Sulfanylation énantiosélective sous catalyse par transfert de phase

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Synthèse d’acides β2,2-aminés : formation de liaison C–C

En 2006, Deng et son groupe ont décrit une réaction de Henry catalysée par la cupréidine O-benzoylée (Schéma 41).64 Cette réaction fait intervenir l’addition énantiosélective du nitrométhane sur les α-cétoesters 73’ à -20 °C. Les produits 74’ ont été isolés avec des ee compris entre 93 et 97% et des rendements supérieurs à 86%. Ils ont ensuite décrit une voie d’accès rapide aux esters d’acides β2,2-aminés α-hydroxylés 75’, par réduction de la fonction nitro en présence de Nickel de Raney et de dihydrogène. Plus récemment, d’autres travaux d’addition de nitrométhane sur les β-cétoesters ont été publiés. Cependant les composés synthétisés n’ont pas été utilisés pour la synthèse d’acides β2,2-aminés. Ils ont toutefois été exploités dans des synthèses totales de composés d’intérêt biologique.65
En 2007, le groupe de Chen a publié une addition conjuguée énantiosélective du cyanoester 76’ sur des cétones α,β-insaturées grâce à l’utilisation du catalyseur de Takemoto (TUC) (Schéma 42).66 Cette méthodologie permet d’obtenir des ee allant de bons à excellents (de 73 à 97%). Un accès rapide aux acides β2,2-aminés 77’ correspondants a été développé, en seulement deux étapes avec une protection intermédiaire de la cétone formée. Il est à noter que cette stratégie de fonctionnalisation asymétrique d’α-cyanocarboxylates a été aussi développée dans des conditions de CTP. Cependant, les produits synthétisés n’ont pas ensuite été exploités pour l’élaboration d’acides β-aminés.
En 2009, Jew et Park ont développé une alkylation énantiosélective de l’imidazoline 78’ sous catalyse par transfert de phase solide/liquide (Schéma 43). L’utilisation du sel d’ammonium de Maruoka de première génération a permis de synthétiser les composés 79’ avec des rendements, allant de 70 à 99%, avec des ee supérieurs à 89%. Les acides β2,2-aminés α-aminés 80’ correspondants ont été obtenu après l’hydrolyse en condition acide des imidazolines 79’.
Melchiorre a réalisé une addition conjuguée de la 3-méthylcyclohexénone 81’ sur les nitroalcènes β,β-disubstitués 82’ en présence de l’epi-amino cupréine en quantité catalytique (Schéma 44).69 Sa stratégie repose sur la formation de l’intermédiaire 83’ de type diénamine vinylogue. Le composé nitro 84’, un précurseur potentiel de l’acide β2,2-aminé correspondant, a été obtenu avec un rendement de 58% et 90% d’ee.
En 2013, une réaction d’addition conjuguée de l’aldéhyde 85’ sur les nitroalcènes β,β-disubstitués 86’ a été publiée par Wennemers (Schéma 45).70 Cette méthode, utilisant une catalyse covalente de type énamine, est efficace puisque les produits ont été obtenus avec de très bons ee pouvant atteindre 97%. Des ed supérieurs à 75% ont été mesurés. Cependant l’étendue de la réaction est principalement limitée à l’utilisation de groupements aryles sur le nitroalcène 86’. Une séquence réactionnelle de 5 étapes a été réalisée afin d’obtenir le précurseur d’acide β2,2aminé 87’ correspondant avec un rendement de 54%.
