Suivi et prédiction de l’évolution de l’occupation du sol en Bretagne

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Le suivi de l’occupation et de l’utilisation du sol

Une préoccupation majeure

Les changements d’occupation et d’utilisation du sol résultent d’interactions complexes entre systèmes sociaux et systèmes environnementaux qui évoluent dans le temps (Figure 1). Tandis que les phénomènes climatiques et biophysiques ont été pendant longtemps les moteurs principaux des transformations des surfaces terrestres, l’homme est aujourd’hui à l’origine de la majeure partie des transformations qui affectent les écosystèmes terrestres (Steffen et al., 2004). Les changements intervenant dans les modes d’occupation et d’utilisation des sols engendrent des impacts au niveau des processus qui contrôlent les écosystèmes (Figure 2), qu’il s’agisse de conversions, c’est-à-dire du passage d’une catégorie d’occupation ou d’utilisation à une autre, ou de modifications qui représentent une évolution à l’intérieur d’une même catégorie suite à des changements affectant ses attributs physiques ou fonctionnels. Par exemple, l’extension des cultures au détriment des surfaces boisées engendre une augmentation du ruissellement de surface et par extension de l’érosion. L’intensification de l’usage des terres, à travers l’emploi massif d’engrais, de fertilisants et de produits phytosanitaires, entraîne des impacts environnementaux, parmi lesquels une forte dégradation de la qualité de l’eau et des sols. Dans certaines régions, les aménagements effectués sur le territoire agricole majorent et accélèrent les transferts de flux et de matières vers les cours d’eau (drainage des zones humides, multiplication des drains et fossés, suppression du réseau bocager…). L’impact de l’occupation et de l’utilisation des sols sur l’environnement dans des régions d’agriculture intensive, thème largement présent dans la littérature scientifique, que ce soit dans des paysages ouverts de grandes cultures (Haith, 1976 ; O’Callaghan, 1996; Taraba et al., 1996; Sheridan, 2002 ; Forsyth, 1999) ou dans des paysages de type bocager (Mérot et Jigorel, 1996; Cheverry, 1998), a été démontré. Le rôle de structures paysagères telles que les haies et les zones humides de fonds de vallées sur le milieu et en particulier sur la qualité de l’eau, est aujourd’hui également bien reconnu, même si peu d’études spécifiques en ont mesuré précisément les impacts (Mérot, 1999 ; Caubel-Forget et al., 2001 ; Viaud, 2004).

Le questionnement lié à la détermination des dynamiques d’occupation et de l’utilisation des sols

L’identification et le suivi de l’évolution de l’occupation du sol pose d’emblée des questions relatives aux échelles spatio-temporelles utilisées : A quelles échelles les processus interviennent-ils et sont-ils perceptibles ? Quelles sont les échelles d’observation disponibles et/ou souhaitables ? Comment peut-on passer d’une échelle à l’autre ? En plus des questionnements liés aux échelles spatiales, la détermination des dynamiques de l’occupation et de l’utilisation des sols soulève le problème de la prise en compte du temps dans les processus d’observation et de suivi : il s’agit en particulier de déterminer si les systèmes territoriaux étudiés, sont en phase de stabilité ou d’instabilité sur une période donnée, c’est-à-dire repérer des constantes, mais aussi des ruptures ou des discontinuités. Ces recherches ont pour ambition d’améliorer les connaissances thématiques sur les changements d’occupation et d’utilisation des sols et des structures paysagères, mais aussi de développer des méthodes de traitement de données spatialisées permettant de mettre ces changements en évidence et de les simuler. Elles s’insèrent dans les problématiques de recherche actuelles de la géographie : elles se situent à l’interface nature/sociétés (la pression anthropique sur le milieu à travers la façon dont l’homme occupe et utilise les sols), elles traitent des dynamiques spatio-temporelles de territoires en visant à mettre en évidence la vulnérabilité de certains espaces vis-à-vis d’un risque environnemental.
La figure 3 illustre les différentes échelles spatio-temporelles d’analyse de l’évolution de l’occupation et de l’utilisation des sols par télédétection. La diversité des échelles d’analyse offertes par les capteurs permet aujourd’hui d’identifier et de suivre plus ou moins finement l’occupation du sol. Le passage d’une échelle à une autre reste cependant très complexe de par la nature même des données.

