Stratégies d’entreprises et nouvelles formes de rationalisation de la production dans le bâtiment au Brésil et en France

LA RÉORIENTATION VERS LES STRATÉGIES D’ENTREPRISES 

Comme nous l’avons dit précédemment, il nous est apparu nécessaire pour appréhender les conditions d’efficience d’intégrer la dimension stratégique dans son articulation aux NFRP. Sans aller jusqu’à défendre l’idée d’une détermination étroite de celles-ci par les stratégies, nous formulions néanmoins l’hypothèse d’un lien fort entre ces deux éléments, via les transformations de l’environnement économique du secteur.

Encore fallait-il définir ce que nous entendions par stratégie. Pour ce faire, nous avons passé en revue les différentes théories traitant de ce thème, sans bien sûr les épuiser toutes. Nous ne présentons ici que l’essentiel de celles que nous avons utilisées. Il ne nous paraît pas inutile de rappeler quel fut notre itinéraire sur cette question.

Dans un premier temps, l’approche que MINTZBERG (1990a) appelle « école stratégique du ‘design' » ou « classique », paraissait répondre à nos attentes. Mais les limites de ses applications dans un certain nombre de travaux qui y associent aussi des démarches du type diagnostic, nous sont vite apparues. C’est le cas des ouvrages de MARTINET (1988), de THIBAUT (1989), de BOTTIN (1991) et de WISSLER (1993), que nous avons étudiés au début et qui proposent une vision inadéquate de la stratégie, du moins par rapport à nos objectifs. En effet, ces ouvrages présentent des outils dont l’utilisation ne nous semble pas assez orientée vers le rôle de la stratégie dans le processus d’amélioration des compétences des entreprises, face aux contraintes de l’environnement, direction dans laquelle nous nous engagions. En outre, notre but n’était pas de trouver de nouveaux secteurs où l’entreprise pourrait s’impliquer, ni d’analyser de changements de même envergure que ceux évoqués, par exemple, par KOENIG (1990). Bref, cette démarche et ces concepts ne répondaient pas tout à fait à nos objectifs.

Un travail plus récent de MARTINET (1993) nous a cependant intéressés et beaucoup influencé à l’époque. Il présente, en effet, deux perspectives différentes dans la quête stratégique, la première fondée sur la notion de « diagnostics stratégiques », et la seconde sur la notion de « diagnostics opérationnels ». Cette dernière permet une évaluation interne de l’entreprise, leur but étant d’évaluer à la fois les compétences de l’entreprise et son efficience technico-économique, tandis que le « diagnostic stratégique » réalise une évaluation de l’environnement et du positionnement stratégique de l’entreprise face à la concurrence.

L’auteur associe chacun de ces diagnostics à deux grands types d’activités, « distincts, complémentaires mais aussi conflictuels » (p. 201), tout aussi nécessaires à l’entreprise : l’un privilégiant « l’exploitation, aussi efficiente que possible, de ces capacités, c’est-à-dire la gestion quotidienne du ‘faire' » (l’opérationnel), le second associé à « la création d’un potentiel de performances ou d’un ensemble de capacités destinées à mettre l’entreprise ‘en situation de faire' » (le stratégique).

L’analyse structurelle de la concurrence et les stratégies génériques compétitives de PORTER

Selon PORTER (1986), l’entreprise a trois alternatives stratégiques différentes, à partir desquelles elle peut développer une démarche pour s’approprier un avantage sur ses concurrents dans un secteur précis du marché. Il s’agit des stratégies génériques compétitives de domination par des coûts, par la différenciation, et par la concentration éventuelle sur un marché (la « focalisation » versus la « diversification »). Selon cet auteur, l’entreprise se « positionnerait » sur l’un des ces créneaux, en fonction de la structure concurrentielle du marché concerné. Il propose de procéder à l’analyse structurelle de la concurrence, à partir de la prise en compte des cinq forces de la concurrence : les entrants potentiels, les clients, les produits de remplacement, les fournisseurs et la rivalité entre les concurrents. La rentabilité d’un secteur industriel serait alors conditionnée par ces forces. L’idée de PORTER (1991) est qu’à partir d’une analyse structurelle, l’entreprise peut établir des stratégies concurrentielles, à partir des trois stratégies génériques en vue de maîtriser les cinq forces mieux que ses rivales.