Akiyama a développé, en 2014, une réaction énantiosélective de Friedel-Crafts entre les indoles substitués 88’ et les nitroalcènes β,β-disubstitués 89’ (Schéma 46).71 Ils ont utilisé un acide phosphorique comme catalyseur chiral. De bons résultats ont été obtenus, aussi bien en termes d’excès énantiomériques (jusqu’à 97% ee) que de rendement (jusqu’à 88%) pour les substrats aryliques. Cependant lorsqu’un groupement alkyle est présent sur le nitroalcène 89’ (R3 = alkyle), une chute de la réactivité est observée conduisant à des rendements de 43 à 52%. La fonction nitro a été réduite en présence de NaBH4 et de NiCl2 pour conduire à l’acide β2,2-aminé 90’ correspondant.
Cette année, Palomo et son équipe ont mis au point l’addition conjuguée énantiosélective des énols 91’ sur des cétones α,β-insaturées catalysée par un squaramide dérivé de la quinine (Schéma 47).72 Cette méthode permet d’obtenir les composés 92’ avec de bons ee supérieurs à 87% et des rendements compris entre 73 et 98%. La méthode a été extrapolée à des azodicarboxylates afin de réaliser des réactions d’α-amination énantiosélectives. Les produits α-aminés 93’ ont été isolés avec des rendements satisfaisants (de 77 à 95%) et d’excellents ee supérieurs à 95%.
Les différents adduits de Michael ont été valorisés (Schéma 48). Une étape d’oxydation de type Baeyer-Villiger, à l’aide de m-CPBA, des pyrrolidin-2,3-diones 92’-93’ a permis l’obtention des anhydrides intermédiaires 94’-95’. Une réaction d’ouverture des anhydrides 95’ par la glycine a été réalisée pour former l’amide β2,2-aminé 97’. Dans le cas où l’électrophile est une énone, une réaction d’ouverture des anhydrides 94’, par exemple, avec l’ester de la phénylalanine a conduit aux α,β2,2-dipeptides 96’ correspondants.
L’analyse de cette introduction bibliographique montre que la stratégie des nitroalcènes β,β-disubstitués s’avère être attractive pour la formation d’acides β2,2-aminés, en particulier avec un centre quaternaire portant au moins un substituant arylique. L’approche des α-cyanocarboxylates bien qu’intéressante a été peu exploitée pour permettre une synthèse générale d’acides β2,2-aminés avec un centre quaternaire tout carboné via des transformations chimiques chimiosélectives. De plus, la méthodologie récemment développée à partir des pyrrolidin-2,3-diones par Palomo est aussi très attrayante. Cependant les composés formés possèdent un centre quaternaire substitué par un méthyle ou benzyle.
En bilan, on peut constater que peu d’approches générales et énantiosélectives ont été développées pour la synthèse d’acides β2,2-aminés et un seul exemple décrit la synthèse énantiosélective d’acides β2,2-aminés portant un atome de soufre sur le centre quaternaire. C’est pourquoi une réaction énantiosélective d’α-sulfanylation d’isoxazolidin-5-ones α-substituées donnerait accès aux acides β2,2-aminés contenant un atome de soufre après un clivage réductif de la liaison N-O. Les résultats obtenus pour cette étude seront décrits dans le chapitre suivant.

