Staphylococcus aureus producteurs de toxines d’intérêt clinique

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Diagnostic microbiologique

Examen direct

Staphylococcus aureus est une bactérie qui se présente sous forme de cocci à gram positif, avec une disposition en paires, tétrades ou grappes lors de l’observation de colonies par microscope optique (Fig.1). Il est généralement capsulé et n’est jamais sporulé, ses caractères biochimiques sont les suivants : catalase positive, oxydase négative, mannitol positif et coagulase positive en opposition avec la plupart des autres staphylocoques. C’est une bactérie aéro-anérobie facultative, non exigeante (4).

Cultures microbiologiques

SAU a une croissance aisée à 35 ± 2 °C et ce, sur une grande variété de milieux, donnant des colonies de 1 à 3 mm de diamètre en 24h et de 3 à 8 mm de diamètre en 48h.
Dans un laboratoire de microbiologie, la gélose au sang dite Columbia est principalement utilisée (mélange de peptones, levures, amidon de maïs, chlorure de sodium, agar, eau distillée et du sang frais défibriné).
La colonie typique sur une gélose au sang Colombia est pigmentée allant de crème/ gris/ gris-blanc avec une teinte jaunâtre allant du jaune à l’orange, lisse, entière, légèrement surélevée et hémolytique (5).
La gélose Chapman ou aussi appelée la gélose au sel de mannitol peut être aussi un milieu de choix pour la croissance de SAU. C’est une gélose à la fois sélective et différentielle, Staphylococcus aureus étant halophile, elle permet une sélection des bactéries qui vivent à des fortes concentrations de sel (6).

Sensibilité aux molécules antibiotiques

Les deux méthodes de détermination phénotypique de la sensibilité aux antibiotiques les plus courantes dans un laboratoire de microbiologie sont la méthode des disques par diffusion en milieu gélosé et la méthode de dilution en milieu liquide.
Classe médicamenteuse des β-lactamines
Les premières traces de résistance aux β-lactamines chez le SAU apparaissent en 1944 dans la littérature, avec la découverte d’une pénicillinase codée par le gène blaZ plasmidique, qui confère une résistance à toutes les pénicillines sauf les pénicillines M. Il est estimé aujourd’hui à 75% de souches porteuses de cette pénicillinase en ville contre 90% à l’hôpital (7). En 1961, on découvre l’acquisition de la protéine de liaison à la pénicilline additionnelle (PLP2a), chez les SAU, entrainant une diminution d’affinité à toutes les β-lactamines, excepté les céphalosporines de 5eme génération (C5G). Cette résistance est portée par un élément génétique mobile : la cassette staphylococcique SCCmec (Staphylococcal Cassette Chromosome mec). La cassette chromosomique est composée de deux éléments essentiels : un des gènes de résistance mecA, mecB, mecC, mecD ainsi qu’un des 5 complexes des recombinases ccr (Cassette Chromosomes Recombinases). La combinaison de ces deux composants permet de définir 13 types de cassette, de I à XIII (8,9). On parle alors de Staphylococcus aureus résistant à la méticilline (SARM) et de bactérie multi-résistante (BMR). Jusqu’en 1990, les SARM restent cantonnés aux structures de soins ; l’apparition de cette résistance dans les premiers cas d’infections communautaires ont amené à la recherche de nouvelles stratégies thérapeutiques (10).
Classe médicamenteuse des aminosides
Les résistances de Staphylococcus aureus aux aminosides sont bien connues de nos jours, le principal mécanisme de résistance étant une inactivation enzymatique codée par des gènes plasmidiques. De cette résistance découle trois phénotypes (11) :
– Phénotype K : Résistance de haut niveau à la kanamycine et à l’amikacine par une phosphorylase. L’enzyme responsable étant l’Aminoside phospho-transférase 3’ (APH (3’)).
– Phénotype KT : Résistance de haut niveau à la kanamycine, l’amikacine et à la tobramycine par une adénylase appelée Aminoside nucléotidyl-transférase (ANT(4’)).
– Phénotype KTG : Résistance de haut niveau à la kanamycine, l’amikacine, tobramycine et à la gentamicine par une enzyme bi-fonctionnelle avec une activité de phophorylation et d’acétylation : Aminoside acétyl-transférase – Aminoside phosphotransférase (AAC(6’)-APH(2’’)).
Classe médicamenteuse des macrolides
Le principal mécanisme de résistance de Staphylococcus aureus aux macrolides est une méthylation de la sous unité 50S ribosomique, cible de l’antibiotique, engendrée par l’acquisition de gène de la classe erm dont il existe à minima une vingtaine de variants (12).
Classe médicamenteuse des fluoroquinolones
Dans l’arsenal thérapeutique contre les SAU, les fluoroquinolones peuvent être également utilisées. Trois mécanismes de résistance sont majoritairement impliqués :
– Les mutations des gènes chromosomiques codant pour la topoisomérase IV, grla et grlb aussi appelés parC et parE.
– La mutation des gènes codants pour les sous-unités A et B de la gyrase, gyrA ou gyrB.
– L’efflux actif de l’antibiotique par une pompe transmembranaire codée par le gène chromosomique norA (11).
Classe médicamenteuse des glycopeptides
Les premières résistances aux glycopeptides chez Staphylococcus aureus ont été décrites en 1996. Cette résistance est également présente chez d’autres espèces comme Staphylococcus haemolyticus et Staphylococcus epidermidis. On retrouve plusieurs mécanismes de résistances aux glycopeptides chez Staphylococcus aureus, certains sont mal connus et probablement liés à un épaississement de la paroi bactérienne, d’autres bien identifiés par l’intermédiaire du gène vanA pouvant entrainer des résistances de très haut niveau aux glycopeptides (13,14).

