Pâturages naturels et les jachères
Au Burkina Faso, les pâturages naturels constituent la base quasi exclusive de l’alimentation du cheptel, en particulier en saison pluvieuse (Bougouma-Yaméogo, 1995). Ils représentent près de 75% des ressources alimentaires pour le bétail au Burkina Faso (MRA, 2004) et près de 90% dans la plupart des pays en Afrique subsaharienne (Coulibaly, 2001). Une analyse des ressources pastorales du Burkina Faso selon le gradient climatique nord sud fait par Zoungrana (1991), a permis de distinguer des unités sahéliennes, Nord-soudaniennes, Sud-soudaniennes et des unités de transition.
Les pâturages sahéliens se caractérisent par un tapis graminéen à base d’espèces annuelles sous une strate ligneuse arbustive à arborée, peu dense (Fontès et Guinko,1995). Le tapis herbacé est largement dominé par Schoenefeldia gracilis, Cenchrus biflorus, Panicum leatum et Aristida mutabilis. Le peuplement ligneux est très ouvert, avec des individus épars de Acacia raddiana, Balanites aegyptiaca, Acacia senegal et Acacia erhenbergiana.
Les pâturages Nord-soudaniens présentent une végétation de type savane arbustive à arborée, localement très claire. La strate herbacée est dominée par Loutedia togoensis, Andropogon pseudapricus, Aristida kerstingii, Dactyloctenium aegyptium et Digitaria horizontalis. Le peuplement ligneux comprend essentiellement Combretum spp., Acacia seyal et Terminalia avicennioïdes.
Les pâturages sud-soudaniens sont constitués de savanes arborées denses dans les vieilles jachères, de savanes boisées et de forêts claires dans les zones peu perturbées. Une étude réalisée dans la zone agropastorale de Sidéradougou a permis d’identifier et de caractériser 4 types physionomiques de la végétation pâturée :
– Les savanes arborées claires localisées sur des buttes cuirassées résiduelles, avec les espèces dominantes ci-après : Vitellaria paradoxa, Burkea africana, Loudetiopsis scaëttae et Schizachyrium sanguineum ;
– Les savanes arborées denses qui se développent sur les plaines à relief plat. Ce sont les formations les plus répandues dans la zone, avec une flore dominée par Afzelia africana, Terminalia macroptera, Schizachyrium sanguineum et Hyparrhenia cyanescens ;
– Les savanes boisées à Isoberlinia doka et Andropogon ascinodis localisées sur les versants des ondulations à pentes faibles ; Enfin, les savanes herbeuses sur bowal (Sol mince limono-argileux, localement hydromorphe en saison des pluies) à Loudetia togoensis et Dihetervpogon agerupii les savanes herbeuses de bas-fond temporairement inondé à Imperata cylindrica et Schizachyrium brevifolium; la prairie aquatique à inondation prolongée à Oryza barthii et Acrocera samplectens. Les pâturages naturels ont une capacité de charge moyenne variant entre 1,3 et 5 ha/UBT (MRA, 2000). En outre, la productivité de ces pâturages tropicaux est très variable dans l’espace et le temps, compte tenu des différences de pluviosité et de fertilité des sols (Pagot, 1985). En terme de biomasse par exemple, la production moyenne se situe en année normale aux niveaux suivants : 0,8t/ha au Sahel ;1t/ha au Centre ;1,2t/ha à l’Est et au Sud-Ouest, avec des taux moyens en matière azotée en début de saison sèche de : 0,8% ; 1% ;0,85% respectivement pour les régions Sahel, Centre et Sud-Ouest (Breman et al., 1985 cité par Nianogo, 2000). Dans les conditions d’élevage extensif, les jachères représentent une source importante de fourrage privilégié par les éleveurs pendant la période humide. La bonne fréquentation des jachères est due à la structure assez basse des groupements post-culturaux comparée aux hautes formations des savanes (Sinsin, 2000) et également à l’indice global de qualité des pâturages herbacés qui est assez élevé pendant les premières années d’abandon cultural (Akpo et al., 2000) conférant ainsi une assez bonne valeur pastorale à la jachère. En effet, des végétations pionnières de plus en plus riches en graminées pérennes se succèdent avec les années s’il n’y a pas de surpâturage sur les jachères. Puis, la proportion de graminées vivaces appétibles s’accroît, au détriment des espèces annuelles et des vivaces à valeur pastorale médiocre (CIRAD, 1996).