la question centrale de l’intégration du suivi de l’occupation et de l’utilisation des sols dans des modèles de simulation

Les données de télédétection sont de plus en plus fréquemment intégrées dans des processus de modélisation. Dans ce contexte, plusieurs programmes internationaux ont vu le jour, parmi ces différents programmes, on peut citer le « National Research Concil » (NRC), « International Geosphere-Biosphere Program » (IGBP), « International Human Dimensions Program » (IHDP) et « Land Use/Cover Change Program » (LUCC) qui découle et dépend des deux derniers…Tous ces programmes insistent sur l’importance de caractériser et modéliser les changements d’utilisation du sol et leurs dynamiques en relation avec l’étude des interactions Homme-Environnement. Les objectifs à atteindre sont donc multiples, ils doivent notamment permettre le développement des bases de données d’occupation et d’utilisation du sol à différentes échelles d’analyse (continentale, régionale et locale). Ces programmes doivent aussi favoriser la compréhension des changements d’occupation du sol en relation avec des données socio-économiques afin d’élaborer des modèles théoriques et des scénarii de simulation de l’évolution de l’occupation du sol. A ce niveau, des protocoles de validation et de reproductibilité des modèles doivent être mis en place pour évaluer la fiabilité des résultats. Enfin, une connexion de ces données avec d’autres modèles biophysiques devra permettre de qualifier et quantifier le plus précisément possible l’impact de ces changements d’évolution d’occupation du sol sur des phénomènes environnementaux spécifiques tels que la pollution des eaux, les processus biochimiques dans les sols, le climat, etc.
En particulier, le programme LUCC est un projet international interdisciplinaire ayant pour objectif principal l’amélioration de la compréhension des changements d’occupation du sol et spécifiquement, de l’approche modélisatrice de ce phénomène. Ainsi, trois thèmes principaux sont abordés dans ce programme représentatif des axes de recherche actuellement en cours sur le suivi de l’occupation et de l’utilisation des sols :
Æ L’identification des « zones sensibles » d’un point de vue environnemental grâce à différents outils d’analyse comme la télédétection, les Systèmes d’Information Géographiques, les modèles de spatialisation,…
Æ L’étude des dynamiques d’occupation du sol où sont appréhendées les questions relatives à la compréhension des changements d’utilisation du sol à travers différentes disciplines (Ecologie, Démographie, Histoire, Economie rurale…).
Æ La modélisation des changements de l’occupation du sol et leur intégration dans des modèles de type biophysique (hydrologique, climatique, biogéochimique,…) afin de mesurer l’impact des changements d’utilisation du sol sur ces derniers.
Les recherches entreprises dans le cadre de ce travail s’insèrent dans les trois thèmes de ce programme.

Le suivi de l’évolution de l’occupation du sol en Bretagne : un enjeu environnemental majeur

Première région agricole française et parmi les plus intensives en Europe, la Bretagne a connu un bouleversement important au niveau agricole, passant en cinquante ans de la ferme à la firme, selon le modèle agricole breton décrit par C. Canévet (1992). Ces mutations ont entraîné de forts impacts sur l’environnement et en particulier sur la qualité de l’eau.