Sulfanylation énantiosélective sous catalyse par transfert de phase

Les molécules soufrées dérivées d’acides β2,2-aminés

Le motif acide β2,2-aminé portant un atome de soufre sur le centre quaternaire en position α de la fonction carbonyle est présent dans des molécules bioactives variées (Figure 10). En 2001, Sandanayaka a exploité cet arrangement sous la forme d’acides hydroxamiques α-sulfonylés. Ces molécules ont montré des activités inhibitrices sur les métalloprotéases matricielles, mises en jeu dans les traitements de certains cancers, de l’infection du VIH et de rhumatismes.73
Greenberg a décrit en 2012 la synthèse de nouveaux nucléotides photolabiles non-naturels, qui permettent la modulation de la structure des acides nucléiques en tant que sonde mécanistique.74 En 2014, Budovská a montré que cette brique moléculaire se retrouve aussi dans des phytoalexines. Ces molécules sont présentes dans les plantes en jouant le rôle d’anti-microbien et possèdent des propriétés cytotoxiques.75 A partir de 2006, Peregrina a réalisé les travaux les plus importants dans le domaine en développant des synthèses stéréosélectives permettant l’accès à des homologues d’isocystéines. Il a aussi proposé des élaborations de dérivés d’α,β-dipeptides contenant un centre quaternaire portant un atome de soufre que l’on peut retrouver dans des antibactériens tels que la nisine.76,77,78
Dans le cadre de ses travaux, Peregrina a montré que les sulfamidates cycliques chiraux 1 étaient des précurseurs privilégiés pour la formation d’acides β2,2-aminés (Schéma 49).76 Une réaction de substitution nucléophile en présence des thiols 2 conduit aux produits d’ouverture 3 avec d’excellents rendements (84–99%). Des conditions de déprotection ont été mises au point pour conduire ensuite aux acides β2,2-aminés 4 et 5. Il est intéressant de noter que le remplacement de cystéine par ces dérivés d’isocystéine dans des peptides génère de bons inhibiteurs de la stromélysine.79
La même année, Peregrina et Avenoza ont décrit une réaction de substitution nucléophile d’ordre 2, en présence de DBU, permettant l’ouverture du sulfamidate 1 par le dérivé de la cystéine 6 (Schéma 50).77 Ceci a permis la formation d’α/β2,2-peptides 7 avec un rendement de 98% et un ed supérieur à 95%. Le produit 7 a été engagé dans des réactions de déprotection pour conduire à l’α-méthyl norlanthionine 8 avec un rendement de 80%.
Busto et Peregrina ont continué à s’intéresser aux sulfamidates cycliques. En 2015, ils ont développé l’élaboration de glycopeptides 12 (Schéma 51).78 Une réaction d’ouverture du sulfamidate 9 avec le thiosucre 10, en présence de DBU dans le DMF a permis d’obtenir l’hybride d’α,β-dipeptides S-glycosylé 11. Suite à des problèmes d’isolement, ce composé 11 a été engagé directement dans des réactions de déprotection et d’hydrolyse conduisant à l’hybride d’ α,β-dipeptides S-glycosylé 12 avec un rendement global de 37% (5 étapes).
Le sulfamidate cyclique 1 est l’intermédiaire commun de ces approches. Il est préparé en 2 étapes à partir de l’α-méthylacrylamide 13. Une réaction de dihydroxylation de Sharpless de l’α-méthylacrylamide 13 en présence d’AD-mix α et de méthanesulfonamide permet l’obtention du diol 14 correspondant avec un rendement de 81% et un ee de 93%. Une réaction de double substitution nucléophile de type SN2 avec le réactif de Burgess, suivie d’une réaction de cyclisation, conduit au sulfamidate cyclique 1 avec 97% de rendement.
A notre connaissance, Xiao est le seul à avoir développé une synthèse catalytique énantiosélective d’acides β2,2-aminés 17 contenant un atome de soufre (Schéma 53).61 Comme cité dans l’introduction bibliographique, il a décrit une réaction de sulfa-Michael de thiophénols sur des nitroalcènes β,β-disubstituées 15 (cf. § I.2.1).
En bilan, Xiao a développé la seule méthode catalytique énantiosélective pour synthétiser des acides β2,2-aminés soufrés cependant les produits synthétisés sont principalement des sulfures aromatiques. Peregrina a dû, quant à lui, utiliser des sulfamidates cycliques énantiopurs en présence d’une base en quantité stœchiométrique pour obtenir des homologues d’acides aminés énantioenrichis et des hybrides de peptides. Bien que cette méthodologie soit efficace, la création du centre stéréogène a lieu en tout début de synthèse. D’une manière générale, il est préférable de créer le centre stéréogène dans les dernières étapes du produit à haute valeur ajoutée.
Au vu de l’intérêt de ces molécules soufrées et du peu de méthodologies catalytiques énantiosélectives développées, nous nous sommes intéressés à une réaction de sulfanylation énantiosélective des isoxazolidin-5-ones α-substituées 18 en utilisant la catalyse par transfert de phase (Schéma 54). L’introduction d’un atome de soufre en position α du carbonyle par le biais des électrophiles soufrés 19, nous permettrait d’obtenir les isoxazolidin-5-ones α,α-disubstituées 20. Nous pouvons envisager par la suite un accès aux acides β2,2-aminés α-sulfanylés 21 énantiomériquement enrichis à l’aide d’un clivage réductif de la liaison N–O.
Dans un premier temps, la synthèse des isoxazolidin-5-ones α-substituées 18 sera abordée ainsi que la synthèse des électrophiles sulfanylés 19. Dans un second temps, une partie consacrée à la réaction de sulfanylation sous catalyse par transfert de phase sera étudiée.