L’analyse structurelle offre ainsi un fil conducteur pour délimiter les éléments qui caractérisent et qui contraignent l’environnement dans un secteur donné, en l’occurrence celui du Bâtiment / Logement au Brésil et en France. Cela nous permet donc de déterminer les règles de fonctionnement des processus de production, conditionnées par les luttes concurrentielles qui se passent dans les deux pays.

Mais, nous l’avons dit, la démarche de PORTER va encore plus loin, en affirmant que face à ces règles, l’entreprise peut analyser et définir les stratégies génériques compétitives adéquates. L’association des règles de fonctionnement à ces dernières fournit alors les éléments pour parvenir à ce que nous avons appelé facteurs clés d’efficacité. En effet, ceux-ci dépendent, comme les règles de fonctionnement, des différents marchés où l’entreprise opère.

Le concept des facteurs a été développé par l’école stratégique « classique », et a été repris par la suite par l’école dite « du positionnement », qui les appelle « F.C.S.S. – Facteurs Clés de Succès Sectoriel », que GARIBALDI (1994) définit ainsi :

• Facteurs clés de succès. « Éléments sur lesquels se fonde prioritairement la lutte concurrentielle. Ils sont à chercher dans l’environnement au niveau des types de clients. »

Nous trouvons quelques exemples d’identification des F.C.S.S. dans la bibliographie, pour le cas de l’industrie textile et chimie, de l’hospitalisation de jour, du secteur de la lingerie, et du courtage d’assurances. GARIBALDI (1994, p. 287-292) nous présente une liste des F.C.S.S possibles, approche suivie également, mais de manière plus exhaustive, par SPENDOLINI (1994, p. 81-85). Quant au Bâtiment / Logement, nous n’avons rien rencontré de pertinent.

Les différents niveaux stratégiques 

Encore fallait-il préciser de quel ou quels niveaux stratégiques nous parlions, car il y a une sorte de hiérarchie de stratégies, associée aux différents niveaux de l’entreprise. Ainsi, au niveau le plus élevé, dans le cas d’un groupe d’entreprises, nous parlons de stratégie de groupe par rapport à l’environnement économique (« corporate strategy »). À l’échelon moyen, c’est-à-dire, celui de l’entreprise par rapport à un secteur précis du marché, c’est la stratégie concurrentielle qui s’impose (« business strategy »). Enfin, se situe la stratégie de fonction, c’est-à-dire celle d’un service de l’entreprise, par rapport à la performance globale attendue (« operating » ou « functional strategy »). Nous reprenons ici, pour chacun de ces termes, les définitions suivantes  :

• Stratégie de groupe. « Expression de la stratégie au plus haut niveau de l’entreprise, prenant en compte la volonté des dirigeants et exprimant leur vision à terme de l’entreprise. »
• Stratégie concurrentielle. « La concurrence est au centre de la réussite ou de l’échec des firmes… Face à des rivaux, la stratégie (concurrentielle) consiste à rechercher une position favorable dans un secteur, scène où la concurrence se manifeste principalement. La stratégie vise à l’obtention d’une position rentable et durable au milieu des forces qui définissent le cadre concurrentiel du secteur. »
• Stratégie de fonction. « Stratégie de mise en oeuvre au niveau d’une fonction (par exemple marketing, production…) de la stratégie (concurrentielle) générique choisie. »

Au terme de cette distinction, il apparaît que la simple amélioration des « points faibles » de l’entreprise de construction, identifiés à partir d’une démarche de type diagnostic, ne suffit pas à améliorer ses compétences. En effet, ces faiblesses peuvent être déconnectées d’un besoin concurrentiel, ce qui rendrait l’action inefficace.