La Bretagne, première région agricole française

Une évolution radicale de son agriculture

La Bretagne, région maritime située à l’ouest de la France a connu depuis les années 1950 un changement radical de ses pratiques agricoles, passant d’une agriculture familiale classique à une agriculture moderne de type intensive (Canevet, 1992).
Historiquement, les producteurs bretons possédaient de petites exploitations et les caractéristiques agronomiques de leurs sols étaient généralement moins favorables que celles des régions voisines. En 1950, ils représentaient ainsi 9% des exploitations agricoles françaises mais n’assuraient que 7% de la production nationale. C’est à partir des années 1960, sous l’impulsion d’une nouvelle génération de responsables agricoles, que l’agriculture bretonne connaît ses premières transformations. Accompagnés par les pouvoirs publics, les agriculteurs bretons entreprennent de faire face au déficit structurel qui caractérise la région à travers différents moyens : la modernisation des infrastructures de transport (constructions de voies express gratuites, voies ferrées,…), un encadrement accru des exploitations agricoles (ingénieurs agronomes, conseillés techniques,…) et le développement des industries agro-alimentaires et agro-industrielles. Un modèle de développement agricole original, basé sur une intensification des moyens de productions végétales et animales, se met peu à peu en place en Bretagne.
Ce développement permet à la Bretagne de prendre à partir des années 1970 la première place en terme de chiffre d’affaires (8,7% de la production française) et malgré des fluctuations importantes de la valeur des productions agricoles, cette première place est consolidée au cours de années 1980 et 1990. La Bretagne est ainsi devenue en trente ans la première région agricole française sur le plan économique avec près de 14% du chiffre d’affaires de l’agriculture nationale. Cette richesse économique repose principalement sur les productions animales (90% du chiffre d’affaires régional) basée notamment sur l’intensification des moyens de production sur de faibles surfaces (développement des activités hors-sol) et sur un développement des industries agro-alimentaires. La Bretagne produit ainsi plus de 50% de la production de viande de porc et de volailles de France ainsi que le quart de la collecte laitière (Agreste, 2003). Les rendements des productions végétales ont également fortement progressé, ainsi pour le maïs, de 51 Q/ha (quintaux à l’hectare) en 1970, on obtient plus de 90 quintaux à l’hectare aujourd’hui (Le Clech, 1998). Même chose pour le blé tendre qui est passé de 35 Q/ha à plus de 70 Q/ha actuellement avec des maxima à 110 Q/ha. On attribue généralement la moitié de cette progression au progrès génétique et l’autre moitié à l’amélioration des techniques culturales. Ces dernières étant caractérisées notamment par l’utilisation parfois massive d’engrais et de pesticides. Cette remarquable évolution qui caractérise la région Bretagne s’est accompagnée par une baisse importante du nombre des exploitations agricoles. En 1955, on comptabilisait ainsi 197 368 exploitations agricoles et une surface agricole utile (SAU) de 1 951 720 ha. En 2000, le nombre d’exploitations a presque été divisé par 4 avec 51219 exploitations et une SAU de 1 701 568 ha (SCEES- Recensement de l’agriculture, statistique agricole annuelle). Elle reste cependant la première région française en terme de nombre d’exploitations et d’emploi dans les secteurs agro-alimentaires et agricoles (Bretagne-Environnement, 2003). La productivité, au vu de ces chiffres, a donc considérablement évolué depuis ces trente dernières années, ainsi entre 1971 et 1995, celle-ci a été multipliée par 5, moyenne très supérieure à la moyenne française, essentiellement du au fait que le volume agricole produit (animal et végétal) a cru beaucoup plus rapidement que dans les autres régions alors que la baisse de la main d’œuvre en Bretagne était du même ordre de grandeur que la moyenne nationale.

