Techniques conventionnelles de CND
La plupart des techniques de CND ont été développées en fonction du type de défaut recherché et du type de matériaux à inspecter. On peut les classer en fonction de la nature des phénomènes physiques mis en jeu : méthodes optiques, électromagnétiques, à vibrations mécaniques, thermographiques… Ces méthodes vont du simple examen visuel à des systèmes complexes tels que la radiographie, en passant par des techniques hybrides combinant plusieurs méthodes (ultrasons, LASER, traducteur électromagnétique-acoustique (EMAT), photo-thermie, magnéto-optique…). Notre propos n’est pas ici de présenter de manière exhaustive toutes les techniques de CND existantes [Con, DF96], mais plutôt d’en rappeler les plus conventionnelles afin de mieux situer notre travail.
Méthodes visuelles Les méthodes visuelles sont les méthodes les plus simples que l’on puisse trouver. Elles sont applicables aux défauts de surface et leur usage est largement répandu pour l’inspection rapide et simple. Parmi les techniques visuelles, l’une des plus abouties et des plus utilisées est le ressuage. Le contrôle par ressuage est une technique optico-chimique simple encore largement utilisée de nos jours, car très performante pour la détection de fissures de surface. Il consiste à enduire les surfaces à contrôler avec un liquide réactif qui s’introduit dans les fissures de surface et à relever ensuite leur présence grâce à un produit révélateur approprié. Il est applicable à toutes sortes de matériaux non-poreux et non-rugueux, il est relativement simple à mettre en œuvre et permet d’apprécier la longueur des fissures, quelle que soit leur orientation. Le ressuage permet en outre d’inspecter l’intégralité des surfaces de la pièce contrôlée. Le principal inconvénient de cette technique est qu’elle n’est utile que pour des défauts débouchants. En outre, elle requiert au préalable de décaper la surface inspectée. Quant aux opérateurs, ils doivent posséder un haut niveau d’expertise et leur acuité visuelle entre en compte dans la détection. Enfin, le ressuage pose de nombreux problèmes d’hygiène et de sécurité à cause des produits polluants utilisés d’autant que dans certains cas (centrales nucléaires), ils peuvent être contaminés.
Méthodes à vibrations mécaniques Les méthodes à vibrations mécaniques consistent à étudier l’influence des vibrations appliquées à une structure. Les fréquences utilisées, sonores ou ultra-sonores, dépendent principalement de la nature des matériaux constituant la pièce inspectée. Pour l’inspection de la majorité des matériaux métalliques, tels que ceux qui nous concernent dans le cadre de ce mémoire, ce sont les ultrasons qui sont utilisés. Le contrôle par ultrasons consiste à émettre des impulsions ultra-sonores dans la structure et à analyser l’écho de retour. Il permet l’inspection en profondeur des structures avec une résolution spatiale élevée et une analyse des signaux relativement directe. Toutefois, la nécessité d’un couplant entre le capteur et la structure mais également la sensibilité de cette technique à la géométrie de la pièce inspectée compliquent sa mise en œuvre. De plus, les temps d’inspection sont longs car il faut procéder à un balayage exhaustif de la structure avec des capteurs de petites dimensions. Enfin, les coûts de mise en œuvre peuvent s’avérer élevés. Les techniques multicapteurs [JNC+06] permettent de s’affranchir d’un certain nombre de ces contraintes.
Méthodes à rayons ionisants Les méthodes à rayons ionisants consistent à injecter un flux de rayons (X ou γ) dans la structure à contrôler et à analyser ensuite l’image qui résulte de leur atténuation dans la structure. En radiographie par exemple, l’image de l’atténuation des rayons est visualisée sur un détecteur sensible (film, écran). Cette technique a l’avantage de fournir une image de l’intégrité de la structure qui soit directement exploitable et dont la résolution spatiale soit excellente. En revanche, elle ne permet qu’une visualisation globale de l’état de la structure. Des méthodes de tomographie permettent de palier cet inconvénient en visualisant par couche l’état interne de la structure. Les principaux inconvénients des techniques à rayons ionisants sont leur coût et le niveau élevé d’expertise demandé à l’opérateur. De plus, elles demandent un niveau de protection pour les opérateurs et pour l’environnement très élevé, ce qui rend difficile leur exploitation sur site.
