Sur une stratégie de calcul pour les problèmes multiphysiques

Quelques notions sur les milieux poreux

     L’objectif de cette section n’est évidemment pas de détailler la théorie des milieux poreux, mais plutôt d’introduire les grandeurs caractéristiques qui seront manipulées tout au long de ce travail, ainsi que les équations qui les gouvernent. Il faut noter que les équations qui vont être présentées sont celles obtenues sous des hypothèses simplificatrices très fortes. Elles ne reflètent pas l’état d’avancement actuel des travaux sur la simulation des milieux poreux. Pour plus de détails sur la mécanique de ces milieux, on pourra se référer aux ouvrages très complets [Lew98, Cou04]. On définit généralement la mécanique des milieux poreux comme l’étude des matériaux dont la structure interne comprend une phase solide et des pores, fermés ou ouverts, remplis d’une phase fluide dont le comportement influence de manière significative celui de la structure (cf. Figure 1.1). Dans les exemples qui seront considérés ici, les pores ouverts seront supposés complètement saturés de fluide. Dans le cas des géomatériaux, comme les sols, les roches ou le béton, ce fluide est généralement de l’eau, du pétrole ou du gaz. Cependant, des propriétés identiques régissent la circulation du sang dans les tissus musculaires ou le comportement des tissus oculaires remplis d’humeur aqueuse [Mer02]. La mécanique des milieux poreux joue donc un rôle important dans des domaines aussi divers que la géophysique, la géotechnique, la biomécanique, l’étude des matériaux … Un des points clés de la mécanique des milieux poreux est de réussir à décrire les interactions entre les constituants solide et fluide. La géométrie des pores est souvent trop complexe pour qu’une description microscopique de ces interactions soit envisageable, i.e. en considérant les inhomogénéités réelles à l’échelle de la porosité. On lui substitue donc généralement un modèle macroscopique, dans lequel on suppose que les différents constituants occupent le domaine tout entier, solide et le fluide formant des milieux continus qui se chevauchent. Ce milieu de substitution peut alors être traité avec les méthodes classiques de la mécanique des milieux continus. Deux familles de stratégies sont généralement utilisées pour construire le comportement de ce milieu de substitution à partir de ceux des différents composants. La première, dont font partie les approches phénoménologiques et les théories des mélanges, est fondée sur une approche macroscopique. La seconde, dont font partie les théories des moyennes (ou des mélanges hybrides), s’appuie sur une vision plutôt microscopique. Très brièvement, elle consiste à intégrer, sur un volume élémentaire représentatif, les équations d’équilibre microscopiques du solide et du fluide, afin de faire apparaître des quantités macroscopiques et les équations quirégissent leur évolution. Ce type de stratégie permet donc une bonne compréhension des relations entre les états microscopique et macroscopique. Il a été montré que, sous certaines hypothèses, les deux approches conduisent à des modèles identiques [Lew98]. Dans la suite, on présente les variables macroscopiques qui seront considérées tout au long de ce document. Elles correspondent à des quantités réellement mesurables. Ce lien avec les pratiques expérimentales est particulièrement important dans des disciplines comme la mécanique des sols.

PUCP : Parallel Unconditionally Convergent Procedure

     Une version parallèle de la stratégie UCSP peut être construite. Elle consiste à substituer l’une dans l’autre chacune des deux équations de (1.11), puis à choisir A et B de façon à ce que les matrices d’itérations s’écrivent toutes deux λI avec |λ| < 1. Comme pour l’UCSP, on est amené à manipuler des matrices pleines, ce conduit à des résolutions coûteuses. En revanche, cette procédure permet de traiter les deux physiques en parallèle sans limitation sur la taille des pas de temps.

