SPIRITUALITE, COPING ET SATISFACTION DE VIE

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Le concept de coping et différentes approches

Le coping comme ressource adaptative.

A partir de l’analyse de 100 évaluations sur le coping, Skinner et al. (2003) ont réalisé une critique des différentes stratégies et pratiques utilisées dans ces études pour identifier quelles seraient les meilleures classifications de stratégies de coping à utiliser. Il en ressort qu’il existe peu de consensus sur la manière de conceptualiser ou de mesurer ce concept de coping, ce qui entraine aussi des difficultés de comparaison des résultats étant donné que le nombre et le type des différentes stratégies de coping sont spécifiques à chacune des études. La manière d’être particulière à chaque individu qui entraine un comportement ou une réaction qui lui est propre ainsi que les différents facteurs situationnels pouvant exister rend très difficile la mesure du coping de manière satisfaisante (Schwarzer & Knoll, 2003).
Paulhan et Bourgeois (1995) indiquent que dans une approche traditionnelle, le coping ressemble aux « défenses du Moi » qui correspond à des « opérations cognitives inconscientes » permettant la réduction de phénomènes pouvant engendrer de l’angoisse (p. 42) ; ces mécanismes de défense sont activés de manière automatique et inconsciente dès lors qu’une menace est perçue. Les notions d’inconscient et de défense renvoient à une approche psychanalytique et définissent des mécanismes de défense qui sont différents des capacités de coping. Le coping renvoie à des réponses conscientes d’ordre cognitif, comportemental ou émotionnel utilisées face à une situation considérée comme stressante. Il correspond à une approche cognitive et comportementale. Chabrol (2005) indique aussi la même distinction entre les mécanismes de défense, phénomènes non contrôlés par la volonté, et le coping où l’action est volontaire et contrôlée pour répondre à une situation problématique. Selon Chabrol et Callahan (2004) le contexte (la situation à laquelle il faut faire face) et la disposition (ce dont la personne dispose pour faire face à la situation) sont deux approches conceptuelles de la notion de coping. Les conditions stressantes ne produisent pas les mêmes effets dans des situations données et ces effets dépendent aussi des personnes qui vont avoir des capacités de résistance plus ou moins importantes car il existe une analogie dans l’étude des traits de personnalité et les processus de coping pour expliquer ces différences (Lazarus, 1993a). Lazarus et Folkman (1984) mettent l’accent sur les processus mis en œuvre par la personne et décrivent le coping comme des efforts cognitif et comportementaux en constante évolution pour gérer des exigences internes et/ou externes spécifiques qui sont évaluées comme mettant à mal ou dépassant les ressources dont la personne dispose. La description du coping ou du comportement d’ajustement dans des situations perçues comme stressantes ou difficiles par un individu implique deux choses simultanées : un problème réel ou imaginaire et la mise en œuvre d’actions au regard de ce problème pour le solutionner ou l’atténuer (Ray & al., 1982).
Lazarus (1993a) met en avant le concept d’évaluation comme processus de médiation dans une situation stressante mais préfère le terme de négociation entre d’un côté les exigences, les contraintes et les ressources de l’environnement et de l’autre la hiérarchie des objectifs et les convictions personnelles de l’individu. Lazarus et Folkman (1984) décrivent les situations en tenant compte d’une part de l’agent stressant et de l’individu et d’autre part de l’importance de la relation entre cet individu et l’environnement. Ils décrivent une approche transactionnelle : l’évènement stressant n’est pas à lui seul ce qui va déterminer la réaction ou le ressenti d’une personne, c’est l’évaluation de la situation qui rend cette dernière stressante ou non. Ils définissent le stress comme une relation particulière entre la personne et l’environnement dans lequel elle va évaluer la situation comme grevant ou dépassant ses ressources et donc comme pouvant mettre en danger son bien-être. La transaction implique que le stress reflète la conjonction d’une personne possédant certaines croyances avec un environnement dont les caractéristiques peuvent posséder des menaces, des préjudices ou des défis (Lazarus, 1990). Ainsi un déménagement lié à un changement de travail peut s’avérer traumatisant pour certains membres de la famille alors que pour d’autres cela peut engendrer l’occasion d’améliorer les conditions de vie et faire de nouvelles connaissances. Chaque fois qu’une situation engendre un sentiment de déséquilibre entre les ressources personnelles et la situation cela peut faire apparaitre un stress. La personne peut se sentir dépassée par les évènements qu’elle n’arrive plus à contrôler en raison de ressources insuffisantes. Chabrol et Callahan (2013) évoquent aussi l’apparition possible d’un stress quand les ressources personnelles sont insuffisamment exploitées en donnant l’exemple de personnes au chômage qui, de fait, ont des ressources non exploitées ou de personnes surqualifiées pour un emploi qui ne peuvent pas utiliser l’étendue de leurs compétences, ainsi « la contrôlabilité d’un évènement a un effet sur le stress perçu. » (p. 164).