Une économie fortement dépendante de son agriculture

L’économie bretonne est fortement tributaire de son activité agricole et de l’industrie agroalimentaire qui l’accompagne. En 2000, l’agriculture bretonne emploi 76 000 actifs, soit 7% de la population active de la région et contribue pour 6% à son produit intérieur brut (à l’échelle nationale, la population active agricole représente 3,4% des actifs et contribue pour 2,8% du PIB, Agreste, 2003). Clé de voûte de l’agriculture bretonne, les productions animales et végétales structurent toujours l’ensemble de la filière agroalimentaire régionale :
• Productions animales
Parmi les nombreuses activités agricoles, la production porcine constitue la première filière en Bretagne et produit 56% du volume national. La filière laitière vient en deuxième place mais, avec 21% de la production nationale la Bretagne se place là aussi au premier rang français. Autre activité phare en Bretagne, les produits de l’aviculture représentent la troisième filière avec 17% de la valeur des productions régionales, le Morbihan se situant au premier rang des départements français dans ce secteur. La production de viande bovine et les cultures légumières avec respectivement 10 et 8% de la valeur des productions régionales arrivent en quatrième et cinquième place. Comme pour la filière du lait, la filière « viande bovine » a cessé de progresser depuis le milieu des années 1980 avec l’arrivée des quotas laitiers et se stabilise autour de 15% de la production nationale.
• Productions végétales
Les productions végétales occupent les 2/3 de la SAU régionales et sont fortement orientées vers les fourrages (308 000 ha de maïs, soit 18% de la SAU et 469 000 ha en prairies temporaires, soit 28% de la SAU, Bretagne Environnement, 2003). On constate cependant une baisse continue des surfaces fourragères depuis 1990 et un recul des superficies agricoles en général (Figure 4). De 73% de la surface agricole utilisée dans les années 1980, sa part est passée à 57% en 2000. Cette évolution s’explique principalement par la stabilisation des besoins fourragers en Bretagne destinés an grande partie à une production laitière sous quotas depuis 1984 associée à l’intensification de la Surface Fourragère Principale (SFP). La réduction de la SFP a laissé la place au début des années 1990 à un développement des surfaces cultivées en céréales, en incluant les jachères obligatoires de la Politique Agricole Commune (PAC), ces surfaces constituent désormais 36% de la SAU. Cette production céréalière en constante augmentation ne suffit cependant pas à l’approvisionnement des industries bretonnes d’aliments du bétail qui importent des volumes encore très importants. En revanche, les cultures légumières, en surface cultivée, arrivent en deuxième position après le Nord-Pas-De-Calais avec une production de près de 1 million de tonnes, les productions phares demeurent le chou-fleur et l’artichaut qui assurent 73% de la production nationale (Agreste, 2003).
• Les industries agroalimentaires
Associé aux activités agricoles, les industries agroalimentaires emploient 60 000 salariés en Bretagne, soit 1/3 des emplois industriels de la région. Si la croissance globale des entreprises agroalimentaires atteint une valeur ajoutée proche de celle de l’agriculture, sa part dans le chiffre d’affaire demeure relativement faible avec 14% contre 19% en moyenne en France. Rapportée aux effectifs salariés, elle est également plus faible que dans les autres régions françaises. Cette faible productivité apparente s’explique principalement par la prépondérance d’une industrie de première transformation orientée vers des productions peu élaborées mais grande utilisatrice de main d’œuvre.
L’agriculture bretonne, première en France, repose ainsi sur une intensification des productions animales, végétales et une industrie agroalimentaire puissante. Celle-ci la rend fortement sensible aux contraintes du marché économique, et son impact sur l’environnement met clairement en évidence les limites de ce modèle de développement.

