La colonne vertébrale est une composante du système musculo-squelettique soutenant le tronc et les membres supérieurs. Elle permet la mobilité en flexion et en torsion du tronc et protège la moelle épinière, située dans le canal rachidien. Sa structure osseuse articulée par symphyse est composée de 33 à 34 vertèbres. Chacune d’entre elles est séparée par un disque intervertébral, à l’exception de la première vertèbre cervicale et de celles du sacrum et du coccyx. Le sacrum et le coccyx sont non articulés puisque leurs vertèbres sont soudées entre elles. On compte ainsi un total de 23 disques intervertébraux.
La colonne s’articule à chaque segment vertébral. Bien qu’un disque intervertébral ne soit pas présent à tous les niveaux vertébraux, on définit ici un segment comme un ensemble de deux vertèbres et du disque intervertébral les unissant. Chaque segment compte trois degrés de liberté en rotation, soit la flexion sagittale, la flexion latérale et la torsion. Le mouvement de translation est peu permissif, mais tout de même présent dans les trois directions, portant le total de degrés de liberté à six. Ces mouvements peuvent être combinés.
Disque intervertébral L5–S1
Le disque intervertébral est au centre de la problématique de la hernie discale. Il lie les vertèbres entre elles, assure la mobilité de la colonne vertébrale et absorbe l’énergie cinétique lors des mouvements relatifs des segments vertébraux (Cassidy et al., 1989). Les connaissances actuelles soutiennent qu’il n’est vascularisé et innervé qu’en périphérie (Bendo et Awad, 2006). Il se compose de deux entités distinctes : le noyau pulpeux (NP), et l’anneau fibreux (AF).
Noyau pulpeux
Le noyau pulpeux est un matériau composite présentant une structure peu organisée de fibres de collagène de type I à l’intérieur d’un gel de protéoglycanes (collagène de type II). Les glycosaminoglycanes contenues dans les chaînes moléculaires de protéoglycanes leur confèrent une propriété hydrophile. Le noyau pulpeux sain contient ainsi jusqu’à 88% d’eau (Cassidy et al., 1989). Il est translucide chez les enfants et les jeunes adultes et plutôt blanchâtre chez les adultes en âge avancé (Iatridis et al., 1996). Le gel hautement hydraté chez la population jeune est un liquide pratiquement incompressible (Hickey et Hukins, 1980; Iatridis et al., 1996) au comportement hydrostatique (Nachemson, 1981).
En étudiant les propriétés viscoélastiques du noyau pulpeux à l’aide d’un spectromètre mécanique, Iatridis et al. (1996) ont démontré que les conditions de chargement influencent son comportement. Treize échantillons prélevés de huit disques intervertébraux lombaires ayant des noyaux pulpeux intacts ont été étudiés en torsion pure sur l’appareil de test. Les spécimens ont été préparés dans les 24 heures suivant le décès, et leur contenu en eau a été maintenu, soit en les enveloppant dans un scellant en plastique, soit en les congelant, selon l’étape de préparation. Les essais ont été faits dans une chambre à humidité contrôlée. Il en ressort que le comportement mécanique du noyau pulpeux est hautement sensible au taux de déformation. Il se rigidifie à mesure que la fréquence du chargement augmente et se comporte davantage comme un solide sous un chargement dynamique. Durant l’étape transitoire, la viscosité n’est pas négligeable. Cependant, à de faibles taux de déformation, il réagit comme un fluide et la viscosité n’influence pas son comportement. Les auteurs n’ont pas indiqué si les spécimens avait été congelés lentement ou rapidement, ni si un agent de cryopréservation avait été utilisé. Or, Lam et al. (2011) ont démontré qu’une certaine concentration d’agent de conservation était nécessaire pour éviter le raidissement viscoélastique des tissus de disques intervertébraux porcins lors de la cryoconservation pendant quatre semaines. Ceci indique que l’utilisation d’un agent de conservation ne peut que favoriser l’observation d’un comportement fluide à de faibles taux de déformation. Ainsi, les observations de Iatridis et al. (1996) ne sont pas remises en doute pour un chargement statique, même dans l’éventualité où un agent de conservation n’avait pas été utilisé. Le noyau pulpeux réagit donc comme un fluide incompressible et non visqueux dans le cas d’un chargement quasi statique.
Lors des chargements mécaniques, la pression dans le noyau pulpeux augmente (Nachemson, 1981; Adams et al., 1996), ce qui a pour effet de gonfler l’anneau fibreux, en plus d’incurver les plateaux vertébraux (Roaf, 1960) et d’occasionner une migration du liquide intradiscal dans les plateaux vertébraux (Kurtz et Edidin, 2006). McMillan et al. (1996) ont enregistré une perte de liquide de 15% par le noyau pulpeux et jusqu’à 30% dans certaines zones de l’anneau fibreux, suite à un chargement de 1500 N en flexion-compression soutenu pendant six heures sur des segments lombaires cadavériques. Leurs résultats corroborent ceux de Botsford et al. (1994) issus d’images par résonance magnétique, qui indiquent une perte de volume de 16 à 17% dans un disque sain durant le cycle diurne. Selon ces auteurs, la perte de volume est la principale cause de la variation en hauteur du disque alors que le renflement du disque a un effet minime. Le volume initial de liquide est retrouvé lors du cycle de repos.