Lors de l’annonce d’une maladie, la personne peut se sentir démunie, du moins dans un premier temps, car elle ne sait pas comment elle va pouvoir contrôler ni même si elle va pouvoir le faire. Il est possible de distinguer deux formes de contrôle différentes. D’une part un contrôle cognitif, dans ce cas la personne va agir mentalement sur les effets que la situation va avoir sur elle-même et d’autre part un contrôle comportemental, dans ce cas la personne va pouvoir agir de manière concrète sur la situation (Chabrol & Callahan, 2013).
Selon Folkman et Lazarus (1985, cité dans Lazarus, 1993a), on peut définir des styles d’adaptation stables mais l’adaptation va fortement dépendre du contexte car pour être efficace elle doit évoluer dans le temps et en fonction des conditions de stress. Certaines stratégies comme la pensée positive sont considérées comme relativement stables et dépendent de la personne alors que la recherche de soutien social est plus instable et va plus dépendre du contexte social.
La construction de systèmes de catégories pour conceptualiser et mesurer le coping est rendu difficile par la complexité du coping. Les différentes façons ou manières de faire face (ways of coping) à une situation stressante sont des unités descriptives de base déterminées pour comprendre comment les personnes réagissent réellement au stress lorsqu’elles font face à des problèmes réels ; l’examen des catégories de coping actuelles (résolution de problème, recherche de soutien social, rumination, fuite) distingue la recherche sur le coping des travaux liés au stress (Skinner & Zimmer-Gembeck, 2007). Skinner et al. (2003) recensent deux approches principales nécessaires pour créer une structure de coping : une approche ascendante inductive et une approche descendante déductive. L’approche ascendante inductive se réfère aux stratégies basées sur les indications individuelles des participants aux études, assez faciles à identifier ou à classer et dans laquelle on retrouve le plus souvent : la résolution de problème, la recherche de soutien, l’évitement, l’action directe, la distraction, mais aussi dans une moindre mesure : l’agression, l’auto-accusation, la fuite, le retrait social, la religion, la restructuration cognitive positive, l’expression affective, le cognitif, la recherche d’informations, l’acceptation et aussi prendre ses désirs pour des réalités (vœu pieux), le soutien social émotionnel et l’inquiétude (Skinner & al., 2003). Cependant certaines de ces stratégies pourraient être reliées comme par exemple l’évitement, la distraction et la fuite ou la recherche de soutien et le soutien social émotionnel ou encore la résolution de problème avec l’action directe et/ou la recherche d’informations qui peut être une action directe pour résoudre un problème. L’approche descendante déductive recense dans un premier ensemble les fonctions d’adaptation dont la plus courante comprend le coping centré sur le problème et le coping centré sur les émotions et dans un deuxième ensemble les caractéristiques typologiques pouvant être utilisées pour définir les différents modes de coping : actif, passif, cognitif ou comportemental, l’approche et l’évitement étant les distinctions les plus courantes (Skinner & al., 2003). Paulhan en 1992 indiquait que les stratégies mises en place pour moduler le stress peuvent être soit de type « évitement » (se détourner de la source de stress), soit de type « vigilance » (porter son attention sur cette source de stress). La vigilance pouvant se rapprocher de l’approche puisque l’attention est portée sur la source de stress. Malgré des différences dans les approches théoriques et les dimensions du coping, les analyses conceptuelles et empiriques convergent vers un petit nombre de familles de coping (Skinner & Zimmer-Gembeck, 2007). Les travaux de Skinner et al. (2003) montrent un exemple de douze familles de coping ainsi qu’une tentative d’analyse de fonction qui leur sont attribuées : la résolution de problème (ajuster les actions pour être efficace), la recherche d’informations (trouver des éventualités supplémentaires), l’impuissance (trouver les limites des actions), la fuite (échapper à un environnement non conciliant), l’autonomie (protéger les ressources sociales disponibles), la recherche de soutien (utiliser les ressources sociales disponibles), la délégation (trouver les limites des ressources), l’isolation (se retirer d’un contexte défavorable), l’adaptation (ajuster les préférences aux options avec souplesse), la négociation (trouver de nouvelles options), la soumission (renoncer, abandonner des préférences), l’opposition (supprimer les contraintes).
Globalement, deux grands types de coping cités par différents auteurs ressortent : un coping centré sur le problème ou la résolution du problème et un coping centré sur les émotions ou la régulation des émotions (Koleck & al., 2003 ; Lazarus, 1993a, 1993b ; Montel & Bungener, 2010 ; Skinner & al., 2003). Les processus d’adaptation peuvent être centrés sur le problème (résoudre ou éviter) ou centrés sur l’émotion (modifier la manière de comprendre ou interpréter). Il existe une distinction entre un coping qui vise à gérer ou modifier le problème qui cause la détresse et le coping qui vise à réguler la réponse émotionnelle à ce problème (Lazarus & Folkman, 1984). Lorsque les processus sont centrés sur le problème, la personne déploie des efforts comportementaux actifs pour agir et modifier la situation et aussi l’état de vigilance pour faire face. La personne modifie la relation avec l’environnement de manière positive et cela prédomine quand agir est possible (Lazarus, 1993a), elle peut élaborer un plan d’action, rechercher des informations, trouver une évaluation positive à la situation… (Bruchon-Schweitzer, 