Selon cette perspective, nous pouvons définir ainsi le secteur du Logement :
• Secteur du Logement. « Frontière arbitraire dans laquelle les entreprises sont en compétition pour produire (et éventuellement commercialiser) des logements de toutes sortes ; celles-ci ont une relation d’interdépendance avec les sous-traitants, les fournisseurs, les maîtres d’oeuvres et les ‘clients’, et elles sont soumises à la menace de nouveaux entrants ou de nouveaux produits. »

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Table des matières

INTRODUCTION GÉNÉRALE
CHAPITRE 1 : INTRODUCTION GÉNÉRALE
1.1. L’OBJET DE LA THÈSE : LE RÉSULTAT D’UN ITINÉRAIRE DE RECHERCHE
1.2. PRÉSENTATION DE NOTRE PROBLÉMATIQUE : QUESTIONS ET
HYPOTHÈSES
1.2.1. LA RÉORIENTATION VERS LES STRATÉGIES D’ENTREPRISES
L’analyse concurrentielle
Des questionnements et des hypothèses sur l’analyse stratégique
1.2.2. LA RÉORIENTATION VERS LES NOUVELLES FORMES DE
RATIONALISATION DE LA PRODUCTION
Des facteurs clés d’efficacité aux nouvelles formes de
rationalisation de la production, en passant par les chaînes
de valeurs
Les formes néo-tayloriennes d’organisation de la production
industrielle
Les enjeux autour de la main-d’œuvre
Les enjeux autour de la sous-traitance
1.2.3. LE NOUVEAU STATUT CONFÉRÉ AU RAPPROCHEMENT ENTRE LA
FRANCE ET LE BRÉSIL
L’environnement, les caractéristiques et les contraintes
sectorielles en France et au Brésil
Les nouvelles formes de rationalisation de la production et
les transformations environnementales
1.2.4. LA THÈSE DÉFENDUE
1.3. LES OBJECTIFS, LA MÉTHODOLOGIE, LE CHAMP DE RECHERCHE ET LE
« TERRAIN » D’INVESTIGATION
1.3.1. LES OBJECTIFS DU TRAVAIL DE THÈSE
1.3.2. LE PLAN DE TRAVAIL ET LA MÉTHODOLOGIE EMPLOYÉE
Partie 1. L’environnement du Bâtiment / Logement au Brésil
et en France et les stratégies d’entreprise
Partie 2. Du stratégique au tactique : les nouvelles formes
de rationalisation de la production au Brésil et en France
1.3.3. LE CHAMP DE LA RECHERCHE : L’ENTREPRISE DE
CONSTRUCTION, SON ENVIRONNEMENT ET LES DIFFÉRENTS TYPES DE
MARCHÉS OÙ ELLE INTERVIENT
1.3.4. LE « TERRAIN » D’INVESTIGATION
CHAPITRE 2 – L’ENVIRONNEMENT DU BÂTIMENT / LOGEMENT AU BRÉSIL ET EN FRANCE
QUELQUES CARACTÉRISTIQUES PARTICULIÈRES
2.1. LE SECTEUR DU B.T.P. : QUELQUES DONNÉES MACRO-ÉCONOMIQUES
2.1.1. L’IMPORTANCE DU B.T.P. DANS L’ÉCONOMIE