Clinique et facteurs de virulence

Staphylococcus aureus peut être responsable d’un large éventail d’infections, locales ou invasives, nosocomiales ou communautaires (4) (Fig3).
Néanmoins on retrouve un très fort portage asymptomatique de ce germe par la population mondiale. Il a pu être déduit que les infections symptomatiques à Staphylococcus aureus surviennent dans des situations particulières dont les principales sont les suivantes :
– Lors d’une brèche de l’épithélium cutané, le germe va pouvoir croître au niveau de la plaie, provoquant une infection cutanée. Fréquemment l’expression clinique se manifestera sous la forme de furoncles et de folliculites.
– Par dissémination interne, à la suite d’une chirurgie. Ces infections symptomatiques sont rares, mais peuvent survenir et engager le pronostic vital (bactériémie, infection du site opératoire).
– Chez les patients ayant un terrain favorable aux infections, tel qu’une immunodépression ou chez les patients diabétiques (15).
La physiopathologie des infections à SAU, se décompose en 3 étapes : la colonisation, le développement et l’extension de l’infection. Chacune de ces étapes se réalise par l’intermédiaire de facteurs de virulence, qui selon leur expression vont conditionner le type d’infection et sa localisation (4).

Les toxines produites par Staphylococcus aureus

Parmi l’arsenal des facteurs de virulence de Staphylococcus aureus, la sécrétion de toxines joue un rôle très important. Dans ce chapitre les principales toxines de Staphylococcus aureus vont être présentées ainsi que leur mécanisme d’action.
Les toxines du SAU peuvent être divisées en trois principales classes (Fig.6) (21) :
– Les toxines formant des pores dans les membranes (Pore Forming Toxins)
– Les toxines exfoliatives (Exfoliatines)
– La famille des superantigènes (Sag)
Le système de production de ces toxines répond à des conditions et des mécanismes différents dont la plupart sont encore mal élucidés. Ces dernières peuvent néanmoins, lorsqu’elles sont sécrétées, entrainer de graves complications allant jusqu’au décès du patient (22).