2001a). Le coping centré sur les émotions va plutôt correspondre à la manière dont la personne interprète la situation. Le déni et la distance sont des techniques puissantes pour contrôler le stress et cela prédomine quand agir n’est pas possible (Lazarus, 1993a). La personne peut éviter le problème par exemple en dormant plus que nécessaire ou en n’y pensant pas, elle peut chercher à se distraire ou à dramatiser la situation et développer des émotions négatives telles que l’anxiété ou la colère (Bruchon-Schweitzer, 2001a). Dans les deux cas, ce qui importe pour faire baisser le stress c’est l’évaluation que fera la personne de la situation rencontrée (Lazarus, 1993a). Il est à noter que selon Folkman et Lazarus (1988b), le coping centré sur le problème peut parfois être utilisé pour réguler les émotions (réduire l’anxiété en s’attaquant à la tâche qui cause cette anxiété) et le coping centré sur les émotions peut avoir une fonction centrée sur le problème, par exemple prendre un tranquillisant pour réduire une anxiété qui perturbe un travail lié à la tâche, cela va dépendre du contexte. Dans le modèle transactionnel, ce qui dans un premier temps est une conséquence de la situation peut devenir une cause inerrante à la personne ou à l’environnement dans un deuxième temps et inversement, c’est un processus de changement (Lazarus & Folkman, 1984).
Le stress psychologique définit une relation défavorable entre la personne et son environnement. Comme indiqué par Lazarus (1993a), la personne va évaluer si elle peut agir ou pas sur la situation. Si la personne peut agir alors elle va utiliser plus largement des stratégies d’adaptation centrées sur le problème. Dans le cas contraire, les stratégies seront plus largement centrées sur les émotions. Une évaluation primaire de la situation considère la menace. S’il s’avère que la situation est menaçante alors la personne effectue une évaluation secondaire qui correspond à l’évaluation de ses ressources pour faire face à la situation. La mise en place de stratégies de coping va avoir des effets immédiats (changements physiologiques, affectifs, amélioration ou dégradation des performances) et des effets à plus long termes (bien-être, mal-être, maladie). Le feedback va permettre un ajustement des stratégies et une réévaluation, si la stratégie fonctionne alors les émotions positives engendrées seront prédominantes et si la stratégie ne convient pas alors les émotions négatives vont prédominer (Folkman & Moskowitz, 2004). Or les émotions positives servent de marqueur d’épanouissement ou d’un meilleur bien-être (Fredrickson, 2001). Les émotions font partie intégrante de toutes les phases du processus de coping, de vigilance, de détection et d’évaluation de la menace (Skinner & Zimmer- Gembeck, 2007), elles sont une sorte de radar, de système rapide de réponse, d’outils grâce auxquels il est possible d’évaluer l’expérience et de se préparer à agir sur les situations (Cole & al., 2004). La régulation de émotions et le coping deviennent pratiquement synonymes dans le cas du coping centré sur les émotions (Rossman, 1992).
« Le coping peut moduler l’émotion de différentes façons. » (Paulhan & Bourgeois, 1995, p. 50). Le stress peut être modulé en utilisant des stratégies comme la relaxation, les activités sportives et/ou divers loisirs qui vont permettre d’évacuer le trop plein afin de se sentir mieux. Il est aussi possible d’éviter le problème source de stress par la fuite qui consiste à utiliser diverses substances plus ou moins toxiques en pensant que l’élément stressant va disparaître. Le coping vigilant, où la personne se centre sur la situation stressante, semble permettre une réduction du stress face à la situation à condition que les informations trouvées permettent de pouvoir agir, dans le cas contraire, l’état de stress pourrait augmenter. Cela peut parfois être le cas lors de la découverte de pathologies lourdes où pour lesquelles il n’y a pas de traitement des causes. Les activités apparentées au déni telles que se distraire pour oublier, exagérer les aspects positifs, utiliser l’humour, etc., consistent « à altérer la signification subjective de l’évènement » (Paulhan & Bourgeois, 1995, p. 51). Ces comportements suscitent une vision déformée de la réalité qui fait que l’on minimise les désagréments et/ou, à l’inverse, on maximise les avantages que l’on va trouver face à cette situation stressante. Pour Paulhan et Bourgeois (1995, p. 51),
Ces stratégies, souvent génératrices d’émotions positives se sont révélées efficaces pour abaisser la tension émotionnelle dans le cas d’expériences stressantes de courte durée et surtout quand le coping centré sur le problème n’est pas possible (la perte d’un proche, une maladie grave, par exemple).
Cole et al. (2004) supposent que les émotions sont des processus biologiquement dotés permettant des évaluations très rapides et une préparation à agir aussi rapide afin de maintenir des conditions favorables pour faire face à des conditions défavorables, ainsi les émotions sont en partie définies comme un moyen d’évaluer une expérience. Cependant les émotions n’engendrent pas toujours des conditions favorables pour faire face à une situation défavorable. Parfois les émotions peuvent entrainer une chaine de réactions négatives qui viennent plomber l’accès aux conditions favorables. Ces émotions peuvent cependant créer un signal d’alerte qui indique à la personne qu’elle doit réagir ou réagir différemment pour ne pas sombrer et dans ce cas les conditions peuvent devenir favorables.