Concept d’interface entre physiques

     En calcul de structures, la simulation de la réponse de structures complexes conduit à des problèmes de grande taille. Le parallélisme est, depuis longtemps maintenant, un des outils majeurs utilisés pour la résolution de ces modèles. Les plus puissants calculateurs actuels sont d’ailleurs très souvent à architecture parallèle et les algorithmes de résolution ont dû être adaptés à ce type d’ordinateurs [Dur00]. Parmi ces algorithmes, des formulations « mécaniques » ont été proposées, comme les méthodes de décomposition de domaine. Ce type de stratégies consiste à décomposer la structure étudiée en sous-domaines et à utiliser une méthode itérative durant laquelle les résolutions globales n’ont lieu que sur les sous-domaines (cf. Figure 2.1). Le nouveau problème est alors de taille considérablement réduite. Une méthode de décomposition de domaine mixte, fondée sur la méthode LATIN qui sera détaillée dans la section suivante, a été proposée au LMT-Cachan, d’abord dans le cadre des structures faiblement hétérogènes [Dur98a, Lad99b], puis dans celui des structures fortement hétérogènes [Lad00, Lad01b], éventuellement avec contacts [Lad02b] et, plus récemment, avec une technique d’homogénéisation à la fois en temps et en espace [Lad02a, Lad03]. Dans cette méthode, les interfaces entre sous-domaines constituent une entité mécanique à part entière pour laquelle les efforts et les déplacements sont traités de manière identique. La stratégie proposée consiste à vérifier alternativement des propriétés sur les sous-structures, supposées indépendantes, et des propriétés d’interfaces, qui permettent de transmettre les couplages entre les sous-domaines. sous-structure interface sous-structure Dans le cas des problèmes multiphysiques, l’idée est similaire. Elle consiste à traiter chaque physique séparément, en résolvant toutes les équations indépendantes, puis à recouvrer les couplages en vérifiant les équations restantes. Si l’on dote une entité de propriétés correspondant à ces équations de couplage, celle-ci peut être vue comme une interface entre les physiques. La notion d’interface matérielle entre sous-structures a alors été étendue à celle d’interface entre physiques. Il est important de noter que, contrairement au cas de la décomposition de domaine, cette interface n’a pas forcément de réalité « matérielle ». Dans le cas de l’aéroélasticité, elle peut être vue comme la « peau » de la structure en contact avec le fluide qui l’entoure. Dans le cas des milieux poreux que l’on traite du point de vue macroscopique, le couplage a lieu en tout point du domaine et l’interface a un sens plus abstrait (cf. Figure 2.2).

Conclusion et perspectives

    DANS CE TRAVAIL, une nouvelle stratégie de calcul a été proposée pour l’analyse des problèmes multiphysiques. Cette stratégie, dont les idées s’inscrivent dans un cadre général, a été développée dans le cas de la simulation d’une structure constituée d’un matériau poreux. L’objectif était d’illustrer le fonctionnement et la faisabilité de la méthode dans une situation de couplage fort entre fluide et structure. Ce type de situation conduit le plus souvent à des coûts de simulation prohibitifs et nécessite donc un intérêt tout particulier. Le point clé de cette nouvelle approche a été l’introduction du concept d’interface entre physiques, qui permet de prendre en compte de manière naturelle un certain nombre d’aspects inhérents aux problèmes multiphysiques. La Figure 6.7 rappelle le schéma de principe de la méthode LATIN, qui est le « moteur » de cette stratégie, et résume les techniques mises en place tout au long de ce travail. La technique d’approximation des champs admissibles sous forme de chargements radiaux • Cette approximation a permis de réduire de manière significative le coût de calcul par rapport à l’approche monolithique et à la procédure ISPP (une technique standard de partitionnement) auxquelles la méthode a été comparée. Cette technique permet, en outre, d’accroître la modularité de la stratégie en réduisant le volume d’informations à stocker et à échanger entre les physiques dans le cas du couplage de codes. La prise en compte des aspects multiéchelles en temps et en espace • Une modification de l’interface entre physiques a été proposée, afin de prendre en compte les échelles de temps et d’espace très différentes qui peuvent apparaître lors de la simulation d’un problème multiphysique. Dans le cas général, cette technique consiste à « matérialiser » l’interface, en la dotant de son propre maillage et de sa propre discrétisation en temps. Du point de vue temporel, on a pu constater qu’une discrétisation plus fine des quantités fluides était nécessaire, si l’on voulait obtenir une sorte d’« isoqualité » fluide/solide de la solution. L’opportunité d’utiliser des champs discontinus en temps a aussi été envisagée afin d’augmenter la souplesse de la stratégie. Les premiers résultats montrent qu’un tel choix n’affecte pas la convergence de la méthode. Du point de vue spatial, on a pu montrer la faisabilité d’une technique rendant possible l’utilisation de maillages spatiaux différents pour chacune des physiques (éventuellement générés par une procédure automatique), ce qui augmente encore la modularité de la stratégie. La prise en compte des non linéarités du problème • À nouveau, une modification de l’interface entre physiques a permis de prendre en compte un certain nombre de non linéarités dans le comportement du matériau. Un choix adapté des directions de recherche, suivi d’une mise à jour de celles-ci, conduit à un taux de convergence et un coût de la stratégie quasi-indépendants du « degré » de non linéarité. Un certain nombre de points techniques, qui n’ont pas été abordés dans ce travail, restent néanmoins à développer : la mise en place d’une méthode de construction du maillage et de la discrétisation en temps de l’interface ; le choix automatique des discrétisations de chacune des physiques, qui devrait permettre d’optimiser les performances de la stratégie ; la prise en compte de non linéarités plus sévères (comme la plasticité…) et la proposition d’un indicateur de « stagnation » des directions de recherche, afin de stopper automatiquement leur mise à jour ; la mise en place de la technique d’homogénéisation en temps et en espace [Lad02a, Lad03] afin d’optimiser les performances lors du traitement indépendant de chacune des physiques ; la validation de l’approche sur des problèmes à plus grand nombre de champs (e.g. thermo-poroélasticité) ; ainsi que l’exploitation, sur des calculateurs à architecture parallèle, du caractère hautement parallélisable de la stratégie, afin de traiter des problèmes jusqu’à présent hors de portée. Enfin, cette stratégie, présentée ici sur un problème modèle, pourrait être étendue à d’autres types de problèmes multiphysiques, tels que le couplage oxydation-endommagement dans les composites.