Synthèse des précurseurs

Une librairie d’isoxazolidin-5-ones α-substituées 18 a été synthétisée (Schéma 55). Ces précurseurs 18 ont été obtenus à partir des acides de Meldrum 22 substitués en C-5 et de l’α-sulfonyl amide 25, précurseur de nitrone. Cette méthode, mise au point auparavant au laboratoire, présente l’intérêt d’être convergente (cf. préambule, p. 9).16

Synthèse des acides de Meldrum

Les acides de Meldrum benzylés 22a-c ont été préparés suivant une méthode décrite par Reddy et Ramachary (Schéma 56).80 Elle met en jeu une séquence domino impliquant une réaction de Knoevenagel entre l’acide de Meldrum 23 et les benzaldéhydes 24a-c appropriés, en présence d’une quantité catalytique de L-proline. L’alkylidène de l’acide de Meldrum 28 ainsi formé est ensuite hydrogéné in situ à l’aide du produit issu de la condensation de la phénylène diamine 27 et d’un deuxième équivalent de benzaldéhyde 24a-c. Cette séquence est assez efficace puisque les produits 22a-c ont été obtenus avec des rendements allant de 60% à 97%. Néanmoins un excès d’aldéhyde est nécessaire afin de générer la source d’hydrure avec la formation du dihydrobenzo-imidazole 29 et la méthodologie est principalement axée sur les aldéhydes aromatiques qui facilitent la génération d’hydrure.
Par la suite, Ramachary et Reddy ont utilisé la dihydropyridine de Hantzsch 30 comme source directe d’hydrure (Tableau 1).81 Un équivalent seulement d’aldéhyde est alors nécessaire dans ce mode opératoire. Cette séquence est la même que décrite précédemment et permet la création d’une librairie assez large d’acides de Meldrum 22 substitués en C-5. Dans le cas de l’acide de Meldrum avec le substituant iso-propyle 22g, l’aldéhyde impliqué dans la réaction de Knoevenagel a été remplacé par l’acétone.

Synthèse des isoxazolidin-5-ones α-substituées

Les isoxazolidin-5-ones α-substituées 18 ont été préparés selon la méthode précédemment décrite par notre équipe.16 Cette méthode met en jeu une réaction domino de cycloaddition (3+2)-fragmentation-décarboxylation entre les amides α-sulfonylés 25 (précurseur N-acylé) et différents acides de Meldrum 22 substitués en C-5, en présence de K2CO3 dans le THF (Tableau 2). Cette séquence réactionnelle a permis d’obtenir une librairie de N-Boc isoxazolidin-5-ones α-substituées 18 avec des rendements variant de 52% à 95% après purification sur colonne de gel de silice (entrées 1-14). Dans le cas de l’isoxazolidin-5-one N-Boc α-méthylée 18g, un ajout d’un équivalent de K2CO3 a été nécessaire après 24 heures de réaction afin d’obtenir une conversion complète et isoler le produit 18g avec 60% de rendement. Pour l’isoxazolidin-5-one N-Cbz α-benzylée 18o, synthétisée à partir de 25b et 22a, une dégradation du produit sur silice a été observée et le produit 18o, isolé à hauteur de 62%, présente toujours des traces d’impuretés visibles par RMN 1H.83 Cela démontre l’instabilité de cette famille d’isoxazolidin-5-ones α-substituées et peut expliquer les modestes rendements obtenus dans plusieurs cas par une décomposition lors de la purification sur colonne de silice. D’une manière générale, l’étendue de cette réaction est tout à fait appréciable car on peut synthétiser des isoxazolidin-5-ones avec divers groupements fonctionnels tels qu’un éther (entrée 11), un NHBoc (entrée 12), un alcène (entrée 13) et un ester (entrée 14).