Le coping comme ressource préventive ou proactive.

Les stratégies de coping présentées ci-dessus sont des stratégies d’adaptation principalement utilisées pour permettre de pallier le stress perçu en fonction de l’appréciation de la situation (environnement/ressources personnelles). Ce concept de coping s’est élargi dans le contexte du mouvement de psychologie positive en incluant des stratégies permettant l’atteinte d’objectifs et de développement personnel (Schwarzer & Knoll, 2003). Dans une perspective classique du coping, l’accent est mis sur des évènements appartenant au passé ou au présent alors que la théorie du coping proactif permet une approche où s’intègre des évènements à venir (Hartmann, 2008).
Schwarzer et Knoll (2003) distinguent quatre types de coping, avec le coping proactif comme modèle (schématisés dans la Figure 3) : « reactive coping », « anticipatory coping », « preventive coping » et « proactive coping »19 situés par rapport à un axe horizontal allant de « pertes et préjudices passés » à « menaces et défis futurs » et un axe vertical allant de « certain » à « incertain ».

Les stratégies de coping et la santé

D’une manière générale, les chercheurs travaillant sur le concept de coping soutiennent que la façon dont les personnes traitent le stress peut réduire ou amplifier les effets, sur la santé physique ou mentale, de situations indésirables et ce aussi bien sur le court-terme que sur le long terme (Skinner & al., 2003). Lors d’une maladie physique, le patient peut être confronté à différentes sources de stress : douleurs, hospitalisations, invalidité… ; en même temps il doit gérer son quotidien : famille, travail, finances, relations sociales… Ces différentes situations nécessitent la mise en place de stratégies de coping différentes et ne peuvent pas dépendre uniquement du profil de la personne (Paulhan, 1992).
Selon Bruchon-Schweitzer (2001a, p. 07), le modèle de Lazarus et Folkman « valorise le rôle des processus transactionnels et minimise ou occulte celui des autres déterminants de la santé (situationnels et dispositionnels) ». Il ne tient pas suffisamment compte des facteurs environnementaux comme la culture ou le niveau socio-économique de la personne ni de son histoire personnelle, ses croyances, sa personnalité…
Les stratégies de coping semblent nombreuses et diffèrent en fonction des situations. Bruchon-Schweitzer (2001a) ajoute la recherche de soutien social au coping défini par Lazarus et Folkman et propose un regroupement des stratégies de coping selon trois axes : le coping centré sur le problème, le coping centré sur les émotions et le coping centré sur la recherche de soutien social qui correspond « aux efforts du sujet pour obtenir la sympathie et l’aide d’autrui » (p. 26). Dans ce cas, le soutien social ne correspond pas au réseau relationnel de la personne mais à une action délibérée pour obtenir de l’aide (Bruchon-Schweitzer, 2001a). Cependant pour Bacqué (2002) la recherche de soutien social correspond à un coping centré sur la résolution de problème de même que la recherche d’informations et l’évitement et Lazarus et Folkman (1984) évoquent le soutien social comme une ressource que la personne peut utiliser pour une meilleure adaptation à la situation mais indiquent que ce soutien se superpose en partie à un soutien émotionnel, tangible et informationnel. Cela pourrait dépendre de ce que les auteurs entendent par soutien social.
Pour Bruchon-Schweitzer (2001a, p. 29) « le stress perçu et un coping centré sur les émotions sont généralement dysfonctionnels ». Le contrôle perçu, le coping centré sur le problème et la recherche de soutien social interviennent plutôt favorablement dans la santé physique alors que la perception d’un manque de contrôle agit de manière défavorable sur la santé en augmentant de surcroit le risque de voir se développer des pathologies graves. Cependant cette généralisation ne convient pas dans toutes les situations et lorsque la maladie est lourde ou incurable, le coping centré sur le problème peut s’avérer néfaste dans un premier temps quand il s’agit de rechercher des informations. Le coping centré sur les émotions peut permettre une protection à court terme quand la situation n’est pas contrôlable (Bacqué, 2002 ; Bruchon-Schweitzer, 2001a), par exemple en fin de vie, les stratégies de coping sont principalement centrées sur les émotions et il ne reste plus beaucoup de possibilités à un malade pour agir sur la souffrance si ce n’est d’adapter les derniers soins au mieux en lui permettant de vivre pleinement ses derniers moments avec ses proches (Brandt & al., 2021). Généralement, plus une situation aura un caractère incontrôlable et plus sa perception sera stressante. La Figure 4 résume le processus qui détermine les stratégies de coping d’après Bruchon-Schweitzer (2001a, p. 9).