Les toxines formant des pores (PFT)

Hémolysine- (Hla ou alpha-toxins)

L’Hémolysine alpha a été découverte et isolée dans le milieu des années 1960. Elle est sécrétée par 95% des SAU (23), sous forme d’un monomère hydrosoluble qui se fixe sur son récepteur transmembranaire ADAM10. La fixation entraine une polymérisation de la toxine qui forme un pré-pore puis un canal transmembranaire (24). La formation de ce canal va entrainer un afflux du calcium extracellulaire dans le milieu intracellulaire, qui va stimuler le métabolisme de l’acide arachidonique, la production de leucotriène, de prostaglandines, d’interleukine (IL) pro-inflammatoire comme IL-6 et IL-8 entrainant une inflammation de la cellule et enfin sa lyse (25) (Fig.7).
Il a été démontré que les effets de cette toxine jouent un rôle très important dans la pathogénèse de Staphylococcus aureus. En effet, l’analyse génétique des SAU dans les épidémies des années 1960 a montré une corrélation entre l’expression de la toxine et la virulence de la souche. (27). D’autre part, plusieurs études montrent que les patients ayant une bactériémie à SAU développent des anticorps à cette toxine (28).
En 2021, une étude a observé que l’injection d’anticorps anti-hémolysine alpha avait des effets protecteurs ou thérapeutiques dans un modèle animal de septicémie, lorsque l’injection est faite conjointement avec l’administration d’antibiotiques (29).

Hémolysine-β (Sphingomyélinase C)

Le rôle de l’hémolysine-β n’est pas totalement compris aujourd’hui. Elle pourrait agir sur l’échappement phagosomal et l’induction de la création d’un biofilm (30,31). L’hémolysine-β est une sphingomyélinase, enzyme clivant les sphingomyélines qui sont les sphingolipides les plus présents dans les membranes eucaryotes. Cette toxine est produite en grande quantité dans les souches isolées des animaux notamment bovins et dans les infections cutanées chez l’Homme (32).

Les leucotoxines

Les leucotoxines sont une famille de toxines formant des pores dans la membrane cellulaire. Elles sont composées de deux sous unités protéiques, une sous unité « S » qui définit le tropisme cellulaire et une sous-unité F qui va former un « pore-baril » (33) (Tab.1).

Phenol soluble moduline (PSM)

Les phenols solubles modulines sont des toxines découvertes en 1999, d’abord chez S. epidermidis puis chez S. aureus. Il a été découvert aujourd’hui chez Staphylococcus aureus, 4 PSMs de type (PSM- ), deux PSMs de type β (PSM-β) et enfin un PSM de type ɣ (PSM-ɣ) aussi appelé hemolysine-δ (21).
Le mécanisme d’action de ces toxines n’est pas encore décrit avec certitude. Les PSMs se fixeraient de manière non spécifique (1) à la membrane cellulaire grâce à leurs structures composées d’hélice puis formeraient un oligomère (2) et par la suite un pore d’une courte durée (3) qui entrainerait la destruction de la membrane cellulaire (Fig.9).
Le mécanisme d’action des PSMs serait dépendant de la charge membranaire. En effet les PSM- sont chargés positivement à l’inverse des autres toxines qui sont neutres, et cette propriété lui confèrerait une cytotoxicité accrue (35,36).
Il y aurait une forte corrélation entre la capacité du SAU à entrainer des infections invasives et la production de PSM (37). Les PSMs peuvent entrainer la lyse d’un grand nombre de cellules (polynucléaires neutrophiles, érythrocytes, kératinocytes) ce qui favoriserait la stratégie d’invasion de Staphylococcus aureus (38).
Les peptides PSMs joue aussi un rôle clé dans la structuration des biofilms chez les S. aureus (39). En effet leurs propriétés tensioactives contribuent à la maturation, au relargage et à la dissémination du biofilm (40).