Sulfanylation énantiosélective des isoxazolidin-5-ones α-substituées

Validation de l’approche par CTP

Mon premier objectif, dans le cadre de ce projet, était de développer une sulfanylation énantiosélective en position α des isoxazolidin-5-ones α-substituées. Tout d’abord, nous nous sommes intéressés à mettre en place la réaction de sulfanylation en version racémique (Schéma 61). Nous avons donc choisi arbitrairement l’isoxazolidin-5-one α-benzylée 18a comme substrat modèle et le N-(phénylsulfanyl)phtalimide 19a comme source sulfurée électrophile, qui a l’avantage d’être commercial. Ce réactif a déjà été utilisé avec succès par Maruoka dans une réaction de sulfanylation de dérivés de l’indanone dans des conditions de transfert de phase liquide/liquide (cf. § I.1.4).44 Dans notre cas, nous avons eu le plaisir d’observer la formation du produit 20a désiré avec un rendement de 92%, après 20 heures de réaction dans le THF en présence de carbonate de césium (1,1 éq.) et d’une quantité catalytique de chlorure de benzyltriéthylammonium (10 mol%).
Une étude a été ensuite réalisée afin de mettre en évidence un éventuel phénomène d’accélération de la réaction par catalyse par transfert de phase. Pour cela, l’effet du chlorure de benzyltriéthylammonium a été examiné dans des solvants de nature variée (Tableau 4). L’isoxazolidin-5-one α-benzylée 18a et le N-(phénylsulfanyl)phtalimide 19a (1,1 éq.) ont été mis en présence de carbonate de césium (1,1 éq.) dans un solvant donné pendant 3 heures à température ambiante. Les rendements ont été déterminés par RMN 1H en présence d’oxyde de dibenzyle comme étalon interne. Dans le cas du THF, la réaction sans le sel d’ammonium fonctionne à hauteur de 41% de rendement (entrée 1). Ce rendement est nettement plus faible que celui observé auparavant (76%, entrée 2) en présence du sel d’ammonium. Une légère influence bénéfique du sel d’ammonium a été mesurée dans le toluène, puisque l’on passe de 21 à 43% de rendement (entrées 3 et 4). Dans le dichlorométhane, la réaction sans sel d’ammonium est particulièrement lente. En trois heures de réaction, seulement 5% du produit désiré 20a est obtenu (entrée 5). En revanche, une accélération marquée est observée avec l’agent de transfert de phase (53% de rendement, entrée 6). Le dichlorométhane, conduisant à une réaction de « fond » racémique limitée, a ainsi été sélectionné comme solvant pour le criblage des catalyseurs chiraux pour conduire à une version énantiosélective de la méthodologie que nous avons envisagée.
Afin d’avoir une vue d’ensemble, la catalyse par des bases de Brønsted a aussi été envisagée. En effet, des réactions de sulfanylation avait déjà été mises en place utilisant les dérivés du quinquina comme base chirale.87 Nous avons ainsi testé la réaction avec les mêmes réactifs 18a et 19a que précédemment, mais en présence d’une quantité catalytique de quinine dans le THF pendant 20 heures (Schéma 62). Malheureusement, aucune réaction n’a eu lieu. Aucune amélioration n’a été observée lors de l’utilisation de bases de Brønsted plus fortes telles que les guanidines.88
N’ayant aucun résultat positif en utilisant la catalyse par des bases de Brønsted faibles (quinine) ou par des bases fortes (guanidine pKa = 24 dans l’acétonitrile), nous pouvons alors dire que la catalyse par transfert de phase se révèle être la catalyse adéquate pour mettre en place notre réaction de sulfanylation électrophile.

