. Introduction
A. Le virus Influenza
a. La particule virale
1. Le virus A
2. Le virus B
b. Le génome viral
c. Classification du virus
d. Transmission et cycle viral
e. Évolution du virus
1. La dérive génétique
2. Le réassortiment génétique
B. La grippe
a. Présentation clinique
1. Facteur de risque de gravité
2. Complications respiratoires
3. Complications extra-respiratoires
b. Méthodes diagnostic
c. Traitements disponibles
1. Antiviraux
2. Traitements adjuvants
3. Traitements des complications
C. Épidémiologie
a. Surveillance mondiale et nationale
b. Surveillance des cas graves admis en réanimation
c. Campagne de vaccination
D. Problématique
II. Matériel et méthodes
A. Méthodologie et schéma expérimental
B. Inclusion des sujets
a. Identification des patients
b. Critères inclusion
c. Critères exclusion
C. Recueil des données
D. Définitions
E. Analyse statistique
F. Considérations éthiques et réglementaires
III. Résultats
V. Conclusion
Bibliographie
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