DISCUSSION
Reprรฉsentativitรฉ et limites
Nous rapportons une รฉtude portant sur les facteurs รฉtiologiques de la dyshidrose , avec un recueil prospectif des donnรฉes sur une pรฉriode de 6 mois, allant du 1 Janvier 2021 au 30 Juin 2021 . Pour rรฉaliser notre รฉtude, nous avons recrutรฉ 80 patients qui prรฉsentaient une dyshidrose, vus aux services de dermatologie de LโHรดpital Aristide Le Dantec, de lโHรดpital Institut dโHygiรจne Sociale et aux consultations externes dermatologiques de lโHรดpital Albert Royer .
– Apport de ce travail :
Il s’agit ร notre connaissance de la premiรจre รฉtude au Sรฉnรฉgal qui s’intรฉresse aux facteurs รฉtiologiques de la dyshidrose ,permettant dโidentifier les aspects รฉpidรฉmiologiques , cliniques , thรฉrapeutiques et รฉvolutifs de cette affection .
– Limites de lโรฉtude :
La non-rรฉalisation des examens complรฉmentaires pour tous les patients constituait la seule limite ร la rรฉalisation de notre รฉtude.
Aspects รฉpidรฉmiologiquesย
Dans notre รฉtude , la frรฉquence hospitaliรจre moyenne รฉtait faible puisque la dyshidrose reprรฉsentait 1,25 โฐ de lโensemble des malades suivis pendant la pรฉriode de lโรฉtude . En effet , la diminution de la frรฉquentation hospitaliรจre des malades en raison de la pandรฉmie covid-19 pourrait expliquer ce taux faible . La moyenne dโรขge ( 35 ans ) รฉtait similaire ร celles retrouvรฉes en Tunisie par Amouri et al (31 ans) [19] et au Togo par Pitchรฉ et al (32,8 ans ) [20] . Une moyenne dโรขge plus รฉlevรฉe ( 50 ans) รฉtait rapportรฉe par lโรฉtude marocaine Bahtaoui et al [21] .
Le pic de frรฉquence [30 ans โ40 ans] retrouvรฉ dans notre รฉtude serait liรฉ aux activitรฉs professionnelles chez les patients de cette tranche dโรขge . Le mรชme pic de frรฉquence รฉtait rapportรฉ par Guillet et al [30 ans โ40 ans] [22] . Une prรฉdominance fรฉminine รฉtait notรฉe chez nos patients (62,5%) . Ce qui rejoint lโรฉtude de Bahtaoui et al [21]. Cependant , on notait une rรฉpartition รฉquivalente entre les 2 sexes par Amouri et al [19].
Habitudes et mode de vieย
Certains auteurs pensent que la dyshidrose serait due ร une sรฉcrรฉtion excessive de sueur . Ainsi une activitรฉ sportive favorisant lโhypersudation รฉtait rapportรฉe chez le quart de nos malades . Lโรฉtude Bahtaoui et al rapportait un taux moins รฉlevรฉ (5,4 %) que celui de notre รฉtude [22]. Concernant le stress , il รฉtait constatรฉ chez le quart de nos patients rejoignant ainsi les rรฉsultats de la sรฉrie Guillet et al (24%) . En effet , les personnes stressรฉes prรฉsentent davantage de risque dโรชtre atteintes de dyshidrose dรจs lors quโelles produisent une quantitรฉ importante de sueur . Le tabagisme รฉtait รฉgalement retrouvรฉ dans 36,3% de cas . Un taux infรฉrieur รฉtait rapportรฉ par Bahtaoui et al ( 12 ,5% ) [21] . En Allemagne , la dyshidrose รฉtait fortement associรฉe au tabac dans lโรฉtude faite par Schwanitz et al [11] . Le mรฉcanisme impliquรฉ nโรฉtait pas encore รฉlucidรฉ. Chez nos patients, un dรฉclenchement ou une aggravation de la dyshidrose pendant la saison dโรฉtรฉ ( juillet ,aoutโฆ) รฉtait notรฉ dans 11,3 % favorisรฉ probablement par lโhypersudation . Nรฉanmoins, 15% de malades notaient au contraire une aggravation pendant la saison dโhiver (janvier ,fรฉvrier ,mars โฆ) . Cela pourrait รชtre expliquรฉ par le climat tropical du Sรฉnรฉgal qui se caractรฉrise par la chaleur durant toute lโannรฉe . Dans une รฉtude indienne [25] , la saison estivale รฉtait un facteur dรฉclencheur important chez les patients avec un taux allant jusquโ ร 47,8% .