Sous-produits agro-industriels (SPAI)
Les SPAI sont essentiellement représentés par le son de blé, les graines de coton, le tourteau de coton, le tourteau d’arachide, l’aliment de bétail industriel, les drèches sèches de brasserie industrielle, les drèches sèches dolo (bière artisanale de mil ou sorgho) et la mélasse de canne. Ils sont utilisés comme complément dans l’alimentation des animaux plus particulièrement des animaux d’embouche (Umutoni, 2012). Selon le Réseau des Organisateurs d’Éleveurs et Pasteurs de l’Afrique, la production globale du tourteau de coton est de l’ordre de 87 à 110 000 tonnes au Burkina Faso. En ajoutant la production de très nombreuses petites huileries, le pays produirait environ 150 000 tonnes de tourteaux de coton par an ce qui est très largement en déca des besoins des filières bétailsviandes surtout durant la période de novembre à mai (ROEPA, 2012).
Traitement physique
Les traitements physiques consistent à réduire la dimension des particules de pailles ou à modifier leur structure afin d’augmenter la surface de contact avec les enzymes et les microorganismes de la digestion. Ces traitements concernent avant tout les fourrages pauvres (pailles) ou les foins récoltés tardivement dont l’ingestion est faible. A cet effet diverses méthodes sont utilisées notamment le broyage, le hachage, l’agglomération, la vapeur pression, etc. Le hachage est plus une technique de présentation de fourrages longs et assez durs facilitant leur distribution et leur préhensibilité par l’animal. Il est utilisé par exemple dans le cas des tiges de céréales (Chenost et Kayouli, 1997). Avec des fourrages hachés ou broyés distribués à des moutons, l’ingestibilité augmente lorsque la taille des particules diminue (Jarrige et al., 1995). La durée d’ingestion diminue et la vitesse d’ingestion augmente considérablement. Cependant, si le broyage est trop fin (en dessous de 0,75 mm pour les légumineuses et de 0,50 mm pour les graminées) la réponse de l’animal s’inverse. Le broyage est d’autant plus efficace pour augmenter l’ingestibilité que celle du fourrage initial est faible. Suivi d’une agglomération, il peut être utilisé pour les pailles (Chenost et Dulphy, 1987) et les foins. Cependant, il peut entrainer une baisse, en particulier pour les foins de graminés, de la digestibilité de la matière organique (dMO), par suite d’une accélération du transit digestif (Baumont et al., 1997 cité par Chenost et Kayouli, 1997). Les fourrages condensés, compactés ou comprimés sont généralement ingérés par le ruminant en plus grande quantité (augmentation de 60 à 80 p.100) que le fourrage sous forme longue et, cela, d’autant plus que le fourrage long est plus grossier (paille). Ce phénomène résulte du fait que les particules réduites quittent plus rapidement le rumen (régulation physique de l’appétit). Cependant l’accélération du transit digestif se traduit par une réduction de la digestibilité en raison du temps de séjour dans le rumen insuffisant pour une action complète des microorganismes (Jackson, 1979)
Embouche semi-intensive
Cette technique est aussi appelée embouche paysanne parce qu’elle est quasiment l’unique forme d’embouche en milieu rural et pratiqué surtout par les femmes (Dicko et al., 2006). Cependant, sa pratique est également courante dans les zones urbaines et périurbaines (Sangare et al., 2005). Elle consiste à nourrir les jeunes mâles à base d’herbe fraîche du pâturage naturel de saison des pluies in-situ ou fauchée et offerte à l’auge avec une complémentation peu régulière, constituée de déchets de ménage/cuisine ou d’issues de céréales (INERA/DPA, 2013). Hormis les issues de céréales et la corde pour le maintien des animaux à l’attache qui font parfois l’objet d’achat, il y a rarement des investissements spécifiques sur les animaux à emboucher. Dans ce type d’embouche, l’hygiène et les soins vétérinaires sont assez mieux suivis (Drabo, 2011). La vitesse d’engraissement des animaux et la durée de l’embouche dépendent essentiellement de l’âge et du poids de départ des animaux non préalablement embouchés (maigres), de la valeur nutritive des pâturages, de la quantité et de la stratégie de complémentation du producteur (INERA/DPA, 2013). La durée de l’engraissement varie généralement de 6 à 12 mois à cause des performances pondérales souvent modestes (≤ 50 g de GMQ), et irrégulières enregistrées au cours de l’opération (Sangare et al., 2005).