Optimisation de la sulfanylation énantiosélective

Choix du catalyseur

Nous avons conservé comme réaction modèle la réaction de sulfanylation à partir de l’isoxazolidin-5-one 18a et du N-(phénylsulfanyl)phtalimide 19a, en présence de carbonate de césium et d’un agent de transfert de phase énantiopur (10 mol%), dans le dichlorométhane pendant 16 heures à température ambiante (Schéma 63). Nous avons commencé le criblage avec l’évaluation des différents dérivés du quinquina commerciaux 39a-d. Ils ont en commun la présence d’un groupement benzyle sur l’atome d’azote de la quinuclidine et d’une fonction alcool secondaire libre. Malheureusement, les rendements obtenus sont modérés, compris entre 43 et 59% et les ee obtenus sont très faibles, inférieurs à 7%.89
Le criblage a été poursuivi en testant la large librairie de catalyseurs dérivés du quinquina (commerciaux ou synthétisés), dont nous disposions au laboratoire (Schéma 64).26,90 Nous avons commencé avec les catalyseurs 39e-g décrits par Lygo et Corey. Le produit 20a est obtenu avec de faibles rendements, n’excédant pas les 63%, et les ee restent très faibles (4 à 16%). Les sels d’ammonium 39h-i comportant des hétéroatomes sur la partie benzylique, décrits par Jew et Park, ont été ensuite testés. Cependant, les rendements sont faibles (inférieurs à 33%) et les ee ne dépassent pas les 20%. Des catalyseurs 39k-m, ayant la fonction alcool en C-9 protégée, ont aussi été envisagés. Le meilleur résultat, avec 10% d’ee et 60% de rendement, a été obtenu avec le sel du O-piv-N-benzyl quinidinium 39m. Après des dérivés des epi-amino quinine 39n-p, contenant respectivement une fonction urée, une fonction amide ou une fonction carbamate ont été criblés.91 Les résultats restent très faibles dans cette série. Le meilleur résultat en termes d’ee (26%) et de rendement (30%) a été obtenu avec le dérivé de la quinine 39p contenant une fonction carbamate. Un sel dimérique dérivé de la quinine 39q a été finalement engagé, avec toutefois avec une légère modification des conditions opératoires. En effet, au regard de la bibliographie, des mélanges de solvants, toluène/CH2Cl2 notamment, sont utilisés afin d’améliorer leur solubilité dans les milieux organiques.36 Malheureusement, un rendement seulement de 32% a été obtenu et un ee faible de 11%. En bilan, les sels d’ammonium dérivés du quinquina ne sont pas les catalyseurs adéquats pour développer une version énantiosélective de la réaction de sulfanylation envisagée. Toutefois, ils ont démontré une faible capacité d’accélération du processus.
Pour la suite de l’optimisation, nous nous sommes orientés vers des catalyseurs de transfert de phase plus exotiques, comme le catalyseur développé par Shibasaki 40, un bis-ammonium dérivé de l’acide tartrique ou bien des catalyseurs à chiralité axiale tels que ceux décrits par Maruoka 41 et 42 (1ère et 2ème génération) (Schéma 65). Avec le catalyseur de Shibasaki 40, un faible rendement a été obtenu (39%) et ce catalyseur n’induit pas d’énantiosélectivité. Une amélioration significative de l’ee à 31% et un bon rendement de 71% ont été observés avec le catalyseur de Maruoka de 2ème génération 42. Un bien meilleur résultat a été obtenu avec le catalyseur de 1ère génération 41. Le produit final désiré 20a est alors obtenu avec un rendement de 65% et un ee de 68%.
Voyant la nette différence d’énantiosélectivité obtenue en présence des catalyseurs dérivés du quinquina et du catalyseur de 1ère génération de Maruoka 41, nous nous sommes intéressés à d’autres catalyseurs à chiralité axiale. Cette démarche était non seulement motivée par l’amélioration de notre méthodologie énantiosélective mais aussi car le catalyseur Maruoka 41 est très long à synthétiser et cher à l’achat. Nous nous sommes alors penchés vers les catalyseurs 43 décrits par Lygo (Schéma 66), qui sont plus faciles à synthétiser.37 Deux sels d’ammonium ont ainsi été élaborés (les synthèses sont détaillées dans le § IV) et testés dans nos conditions de transfert de phase solide/liquide. Pour les deux catalyseurs synthétisés 43a et 43b, la même tendance a été remarquée. Ils sont très efficaces en termes d’accélération de la vitesse de la réaction (67% et 80% de rendement). En revanche, ils sont peu compétents pour l’induction asymétrique (ee < 13%).
Cette étude a montré que les sels d’ammonium dérivés du quinquina n’étaient pas des catalyseurs performants dans la méthodologie de sulfanylation envisagée. Cependant, le catalyseur commercial à chiralité axiale 41 de 1ère génération de Maruoka, a conduit à des résultats encourageants avec un rendement de 65% et un ee de 68%. C’est pourquoi nous avons décidé de continuer l’optimisation avec ce catalyseur. Nous avons successivement fait varier le solvant et la base. Les résultats obtenus sont décrits ci-après.