Dans notre sรฉrie ,les produits mรฉnagers รฉtaient incriminรฉs de dรฉclencher la dyshidrose dans 31,3% de cas , les gants en latex dans 5% et le gel hydroalcoolique dans 5% . Ce dernier รฉtait de plus en plus utilisรฉ par la population depuis la pandรฉmie de covid-19 . Une รฉtude indienne vient conforter nos rรฉsultats en rapportant une intolรฉrance aux dรฉtergents dans 21,7% de cas [25] . Dโoรน lโintรฉrรชt de conseiller aux patients lโutilisation des gants pendant les activitรฉs mรฉnagรจres et dโopter pour les produits de mรฉnage hypoallergรฉniques . De mรชme , les aliments รฉtaient mis en cause chez nos malades surtout le poisson (26,3%) , les fruits de mer (7,5% ) et le chocolat (5%) . De nombreuses รฉtudes rapportaient les mรชmes rรฉsultats notamment pour lโail , la laitue et les รฉpices [6][8].
Aspects Cliniques
Lโatopie ( familiale et/ou personnelle) รฉtait notรฉe chez 76,25% de nos malades et ce taux รฉtait plus รฉlevรฉ que ceux des sรฉries Lodi et al ( 50% ) [10] et Guillet et al (46,7%) [22]. En France ,La dyshidrose reprรฉsentait 3,7% des formes cliniques de la dermatite atopique dans lโรฉtude menรฉe par Jacobzone et al [23]. Nรฉanmoins , aucun risque de dyshidrose nโรฉtait associรฉ ร lโatopie dans la sรฉrie Bryld et al [1]. En ce qui concerne lโ antรฉcรฉdent dโeczรฉma de contact , il รฉtait observรฉ chez 2,5% de nos patients .Ce qui reprรฉsente presque la moitiรฉ du taux rapportรฉ par Bahtaoui et al (5,4%) [21] . Des taux plus รฉlevรฉs รฉtaient observรฉs dans la sรฉrie de Guillet et al (72%) [22] et de Bryld et al (71,10%)[1]. En outre , lโeczรฉma de contact รฉtait statistiquement associรฉ ร la dyshidrose dans lโรฉtude togolaise de Pitchรฉ et al [20] .