Une conjoncture économique très mouvante

La commercialisation de productions importantes sur des marchés faiblement organisés et fortement concurrentiels rend l’agriculture bretonne très sensible à la conjoncture. Ainsi, en 1999, la chute des prix agricoles et la contraction des volumes de production ont conduit à une forte baisse du revenu agricole breton. Le revenu par actif non salarié s’établissait alors à 12 700 €, soit 62% du revenu agricole moyen en France (Bretagne-Environnement, 2003). A l’inverse, la très bonne conjoncture de l’année 2001, dans les principaux secteurs agricoles que sont les activités hors-sol, les légumes et le lait, a permis de porter ce revenu à 22 000 €, un niveau supérieur à la moyenne française. La faiblesse structurelle des revenus agricoles, les programmes d’aide à la cessation de la production laitière, les contraintes financières de la PAC contribuent – parallèlement à la baisse des actifs agricoles liée aux départs en retraite non remplacés – par ailleurs à une réduction importante des exploitations agricoles dans la région. Entre 1988 et 2000, le taux moyen annuel de réductions des exploitations est de -4,8%, dépassant largement la moyenne nationale (-3,7%). La Bretagne se classe alors au cinquième rang en 2000 alors qu’elle occupait le premier rang des régions françaises en 1990. Ce rythme élevé de disparition a entraîné mécaniquement un agrandissement accéléré des exploitations agricoles. La taille moyenne des exploitations bretonnes est ainsi passé de 13 ha en 1970 à 33 ha en 2000, encore en deçà de la moyenne française qui est de 42 ha, mais avec une augmentation moyenne annuelle de 4,8% entre 1990 et 2000 contre 3,4% sur le reste de l’hexagone (Figure 5).
D’un point de vue économique toujours, les institutions européennes de la PAC (Politique Agricole Commune) et de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) devraient progressivement conduire à une baisse des aides publiques et à une réduction des protections douanières pour l’ensemble des productions. Dans ce contexte, l’agriculture bretonne risque de devoir continuer à se restructurer (réduction du nombre d’exploitations, recrutement de salariés agricoles, optimisation des pratiques d’élevage et d’agronomie,…). Le principal défi est actuellement de maintenir une activité agricole viable économiquement tout en préservant l’environnement.

Les pollutions d’origine agricole et leurs impacts sur l’environnement

Les conséquences d’une agriculture basée sur l’intensification de l’élevage et des productions fourragères sur l’environnement sont à présent identifiées et bien connues : pollution de l’eau et des sols par les excédents azotés, eutrophisation des cours d’eau et des littoraux, érosion et appauvrissement des sols, etc. De nouvelles réglementations environnementales européennes voient actuellement le jour et les agriculteurs bretons devront faire face à une augmentation inéluctable des coûts de préservation de l’environnement. Afin de concilier en Bretagne le respect de l’environnement mis à mal par les pollutions d’origine agricole et le maintien du potentiel économique, de nombreux programmes d’actions sont lancés à différentes échelles pour un développement pérenne de l’agriculture et pour la reconquête de la qualité de l’eau.
En quarante ans, les rendements des productions végétales et animales ont connu une progression spectaculaire. On attribue généralement la moitié de cette augmentation au progrès génétique et l’autre moitié à l’amélioration des techniques d’élevage et culturales, celles-ci correspondant notamment au développement des activités hors-sol et de l’utilisation d’engrais et de pesticides. L’application massive de ces techniques de production joue un rôle majeur, et aujourd’hui connu, dans la dégradation de la qualité de l’eau et des sols, mais les eux pluviales urbaines et assainissements individuels ont également un impact qui fait l’objet de recherches de plus en plus nombreuses. Parmi les pollutions d’origine agricole, trois éléments majeurs sont identifiés : les nitrates, les phosphates et les produits phytosanitaires.

