Les ions de terres rares, aussi appelés lanthanides, jouent un rôle très important dans une grande partie de la technologie optique moderne comme étant les constituants actifs de matériaux. Il y a un nombre incroyable d’applications pour les matériaux activées aux ions terres rares et une grande partie de la technologie optique de pointe d’aujourd’hui et les innovations futures comptent sur leurs propriétés uniques. L’une des applications les plus connue et réputée est le laser YAG : Nd3+ . Les matériaux de type MF2, où M est élément alcalino-terreux (Ba, Ca, Sr), Pb ou Cd, dopés aux ions de terres rares ont permis le développement de l’efficacité des sources laser pour les régions proches infrarouges et ultraviolettes du spectre. Ces lasers sont utilisés dans de nombreuses applications, y compris les instruments chirurgicaux, les équipements industriels, l’interférométrie de précision et l’holographie, suivie de leur utilisation dans les techniques Lidar où on explore la composition atmosphérique et les composants des gaz polluants, de l’imagerie ultra rapide, et la recherche fondamentale. Les ions de terres rares jouent également un rôle crucial dans les matériaux luminescents économes en énergie tels que des luminophores pour lampes fluorescentes, les tubes à rayons cathodiques (CRT) et les écrans plasma ainsi que des agents sensibilisateurs.
Spectroscopie des ions de terres rares
La série des lanthanides (ou terres rares) comprend 15 éléments du tableau périodique commençant du numéro atomique 57 jusqu’à 71. Ces éléments constituent un groupe qui occupant la sixième période du tableau de Mendeleïev ont une spécificité liée à l’existence d’une couche électronique 4f incomplète qui les caractérisent. Ceci leur permet d’avoir un comportement particulier [1], lorsqu’ils sont insérés dans une matrice solide comme dopants. Généralement, on utilise le symbole (TR3+) pour désigner les ions de terres rares. Ces éléments ne sont pas rares et le lanthane (Z=57), le cérium (Z=58) et le néodyme (Z=60) sont, par exemple, plus abondants que le plomb dans l’écorce terrestre. Le thulium (Z=69) qui est le plus rare des lanthanides, existe en plus grande quantité que le mercure ou le sélénium. Cette appellation vient du fait qu’ils se trouvent à l’état naturel sous forme très dispersée. Il existe des endroits où les terres rares sont plus abondantes qu’ailleurs, une importante réserve se trouve en Inde, au Brésil, en Scandinavie, en Australie, en Chine, dans l’ex-Union Soviétique ainsi qu’aux Etats-Unis.
Les ions lanthanides trivalents peuvent exister dans une matrice cristalline sous deux formes :
● Soit comme un constituant de la matrice non luminescente lorsque l’ion TR3+ présente une couche 4fn vide (La3+), saturée (Lu3+) ou à moitié remplie (Gd3+). Les configurations 4f0 (La3+) et 4f14 (Lu3+) sont particulièrement stables et ne permettent que des transitions interconfigurationnelle 4f → 5d d’énergie supérieure à 5 eV. Par ailleurs, le premier niveau excité 6P 7/2 de l’ion Gd3+ (configuration 4f7 ) est situé à environ 6,2 eV du fondamental et n’absorbe que dans le domaine ultraviolet des radiations de longueur d’onde inférieure à 308 nm.
● Soit comme un centre optiquement actif si la configuration 4fn est différente (n≠ 0, 7, 14). Dans ce cas, les ions trivalents sont très fortement fluorescents lorsqu’on les soumet à une excitation ultraviolette. Le retour à l’état fondamental étant accompagné de l’émission d’un rayonnement quasi-monochromatique [2].