La durรฉe moyenne dโรฉvolution รฉtait de 10 ans .Les sรฉries Bahtaoui et al [21] et Pitchรฉ et al [20] avaient respectivement rapportรฉ des taux infรฉrieurs de 6,22 ans et de 3ans .Cela pourrait รชtre dรป au retard de consultation par nos patients . Si la plupart des patients dans notre รฉtude prรฉsentait un prurit (95%) concordant ainsi avec lโรฉtude Bahtaoui et al (100%)[21] , certaines lรฉsions peuvent prolifรฉrer profondรฉment sous la couche รฉpidermique et provoquer de la douleur (25% dans notre รฉtude ) . De mรชme , cette derniรจre pourrait รชtre engendrรฉe par la surinfection des lรฉsions . Sur le plan lรฉsionnel , les lรฉsions vรฉsiculeuses รฉtaient prรฉdominantes (68,75%) suivies par les lรฉsions รฉrythรฉmato-squameuses ( 30% ) . Nous nโavons trouvรฉ aucun lien statistiquement significatif entre lโatopie et les diffรฉrentes prรฉsentations cliniques . Par contre , nous avons trouvรฉ un lien significatif entre le tabagisme et la survenue dโune lรฉsion รฉrythรฉmato-squameuse surmontรฉe dโune vรฉsicule (p = 0,018). La topographie รฉtait palmaire dans 21 , 3% de cas .Ce rรฉsultat รฉtait infรฉrieur ร celui retrouvรฉ par Mineoka et al au Japon (47,9%) [24] et par Guillet et al (70%)[22]. Elle รฉtait plantaire chez 11 ,3% de nos patients .Une frรฉquence quasi similaire รฉtait rapportรฉe par Guillet et al (10%) [22] et moins รฉlevรฉe par Mineoka et al (6,25%)[24] . Quand ร lโatteinte palmo-plantaire , elle รฉtait la plus frรฉquente chez nos patients ( 67 ,5%). Cependant , cette topographie รฉtait moins frรฉquemment observรฉe par Mineoka et al (45,80%) [24] et Guillet et al (20%) [22]. Une atteinte unguรฉale รฉtait observรฉe chez 13 ,8% de nos malades . Ce taux est infรฉrieur ร celui rapportรฉ par la sรฉrie Bahtaoui et al au Maroc ( 65,5% ) [21] . En effet , les infections mycosiques pourraient favoriser la survenue dโune dyshidrose . La rรฉalisation dโun prรฉlรจvement mycologique doit รชtre systรฉmatique chez tous les patients prรฉsentant une dyshidrose .
Un intertrigo interorteil dโallure mycosique รฉtait observรฉ dans 7 ,5% de cas .Ce taux รฉtait nettement moins รฉlevรฉ que celui rapportรฉ par les sรฉries Guillet et al (15,8%) [22] , Bahtaoui et al (44,5%)[21] , Pitchรฉ et al (52%) [20] et la sรฉrie tunisienne Amouri et al (35,5%) [55] . Le mรฉcanisme impliquรฉ est une rรฉaction fongique dite rรฉaction ยซ IDE ยป consistant en la survenue dโun eczรฉma dyshidrosique des mains sans filaments identifiรฉs localement .
Aspects paracliniquesย
Les patch tests รฉtaient positifs dans 50% de cas , ce qui rejoint la sรฉrie Lodi et al [10] qui avait retrouvรฉ un taux de 48% . Un taux de positivitรฉ lรฉgรจrement moins รฉlevรฉ รฉtait dรฉcrit par la sรฉrie Meneghini Angelini et al (30%) [9] et plus รฉlevรฉ par la sรฉrie indienne Varadraj et al (70%) [25] . Ces rรฉsultats pourraient conforter la thรฉorie selon laquelle certains auteurs considรจrent cette affection comme une forme dโeczรฉma des mains . Les allergรจnes retrouvรฉs รฉtaient surtout le cobalt , le baume de pรฉrou et le nickel . Le nickel est lโallergรจne le plus frรฉquemment dรฉcrit dans la littรฉrature comme pourvoyeur de dyshidrose notamment dans les sรฉries de Guillet et al [22] , de Lodi et al [10] , de Varadraj et al [25] , de Yokozeki et al [3] et de Mineoka et al[24]. Le cobalt reprรฉsentait le 2รจme allergรจne le plus retrouvรฉ aprรจs le nickel dans lโรฉtude de Mineoka et al [24] et le 3รจme allergรจne aprรจs le nickel et le chromate dans la sรฉrie de Yokozeki et al [3]. Le chromate รฉtait รฉgalement identifiรฉ dans certaines sรฉries comme celle de Varadraj et al [25] mais on notait lโabsence de cet allergรจne dans notre sรฉrie . Les prick tests alimentaires รฉtaient positifs dans 2 cas principalement aux cacahuรจtes et aux sardines .
Quand aux prick tests respiratoires , ils รฉtaient รฉgalement positifs dans 2 cas surtout aux dermatophagoides farinae , aux cafards et aux plumes de poule.