Performances de croissance des animaux
Les paramètres de croissance pondérale des ovins pendant la durée de l’essai sont récapitulés dans le tableau XVI. En 42 jours d’embouche, les gains totaux moyens de poids ont varié de 4,6 kg à 5,8 kg par animal. Ce qui équivaut à des gains moyens quotidiens (GMQ) de 109,6 à 138,1 g/jour/animal. L’analyse de variance a montré que l’utilisation des fourrages de variété améliorée en combinaison ou non à celles de variété locale n’a pas eu d’effet significatif (p>0,05) sur la croissance pondérale des ovins. Les performances pondérales obtenues sont comparables à celles rapportées par certains auteurs (Somda, 2001 ; Nantoumé et al, 2006 ; Ouédraogo et al, 2004 ; Kiéma et Sanon, 2001 ; Dehoux et Hounsou-vé, 1991). Chez les moutons de race Mossi et Peulh avec quatre essais d’alimentation intensive, les GMQ étaient compris entre 73g et 133g selon Bourzat (1987). En complémentant quatre fourrages (paille de brousse, fanes d’arachide, paille de sorgho et paille de maïs) avec du tourteau de coton et du mil, Nantoumé et al. (2006) ont obtenu des GMQ respectifs de 92 ; 192 ; 132 et 142g sur des moutons Maures. Dehoux et Hounsoun-vé (1991) rapportent un GMQ de 106 et 118g pour des moutons Djallonké et Foulani âgés de 14 à 20 mois en 5 semaines d’engraissement avec une ration composée de céréales (mil et maïs), de graines de coton et de fourrages frais. Nantoumé et al (2009) au Mali rapporte des gains variant entre 100g et 124g sur des moutons Maures de 12 à 18 mois alimentés avec quatre types de fourrages pauvres (paille de sorgho, paille de mil, paille de maïs, paille de brousse) complémentés avec du tourteau de coton. Par ailleurs Somda (2001) rapporte des gains de poids moyen supérieurs à 130g/j sur des moutons de races Mossi, Métis et Bali-bali alimenté avec des résidus de cultures locales (paille de sorgho, fanes d’arachide, fanes de niébé) complémentés avec du tourteau de coton et du son cubé. Les meilleures performances de croissance obtenues avec les variétés améliorées sur les variétés locales seraient en partie liées à leur qualité nutritive (tableau VX) plus importante. En effet, les rations combinant les deux variétés ont donné des gains de poids moyens intermédiaires.
Evolution pondérale par ration distribuée
Les courbes montrent des allures semblables. Pendant les 3 premières semaines, nous remarquons une croissance des gains de poids puis une chute brutale à la 4ème semaine. Ensuite le gain de poids subit une remontée de la 5ème semaine à la fin de l’opération d’embouche. La chute du gain pondérale serait liée à une sous-consommation des animaux pendant cette période due à une apparition précoce des premières pluies. D’un constat général, les gains de poids obtenus avec les fourrages de variétés améliorées en combinaison ou non à ceux de variétés locales ont consacré les meilleures évolutions. L’évolution continue des gains de poids serait lié à la période relativement court (49 jours période d’adaptation y compris) de l’essai car les ovins en matière d’embouche extériorisent leurs meilleures performances dès les deux premiers mois (Kiéma, 2008).