Les nitrates

La quantité d’azote apportée aux cultures sous forme organique ou minérale demeure largement excédentaire en Bretagne (Agreste, 2003). Comparée aux quantités d’azote prélevées par les cultures et les prairies, l’excédent avoisine 103 000 tonnes en 2001. Rapporté à la surface fertilisable de la Bretagne, cela représente ainsi un excédent moyen de 64 kg/ha (Figure 6).
La pollution des eaux par les nitrates en excédent fait l’objet d’un suivi particulier de par son évolution depuis 30 ans. La figure 7 illustre l’évolution de la concentration moyenne en Bretagne en nitrates. On note une croissance régulière jusqu’en 1988, dépassant les 25mg/l (valeur guide européenne) en 1982. Ces dernières années, une inflexion de cette tendance est remarquée avec une diminution notable de la concentration à partir de 1999 (en 2002, la moyenne estimée à partir des données du réseau National de Bassin, est de 27,7 mg/l).
Le rôle de l’agriculture intensive dans l’accroissement des teneurs en nitrate des eaux est connu depuis longtemps. En 1980, le rapport Hénin, réalisé à partir d’un bilan global, estimait cette responsabilité à plus des deux tiers, les autres sources étant les rejets domestiques et industriels. Les pollutions d’origine agricole correspondent à deux pratiques culturales majeures caractéristiques de l’agriculture intensive :
• L’utilisation d’engrais.
On entend par le terme engrais, « tout produit naturel ou manufacturé utilisé par l’agriculture afin d’entretenir ou d’améliorer la fertilité des sols » (Vilaginès, 2000). Les engrais se présentent sous différentes formes :
Æ Les engrais azotés organiques, dits engrais « de fond » d’action lente car étant insolubles dans l’eau, ils libèrent petit à petit leur azote.
Æ Les engrais azotés ammoniacaux
Æ Les engrais azotés nitriques
Æ Les engrais ammoniaconitriques sont les plus utilisés de part leur prix avantageux et par leur souplesse d’emploi. Leur utilisation n’a cessé d’augmenter depuis les années 1960. Ainsi, en 1970, les doses avoisinaient les 49 kg d’azote à l’hectare contre plus de 150 kg d’azote à l’hectare aujourd’hui (Le Clech, 1998).
• La pratique des épandages
Une des fonctions de base de l’élevage français était la production de fumier et son épandage sur les terres agricoles constituait jusque dans les années 1960 la principale, voire la seule méthode d’amendement des terres. La production animale étant faible, les risques liés à une mauvaise gestion des fumiers et effluents d’élevage étaient minimes. Le développement des activités hors-sol (volaille, porc,…) dans les années 1970 a considérablement changé la donne. La production des effluents d’élevage est aujourd’hui telle que dans certains cantons, la charge en azote d’origine animale est supérieure au plafond de la directive nitrates, c’est-à-dire, 170 kg d’azote organique par hectare et par an. Ces espaces correspondent à des Zones d’Excédent Structurel (ZES), qui touchent en 2003, 104 cantons en Bretagne, soit 2/3 de la SAU régionale en ZES (Agreste, 2003). Cette diminution résulte des nombreux programmes lancés pour améliorer la qualité de l’eau en Bretagne.
Autre impact significatif de l’agriculture intensive, l’évolution de la teneur en azote des sols. Au cours des 40 dernières années, la Bretagne est passée d’une situation déficitaire en azote par rapport aux besoins des cultures à une situation très excédentaire pour les seules déjections animales. L’excédent d’azote rejeté dans les eaux bretonnes, est ainsi estimé à plus de 110000 tonnes d’azote par an. Si cette présence est essentielle à la production culturale, une quantité excessive accroît les risques de contamination des eaux de surface souterraines et donc littorales. En effet, si les apports (lisier, fumier, engrais) dépassent les capacités d’absorption des plantes, des nitrates peuvent migrer dans le sol et atteindre les eaux. Les conséquences les plus visibles : une eau non potable, une eutrophisation des rivières et la prolifération des algues vertes sur le littoral.

