Subjectivation et Intersubjectivité en psychomotricité

« Tu devrais aller voir du côté de la psychomotricité, ça pourrait t’intéresser toi qui veux travailler à la croisée du psychisme et du corporel…»

Nous sommes en avril 2014 et Julien, un ami rencontré fortuitement un an plus tôt sur le quai d’un métro parisien, me parle de ce métier que je ne connaissais alors pas. Cette rencontre a été pour moi décisive puisqu’elle a orienté ma vie professionnelle sur ce chemin. J’ai fait d’autres rencontres marquantes dans ma vie, comme vous aussi certainement, et celles-ci ont alimenté mon envie de comprendre davantage les rouages de ce qui les constituent, les définissent et la manière dont je me les représente. Avant de rentrer dans le vif du sujet, je souhaite revenir sur l’année précédent l’entrée dans la formation, car elle participe à mes questionnements sur la rencontre et a nourri mon travail de réflexion autour de ce mémoire. Après cette discussion avec Julien, je suis allée me renseigner sur l’outil internet et ai trouvé pléthore d’informations sur ce métier. Souhaitant m’entretenir avec un professionnel de vive voix, je me suis rendue à la Cité des métiers à Paris où, perdue dans les rayons et les fiches de métiers, j’ai rencontré une femme. Je lui ai raconté mon parcours : après avoir obtenu un bac littéraire puis une licence d’histoire, le théâtre fut pour moi une révélation et enfin, aujourd’hui, je crois avoir trouvé ma vocation : « Je veux être psychomotricienne ! »

Présentation de l’Institution d’accueil

Présentation générale

J’effectue l’un de mes stages au sein d’un service de pédopsychiatrie d’un hôpital parisien. Toutes les unités sont regroupées dans un seul bâtiment structuré en plusieurs étages. Au sous-sol, se trouvent le service de psychomotricité et l’hôpital de jour pour adolescents. Au rez-de-chaussée, il y a l’hôpital de jour pour enfants qui accueille Jade et Moussa ( les deux enfants m’ayant inspirée pour le sujet du présent mémoire) et le Centre des maladies rares. Au 1er étage se situe l’unité de soins intensifs et au second le service d’hospitalisation à temps plein pour les adolescents. La psychomotricité intervient dans tous les services en fonction des indications thérapeutiques. Nous allons à la rencontre de chaque enfant que nous allons chercher directement dans son unité s’il est sur place. Si l’enfant provient d’une structure extérieure de l’hôpital, d’un CMP* par exemple, nous les retrouvons directement dans la salle d’attente du service de psychomotricité.

Aménagement des locaux
Je privilégie la description du sous-sol, espace dans lequel nous passons la journée du vendredi, jour pendant lequel j’interviens à l’hôpital. Il comprend une grande salle de psychodrame, deux petites salles attenantes pour des prises en charge en psychothérapie, un gymnase et trois salles allouées pour la psychomotricité. L’une de ces trois dernières salles est surtout utilisée pour de la relaxation avec la présence d’un matelas au sol. Les deux autres, de taille moyenne, sont équipées d’une table, de chaises, d’équipements de jeux et de divers autres mobiliers. Il y a également une cuisine contenant une petite bibliothèque et un coin pour déjeuner où se trouvent des armoires et du matériel de jeu.

In fine, les limites entre les espaces voués à la psychomotricité, ceux de la salle d’attente et ceux des temps de pause des professionnels sont poreuses, le matériel empiétant sur la salle de cuisine et la salle de déjeuner. La salle d’attente se situe dans un renfoncement du couloir et offre peu de contenance et d’intimité.

Les différents étages, la configuration des services et le fait de « se croiser » avec les différentes équipes m’ont au début perturbée. Ayant effectué des stages dans des structures de taille plus petite, la rencontre entre professionnels s’en trouvait facilitée et j’avais davantage le sentiment d’appartenance à un groupe. En raison de la grandeur de ce bâtiment, du nombre important d’intervenants, de l’emplacement de la psychomotricité au sous-sol et des temps formels auxquels je ne peux pas toujours assister, j’ai eu des difficultés à avoir des repères spatiaux et professionnels stables. Il m’a fallu un temps d’adaptation pour apprivoiser la dynamique et avoir le sentiment d’appartenir à un groupe de travail.

Les professionnels de santé
Pluridisciplinaire, l’équipe est composée de médecins psychiatres, d’internes, d’infirmiers, d’aides soignants, de psychologues, d’éducateurs, de psychomotriciens, d’instituteurs, d’agents des services hospitaliers, de personnels administratifs et techniques. Le corps médical est fortement investi dans la prise en charge des patients qui passent parfois d’une unité à une autre en fonction de l’évolution de leur problématique. Cela crée une continuité dans le soin et le sentiment pour chaque patient d’être perçu, reconnu de tous.