Quelques études in vivo ont été menées sur des humains afin de connaître la pression intradiscale occasionnée par différentes charges et postures (Nachemson et Morris, 1964; Nachemson, 1981; Wilke et al., 1999; Sato et al., 1999). Ces études ont démontré que la variation de pression intradiscale est reliée non seulement à la charge externe, mais aussi à la posture. Selon Nachemson (1981), la pression intradiscale en position assise est de 40% supérieure à celle en position debout . De plus, le soulèvement d’une masse de 10 kg, en gardant le dos droit, augmente la pression de 340% tandis qu’une flexion vers l’avant combinée à une rotation du tronc en soutenant une masse de 10 kg l’augmente de 400% comparativement à la pression en position debout sans charge externe. Ces résultats sont en bonne corrélation avec ceux de Wilke et al. (1999, 2001), à l’exception d’écarts notables entre les différentes postures assises. La pression varie entre 0,22 MPa et 0,75 MPa en position debout avec le dos droit (Sato et al., 1999; Wilke et al., 2001), et elle grimpe jusqu’à 1,50 MPa en flexion (Sato et al., 1999). Ces résultats d’expériences in vivo doivent être considérés avec discernement, car peu de sujets ont été étudiés. De plus, l’utilisation de ces résultats pour l’étude d’un segment vertébral requiert l’estimation de la charge appliquée sur ce segment. Or, il est difficile d’estimer la part de la masse corporelle supportée par un niveau particulier de la colonne vertébrale.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 REVUE DE LA LITTÉRATURE
1.1 Statistiques sur les affections vertébrales
1.2 Description du segment vertébral L5–S1 et études expérimentales
1.2.1 Disque intervertébral L5–S1
1.2.2 Noyau pulpeux
1.2.3 Anneau fibreux
1.2.3.1 Nombre de lamelles
1.2.3.2 Épaisseur des lamelles
1.2.3.3 Orientation des fibres de collagène
1.2.3.4 Frisures des lamelles
1.2.3.5 Interactions interlamellaires
1.2.3.6 Renflement de l’anneau fibreux
1.2.3.7 Propriétés mécaniques
1.2.4 Vertèbres lombaires, sacrum et plateaux vertébraux
1.2.5 Arborescences de Sharpey
1.2.6 Moelle épinière et nerfs spinaux
1.2.7 Ligaments
1.3 Dégénérescences du disque intervertébral L5–S1
1.3.1 Description de la hernie discale
1.3.2 Classification des dégénérescences du noyau pulpeux
1.3.3 Classification des dégénérescences de l’anneau fibreux
1.4 Revue des modèles biomécaniques analytiques
1.5 Revue des modèles biomécaniques numériques par éléments finis
1.5.1 Types d’analyse, géométrie et types d’éléments
1.5.2 Modélisation constitutive
1.5.3 Implémentation d’un modèle constitutif dans le logiciel d’éléments finis ANSYS 14
1.6 Conclusion de la revue de la littérature
CHAPITRE 2 DÉFINITION DU PROJET DE RECHERCHE
2.1 Introduction
2.2 Objectifs et hypothèse de l’étude
2.3 Méthodologie de recherche
2.3.1 Théorie des membranes et fondements du modèle
2.3.2 Cheminement du projet de recherche
2.4 Résultats escomptés, impacts envisagés et plan de publications
CHAPITRE 3 ARTICLE 1 : ON THE MODELING OF AN INTERVERTEBRAL DISC USING A NOVEL LARGE DEFORMATION MULTISHELL APPROACH
3.1 Introduction
3.2 Methods
3.2.1 Model Properties
3.2.2 Static Equilibrium
3.2.3 Compatibility of Displacements
3.2.4 Longitudinal and Circumferential Stresses
3.2.5 Large Deformation
3.2.6 Finite Element Models
3.3 Results
3.4 Discussion
3.5 Conclusion
CHAPITRE 4 ARTICLE 2 : EFFECT OF SHARPEY’S FIBERS ON THE STRESS DISTRIBUTION IN THE ANULUS FIBROSUS OF AN INTERVERTEBRAL DISC SUBJECTED TO COMPRESSION
4.1 Introduction
4.2 Methods
4.2.1 Finite Element Model
4.2.2 Analytical Model
4.2.2.1 Membrane Analysis
4.2.2.2 Discontinuity Analysis
4.3 Results
4.4 Discussion
4.5 Conclusion
CHAPITRE 5 ARTICLE 3 : ANALYTICAL EVALUATION OF STRESSES AND DISPLACEMENTS OF AN INTERVERTEBRAL DISC
5.1 Introduction
5.2 Methods
5.2.1 Sagittal profiles
5.2.2 Membrane analysis
5.2.3 Edge effects
5.2.4 Combined effects
5.2.5 Finite element model
5.3 Results
5.4 Discussion
5.5 Conclusion
CHAPITRE 6 ARTICLE 4 : ANISOTROPIC MULTI-SHELL ANALYTICAL MODELING OF AN INTERVERTEBRAL DISC SUBJECTED TO AXIAL COMPRESSION
6.1 Introduction
6.2 Methods
6.2.1 Model Parameters
6.2.2 Analytical Model
6.2.2.1 Membrane Shell Analysis
6.2.2.2 Discontinuity Analysis
6.2.3 Material Properties
6.2.4 Finite Element Model
6.3 Results
6.4 Discussion
6.5 Conclusion
CHAPITRE 7 DISCUSSION DES RÉSULTATS
7.1 Introduction
7.2 Résumé des articles de revue
7.3 Récapitulation des principaux résultats de la thèse
CONCLUSION GÉNÉRALE
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