Les phosphates

Le phosphore est la cause première de l’eutrophisation des cours d’eau et de certains littoraux mais seulement 22% des quantités déversées en France seraient liées à l’activité agricole (48% d’origine domestique et 30% d’origine industrielle). Contrairement aux nitrates, les différentes formes de phosphore sont assez peu solubles et se fixent facilement sur les particules, le lessivage dépasse ainsi rarement 1 kg/ha/an, par contre, le ruissellement superficiel et l’érosion peuvent conduire à des départs importants. Comme pour l’azote, la présence des phosphates dans les sols en Bretagne n’a cessé d’augmenter avec le développement de l’agriculture intensive (Agreste, 2003). Des sols plutôt carencés à la fin de la seconde guerre mondiale, la tendance s’est inversée au début des années 1980 et nombre de sols ont basculés dans l’excès. A ce jour, la teneur moyenne dans les sols de Bretagne est de près de 400 mg/kg de terre alors que la teneur en phosphore assimilable (P2O5) recommandé en agronomie est de 220-240 mg/kg de terre. Plus de la moitié des communes bretonnes aurait des sols trop riches en phosphore, notamment dans les zones légumières et les zones d’élevage intensif (Le Clech, 1998). Concernant la matière organique, la Bretagne possède des sols généralement riches en matière organique mais inégalement pourvus : de 2 à 8%. Elle constitue une source d’éléments nutritifs pour les plantes et joue également un rôle important sur la structure du sol et son activité biologique. Sa diminution a des conséquences sur le ruissellement des eaux de pluie, l’érosion des sols et par conséquent sur la dispersion des polluants. Depuis 30 ans, la tendance de la concentration de la matière organique est à la baisse avec une diminution moyenne de 0,6% tous les 10 ans.