Dans ce modèle, le type A renvoie à des personnes susceptibles d’être associées aux risques de cardiopathie et regroupe des caractéristiques telles que : l’impatience, l’hostilité, la compétitivité… ; et le type C correspondrait à des personnes susceptibles de développer un cancer. Une approche transactionnelle, souvent étudiée en psychologie de la santé comme rôle médiateur ayant une influence sur la maladie, permet de compléter une approche basée sur des facteurs situationnels qui ont finalement un plus faible impact sur la santé physique (Koleck & al., 2003). Chaque individu réagissant différemment face à une situation identique.

Satisfaction de vie, fatigue, douleur et catastrophisme

Qualité de vie/satisfaction de vie / bien-être

L’Organisation Mondiale de la Santé (World Health Organization (WHO), 1996, p. 384) définit la qualité de vie comme « la façon dont les individus perçoivent leur existence compte tenu de la culture et du système de valeurs dans lequel ils vivent et en fonction de leurs buts, de leurs attentes, de leurs normes et de leurs préoccupations ». Les domaines retenus par l’OMS sont les états physique et psychologique, le niveau de dépendance, les rapports sociaux, l’environnement et la spiritualité, les croyances personnelles et la religion.
L’Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques (INSEE) évalue la qualité de vie sous deux angles :
 L’évaluation de la situation d’une personne à partir de critères objectifs tels que les conditions de vie matérielles, la santé, l’insécurité économique et physique, l’environnement, les liens sociaux, la confiance dans la société ;
 Le bien être ressenti (subjectif) ou quelle satisfaction les personnes retirent de leur vie (Amiel, 2013).
Launois (1996) indique que le concept de qualité de vie pourrait englober quasiment tout ce qui concerne les facteurs environnementaux, les revenus, les habitudes et les styles de vie, et pour Lourel (2007) le concept de qualité de vie prend en compte de nombreuses dimensions : le bonheur, le bien-être subjectif, le bien-être matériel, la satisfaction de vie. Selon Ferrans et Powers (2007), il n’y a pas de consensus pour la mesure de la qualité de vie, les aspects pouvant être mesurés sont multiples, cependant il semble se développer un consensus autour de la mesure de la satisfaction de vie. L’INSEE (2020) 21 mesure la satisfaction de vie en s’intéressant à six domaines de la vie des personnes : « la vie menée actuellement, le logement, le travail, les loisirs, les relations familiales et les relations amicales », ces critères englobent des critères objectifs. Mesurer la qualité de vie nécessite donc de choisir un angle ou un axe d’approche le plus près possible de ce que l’on cherche à démontrer.
Dans cette étude, la qualité de vie ou la satisfaction de vie s’inscrit dans un axe plus restreint et ne prend pas en compte des critères socio-économiques comme indiqués dans les rapports de l’INSEE. Ce que l’on cherche à démontrer ici ce sont les éventuels liens entre le niveau de spiritualité implicite ou explicite et la satisfaction de vie des patients. La satisfaction de vie s’inscrit dans l’une des trois composante du bien-être subjectif faisant référence à un processus de jugement ou d’évaluation cognitif, les deux autres composantes étant l’affect positif et l’affect négatif (Diener & al., 1985). Shankland et Martin-Krumm (2012) ont évalué des échelles utilisées en psychologie positive et considèrent que l’échelle de Satisfaction de Vie traduite et validée par Blais et al. (Satisfaction With Life Scale, 1989) est un outil fiable et facile à utiliser dans la recherche. Ils font simplement remarquer que cet outil ne tient pas compte des composantes affectives du bien-être subjectif et ne mesure que la composante cognitive. L’échelle étant très courte et facile à utiliser, c’est celle qui sera utilisée pour la première étude de cette recherche. Pour pallier les lacunes des composantes affectives de l’échelle de Diener, la deuxième étude utilise une échelle de mesure du bien-être subjectif de Antoine et al. (2007) qui s’inscrit dans le cadre de recherches en psychologie positive. C’est un outil qui mesure la fréquence des affects positifs et négatifs au travers des émotions positives et des émotions négatives. Selon Fredrickson (2001) il émerge un consensus pour dire que les émotions ne sont qu’un sous-ensemble d’une classe plus large de phénomènes affectifs. La psychologie positive est définie comme l’étude scientifique des processus et conditions contribuant à l’épanouissement optimal des personnes et au fonctionnement optimal des groupes et des organisations (Gable & Haidt, 2005).

