L’eau est la condition primordiale de la vie. Elle est déterminante et omniprésente. Le corps humain est composé à 70% d’eau pour l’adulte et 95% pour un embryon de 3 jours. L’eau couvre 70% de la planète : 97 % d’eau salée, essentiellement des océans et 3 % d’eau douce dans différents réservoirs. Elle existe même dans des environnements hyper-arides, par exemple dans les déserts ou sur la planète Mars, où les conditions de température et de sècheresse sont extrêmes. Une simple petite molécule d’eau est capable de commander les processus majeurs de transfert de masse et d’énergie à savoir le cycle de l’eau. L’eau n’est pas seulement indispensable à la vie, c’est également un élément d’une grande valeur culturelle; elle inspire les artistes et, dans beaucoup de traditions et de religions, elle est un élément essentiel du rituel, symbole de pureté. Objet de recherches scientifiques, l’eau est une des rares substances à exister dans la nature sous les trois formes: gaz, liquide et solide.
Structure électronique et géométrique de la molécule
Dans une molécule H2O, on s’attendrait à une liaison sp entre l’orbitale 1s de l’hydrogène H et une orbitale 2p de l’oxygène O. Ainsi, l’angle formé entre les deux liaisons covalentes O-H serait de 90°. Mais cette molécule originale a deux liaisons hybrides sp3 entre O et H et son angle HOH est ~104,40° (cas de l’eau à l’état vapeur). Cette molécule est sous forme de tétraèdre plus ou moins régulier (Fig. 1) dont l’atome d’oxygène occupe presque le centre. Dans la glace (de type Ih), l’oxygène est bien centré dans le tétraèdre, l’angle HOH ~109.47° et les tétraèdres forment un réseau hexagonal en forme de chaise ou de bateau.
Les propriétés électroniques et géométriques de la molécule d’eau ont une conséquence importante pour la liaison covalente O-H. L’oxygène, qui est plus électronégatif que l’hydrogène, attire d’avantage les électrons et il se crée ainsi une dissymétrie dans la distribution des charges. Il y a deux charges négatives provenant de deux paires d’électrons libres de l’oxygène et de deux charges positives provenant des atomes d’hydrogène, qui en se liant à l’oxygène, lui donnent leur électron et compensent cette perte par un caractère positif de la charge. Les deux paires d’électrons non engagées complètent la structure en tétraèdre et sont responsables du comportement spécifique de l’eau.
Liaison hydrogène, polarité et constante diélectrique de l’eau liquide
Une conséquence capitale de la polarité de la molécule d’eau est l’attraction qu’elle exerce sur les molécules d’eau avoisinantes. L’atome d’hydrogène d’une molécule subit l’attraction de l’atome d’oxygène d’une autre molécule. Il s’établit une liaison hydrogène. Ces liaisons hydrogènes sont de faible énergie mais elles confèrent à l’eau une pseudo-structure très souple. Elles permettent aussi d’interagir avec les espèces à déficience électronique (cations) et de former des liaisons électrostatiques avec les atomes d’hydrogène des molécules voisines. Bien qu’électriquement neutre, la molécule d’eau possède un moment dipolaire très important (1.8 Debye) permettant aux molécules d’eau de s’aligner dans un champ électrique. L’eau peut devenir un meilleur conducteur que n’importe quelle solution saline à température ambiante. Tout tient à la structure de la molécule d’eau. La réponse de l’eau au champ électrique est décrite par la constante diélectrique. Cette dernière est une mesure de la diminution des forces électriques qui existent entre les ions lorsqu’ils sont immergés dans le liquide, par rapport à celles qui existent entre eux lorsqu’ils sont dans le vide (Angell, 1982).
Cette constante qui évolue avec la température est une propriété physique très élevée dans le cas de l’eau.