Communication et liens institutionnels
Parmi les enfants et adolescents que j’ai suivis, j’ai pu participer à quelques réunions de synthèse, n’étant présente que le vendredi. De plus, ma maître de stage, travaillant transversalement dans plusieurs unités, ne peut se rendre à toutes les réunions de synthèses qui ont lieu chaque semaine. A la fin de l’année 2018, s’est tenue une réunion de synthèse pour Jade dans l’objectif de faire un point sur son orientation pour la rentrée 2019. Une seconde aura lieu début mai pour confirmer son orientation en ULIS TFC*. Une réunion portant sur Moussa s’est quant à elle tenue en septembre 2018, juste avant que je ne commence mon stage, je n’ai donc pu m’y rendre. C’est à cette occasion que l’indication thérapeutique du jeu de faire semblant avec Jade et Moussa a été mise en place. Enormément d’échanges entre professionnels se font lors de temps informels, lorsque nous allons chercher les patients ou bien lorsque nous les ramenons. C’est un moment de discussion sur la manière dont s’est déroulée la matinée et la disponibilité du patient et s’il y a des événements importants à relater. C’est d’ailleurs lors de ces moments informels que j’ai pu le plus discuter avec les professionnels, leur poser des questions sur les patients, leurs rapports avec les pairs.

La place de la psychomotricité 

Les indications thérapeutiques 

Les enfants et adolescents accueillis dans le service souffrent de troubles du comportement, de troubles neurodéveloppementaux, de troubles dépressifs, anxieux, d’états psychotiques aigus. Il y a également des maladies rares mais je n’ai pas suivi d’enfants concernés. Certains passages sont transitoires et durent quelques semaines, d’autres patients sont présents depuis plus de six mois. Dans les hôpitaux de jour, les enfants peuvent rester plusieurs années en attendant une orientation en ULIS* ou IME* par exemple. C’est le cas de Jade et Moussa. Toute indication en psychomotricité est prescrite par le médecin psychiatre de l’unité dont il est le référent. Au sein du service intra-hospitalier des adolescents, la place allouée aux bilans psychomoteurs est importante, primant sur les activités extra-scolaires, voire sur le temps scolaire parfois. Notre présence aux réunions de synthèse de patients que nous avons rencontrés lors de la passation d’un bilan psychomoteur est donc sollicitée. Une jeune fille, Tania, d’abord hospitalisée dans l’unité d’hospitalisation à temps plein des adolescents et ensuite dans l’unité de soins intensifs, a vu ses séances de psychomotricité doubler pour son suivi. Passant d’une séance par semaine à deux, son état s’est nettement amélioré en l’espace de deux semaines. Les soignants ont pu apprécier les fruits du travail du toucher thérapeutique que nous avons mis en place avec cette jeune adolescente.

La journée du vendredi
La matinée commence par une prise en charge individuelle de trente minutes avec Tania. A partir de sa demande, nous lui avons proposé un toucher thérapeutique permettant de travailler l’enveloppe corporelle, la conscience d’éprouvés corporels non intrusifs mais réparateurs. Confinée, tamisée, avec une odeur florale, la salle participe via son atmosphère à contenir psychiquement Tania.

La seconde partie de la matinée, j’interviens auprès d’enfants provenant de l’hospitalisation à temps plein pour adolescents ou bien provenant d’un CMP extérieur. La durée de passation de ces bilans psychomoteurs est de deux heures, deux heures et demi environ. Nous passons ce temps avec l’enfant et lui faisons passer tous les tests psychomoteurs évaluant le tonus, les coordinations globales, les praxies*, l’impulsivité, les repères spatio-temporels, etc… Après cette matinée dense, le temps d’une heure de pause déjeuner est la bienvenue. L’après-midi commence par la prise en charge de Jade et Moussa. Officiellement, la durée de cette prise en charge est de quarante-cinq minutes mais en raison du quart d’heure de préparation de Jade et Moussa, il reste environ trente minutes pour la séance. L’axe thérapeutique étant le « jouer ensemble », nous improvisons les séances en scénarisant une histoire, en jouant aux jeux qu’ils proposent ou bien en proposant une autre activité.

A la suite de cette prise en charge, nous avons quarante-cinq minutes de pause avant l’arrivée de deux autres patients pour lesquels l’axe thérapeutique est analogue. J’ai vu ces patients jusqu’en janvier, date à laquelle l’un d’eux a été intégré dans un IME et le second a pu bénéficier d’ un autre suivi en psychomotricité dans une autre structure. La prise en charge s’est donc arrêtée en cours d’année. Depuis la moitié du mois de mars, je vois un enfant autiste sévère pendant trente minutes avec lequel nous travaillons essentiellement sur la sensori-motricité, allant à la rencontre de l’ossature et de sa résonance tout en favorisant les stimulations tactiles et proprioceptives*.