La famille des superantigènes (Sag)

Il y a plus de 23 toxines appartenant à la famille des superantigènes décrites à partir de 2010, avec comme chef de file l’entérotoxine du syndrome de choc toxinique (TSST-1). Les autres toxines de cette famille sont les entérotoxines staphylococciques (Sea, Seb ,Sec ,Sed, See, Seg, Seh, Sei, Sej, Sel, Sem, Sen, Seo, Sep, Seq, Ser, Ses, Set) et les toxines du superantigène ( Seik à Seiq, Seiu à Seix ) (21).
Le mécanisme d’action de ces toxines est bien connu (Fig. 10). Il a été décrit pour la première fois en 1988 par Bernhard Fleischer et Hubert Schrezenmeier (41). Les toxines de la famille des superantigènes se fixent au complexe majeur histocompatibilité de classe II (CMH de classe II), et à une partie variable des récepteurs des lymphocytes T (Vβ). Cette fixation entraine une stimulation polyclonale des lymphocytes T. L’activation de ces derniers entraine la production de nombreux médiateurs de l’inflammation (IL2, IFN-Ɣ, Tumor Necrosis Factor) et les symptômes qui en découlent (fièvre, vomissement, diarrhées, hypotension, défaillances multiviscérales) (21,41). Suite à la production de ces médiateurs on retrouve un déficit immunologique dans la réponse des lymphocytes T et leur incapacité à produire d’IL-2 pour leur survie ce qui peut entrainer l’apoptose de ces derniers.

Les toxines exfoliatives (Ets)

Les toxines exfoliatives appelées aussi exofoliatines ou bien encore toxines epidermolytiques sont des toxines très spécifiques des S. aureus (42). Les principales toxines de cette famille sont l’exfoliatine A, B, C, D (ETA/ETB/ETC/ETD). Seules l’exfoliatine A et l’exfoliatine B semblent impliquées dans les infections humaines, l’exfoliatine C étant simplement décrite dans les infections équines et l’on retrouve dans la bibliographie actuelle, un seul cas d’exfoliatine D isolée chez une souche humaine (43,44).
Les exfoliatines A sont majoritaires en Europe, Amérique et Afrique contrairement au continent asiatique ou l’on va retrouver majoritairement des ETB (41).
Ces toxines sont impliquées dans le clivage des jonctions cellule-cellule des kératinocytes ce qui va entrainer une desquamation de la peau et la formation de lésions. Les exfoliatines reconnaissent et hydrolysent les desmosomes cadhérines dans les couches superficielles de la peau (Fig.11).

Staphylococcus aureus producteurs de toxines d’intérêt clinique

S. aureus producteurs de la toxine de Panton et Valentine (PVL)

La toxine de Panton et Valentine est la leucotoxine la plus connue de cette famille. Elle a été découverte en 1884 par Van de Velde et associée aux infections cutanées en 1932 par Philip Noel Panton et Francis Valentine (45). Elle est codée par les gènes lukPV et lukS acquis au cours de l’évolution par les SAU par des transferts d’ADN via des bactériophages (46). Il y a 6 phages connus, à ce jour, codant pour la leucocidine de Panton et Valentine : ΦPVL, Φ108PVL, ΦSLT, ΦSa2MW, ΦSa2USA et ΦSa2958 (47).
Les souches qui expriment la PVL causent généralement des infections cutanées superficielles (furoncle, impétigo, anthrax, folliculites) ainsi que des infections plus profondes (dermo-hypodermite non nécrosante) (48).
Ces souches sont aussi associées à des syndromes nécrosants tels que la pneumopathie nécrosante chez l’enfant et l’adulte en bonne santé. Il a été démontré par une étude que la pneumonie à SAU-PVL positif était bien plus mortelle que la pneumonie à SAU-PVL négatif, du fait d’une inflammation engendrant une nécrose pulmonaire (49) (Fig. 12).
Le centre national de référence (CNR) des staphylocoques en France, basé à Lyon, effectue une surveillance des souches possédant le gène de la toxine de Panton et Valentine.
126 souches de SAU ont été envoyées au CNR en 2019, isolées sur un terrain de pneumonies, pour évaluation du statut toxinique. Il a été retrouvé 44 souches (26,3%) avec le gène codant pour la PVL. Les souches ont été ensuite séquencées, avec comme clones majoritaires le CC152-MSSA et le USA300 Latin Variant pour respectivement les S. aureus meti-S (SASM) et les S. aureus meti-R (SARM) (Fig.13).