Choix du solvant

Pour des soucis de prix du catalyseur 41,92 nous avons décidé de baisser la charge catalytique à 5 mol% pour la suite de l’optimisation (Tableau 5). Dans le cas du dichlorométhane, l’ee du produit 20a reste quasiment inchangé (66% versus 68%) et une légère chute de la conversion a été remarquée (57% versus 65%, entrée 1). Avec le THF comme solvant une hausse de l’ee à 80% ainsi qu’une bonne conversion de 92% ont été mesurées (entrée 2). Ensuite, dans le toluène, un très bon ee de 90 % a été obtenu (entrée 3) néanmoins une chute de la conversion à 82% a été observée. L’éther diéthylique a, par la suite, été testé (entrées 4 et 5).93 Pour notre plus grande satisfaction, une conversion totale ainsi qu’un très bon ee de 93% ont été mesurés après 16 heures de réaction. De plus, on a pu remarquer que l’on pouvait obtenir le produit 20a de configuration absolue soit (S) soit (R) avec les mêmes ee et la même conversion suivant l’utilisation des catalyseurs énantiomères NAS Br 41 (R,R) et (S,S) respectivement. Nous avons ainsi souhaité tester d’autres solvants éthérés. Dans le cas 233€/100 mg.
Lors de l’achat du catalyseur directement auprès du fabricant Nagase (avec un prix beaucoup plus raisonnable), le seul énantiomère disponible du NAS Br (41) était le (R,R), c’est-à-dire l’énantiomère du catalyseur en stock au sein du laboratoire. Une réaction comparative a été réalisé (Tableau 2, entrée 5). L’optimisation ainsi que l’exemplification ont été effectuées avec le (R,R)-NAS Br du 1,4-dioxane, une bonne conversion de 91% a été obtenue cependant une chute de l’ee a été observée (69%, entrée 6). Des solvants éthérés considérés comme ‘verts’ ont été aussi évalués.94 Le cyclopentyl méthyl éther (CPME) a donné des résultats proches (conv. >99%, 91% ee) que ceux obtenus dans l’Et2O (entrées 7 versus 5). Pour finir, nous avons testé le méthyl tétrahydrofurane (MeTHF) mais une chute de l’ee et de la conversion a été mesurée (conv. 86%, 87% ee, entrée 8).