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Table des matières

Introduction
Chapitre 1 Suivi et prédiction de l’évolution de l’occupation du sol en Bretagne
1.1. Problématique et enjeux du suivi de l’évolution de l’occupation du sol
1.1.1. Cadre général
1.1.1.1. Occupation et utilisation du sol : distinctions sémantiques
1.1.1.2. Le suivi de l’occupation et de l’utilisation du sol
1.1.2. Le suivi de l’évolution de l’occupation du sol en Bretagne : un enjeu environnemental majeur
1.1.2.1. La Bretagne, première région agricole française
1.1.2.2. Les pollutions d’origine agricole et leurs impacts sur l’environnement
1.2. Le cas particulier de la couverture hivernale des sols
1.2.2. Problématiques liées à la couverture hivernale des sols en Bretagne
1.2.2.1. Un thème sensible
1.2.2.2. L’implantation d’une interculture comme moyen de lutte contre les pollutions d’origine agricole
1.2.2.3. Les échelles d’analyse du couvert hivernal des sols
1.2.3. Une classe d’occupation du sol aux limites floues
1.2.3.1. La couverture hivernale des sols : un état de transition de l’utilisation du sol
1.2.3.2. La couverture hivernale des sols : un caractère incertain et imprécis
1.3. Modélisation prédictive de l’occupation des sols
1.3.1. Rappels sur l’approche conceptuelle de la modélisation
1.3.1.1. La modélisation en géographie
1.3.1.2. Les différentes approches modélisatrices
1.3.2. Les modèles de simulation de l’évolution de l’occupation du sol
1.3.2.1. Les modèles reposant sur une approche « dure »
1.3.2.2. Les modèles reposant sur une approche « approximative »
1.3.3. Simulation de l’évolution de la couverture hivernale des sols par une approche approximative
1.3.3.1. Prise en compte de l’incertitude et de l’imprécision dans le processus de modélisation
1.3.3.2. Le choix d’un modèle pour simuler la couverture hivernale des sols en contexte agricole
intensif
Chapitre 2 Modélisation prédictive à partir de la théorie des évidences
2.1. La théorie des évidences de Dempster-Shafer
2.1.1. Notions fondamentales
2.1.1.1. Une extension de la théorie de Bayes
2.1.1.2. Le cadre de discernement
2.1.1.3. Les fonctions de masses élémentaires
2.1.1.4. La fonction de croyance
2.1.1.5. La fonction de plausibilité
2.1.2. La règle de Fusion de DST
2.1.2.1. Principe
2.1.2.2. Quelques commentaires
2.1.3. La prise de décision
2.1.4. Applications de la DST
2.2. Présentation du site d’étude et des données
2.2.1. Un contexte environnemental marqué par des marées vertes
2.2.2. Une production agricole orientée vers l’élevage bovin
2.2.3. Les données
2.2.3.1. La base de données
2.2.3.2. Les prétraitements des données image
2.3. Application de la théorie des évidences pour la modélisation de la couverture hivernale des sols sur le bassin versant du Yar
2.3.1. Détermination de la couverture hivernale des sols
2.3.1.1. Taux de couverture des sols
2.3.1.2. L’identification des intercultures
2.3.2. Les changements de la couverture hivernale des sols
2.3.2.1. Analyse à partir des vecteurs de changement
2.3.2.2. Analyse par les rotations culturales
2.3.3. Les facteurs de changement
2.3.3.1. Les échelles des changements
2.3.3.2. Identification des facteurs
2.3.3.3. Hiérarchisation des facteurs
2.3.4. Prédiction de la couverture hivernale des sols appliquée au système d’exploitation de type « bovin mixte »
2.3.4.1. Affectation des jeux de masse pour chaque hypothèse, fusion des données, et prise de décision
2.3.4.2. Résultats
Chapitre 3 L’approche paradoxale dans le processus de modélisation prédictive des changements de la couverture hivernale des sols
3.1. La gestion du conflit en fusion de données
3.1.1. La gestion du conflit entre les sources avec Dempster-Shafer
3.1.2. Les méthodes de gestion du conflit
3.1.3. La gestion du conflit avec l’affaiblissement des sources appliquée au site d’étude
3.1.3.1. L’identification des sources d’information conflictuelles
3.1.3.2. Application au site d’étude
3.2. La gestion des sources d’information avec la théorie de Dezert-Smarandache
3.2.1. Le principe général
3.2.1.1. Le cadre de discernement généralisé
3.2.1.2. Jeu de masse généralisé
3.2.1.3. Les fonctions de croyance et de plausibilité généralisées
3.2.2. Les spécificités de la DSmT
3.2.2.1. La transformation pignistique généralisée
3.2.2.2. La règle de fusion de Dezert-Smarandache
3.2.2.3. Quelques exemples de fusion de données avec la DSmT
3.3. Application de la DSmT à la prédiction de la couverture hivernale des sols
3.3.1. Le cadre de travail
3.3.2. Application et optimisation de la DSmT sur le bassin versant du Yar
3.3.2.1. Utilisation de la théorie de la DSmT pour la prédiction des changements de la couverture hivernale des sols
3.3.2.2. Optimisation de la théorie de la DSmT pour l’hypothèse « sols nus à peu couverts »
Chapitre 4 Simulations prédictives de l’occupation hivernale des sols au-delà du site expérimental
4.1. Présentation du site d’étude et des données
4.1.1. La qualité de l’eau sur le bassin versant du Scorff
4.1.2. Un bassin versant à vocation agricole
4.1.3. Les données utilisées
4.2. Les changements de la couverture hivernale des sols
4.2.1. Analyse des changements de l’occupation et de l’utilisation des sols par télédétection
4.2.1.1. La détection de la couverture hivernale des sols
4.2.1.2. La détection des cultures annuelles
4.2.1.3. Le suivi de la couverture hivernale des sols pour les hivers 2000/01-2001/02
4.2.1.4. Le suivi des cultures annuelles pour les étés 2001 et 2002
4.2.1.5. Les successions des modes d’occupation des sols
4.2.2. Les facteurs de changements
4.2.2.1. Choix et validation des facteurs de changement
4.2.2.2. Hiérarchisation des facteurs de changement
4.3. Prédiction de la couverture hivernale des sols sur le bassin versant du Scorff
4.3.1. La détermination des jeux de masse
4.3.2. Les résultats obtenus avec la théorie de Dempster-Shafer
4.3.2.1. Les prédictions basées sur les probabilités pignistiques
4.3.2.2. La validation des prédictions à l’échelle parcellaire
4.3.3. Les résultats obtenus avec la théorie de Dezert-Smarandache
4.3.3.1. Les résultats issus d’une affectation identique des jeux de masse
4.3.3.2. Les résultats issus du transfert des masses de l’incertitude sur le paradoxe
Conclusion générale
Liste des figures
Liste des tableaux
Références

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