Pouvoir solvant de l’eau
L’eau est un bon solvant vis-à-vis des composés ioniques et polaires. A haute température, une rupture dans le réseau de liaisons hydrogènes de l’eau augmente la solubilité des solutés non-polaires; car la force des liaisons hydrogènes agit sur leur hydrophobicité (Coym et Dorsey, 2004). Sur les continents de la planète, l’eau altère les roches et se charge en sels minéraux solubles, qui se retrouvent dans les lacs et les océans. Ce phénomène de dissolution résulte de deux effets associés : une forte constante diélectrique et l’hydratation appelée aussi solvatation. La forte constante diélectrique du solvant limite les forces d’attraction, empêchant ainsi l’élaboration de liaisons ioniques. L’hydratation est une interaction électrostatique (Van der Waals) entre le solvant et le soluté dissous. La molécule d’eau s’oriente, sous l’effet de sa charge, autour des ions formant des sphères d’hydratation.
Propriétés physiques originales de l’eau
L’eau a des températures de fusion, d’ébullition et critique anormalement élevées. Lorsqu’un cristal de glace approche de sa température de fusion, l’arrangement et l’orientation moléculaire changent. La rigidité est remplacée par la fluidité et la périodicité cristalline laisse la place à l’homogénéité spatiale. La densité en ce point augmente de 9% (Stillinger, 1980). La densité varie d’une manière différente entre 0 et 4°C et de 4°C aux températures supérieures, avec un maximum de densité à 4°C qui est l’anomalie la plus célèbre de l’eau . Dans un liquide normal, on observe une diminution des fonctions de transfert (par exemple la compressibilité isotherme KT, la capacité calorifique isobare Cp ou la dilatation thermique αp) avec la diminution de la température dans la fluctuation des quantités comme le volume ou l’entropie. Contrairement aux liquides normaux, les fonctions de transfert de l’eau augmentent quand la température diminue en dessous d’une valeur, qui dépend de la quantité considérée. On a une augmentation de KT au dessous de 46°C, de CP au dessous de 35°C (Poole et al., 1992 ; Debenedetti, 1996). La capacité calorifique de l’eau est exceptionnellement élevée : une petite augmentation de température provoque une forte augmentation de sa capacité d’absorber la chaleur. La valeur de |αp | augmente en dessous de 4°C. En dessous de cette température, le volume molaire de l’eau augmente ce qui explique par exemple qu’un iceberg flotte sur l’eau. A une température ~ – 45 °C, αp diverge à l’infini, ce qui témoigne d’une sorte de comportement critique (Franzese et Stanley, 2007). Ces propriétés physiques extraordinaires ont permis à l’eau d’exister dans des formes particulières différentes de l’eau usuelle.
Eau confinée
L’eau capillaire est un exemple d’eau volumique. Cette capillarité de l’eau se met en place du fait de sa grande tension superficielle (expliquée plus loin) et des forces d’adhésion liquidesolide. Cette eau se maintient dans les pores malgré les effets de la gravité. L’eau capillaire est représentée schématiquement dans un pore de forme tubulaire de petite taille, dont les parois sont recouvertes d’un film d’adsorption. La loi de Laplace permet de relier la géométrie du pore à la pression capillaire s’exerçant sur la phase liquide et à la tension superficielle du liquide qui exprime les forces de cohésion (Pettinati, 2006).
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I : ETAT DE L’ART
I EAU : GENERALITES
I.1 STRUCTURE ELECTRONIQUE ET GEOMETRIQUE DE LA MOLECULE
I.2 LIAISON HYDROGENE, POLARITE ET CONSTANTE DIELECTRIQUE DE L’EAU
I.3 POUVOIR SOLVANT DE L’EAU
I.4 PROPRIETES PHYSIQUES ORIGINALES DE L’EAU
I.5 EAU VOLUMIQUE
I.6 DIAGRAMME DE PHASE
I.6.1 Courbes d’équilibres et points particuliers
I.6.2 Transitions de phase de 1er et 2ème ordre
I.7 STABILITE, METASTABILITE, INSTABILITE, NEUTRALITE
II LA MÉTASTABILITÉ
II.1 DÉFINITION
II.2 SPINODALES : DEFINITIONS, CALCULS ET FORMES
II.2.1 Spinodale thermodynamique
II.2.2 Calcul de la spinodale : équations d’états
II.2.3 Scénarii possibles sur la forme de la spinodale
III LA METASTABILITE : UNE AFFAIRE CINETIQUE
IV LA THEORIE CLASSIQUE DE LA NUCLEATION HOMOGENE (CNT)
IV.1 CALCUL DE LA BARRIERE D’ENERGIE LIEE A LA NUCLEATION DE VAPEUR
IV.1.1 Tension de surface
IV.2 TRAVAIL MINIMAL DE NUCLEATION D’UNE BULLE
IV.2.1 Minimisation de ∆F
IV.2.2 Limites de la CNT avec approximation de paroi mince
IV.2.3 Modèle de la densité fonctionnelle (DFT)
IV.3 ASPECT STATISTIQUE : TAUX DE NUCLEATION
V BILAN EXPERIMENTAL SUR LA METASTABLE
V.1 EXPERIENCES DE SURCHAUFFE
V.1.1 Méthode de gouttes
V.1.2 Expériences en tension
VI POURQUOI S’INTERESSER A LA METASTABILITE ?