S. aureus producteur de la toxine du syndrome du choc toxique (TSST-1)

TSST-1 est le chef de file de la grande famille des superantigènes, elle peut mettre en jeu le pronostic vital d’un patient en entrainant un syndrome de choc toxinique.
Celui-ci se manifeste cliniquement par une hyperthermie, une hypotension, une éruption érythémateuse diffuse, une atteinte multiviscérale qui peut rapidement évoluer vers un choc sévère et en dehors de toute ressource thérapeutique vers le décès du patient (53).
La population la plus touchée par ce syndrome est la femme non ménopausée utilisant des dispositifs vaginaux comme protection périodique. Une étude a montré que le port du même tampon lors des menstruations pendant plus de 6 heures augmente significativement le risque de faire un choc toxinique. En effet le fluide menstruel bloqué par l’utilisation d’un tampon va être utilisé par Staphylococcus aureus comme milieu de culture où la bactérie pourra se développer en produisant la toxine TSST-1 (54).
Le CNR recense en 2020, 108 cas de choc toxinique staphylococcique, dont 11 chocs toxiques menstruels, et enfin 4 cas de scarlatine staphylococcique, la forme mineure du choc toxinique. On retrouve une stabilité du nombre de cas par rapport aux années précédentes (Fig.16).
Parmi les 11 cas des chocs toxiques menstruels de 2020, il a été retrouvé dans la totalité des souches, la présence du gène de la toxine TSST-1.
Pour les autres souches, l’analyse a mis en évidence 38 cas (39,6%) exprimant la TSST-1, 27 cas (28,1%) possédant un gène codant pour un autre super antigène et 9 cas (9,4%) pourvu du gène codant la toxine PVL. La grande majorité des souches toxinogènes sont méti-sensibles (90%). Le clone majoritaire retrouvé en France dans ces cas recensés est le clone CC30-MSSA à la hauteur de 31% (52).

S. aureus producteur d’exfoliatines (ET)

Staphylococcal scaled skin syndrome (SSSS)

Le SSSS ou l’épidermolyse aïgue staphylococcique est une exfoliation cutanée principalement retrouvée chez les nouveaux nés ou les enfants. Le diagnostic relève uniquement de la clinique devant l’observation d’un rash cutané érythrodermique et vésiculeux avec des lésions suintantes au niveau des zones de frictions. Ce décollement de l’épiderme est dû généralement à une infection a S. aureus producteur d’exfoliatine A ou B. On estime la mortalité de ce syndrome à 59% chez les immunodéprimés et 10% chez les immunocompétents (55,56).
Depuis 2011, le CNR recense une augmentation du nombre de cas de SSSS (Fig. 18). Parmi les observations de ces staphylocoques en 2020, sur 13 cas de maladie d’exfoliation généralisée, on retrouve 2 souches possédant les gènes de eta/etb, 7 souches qui possèdent eta seul, et 3 souches etb seul. (47). Parmi ces souches aucun SARM n’a été retrouvé.

Impétigo bulleux

L’impétigo est une infection cutanée superficielle purulente, due principalement à S. aureus. Il touche majoritairement les nouveaux nés, et les enfants, en provoquant des petites épidémies sporadiques (crèches, maternités). L’expression clinique se compose généralement d’une lésion vésiculo-bulleuse sous cornée, évoluant rapidement vers une érosion mélicérique à extension centrifuge. L’impétigo bulleux est similaire, excepté que les lésions vont former des « bulles » généralement par la production d’exfoliatine. La cicatrisation dure environ une semaine. (58)
Il est recensé en 2020, 78 cas d’impétigo bulleux, 12 souches possédaient les gènes codant pour ETA et ETB, 20 souches possédaient ETA seul, et 3 souches ETB seul. (47). Parmi ces souches aucun SARM n’a été retrouvé.