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Table des matières

Liste des abréviations
Préambule
1. Les isoxazolidin-5-ones : synthèses et applications
1. Contexte du sujet
Chapitre I. Introduction bibliographique
I.1. Organocatalyse et la catalyse par transfert de phase
I.1.1. Chronologie de la catalyse par transfert de phase
I.1.2. Aspects mécanistiques
I.1.3. Les grandes familles de catalyseurs
I.1.4. Formation de liaisons C–S sous CTP
I.1.5. Formation de liaisons C–C sous CTP : réaction de Michael
I.2. Synthèse organocatalysée et énantiosélective d’acides β2,2-aminés
I.2.1. Synthèse d’acides β2,2-aminés : formation de liaison C–X
I.2.2. Synthèse d’acides β2,2-aminés : formation de liaison C–C
Chapitre II. Sulfanylation énantiosélective sous catalyse par transfert de phase
II.1. Les molécules soufrées dérivées d’acides β2,2-aminés
II.2. Synthèse des précurseurs
II.2.1. Synthèse des acides de Meldrum
II.2.2. Synthèse des hydroxylamines N-alkoxycarbonyles
II.2.3. Synthèse des isoxazolidin-5-ones α-substituées
II.2.4. Synthèse des électrophiles soufrés
II.3. Sulfanylation énantiosélective des isoxazolidin-5-ones α-substituées
II.3.1. Validation de l’approche par CTP
II.3.2. Optimisation de la sulfanylation énantiosélective
II.3.2.a. Choix du catalyseur
II.3.2.b. Choix du solvant
II.3.2.c. Choix de la base
II.3.2.d. Choix de l’électrophile soufré
II.3.2.e. Influence d’autres paramètres
II.3.3. Etendue de la réaction énantiosélective
II.3.3.a Champs d’application
II.3.3.b. Variation de l’électrophile soufré
II.3.4. Aspects mécanistiques
II.3.5. Vers une version multicomposés
II.3.6. Transformations chimiques
III.3.6.a. Réaction d’oxydation
III.3.6.b. Réactions d’ouvertures
III.3.6.c. Rupture de la liaison N-O
II.4. Conclusion
Chapitre III. Alkylation énantiosélective sous catalyse par transfert de phase
III.1. Réactions d’alkylation sous catalyse par transfert de phase par des halogénures d’alkyle
III.1.1. Réaction de méthylation
III.1.2. Réaction de benzylation et d’allylation
III.2. Réaction d’addition 1,4 sous catalyse par transfert de phase
III.2.1. Choix du catalyseur
III.2.2. Choix du solvant, de la base et de la température
III.2.3. Influence de l’acrylate et de la charge catalytique
III.2.4. Etendue et limites de la réaction
III.2.5. Aspects mécanistiques
III.2.6. Autres électrophiles
III.2.7. Transformations chimiques
III.3. Conclusion
Chapitre IV. Synthèse de nouveaux catalyseurs de transfert de phase
IV.1. Introduction bibliographique
IV.2. Synthèse de catalyseurs hybrides dérivés de Maruoka et Lygo
IV.2.1. Synthèse de l’amine atropoisomère
IV.2.2. Synthèse de la partie tropos
IV.2.3. Formation des sels d’ammonium et caractérisation par RMN
IV.3. Evaluation des nouveaux catalyseurs à chiralité axiale
Chapitre V. Conclusion générale et perspectives
Experimental part
1.General procedures
2.1. Synthesis of precursors
2.2. Synthesis of Meldrum’s acid derivatives
2.3. Synthesis of N-alkoxycarbonyle hydroxylamine
2.4. Synthesis of α-substituted isoxazolidin-5-ones
3. Enantioselective sulfanylation reaction
3.1. Synthesis of sulfanylated reagents
3.2. Synthesis of α,α-disubstituted isoxazolidin-5-ones
3.3. Synthetic transformations of α,α-disubstituted isoxazolidin-5-ones
4. Racemic alkylation reaction
5. Enantioselective conjuguated addition reaction
5.1. Synthesis of acrylate reagents
5.2. Synthesis of α,α-disubstituted isoxazolidin-5-ones
5.3. Synthetic transformations of α,α-disubstituted isoxazolidin-5-ones
6. Synthesis of new phase-transfer catalysts
6.1. Synthesis of enantiopure amine
6.2. Synthesis of the tropos part
6.3 Preparation of the ammonium salts
Curriculum Vitae
Publications

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