Les thérapeutes 

Toutes les séances du vendredi se font avec ma maître de stage et Elsa. Ma maître de stage a une double formation de psychologue clinicienne et de psychomotricienne. Lors de ma demande pour effectuer ce stage, ma maître de stage m’a signalé que je devais trouver un binôme fille ou garçon. Sachant que nous allions utiliser la médiation du « jeu de faire semblant », j’ai pensé à Elsa. Elsa fait de l’improvisation théâtrale et je suis comédienne depuis six ans. J’ai rencontré Elsa lors du premier jour de ma rentrée en psychomotricité. C’était le TD « jeux de cours, jeux de rue ». Je me souviens avoir découvert le talent d’Elsa pour l’improvisation lors de ce cours, talent qui ne s’est d’ailleurs jamais démenti au cours des deux années qui ont suivi. Elsa et moi avons appris à nous connaître mutuellement, par le groupe et au sein du groupe. Au regard de notre intérêt commun pour le théâtre, j’ai pensé que notre binôme s’avérerait pertinent auprès d’enfants autistes. Contrairement à Elsa qui a davantage de facilités pour l’improvisation, je me sens plus à l’aise à mâcher les mots d’ un texte. Ces différences m’ont semblé être des qualités complémentaires pour intervenir auprès d’enfants porteurs d’un TSA. Nous connaissant mutuellement via notre expérience commune au sein du groupe 3 dont je faisais partie en première et deuxième année de formation, je lui ai donc proposé de faire ce stage avec moi.

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Table des matières

INTRODUCTION
I- Présentation de l’institution d’accueil
A- Présentation générale
1. Aménagement des locaux
2. Les professionnels de santé
3. Communication et liens institutionnels
B- La place de la psychomotricité
1. Les indications thérapeutiques
2. La journée du vendredi
3. Les thérapeutes
II- Présentation de Jade et Moussa
A- Jade
1. Anamnèse
2. Lecture psychomotrice
B- Moussa
1. Anamnèse
2. Lecture psychomotrice
C- Définition de l’autisme
D- Définition de la déficience intellectuelle
III- Le groupe de « jeu partagé »
A- Le cadre thérapeutique
1. Ses objectifs
2. Ses outils
B- L’apport du jeu dans le développement de l’enfant
1. Le jeu comme espace projectif
2. Le jeu comme support créatif
3. Le jeu comme processus d’assimilation
4. Le jeu comme la mise en mouvement d’une psychocorporéité
C- Qu’est ce que la rencontre ?
1. Le regard étymologique
2. La perception comme soubassement de la rencontre
3. La rencontre laisse-t-elle une trace ?
4. L’approche anthropologique et philosophique
a) La rencontre comme transformation de soi
b) La distance comme unique possibilité du lien ?
c) La réciprocité est-elle garante de la rencontre ?
d) L’impossible rencontre entre deux sujets ?
D- Le jeu partagé : Soi, l’autre et la rencontre
1. La fonction du groupe dans l’intégration psychique de l’enfant
a) Le groupe comme enveloppe physique et psychique
b) Les allers-retours entre Soi et le groupe
c) Un espace d’émotions partagées et symbolisées
2. La place de thérapeute au sein du groupe
3. Ma place de thérapeute stagiaire
IV- Le développement relationnel de l’enfant
A- Accès à l’intersubjectivité : de l’inné à l’acquis
1. Les compétences du nouveau né sous le prisme de la psychanalyse
2. L’apport des neurosciences
3. La position contemporaine de Bernard Golse
a) La subjectivation
b) L’intersubjectivité
4. La perspective instrumentale d’André Bullinger
5. De l’empathie à la théorie de l’esprit
B- Les étayages du processus de subjectivation et d’ intersubjectivation
1. L’imitation
2. Tonus et dialogue tonico émotionnel
3. La contenance
4. La naissance de l’axe corporel
5. Un espace à soi, un espace à l’autre
V – Espace de discussion
A- Comment j’ai dû faire évoluer la représentation de mon rôle de psychomotricienne au cours des séances
B- La méthode choisie permet-elle d’aller à la rencontre des enfants et facilite-t-elle leur rencontre réciproque ?
C- En quoi l’approche phénoménologique que j’ai du adopter pour m’ajuster m’a-t-elle permise de trouver ma juste proximité dans le processus thérapeutique ?
CONCLUSION

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