VI.1 METASTABILITE DANS LE MILIEU NATUREL
VI.2 METASTABILITE ET NUCLEATION AU QUOTIDIEN
VI.3 EFFETS BENEFIQUES DE LA METASTABILITE ET DE LA NUCLEATION
VI.4 EFFETS GENANTS DE LA METASTABILITE ET DE LA NUCLEATION
VII CONCLUSION
Chapitre II : Inclusions fluides et microthermométrie
I LES INCLUSIONS FLUIDES SYNTHETIQUES
I.1 INTRODUCTION
I.2 SYNTHESES DES INCLUSIONS FLUIDES
I.2.1 Minéral et capsule de choix
I.2.2 Technique de Bodnar et Sterner : cracks par chocs thermiques
I.2.3 Techniques de Shmulovich et Graham
I.2.4 Cracks par chocs thermiques
I.2.5 Croissance cristalline de quartz pur
II INCLUSIONS FLUIDES SYNTHETISEES POUR LE PROJET
III ETUDE MICROTHERMOMETRIQUE DES INCLUSIONS FLUIDES
III.1 PRINCIPE
III.2 APPAREILLAGE
IV MESURE DE LA METASTABILITE DANS LES INCLUSIONS FLUIDES
Chapitre III : Calibration de la platine microthermométrique
I CALIBRATION OF THE LINKAM THMS 600 MICROTHERMOMETRIC STAGE USING SOLID-SOLID TRANSITIONS IN SALT, CERAMICS AND MINERALS
II ABSTRACT
III INTRODUCTION
IV MATERIELS
IV.1 APPAREILLAGE
IV.2 STANDARDS UTILISES ET DESCRIPTION DE LEURS TRANSITIONS DE PHASE
IV.2.1 A froid
IV.2.2 A chaud
V METHODES
V.1 ESTIMATION DU GRADIENT LATERAL
V.1.1 A froid
V.1.2 A chaud
V.2 ESTIMATION DU GRADIENT VERTICAL A 570°C
VI PROTOCOLE DE MESURES DES TRANSITIONS
VII RESULTATS ET DISCUSSION
VIII CONCLUSION
Chapitre IV : Les gammes de métastabilité
I PROTOCOLE EXPERIMENTAL
I.1 CONTRAINTES
I.2 SOLUTIONS ET METHODES
II RESULTATS ET DISCUSSION
II.1 MESURES DE TH ET TN
II.1.1 Reproductibilité
II.1.2 Explosivité
II.1.3 Vitesses de mesure
II.1.4 Sensibilité à l’environnement externe
III GAMMES DE METASTABILITE : PRESSIONS NEGATIVES
III.1 H2O-NAOH
III.2 H2O-NACL
III.3 H2O-CACL2
III.4 H2O-CSCL
IV QU’EST-CE QUI CONTROLE LA METASTABILITE DANS LES IF ?
IV.1 FORME DES IF
IV.1.1 Traitement d’image avec SPO
IV.1.2 Microscope confocal
IV.2 VOLUME DES IF
IV.2.1 Modes de calcul
IV.3 VOLUME EN FONCTION DE LA GAMME DE METASTABILITE
IV.4 LES EFFETS DE LA CHIMIE ET DE L’HISTOIRE THERMIQUE DE L’ECHANTILLON
V CONCLUSIONS
CONCLUSION