Fatigue, douleur et catastrophisme

La fatigue.

Dans plusieurs études longitudinales sur les personnes atteintes de fibromyalgie, il est noté une fatigue persistante pour 75 % des personnes, cependant les échelles utilisées n’ont pas été validées pour la fibromyalgie (Inserm, 2020). La fatigue, aussi appelée asthénie « devient anormale lorsqu’elle perdure malgré le sommeil et le repos. Elle peut être passagère et réactionnelle […], ou durable, en lien avec une maladie chronique ou une souffrance psychique. » (https://www.ameli.fr, avril 2022)22.
La plupart des études s’intéressant à la fatigue décrivent des situations de syndrome de fatigue chronique mais ne définissent pas la fatigue liée à une pathologie spécifique. Le Vidal en ligne (2022)23 donne la définition suivante « En médecine, on distingue la fatigue normale, dont on connait la cause et qui disparait avec le repos, de la fatigue pathologique qui est un symptôme ou une maladie à part entière. » La fatigue peut être ressentie soit parce que le système nerveux central ne veut pas ou ne peut pas intervenir alors que les muscles ont la capacité de réagir ou soit parce que les muscles sont incapables de réagir, de fonctionner après avoir été sollicités pour des exercices (Macintosh & Rassier, 2002).
Dans une étude de 2003, Kochman et al. (2003) indiquent qu’il existe entre la fibromyalgie et le syndrome de fatigue chronique plus de point de convergence que de divergences, ces deux pathologies recensent douleurs, asthénie, troubles cognitifs, troubles du sommeil. Le syndrome de fatigue chronique24 (SFC) se caractérise par un état de fatigue invalidant et persistant qui dure depuis au moins six mois et qui s’accompagne de douleurs, de troubles du sommeil et d’une déficience cognitive (Afari & Buchwald, 2003). Cependant, même s’il existe beaucoup de ressemblances entre la fibromyalgie et le SFC, ce dernier est une maladie à part entière, aussi il ne semble pas nécessaire de s’attarder ici sur ce syndrome.
La fatigue ressentie par les malades atteints de fibromyalgie pourrait alors correspondre à un symptôme découlant de la situation engendrée par les autres symptômes à moins qu’elle ne soit un symptôme à part entière ? La réponse n’a pas été trouvée dans les lectures réalisées pour cette étude cependant il est apparu que cet état de fatigue pouvait devenir très handicapant.