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Table des matières

Introduction
1 Le problème de référence 
1 Quelques notions sur les milieux poreux
2 Problème de référence
2.1 Conditions aux limites
2.2 Équations mises en jeu
2.3 Espaces de solution
2.4 Techniques de résolution
3 Méthode directe
3.1 Concepts de base
3.2 Application
4 Stratégies de partitionnement 
4.1 Concepts de base
4.2 Application
5 Discussion
2 La méthode LATIN pour le multiphysique 
1 Concept d’interface entre physiques 
2 Principes de la méthode LATIN 
2.1 Séparations des difficultés
2.2 Résolution itérative en deux étapes
2.3 Représentation des inconnues
2.4 Convergence de la méthode
3 Aspects multiéchelles
4 Cas test 
4.1 Description du problème
4.2 Premiers résultats et comparaisons
5 Conclusions
3 Une représentation adaptée des inconnues 
1 Représentation des champs cinématiques uniquement 
1.1 Étape linéaire avec représentation à l’itération n +1
1.2 Étape préliminaire à l’itération n +1
1.3 Solution initiale
1.4 Résultats et comparaisons
2 Représentation de tous les champs 
2.1 Étape linéaire avec représentation à l’itération n +1
2.2 Étape préliminaire à l’itération n +1
2.3 Solution initiale
2.4 Résultats et comparaisons
3 Exemple d’un filtre poreux 
3.1 Description du problème
3.2 Résultats
4 Conclusions 
4 Les aspects multiéchelles en temps 
1 Motivations 
2 Mise en place de l’approche multiéchelle 
2.1 Introduction d’une discrétisation de l’interface
2.2 Description des variables aux échelles micro et macro
2.3 Choix des discrétisations
2.4 Étape locale à l’itération n +1/2
2.5 Résultats
3 Formulation Galerkin discontinue en temps 
3.1 Formulation
3.2 Directions de recherche
3.3 Étape linéaire avec représentation à l’itération n +1
3.4 Étape locale à l’itération n +1/2
3.5 Étape préliminaire à l’itération n +1
3.6 Résultats
4 Conclusions 
5 Les aspects multiéchelles en espace 
1 Motivations
2 Mise en place de l’approche multiéchelle
2.1 Introduction d’une discrétisation de l’interface
2.2 Point fixe entre les physiques
3 Opérateurs de transfert 
3.1 Cas d’un champ C0 défini aux nœuds
3.2 Cas d’un champ défini aux points d’intégration
4 Résultats
4.1 Consolidation d’un sol
4.2 Filtre poreux
5 Conclusions 
6 Prise en compte des non linéarités 
1 Perméabilité et rigidité non constantes 
1.1 Perméabilité
1.2 Rigidité
2 Méthode LATIN pour le non linéaire
2.1 Étape locale à l’itération n +1/2
2.2 Premiers résultats
3 Mise à jour des directions de recherche
3.1 Choix des directions de recherche
3.2 Résultats
4 Conclusions 
Conclusion et perspectives
Bibliographie

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