Les syndromes drépanocytaires sont des maladies génétiques de l’hémoglobine (Hb), transmises selon le mode autosomique récessif et caractérisées par la présence de l’hémoglobine S (HbS). Il en existe différents types dont les plus fréquents sont la drépanocytose homozygote (forme SS), l’hétérozygotie composite pour l’Hb S et l’Hb C (forme SC), et l’hétérozygotie composite pour l’HbS et une β-thalassémie (forme Sβ0 et Sβ+ thalassémie) (1). Ils associent trois grandes catégories de manifestations cliniques liées à l’anémie hémolytique chronique, aux phénomènes vaso-occlusifs et à la susceptibilité accrue aux infections .
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 4,5% de la population mondiale serait porteuse du gène de l’hémoglobine S (70). Cette hémoglobinopathie héréditaire est reconnue comme priorité de santé publique depuis 1990 en Guadeloupe, en 2005 par l’Union Africaine (UA), en 2006 par l’OMS et en 2008 par l’ONU .
Définition
La drépanocytose SC est une forme hétérozygote composite de la drépanocytose qui associe deux hémoglobines anormales : l’hémoglobine S (mutation due à une substitution d’un acide glutamique par une valine à la position 6 de la chaine β-globine) et l’hémoglobine C (mutation due à une substitution de l’acide glutamique par une lysine à la position 6 de la chaine β-globine .
Rappels sur l’hémoglobine
Structure de l’hémoglobine adulte (Hb A)
Il en existe différents types, dont l’expression évolue au cours du développement ontogénique. Les différentes hémoglobines sont des tétramères qui résultent de l’association de 4 chaînes polypeptidiques, dites chaînes de globine, semblables deux à deux. C’est la nature de ces chaînes qui va caractériser le type d’hémoglobine .
L’hémoglobine présente une structure primaire définie par la séquence en acides aminés des chaînes de globine, une structure secondaire (alternance d’hélices alpha et non-alpha), une structure tertiaire définie par l’arrangement tridimensionnel du monomère de globine qui permet de délimiter une poche à hème, et une structure quaternaire définie par les interactions entre les monomères au sein du tétramère (13).
Les chaînes α et β sont assemblées entre elles par des liaisons fortes (liaisons α1β1 et α2β2) et par des liaisons faibles (liaisons α1β2 et α2β1), les premières jouant un rôle essentiel dans la stabilité de la molécule et les secondes dans le processus de transition allostérique .
Structure de l’hémoglobine S (Hb S) et de l’hémoglobine C (Hb C)
– Hémoglobine S : mutation entrainant la substitution d’un acide glutamique par une valine à la position 6 de la chaine β-globine.
– Hémoglobine C : mutation entrainant la substitution de l’acide glutamique par une lysine à la position 6 de la chaine β-globine.
Fonctions de l’hémoglobine
Chaque chaîne de globine possède une poche à hème qui permet à l’hémoglobine d’assurer sa fonction oxyphorique. En effet, chaque chaîne s’enroule sur elle-même en aménageant un repli central dans lequel se loge une molécule d’hème (13). L’hème s’arrime à la globine, et fixe un atome de fer, qui lui-même fixe une molécule d’oxygène. Ainsi, chaque molécule d’hémoglobine fixe 4 molécules d’oxygène et constitue l’oxyhémoglobine. La saturation en oxygène en fonction de la pression partielle d’oxygène se fait selon une courbe sigmoïdale. On la caractérise souvent par la mesure de la P50 érythrocytaire, qui est la pression partielle de l’oxygène pour 50% de saturation du sang .
Historique
En 1910, James Herrick, médecin à Chicago, fait la première description médicale de la drépanocytose. En 1917, Emmel évoque le caractère familial de la maladie et depuis des progrès ne cessent de se dérouler. En 1927, Hahn et Gillepsie montrent que les hématies falciformes apparaissent quand la pression partielle en oxygène baisse au dessous de 45 mm de Hg. En 1949, James Neel démontre que la transmission de cette maladie est mendélienne. Pauling et Itano et leurs collaborateurs étudient la migration électrophrétique anormale de l’HbS En 1956, le Britannique Vernon Ingram montre que l’HbS est due à un remplacement d’un acide aminé dans l’hémoglobine normale en position 6. Cela a démontré pour la première fois que les gènes déterminaient la nature de chaque acide aminé dans une protéine.