Méthodes thermiques Ces techniques reposent sur l’excitation thermique de la structure à contrôler. La diffusion de la chaleur dans le matériau renseigne sur les propriétés thermophysiques de la structure et sur la présence d’éventuels défauts grâce aux barrières de chaleur qu’ils induisent. Les atouts des techniques thermiques résident dans la possibilité d’effectuer un contrôle sans contact, automatisable et utilisable sur site. Les principaux inconvénients en sont la lenteur de contrôle, le coût d’investissement et les difficultés d’interprétation et de traitement des signaux.
Les méthodes électromagnétiques à courants de Foucault Les méthodes électromagnétiques et notamment les méthodes à courants de Foucault (CF) sont très utilisées dans le domaine du CND. L’interaction de CF induits (au moyen d’un dispositif approprié) dans la cible et leurs interactions avec les défauts permet d’obtenir des informations révélatrices de ces défauts. Les capteurs à CF ont l’avantage d’avoir d’une haute sensibilité aux défauts de type « manque de matière » / « rupture de conductivité électrique » (fissures) qu’ils se trouvent en surface ou enfouis, d’une relative facilité de mise en oeuvre ainsi que d’un faible coût. Pour ces raisons, ils sont largement utilisés dans l’industrie du CND dont il représente 50% du marché. En revanche, la technique des CF ne s’applique qu’aux matériaux électriquement conducteurs et à cause de la dispersion de l’onde générée dans le matériau, et de la faible résolution spatiale qui en découle, l’interprétation quantitative des signaux s’avère particulièrement difficile. Enfin, l’utilisation des CF présente l’inconvénient d’être limitée en termes de profondeur d’investigation, à cause de l’atténuation des courants.
Comparaison qualitative des performances des techniques de CND Le tableau 1.1 situe qualitativement des performances de techniques de contrôle présentées ciavant qui sont d’un usage courant en aéronautique (pour l’inspection de matériaux conducteurs). Les critères de comparaison reflètent les critères de performances énoncés au début de cette section. Les CF présentent un plus faible coût de mise en œuvre et d’utilisation que les autres techniques, ce qui leur vaut d’être très utilisés. En revanche, l’interprétation des signaux issus de ces capteurs est particulièrement difficile, notamment en vue de l’inversion des modèles associés.
Autres types d’éléments récepteurs
Il existe de nombreuses autres technologies d’éléments sensibles que l’on pourrait envisager d’exploiter pour réaliser des multicapteurs CF, comme les capteurs à effet Hall, les fluxgates [Rip92] ou les SQUID [Ga02]. Les fluxgates sont des éléments très sensibles au champ magnétique (comme les GMI) mais sont généralement de dimensions élevées, ce qui leur confère une faible résolution spatiale. Les fluxgates de petites dimensions sont moins sensibles au champ magnétique. Les capteurs à effet Hall ont un bruit magnétique sensiblement plus important les GMI (supérieur d’un facteur de l’ordre de 500) ou les GMR (d’un facteur 10 à 100) ce qui les rend moins intéressants pour le CND que ces technologies [Vac07]. Enfin, les SQUID sont des systèmes à base de supraconducteurs ayant une très grande sensibilité au champ magnétique mais nécessitant une instrumentation complexe. Toutefois, des solutions à base de SQUID ont été proposées pour des applications de CND à CF pour l’aéronautique [Ga02, ASBV08].