Antibiothérapies des souches productrices de toxines

La prise en charge des patients porteurs de souches à Staphylococcus aureus producteurs de toxines, va être modulée selon la présentation clinique de l’infection. Généralement, celle-ci nécessite l’utilisation d’une antibiothérapie adaptée, accompagnée de l’éradication d’un éventuel foyer infectieux (drainage, nettoyage de plaie, débridement, nécrosectomie, retrait de tampon). Dans les cas les plus graves une prise en charge réanimatoire peut être mise en place.

Infections superficielles et cutanées

Actuellement en France, le traitement des infections suppuratives est principalement chirurgical (60) et souvent associé à une antibiothérapie en cas de signes généraux, d’immunodépression ou d’autres facteurs de risques.
Contrairement aux États-Unis, où la prévalence des infections communautaires à SARM reste élevée et que le clone majoritaire est le clone USA 300 (61), il ne convient pas en France d’utiliser une antibiothérapie probabiliste dirigée contre les toxines. (D’après les recommandations conjointes de la HAS et de I’INRS accessibles à cette adresse : http://www.inrs.fr/dms/eficatt/FicheEficatt )

Pneumopathie nécrosante, choc toxinique, SSSS

Le traitement d’un choc toxinique, d’un SSSS, ou d’une pneumopathie nécrosante, outre la prise en charge en réanimation, associera donc des antibiotiques bactéricides actifs sur les SAU comme les β-lactamines associées à des antibiotiques dits anti-toxiniques comme la clindamycine.
En effet la clindamycine (famille des Lincosamides) est l’antibiotique de choix, à utiliser dans les infections à souches toxiniques car il est démontré qu’elle diminue in vitro, la quantité de toxine probablement grâce à son mécanisme d’action (inhibition de la synthèse protéique) (Fig. 20) (62,63).
Parmi les autres anti-staphylococciques disponibles par voie orale, la rifampicine et l’acide fusidique ne sont pas à utiliser en monothérapie en première intention du fait d’un risque de sélection de mutants résistants. Dans la mesure du possible et si la situation le permet, le linézolide ne doit pas être utilisé, ceci dans une optique d’épargne des molécules utilisables sur les souches dites BMR.
Situation et objectifs de cette thèse :
A notre connaissance en France, peu de données épidémiologiques existent sur la prévalence des souches toxinogènes de Staphylococcus aureus, dans des prélèvements de routine hospitalière. En effet, les recherches de toxines dans la majorité des cas, sont réalisées devant une clinique spécifique et évocatrices ou des situations particulières, qui restent rares. De plus, l’ajout de recherche des toxines sur un prélèvement bactérien, dans notre centre, est réalisé généralement par le biologiste face à des phénotypes de résistances évocateurs de clones connus ou sur une information clinique évocatrice, ce qui limite énormément la connaissance et la surveillance épidémiologique de ces dernières. L’objectif premier de cette thèse est donc de définir la prévalence des souches de Staphylococcus aureus toxinogènes (toxine de Panton et Valentine, TSST-1, Exfoliatine A) retrouvées sur les prélèvements de routine du Centre Hospitalier Universitaire de Caen, en incluant un maximum d’échantillons. Puis dans un second temps, nous essaierons de comparer l’impact clinique de ces souches toxinogènes aux souches non toxinogènes sur notre cohorte de patients. Nous étudierons ensuite les profils de résistance aux antibiotiques de ces souches. Enfin pour finir, nous réaliserons le séquençage de certaines de ces souches toxinogènes pour identifier, s’ils existent, des clones bactériens circulant au sein de notre établissement.