Génétique
Mode de transmission
La drépanocytose SC est une maladie génétique dont la transmission se fait selon le mode autosomique récessif codominant. Elle est caractérisée par une double anomalie biochimique atteignant les chaines β de la molécule d’hémoglobine. Ainsi cette forme associe deux chaînes β qualitativement anormales et dissemblables. Elle nécessite que l’un des parents apporte la tare drépanocytaire (S), et l’autre apporte la tare hémoglobinique C .
Génétique moléculaire
Chez le drépanocytaire SC, le gène β globine, localisé au niveau du bras court du chromosome 11, est caractérisé d’une part par la substitution de la thymine à l’adénine au niveau du 6éme codon (CAC → GTG) et d’autre part par la substitution de l’adénine à la première Guanine du 6éme codon (CAC → GGG). Ce qui est à l’origine de la formation respectivement de l’Hb S et l’Hb C .
Haplotypes de la drépanocytose
Des variations de la séquence nucléotidique, sans conséquence pathologique directe, sont fréquentes. Elles sont désignées sous le terme de polymorphisme. Lorsque ces modifications portent sur des sites reconnus très spécifiquement par certaines endonucléases (enzymes de restriction), elles sont faciles à mettre en évidence par les méthodes de cartographie génique (polymorphisme de taille des fragments de restriction).
L’association de plusieurs de ces polymorphismes définit un haplotype (65). L’un des résultats les plus intéressants des études de polymorphisme de l’environnement du gène drépanocytaire a été l’observation d’un déséquilibre de liaison : les polymorphismes ne sont pas distribués au hasard mais forment un petit nombre d’haplotypes bien définis. La mutation drépanocytaire a été trouvée habituellement associée à 5 haplotypes désignés d’après leur épicentre. Ce sont les haplotypes : Sénégal, Bénin, Cameroun, Bantou et Arabo-indien .
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Table des matières
INTRODUCTION
I. Définition
II. Rappels sur l’hémoglobine
Structure de l’hémoglobine adulte (HbA)
Structure de l’hémoglobine S (HbS) et de l’hémoglobine C (HbC)
Fonctions de l’hémoglobine
III. Historique
IV. Génétique
IV.1. Mode de transmission
IV.2. Génétique moléculaire
IV.3. Haplotypes de la drépanocytose
V. Epidémiologie
VI. Physiopathologie
VI. 1. La polymérisation
VI. 2. La falciformation
VII. Diagnostic
VII. 1. Clinique
VII.1.1. Circonstances de decouverte
VII.1.2. Phase intercritique
VII .1.3. Phase critique
VII. 2. Biologie
VII. 2.1. Hémogramme
VII. 2.2. Les techniques d’étude de l’hémoglobine
VII. 2.2.1. Les techniques non séparatives
A- Test de solubilité de l’Hb
Le test Itano
Le test de falciformation
B- Test de stabilité de l’hémoglobine
VII. 2.2.2. Les techniques séparatives
A- Electrophorèse
L’électrophorèse de zone à pH alcalin
L’électrophorèse à pH acide
L’isoélectrofocalisation
B- La chromatographie liquide haute performance
VIII. Evolution
VIII.1. Complications aigues
VIII.1.1. Complications anémiques
Crise de déglobulisation
Crise de séquestration splénique aigue
Crise aigue érythroblastopénique
VIII.1.2. Syndromes occlusifs graves
Accidents vasculaires cérébraux
Syndrome thoracique aigu
Priapisme
VIII.1.3. Complications infectieuses
VIII.2. Complications chroniques
VIII.2.1. L’ostéonécrose aseptique
VIII.2.2. La rétinopathie
VIII.2.3. La lithiase vésiculaire
VIII.2.4. L’ulcère de la jambe
VIII.2.5. Les complications rénales
VIII.2.5. Les complications cardiaques
IX. Traitement
IX.1. Objectif
IX.2. Principes généraux de prise en charge
IX.3. Moyens
IX.4. Traitement des complications
Traitement antalgique initiale
IX.5. Indications de traitements spécialisés
Transfusion sanguine
Hydroxyurée
Allogreffe de moelle osseuse
IX.6. Prévention des crises vaso-occlusives et de l’hémolyse
L’hyperhydratation
La prévention des infections
Supplémentation en Acide Folique
Conseil génétique
IX.7. Perspectives thérapeutiques
CONCLUSION