Inconvénients et limites du MOI
Bien qu’il permette une inspection relativement rapide des structures à contrôler, le MOI présente un certain nombre d’inconvénients et de limites. De plus, le gain de temps annoncé est modeste, et il est diminué par plusieurs facteurs. En premier lieu, les images binaires (tout ou rien) sont obtenues par comparaison à un seuil que l’opérateur doit adapter lui même en permanence de façon empirique en fonction des défauts recherchés. En outre, l’opérateur doit faire de multiples passages dans la zone du défaut afin d’assurer une bonne détection. En second lieu, l’information binaire fournie limite considérablement l’utilisation ultérieure de tout algorithme de caractérisation quantitative des défauts détectés, même avec l’aide de systèmes de traitement d’images. De plus, la sensibilité aux défauts reste assez réduite, en particulier lorsqu’ils sont enfouis au delà de 1 mm de profondeur. Enfin, la qualité des images fournies est fortement tributaire de la température, et largement dégradée par la présence de domaines magnétiques minoritaires, qui se traduit par l’apparition de « serpentins » qui obscurcissent encore d’avantage l’image formée. Pour être plus exploitables, les images nécessitent donc d’être filtrées, de façon statique [Dec03] ou dynamique [PUS04]. En raison de ces inconvénients, il semble que le MOI provoque un nombre assez élevé de fausses alarmes, ce qui ralentit considérablement l’inspection puisqu’une vérification doit généralement être faite sur les rivets détectés comme défectueux. Pour ces raisons, il semble également que l’utilisation du MOI soit progressivement abandonnée.
|
Table des matières
1 Vers l’imagerie à courants de Foucault pour l’évaluation non-destructive
1.1 Contexte
1.2 Le contrôle non-destructif
1.2.1 Généralités
1.2.2 Techniques conventionnelles de CND
1.2.2.1 Méthodes visuelles
1.2.2.2 Méthodes à vibrations mécaniques
1.2.2.3 Méthodes à rayons ionisants
1.2.2.4 Méthodes thermiques
1.2.2.5 Les méthodes électromagnétiques à courants de Foucault
1.2.2.6 Comparaison qualitative des performances des techniques de CND
1.2.3 Systèmes d’évaluation non-destructive à courants de Foucault
1.2.3.1 Problématique d’un système de CND
1.2.3.2 Courants de Foucault
1.2.3.3 Les capteurs « ponctuels »
1.2.3.4 Les multicapteurs et leurs technologies
1.3 Introduction à l’imagerie magnéto-optique
1.3.1 Matériaux magnéto-optiques
1.3.2 Films magnéto-optiques pour l’imagerie
1.3.2.1 Présentation et réalisation
1.3.2.2 L’effet Faraday
1.3.2.3 Anisotropie
1.3.2.4 Principe de mesure du champ magnétique par la rotation Faraday
1.3.3 Exploitation des films IMO pour l’imagerie
1.3.3.1 Mode interrupteur
1.3.3.2 Mode modulateur
1.4 Imagerie MO à CF pour le CND
1.4.1 Principe
1.4.2 Imageur magnéto-optique qualitatif
1.4.2.1 Présentation
1.4.2.2 Appareil Commercial
1.4.2.3 Inconvénients et limites du MOI
1.4.3 Imageur MODAI
1.4.4 Imageur à courants de Foucault développé au laboratoire SATIE
1.4.4.1 Du MOI à l’ICF
1.4.4.2 Principe de l’ICF
1.4.4.3 Conclusion
1.5 Conclusion
2 Contribution à l’élaboration de prototypes intégrés d’imageur à courants de Foucault
2.1 Présentation de l’appareil
2.1.1 Principe général
2.1.1.1 Structure de l’ICF
2.1.1.2 Principe général de fonctionnement
2.1.2 Principe de la conversion magnéto-optique d’un champ magnétique variable
2.1.3 Acquisition des images
2.1.3.1 Stroboscopie homodyne
2.1.3.2 Réglage de l’angle entre le polariseur et l’analyseur
2.1.3.3 Détection synchrone numérique
2.1.4 Interface logicielle
2.2 Étude de l’inducteur
2.2.1 Modélisation en éléments finis 3D
2.2.1.1 Déroulement d’une simulation avec ANSYS
2.2.2 Pré-processeur
2.2.2.1 Création du domaine de travail et de la géométrie de l’inducteur
2.2.2.2 Choix des paramètres des matériaux