Matériels et méthodes

Constitution de la collection de prélèvements

Pour constituer notre collection de prélèvements, une extraction de données sur l’année 2020 (1er janvier 2020 au 31 décembre 2020) a été réalisée à partir du système informatique du laboratoire (SIL) (TdNextLab, Synergy®). Tous les prélèvements bactériologiques à Staphylococcus aureus ont été extraits. Par la suite, un dédoublonnage a été effectué avec ce même logiciel. Un prélèvement est considéré comme un doublon lorsque :
– L’échantillon prélevé provient d’un même patient.
– La nature de la bactérie retrouvée est la même (S. aureus).
– Il y a moins d’une différence majeure sur l’antibiogramme.
– Il y a moins de deux différences mineures sur l’antibiogramme.
Une différence majeure sur l’antibiogramme est définie comme une modification de la catégorie clinique comme elle est présentée par la société française de microbiologie (Sensible, Résistant, Sensible à forte posologie). Une différence mineure sur l’antibiogramme est définie comme une modification du diamètre d’inhibition ou de la CMI mais sans modification de catégorie clinique.
Le premier prélèvement extrait, par ordre chronologique, est conservé dans le listing, les doublons sont supprimés.
L’étape suivante a été une exclusion des prélèvements restants répondant à un des critères suivants :
– Prélèvement réalisé en dehors du CHU de Caen, justifié par l’absence de données cliniques dans notre établissement.
– Selon la nature des prélèvements : exclusion des liquides céphalo-rachidien, des selles, des urines, des cathéters et des expectorations de patients atteints de mucoviscidose. L’exclusion de ce type de prélèvement, est justifié par le faible effectif de prélèvements disponibles dans notre centre et la faible fréquence de PVL/TSST-1/ETA retrouvée dans ces matrices physiologiques, puisque seulement quelques case reports sont consultables dans la littérature (64)(65)(66)(67). Chaque souche a été ensuite récupérée dans la thèque du laboratoire de microbiologie du CHU de Caen. Elles sont conservées dans des milieux Brain-Heart-Infusion (BHI) gélosés à température ambiante. Les isolats ont été repiqués sur des géloses Tripticase-Soja (TS), incubés dans des étuves à 35±2C° pendant 24±4H. Les colonies ont été identifiées par la technologie MALDI-TOFF (Microflex®, Brucker, Bremen), puis conservées dans un BHI glycérolé, à -80C°. Certaines souches n’ont pas été retrouvées, ont été contaminées ou n’ont pas poussé après repiquage.

Recherche des gènes toxiniques (PVL, TSST-1, ETA)

Une fois la collection d’échantillons constituée, nous avons réalisé une recherche des gènes codant pour les principales toxines d’intérêt par une réaction PCR en temps réel selon la méthode Taqman®. Pour ce faire, les échantillons ont été repiqués une nouvelle fois sur gélose TS puis incubés à 35±2C° pendant 24±4H avant utilisation de la technique de PCR sur colonie.
La réaction a été réalisée sur un automate ROTORGENE (Qiagen®) sous un volume final de 20 µL contenant 1,25 µL de chaque amorce à 10uM, 0,5 µL de chaque sonde à 10uM, 5 µL de Quantifast Multiplex PCR Master Mix, 6,0 µL H2O free DNA. Les amorces et les sondes utilisées sont référencées dans le tableau 2.

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Table des matières

I. Introduction
A. Staphylococcus aureus
1. Généralités
2. Diagnostic microbiologique
3. Sensibilité aux molécules antibiotiques
4. Clinique et facteurs de virulence
B. Les toxines produites par Staphylococcus aureus
1. Les toxines formant des pores (PFT)
2. La famille des superantigènes (Sag)
3. Les toxines exfoliatives (Ets)
C. Staphylococcus aureus producteurs de toxines d’intérêt clinique
1. S. aureus producteurs de la toxine de Panton et Valentine (PVL)
2. S. aureus producteur de la toxine du syndrome du choc toxique (TSST-1)
3. S. aureus producteur d’exfoliatines (ET)
4. Antibiothérapies des souches productrices de toxines
Situation et objectifs de cette thèse :
II. Matériels et méthodes
A. Constitution de la collection de prélèvements
B. Recherche des gènes toxiniques (PVL, TSST-1, ETA)
C. Données cliniques
D. Détermination de la sensibilité aux antibiotiques
E. Whole Genome Sequencing
F. Statistiques
III. Résultats
A. Prélèvements cliniques et population de l’étude
B. Prévalence des souches sécrétrices de toxines
C. Données cliniques
D. Étude de la sensibilité aux antibiotiques
E. Whole Genome Sequencing des souches toxinogènes
IV. Discussion
V. Conclusion et Perspectives
VI. Bibliographie

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