Aspects thรฉrapeutiques
Les thรฉrapeutiques utilisรฉes chez nos malades รฉtaient essentiellement les dermocorticoides (87,5%) et la corticothรฉrapie gรฉnรฉrale (26,3%) .Lโรฉviction allergรฉnique รฉtait รฉgalement incluse dans la prise en charge des malades en se basant sur lโรฉducation thรฉrapeutique . Les dermocortioides constituent la pierre angulaire du traitement de cette affection [39]. Dโautres traitements locaux avaient fait lโobjet de nombreuses รฉtudes comme les inhibiteurs de la calcineurine topiques dont lโeffet รฉtait gรฉnรฉralement limitรฉ ainsi que la photothรฉrapie qui รฉtait identifiรฉe comme thรฉrapeutique efficace par Wollina et al [40][41]. Selon certaines sรฉries , un traitement court par la prednisolone ร la dose de 30mg /jour pendant les premiers jours de lโรฉruption permettait un contrรดle rapide de la dyshidrose [29] . Dans une autre รฉtude , le mรฉthotrexate รฉtait efficace ร des doses de 12.5 ร 20 mg par semaine[34] . De mรชme , l’azathioprine s’est avรฉrรฉe utile ร des doses de 50 mg ร 150 mg par jour dans une รฉtude faite sur 6 patients atteints de dyshidrose [35] . Par ailleurs , dans une grande รฉtude contrรดlรฉe de 1032 patients sur l’eczรฉma chronique des mains l’alitrรฉtinoรฏne รฉtait efficace chez 33 % des patients prรฉsentant une forme dyshidrosique de cet eczรฉma [36].
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Table des matiรจres
INTRODUCTION
MATERIEL ET METHODES
I. OBJECTIFS DE LโETUDE
II. METHODOLOGIE
II.1. Type dโรฉtude
II.2. Cadre dโรฉtude
II.3. Population dโรฉtude
II.4. Critรจres dโinclusion
II.5. Critรจres de non-inclusion
II.6. Critรจres diagnostiques
II.7. La technique de collecte
II.8.Lโaspect รฉthique
II.9. La saisie et lโanalyse des donnรฉes
RESULTATS
III. ETUDE DESCRIPTIVE
III.1. Aspects รฉpidรฉmiologiques
III.1.1. Rรฉpartition selon le site de recrutement
III.1.2. Rรฉpartition en fonction de la frรฉquence hospitaliรจre
III.1.3. Age et sexe
III.1.4. Origine gรฉographique et catรฉgorie socio-professionnelle
III.2. Habitudes et mode de vie
III.2.1. Pratique du sport et saison
III.2.2. Stress et tabagisme
III.2.3. Produits de contact suspectรฉs par les patients
III.2.4. Aliments suspectรฉs par les patients
III.2.5. Retentissement socio-professionnel
III.3. Aspects cliniques
III.3.1. Antรฉcรฉdents et terrain
III.3.2. Hyperhidrose
III.3.3. Durรฉe dโรฉvolution
III.3.4. Signes fonctionnels
III.3.5. Prรฉsentation clinique
III.3.10. Intertrigo interorteil
III.4. Aspects paracliniques
III.4.1. Tests allergologiques
III.4.2. Prรฉlรจvement mycologique
III.5. Aspects thรฉrapeutiques
III.6. Aspects รฉvolutifs
IV. ETUDE ANALYTIQUE
IV.1. Relation entre lโaspect clinique et le tabagisme
IV.2. Relation entre lโaspect clinique et lโatopie
IV.3. Relation entre lโรฉvolution et le tabagisme
DISCUSSION
V. Reprรฉsentativitรฉ et limites
VI. Aspects รฉpidรฉmiologiques
VII. Habitudes et mode de vie
VIII. Aspects Cliniques
IX . Aspects paracliniques
X. Aspects thรฉrapeutiques
XI. Aspects รฉvolutifs
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES
ANNEXES