2.1.2. L’IMPORTANCE DU BÂTIMENT DANS LE B.T.P
2.1.3. LES DIFFÉRENTS TYPES DE MARCHÉ DU BÂTIMENT
2.1.4. UN SECTEUR « ÉVOLUÉ »
2.2. LE SECTEUR DU LOGEMENT : LES DIFFÉRENCES ENTRE LES DEUX PAYS
S’ACCENTUENT
2.2.1. LE PROBLÈME DU LOGEMENT
2.2.2. LES TROIS PRINCIPAUX TYPES D’ENTREPRISES DU LOGEMENT
2.2.3. LA POLITIQUE DE FINANCEMENT DU LOGEMENT
2.3. LES BÂTIMENTS D’HABITATION COLLECTIFS AU BRÉSIL ET EN FRANCE
2.4. LE SYSTÈME D’ACTEURS AU BRÉSIL ET EN FRANCE
2.4.1. LE MAÎTRE D’OUVRAGE
2.4.2. LE MAÎTRE D’ŒUVRE
2.4.3. LES ENTREPRISES DE TRAVAUX ET LA MAIN-D’ŒUVRE DE
PRODUCTION
2.5. LA LOGIQUE D’EFFICACITÉ SUIVIE PAR LES ENTREPRISES BRÉSILIENNES ET SES CONSÉQUENCES
2.5.1. LA LOGIQUE SUIVIE PAR LES ENTREPRISES BRÉSILIENNES: LA
RECHERCHE D’EFFICACITÉ COMMERCIALE ET FINANCIÈRE
2.5.2. L’AFFAIBLISSEMENT TECHNICO-ÉCONOMIQUE DES
ENTREPRISES BRÉSILIENNES DE CONSTRUCTION
2.6. UNE SYNTHÈSE DES CARACTÉRISTIQUES SECTORIELLES LES PLUS
MARQUANTES
2.6.1. CARACTÉRISTIQUES SECTORIELLES ET ENJEUX
CONCURRENTIELS
2.6.2. CARACTÉRISTIQUES SECTORIELLES ET FORMES DE
RATIONALISATION DE LA PRODUCTION
Chapitre 1 – Introduction générale
CHAPITRE 3 – L’ENVIRONNEMENT DU BÂTIMENT / LOGEMENT AU BRÉSIL ET EN FRANCE
LES NOUVELLES CONTRAINTES SECTORIELLES
3.1. LES NOUVELLES CONTRAINTES DES ENVIRONNEMENTS
CONCURRENTIELS DU BÂTIMENT / LOGEMENT BRÉSILIEN ET FRANÇAIS
3.1.1. LES NOUVELLES CONTRAINTES LIÉES AUX DIMENSIONS
ÉCONOMIQUE ET COMMERCIALE DE L’ENVIRONNEMENT
3.1.2. LES NOUVELLES CONTRAINTES LIÉES À LA DIMENSION
TECHNIQUE DE L’ENVIRONNEMENT
3.1.3. LES NOUVELLES CONTRAINTES LIÉES À LA DIMENSION SOCIALE
DE L’ENVIRONNEMENT : LES NOUVEAUX ENJEUX LIÉS À LA GESTION DE
LA MAIN-D’ŒUVRE
3.1.4. LES NOUVELLES CONTRAINTES LIÉES À LA DIMENSION
FINANCIÈRE DE L’ENVIRONNEMENT
3.1.5. LES NOUVELLES CONTRAINTES LIÉES À LA DIMENSION LÉGALE
DE L’ENVIRONNEMENT
3.2. UNE SYNTHÈSE DES CONTRAINTES SECTORIELLES LES PLUS
MARQUANTES
3.2.1. LES NOUVELLES CONTRAINTES LIÉES AUX DIMENSIONS
ÉCONOMIQUE ET COMMERCIALE
3.2.2. LES NOUVELLES CONTRAINTES LIÉES À LA DIMENSION
TECHNIQUE
3.2.3. LES NOUVELLES CONTRAINTES LIÉES À LA DIMENSION SOCIALE
3.2.4. LES NOUVELLES CONTRAINTES LIÉES À LA DIMENSION
FINANCIÈRE
3.2.5. LES NOUVELLES CONTRAINTES LIÉES À LA DIMENSION LÉGALE
CONCLUSION GÉNÉRALE

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