La douleur

La douleur est un état récurent chez les personnes atteintes de fibromyalgie, on  peut se demander si la spiritualité et/ou l’utilisation de stratégies de coping spécifiques peuvent avoir une influence sur sa perception. La douleur peut être expliquée par des mécanismes physiques qui font intervenir les noyaux du thalamus ventro-postéro-latéral, les sites de projection bulbaires et mésencéphaliques, l’hypothalamus et le complexe amygdalien, sa perception se trouve modulée par des facteurs externes faisant partie de l’environnement du patient tels l’état affectif, le contexte socioculturel, la situation géographique, l’état psychologique… (Calvino & Grilo, 2004). On retrouve ici les facteurs environnementaux cités plus haut par Bruchon-Schweitzer (2001a). Les personnes qui vont faire preuve d’une certaine acceptation de la douleur utilisent moins les stratégies d’évitement, sont moins anxieuses et moins dépressives (McCracken, 1998). Keefe et al. (1997) évoquent le sentiment de contrôle et d’auto-efficacité comme semblant être en relation avec une meilleure tolérance à la douleur chez les personnes souffrant d’arthrite, ainsi que l’existence de plus en plus d’études démontrant qu’il est possible d’évaluer de manière fiable si les stratégies utilisées sont prédictives de la douleur chez les personnes souffrant de douleurs persistantes. Aussi, dans l’approche transactionnelle du coping, la personne évalue bien ses capacités à faire face à la situation en fonction de son environnement et de ses possibilités de contrôle de la situation. Si l’expérience de la douleur est bien réelle, sa perception reste subjective et semble liée à la personnalité du patient, à ses expériences passées et à son environnement. Dans le cadre théorique explicité ci-dessus, plusieurs facteurs peuvent intervenir pour moduler la douleur et/ou les conséquences de symptômes d’une maladie telle que la fibromyalgie sur la qualité de vie des personnes. Davidson (dans Davidson & Begley, 2012/2018), qui a étudié grâce à l’IRM, ce qu’il se passe dans le cerveau pendant différents types de méditation, indique comment la méditation vipassana25 permet de ressentir la douleur autrement ; la douleur est un concept qui peut s’expliquer par un ensemble de sensations (picotements, brûlures, pressions), et en se concentrant sur ces sensations on peut modifier la perception globale de la douleur et la faire disparaitre pour ne garder qu’une sensation qui devient alors beaucoup plus acceptable, ce qui ne se produit pas sans un certain apprentissage pas toujours facile à mettre en œuvre surtout quand la douleur semble insupportable. D’autres facteurs peuvent cependant venir accentuer la sensation de douleur.