Conclusion
Les ruminants domestiques sont confrontés à d’énormes difficultés alimentaires d’ordre qualitatif et quantitatif pendant la saison sèche de l’année. A cet effet, l’étude de la production de la biomasse des variétés améliorées à double objectif de sorgho et de niébé a permis d’aboutir à un certain nombre de résultats et conclusions qui peuvent contribuer à résoudre ce problème de déficit alimentaire. L’étude a montré que les variétés à double objectif de sorgho et de niébé présentent des potentialités céréalières et fourragères intéressantes et constituent un appoint alimentaire pour les familles et le bétail. En effet, pour les deux spéculations étudiés (sorgho « variété Sariasso » et niébé « variété KVX-745-11P ») ; des quantités plus ou moins importantes de graines et fourrages à l’hectare sont obtenues. L’analyse de la composition chimique des fourrages des variétés étudiés montre des teneurs en MS, MO, MM et MAT relativement importante susceptible de pallier les déficiences nutritionnelles des ruminants domestiques en saison sèche. Le diagnostic des pratiques d’embouches bovine et ovine dans la zone d’étude révèle que les hommes principalement des agriculteurs sont les premiers acteurs de cette activité. Le mode de conduite est la stabulation permanente. Les rations des animaux d’embouche sont composées principalement d’aliments grossiers, de concentrés, de complément minéral et de quelques fourrages ligneux. La disponibilité et la cherté des ressources alimentaires est de loin la principale contrainte de cette activité. Les résidus de cultures des variétés testées sont d’une bonne qualité pour être valorisé en embouche ovine. En effet, une ingestion du fourrage des dites variétés complémentées avec du concentré permet un gain de poids important des animaux en stabulation. D’une façon générale, cette étude montre que ces variétés améliorées pourraient assurer une alimentation humaine et animale dans la zone soudano-sahélienne. Il est donc possible d’accroître la production agricole et animale dans ladite zone par la vulgarisation des variétés de sorgho et de niébé à double objectif. Pour cela nous proposons la prise en compte de la dimension « culture associative sorgho/niébé » dans le système de l’intégration de l’agriculture à l’élevage.
|
Table des matières
Introduction
PREMIERE PARTIE : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
Chapitre I : Principales ressources alimentaires du bétail
I.1. Fourrages
I.1.1. Pâturages naturels et les jachères
I.1.2. Résidus de cultures
I.1.3. Cultures fourragères
I.1.4. Réserves fourragères (foins)
I.2. Sous-produits agro-industriels (SPAI)
I.3. Autres aliments
Chapitre II : Valorisation des résidus de culture dans l’alimentation animale
II.1. Valeur nutritive de résidus de cultures
II.1.1. Composition chimique
II.1.2. Ingestibilité
II.1.3. Digestibilité
II.2. Traitement des résidus de cultures
II.2.1. Traitement physique
II.2.2. Traitements chimiques
II.3. Supplémentation et Complémentation
Chapitre III : Pratique de l’embouche ovine au Burkina Faso
III.1. Types d’embouche pratiqués
III.1.1. Embouche semi-intensive
III.1.2. Embouche intensive
III.2. Aliments utilisés
III.2.1. Aliments grossiers
III.2.2. Aliments concentrés
III.2.3. Autres aliments
III.3. Paramètres zootechniques
DEUXIEME PARTIE : ETUDE EXPERIMENTALE
Chapitre I : Présentation de la zone d’étude
I.1. Situation géographique
I.2. Milieu physique
I.2.1. Relief et sols
I.2.2. Climat
I.2.3. Végétation
I.3. Milieu humain
Chapitre II : Matériel et méthodes
II.1. Evaluation de la production en graines et en fourrages
II.1.1. Matériel
II.1.2. Méthodes
II.1.2.1. Production de graines
II.1.2.2. Production en fourrage
II.2. Analyses bromatologiques
II.2.1. Matériel
II.2.2. Méthodes
II.3. Pratiques d’embouches bovine et ovine
II.3.1. Phase d’enquête
II.3.2. Méthode d’échantillonnage
II.4. Essai d’alimentation avec les résidus culturaux
II.4.1. Les animaux
II.4.2. Aliments et mode de distribution
II.4.3. Méthode expérimentale
II.5. Analyse statistique
Chapitre III : Résultats et discussions
III.1. Production de graines et fourrages des variétés testées
III.1.1. Rendement graines
III.1.2. Rendement fourrage
III.2. Pratiques d’embouche bovine et ovine
III.2.1. Caractéristiques générale des emboucheurs enquêtés
III.2.2. Conduite de l’activité d’embouche
III.2.2.1. Proportion d’embouches bovine et ovine
III.2.2.2. Habitat et équipements
III.2.2.3. Animaux
III.3. Essai d’alimentation
III.3.1. Composition chimique des aliments
III.3.2. Performances zootechniques
III.3.2.1. Performances de croissance des animaux
III.3.2.2. Evolution pondérale par ration distribuée
III.3.3. Consommation alimentaire
Conclusion
Bibliographie
Webographie
Annexes
Télécharger le rapport complet