2.2.2.3 La discrétisation des volumes en éléments finis
2.2.2.4 Discrétisation et maillage
2.2.2.5 Les conditions aux limites
2.2.3 Résolution du problème
2.2.4 Post-traitement
2.2.5 Exemple de mise en oeuvre et validation
2.2.6 Dimensionnement de l’inducteur
2.2.6.1 Critères de comparaisons
2.2.6.2 Choix de la structure inductrice
2.2.7 Étude paramétrique de l’inducteur retenu
2.2.7.1 Plages de variations de paramètres
2.2.7.2 Résultats des simulations
2.2.7.3 Conclusion sur le dimensionnement
2.3 Caractérisation des films IMO
2.3.1 Rotation Faraday en fonction de la longueur d’onde
2.3.1.1 Banc de mesure
2.3.1.2 Longueur d’onde du faisceau lumineux
2.3.1.3 Influence de l’intensité d’éclairement
2.3.1.4 Cycle d’aimantation des films IMO
2.4 Réglage de la caméra CCD
2.4.1 Réglage de l’exposition
2.4.1.1 Influence du paramètre d’exposition
2.4.1.2 Influence du rapport cyclique de l’éclairage
2.4.1.3 Influence du gain analogique de la caméra
2.4.2 Faisabilité de l’acquisition hétérodyne
2.5 Assemblage du prototype intégré de laboratoire
2.6 Caractérisation de l’ICF intégré
2.6.1 Calibration de l’ICF en amplitude de champ magnétique
2.6.1.1 Température ambiante T = 25°C
2.6.1.2 Influence de la température sur l’amplitude
2.6.2 Résolution spatiale et taille de l’image
2.6.3 Uniformité de la mesure dans la surface active
2.7 Rapport signal à bruit pour une signature de rivet
2.7.1 Effet du bruit d’acquisition seul en fonction de la fréquence d’excitation
2.7.2 Effets de bord de l’inducteur
2.7.3 Nombre d’images d’acquisition
2.7.3.1 Influence sur le RSB
2.7.3.2 Influence sur la durée d’acquisition
2.7.3.3 Synthèse sur le nombre d’images d’acquisition
2.7.4 Influence de paramètres externes
2.7.4.1 Influence du décollement
2.7.4.2 Influence de l’angle d’inclinaison
2.8 Conclusion
3 Traitement des images courants de Foucault pour la caractérisation des défauts enfouis
3.1 La maquette de laboratoire
3.2 Images obtenues en sortie d’ICF
3.3 Séparation de source
3.3.1 Considérations sur les images CF
3.3.2 Choix de la méthode de séparation de sources
3.4 ACP
3.4.1 Représentation matricielle des mesures
3.4.2 Hypothèses pour l’application de l’ACP
3.4.3 Décomposition
3.5 Discussion sur les sources
3.6 Rapport de séparation
3.7 Optimisation en fréquences
3.7.1 Conditions d’optimisation
3.7.2 Détermination des fréquences optimales
3.7.3 Performances de l’ACP bi-fréquences
3.8 ACP mono-fréquence
3.9 ACP multifréquences
3.10 Fissures orientées
3.10.1 Introduction
3.10.2 Multi-orientations des courants de Foucault pour l’imagerie de fissures orientées
3.10.3 ACP mono-fréquence et multi-orientations
3.10.3.1 Rapport de séparation
3.10.3.2 Estimation de l’angle d’orientation du défaut
3.10.4 ACP multifréquences et multi-orientations
3.11 Robustesse de l’ACP
3.12 Étude d’une maquette de validation
3.12.1 Introduction
3.12.2 Choix des fréquences de mesure
3.12.3 Imagerie de fissures situées en première plaque
3.12.4 Imagerie de fissures situées en deuxième plaque
3.12.5 Imagerie de fissures situées en troisième plaque
3.12.6 Effets de bord
3.12.7 Conclusion
3.13 Conclusion
4 Caractérisation de rivets
4.1 Introduction
4.2 Détection
4.2.1 Formulation du problème de détection
4.2.2 Diagnostic
4.3 Application et validation expérimentale
4.3.1 Données du problème
4.3.2 Modèle du bruit
4.3.3 Résultats du diagnostic
4.3.4 Courbes opérationnelles de réception (COR)
4.3.5 Courbes opérationnelles de réception « augmentées »
4.4 Processus de classification
4.4.1 Introduction
4.4.2 Modèle direct des rapports de séparation et modèle de bruit
4.4.3 Classification par maximum de vraisemblance
4.4.3.1 Paramètres à estimer
4.4.3.2 Règle de décision
4.4.4 Application
4.5 Fissures orientées
4.6 Conclusion
Télécharger le rapport complet