Le catastrophisme

Le catastrophisme semble être une caractéristique souvent rencontrée chez les personnes présentant des douleurs chroniques (Wrobel, 2013). Le catastrophisme en lien avec la santé peut être défini chez une personne comme une propension à empirer ce qui lui arrive et à n’envisager que le côté négatif. Certes, en ce qui concerne les douleurs et d’autant plus si elles sont fortes et chroniques, il semble difficile voire impossible de les envisager sous un angle plus positif. Cependant les personnes ne sont pas toutes égales devant le ressenti douloureux et plusieurs facteurs peuvent être pris en compte pour travailler à une réduction du ressenti douloureux surtout quand les traitements se révèlent être insuffisants et/ou trop lourds à supporter. Plusieurs études publiées par Sullivan et différents collaborateurs ont mis en évidence des liens entre le niveau de catastrophisme et la douleur (Sullivan & al., 1998 ; Sullivan, Rodgers & al., 2001 ; Sullivan, Thorn & al., 2001). Le catastrophisme chez les personnes souffrant de douleurs peut entrainer un cercle vicieux en instaurant la peur de la douleur, la peur de déclencher une douleur et de provoquer des réactions pour éviter ces douleurs qui peuvent à leur tour être responsables de l’instant douloureux (Vlaeyen & Crombez, 2009, p. 512) (Figure 5).
Une meilleure considération du catastrophisme permettrait une meilleure prise en charge des personnes (Sullivan, 2014). S’intéresser au catastrophisme en partant de la spiritualité pourrait être une piste supplémentaire pour aider les personnes à améliorer leur état. La qualité relationnelle entre le médecin et le malade peut avoir un impact positif sur la pensée catastrophique (Wrobel, 2013) et un impact tout court sur la maladie grâce aux effets bénéfique de l’empathie dans la relation de soin (Rogers, 1975).
Baetz et Bowen (2008) indiquent dans leur étude que les personnes religieuses semblent avoir de meilleurs résultats sur le niveau de douleur chronique et de fatigue, cependant ces résultats ne déterminent pas si cela correspond à moins de douleur en général ou à une meilleure gestion de la douleur. Ils indiquent que s’interroger sur les croyances religieuse et spirituelles des patients peut permettre l’exploration de formes positives ou négatives possibles de coping et/ou de croyances qui autrement n’émergeraient pas. Il est ensuite possible de travailler sur ces stratégies et croyances en les renforçant quand elles sont positives et en les diminuant quand elles sont négatives.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : LA FIBROMYALGIE
I. Le tableau clinique
II. Les difficultés du diagnostic
III. Les divergences
IV. Les recherches récentes
DEUXIEME PARTIE : LE CADRE THEORIQUE
I. La spiritualité
1.1. Définitions
1.2. La spiritualité, la religion et la laïcité
1.3. Spiritualité religieuse, areligieuse, explicite et implicite
1.4. Les pratiques spirituelles et la santé
II. Le coping
2.1. Le concept de coping et différentes approches
2.1.1. Le coping comme ressource adaptative
2.1.2. Le coping comme ressource préventive ou proactive
2.2. Les stratégies de coping et la santé
III. Satisfaction de vie, fatigue, douleur et catastrophisme
3.1. Qualité de vie/satisfaction de vie / bien-être
3.2. Fatigue, douleur et catastrophisme
3.2.1. La fatigue
3.2.2. La douleur
3.2.3. Le catastrophisme
IV. La problématique générale
TROISIEME PARTIE : CONTRIBUTIONS EMPIRIQUES
PREMIERE ETUDE : SPIRITUALITE, COPING ET SATISFACTION DE VIE
I. Méthode
1.1. La population
1.2. Hypothèses et variables
1.3. Le matériel et la procédure
II. Les résultats
2.1. Etude quantitative
2.1.1. Les corrélations
2.1.2. Les régressions
2.1.3. Les calculs de médiation
2.1.4. Effet de la spiritualité sur la satisfaction de vie
2.1. Etude qualitative
III. Discussion
3.1. Interprétation des résultats chiffrés
3.2. Interprétation du recueil des données
IV. Les limites de l’étude
V. Conclusion de la première étude
DEUXIEME ETUDE : SPIRITUALITE, FATIGUE, COPING ET BIEN-ETRE SUBJECTIF
I. Méthode
1.1. La population
1.2. Hypothèses et variables
1.3. Le matériel et la procédure
II. Les résultats
2.1. Etude quantitative
2.1.1. Les corrélations
2.1.2. Les régressions
2.1.3. Les calculs de médiation
2.1.4. Les effets de la spiritualité implicite sur la fatigue
2.1. Etude qualitative
III. Discussion
TROISIEME ETUDE : SPIRITUALITE, DOULEUR, COPING ET CATASTROPHISME 
I. Méthode
1.1. La population
1.2. Hypothèses et ves variables
1.3. Le matériel et la procédure
II. Les résultats
2.1. Etude quantitative
2.1.1. Les corrélations
2.1.2. Les régressions
2.1.3. Les calculs de médiation
2.1.4. Les effets entre la spiritualité implicite et la douleur
2.2. Etude qualitative
III. Discussion troisième étude
LIMITES GENERALES DE L’ETUDE
DISCUSSION GENERALE ET CONCLUSION
LES REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES :
TABLE DES FIGURES
TABLE DES TABLEAUX
ANNEXES
ANNEXE A : LETTRE INFORMATIVE D’ACCOMPAGNEMENT
ANNEXE B : QUESTIONNAIRE EN LIGNE SPIRITUALITE, COPING ET SATISFACTION DE VIE
ANNEXE C : DIAGRAMME CONCEPTUEL DE HAYES
FIBROMYALGIE, SPIRITUALITE ET STRATEGIES DE COPING 9
ANNEXE D : EXTRAIT CORPUS DE TEXTE PREMIERE ETUDE (SATISFACTION DE VIE)
ANNEXE E : MAIL EXPLICATIF POUR L’ASSOCIATION
ANNEXE F : DOCUMENT INFORMATIF ACCOMPAGNANT LES QUESTIONNAIRES DEUXIEME ETUDE
ANNEXE G : QUESTIONNAIRE SPIRITUALITE, COPING, BIEN-ETRE ET FATIGUE XVI
ANNEXE H : EXTRAIT CORPUS DE TEXTE DEUXIEME ETUDE (BIEN-ETRE SUBJECTIF ET FATIGUE)
ANNEXE I : QUESTIONNAIRE SPIRITUALITE, COPING, DOULEUR ET CATASTROPHISME
ANNEXE J : CORPUS DE TEXTE TROISIEME ETUDE (DOULEUR ET CATASTROPHISME)

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