Configuration électronique des ions de terres rares
L’ionisation des atomes TR3+ produit généralement des ions trivalents, certains ions existent au degré réduit (+2) comme l’europium, et au degré (+4) comme le cérium, ce sont les électrons de la couche 6s2 et ceux de la couche 5d ou 4f qui sont perdus lors de l’ionisation. La configuration électronique des ions trivalents peut s’écrire sur la base de la configuration électronique du Xénon [Xe] :
]Xe[ 5s2 5p6 4f n
Propriétés optiques
Les propriétés optiques des terres rares sont liées à leurs structures électroniques. Les électrons 4f optiquement actifs sont écrantés par les couches externes 5s et 5p ce qui réduit considérablement l’action de l’environnement cristallin. Leurs spectres optiques sont dus aux transitions entre les niveaux électroniques des différents multiplets de la configuration fondamentale 4fn , les longueurs d’onde des photons absorbés ou émis vont de l’ultraviolet jusqu’à l’infrarouge. La position de ces niveaux d’énergie résulte de la combinaison de différentes interactions : la répulsion coulombienne, le couplage spin-orbite et l’interaction avec le champ cristallin. Les transitions 4f – 4f se produisent alors, sans effets perturbateurs, par conséquent, l’absorption et émissions sont presque monochromatiques et le spectre d’énergie de l’ion de terre rare est identique à celui de l’ion libre. Les rayons atomiques sont très proches pour tous les lanthanides et présentent la « contraction » déjà commentée pour les ions trivalents quand Z augmente.
Cette famille de composés est actuellement utilisée pour de nombreuses applications, notamment en catalyse, métallurgie, magnétisme et naturellement en optique. Dans cette dernière application, les terres rares sont utilisées pour leurs propriétés électroniques permettant l’obtention d’émissions intenses allant de l’ultra-violet (UV) à l’infrarouge (IR) moyen. Parmi ces émissions, deux cas doivent cependant être distingués:
❖ Dans le cas d’une transition intraconfigurationalles entre niveaux 4f, les raies observées sont fines et leurs positions dépendent peu de l’environnement. Cette propriété provient de la très faible interaction entre l’environnement et les électrons 4f qui se traduit par une très faible influence du champ cristallin par rapport à la répulsion coulombienne et au couplage spin-orbite (voir suite).
❖ Dans le cas d’une transition inter- configurationnelle 4f-5d, les bandes d’absorption et d’émission sont beaucoup plus larges et présentent une variation importante de leurs positions en fonction de la matrice hôte. Cette différence provient du fait que les orbitales 5d sont très sensibles aux variations d’environnement.
En optique, ces deux propriétés différentes sont mises à profit dans de nombreuses applications. Nous pouvons citer par exemple [4]:
● Les lasers basés sur les monocristaux ou les fibres optiques ;
● Les phosphores ;
● Les cristaux scintillateurs ;
● Les dispositifs magnéto-optiques ;
● Les matériaux photosensibles (photochromisme).
Dieke et ses collaborateurs ont déterminé un grand nombre de niveaux d’énergie de la configuration 4fn pour les ions de terres rares (TR+3) dans la matrice Lacl3 [5]. Les positions des niveaux d’énergie de la configuration 4fn varie peu d’un matériau à un autre. Le diagramme de Dieke peut servir comme un outil de base pour la spectroscopie des ions de terres rares.
|
Table des matières
INTRODUCTION
Chapitre I: Spectroscopie de base des ions de terres rares
I. 1 Spectroscopie des ions terres rares
I. 1.1 Introduction
I. 1.2 Configuration électronique des ions terres rares
I. 1.3 Propriétés optiques
I. 2 Hamiltonien des ions terres rares
I. 3 Théorie du champ cristallin
I. 3.1 Levée de dégénérescence et sous niveaux Stark
I. 4 Caractéristiques et application de l’ion terbium
I. 4.1 Niveaux d’énergie électronique de l’ion Tb3+
I. 4.2 Choix de l’ion dopant
I. 5 Niveaux d’énergie électronique de l’ion Yb3+
I. 6 Interaction du rayonnement avec les ions terres rares
I. 6.1 Absorption
I. 6.2 Transitions radiatives
1. 6.2.1 Emission stimulée
I. 6.2.2 Emission spontanée
I. 6.3 Transitions non radiatives
I. 6.4 Transferts d’énergie
I. 6.4.1 Transfert d’énergie non radiatif
I. 6.4.2 Transfert d’énergie par Up-conversion (APTE)
I. 6.4.3 Transfert d’énergie par down-conversion
I. 6.4.4 Effet coopératif
I. 7 Règles de sélection
I. 7.1 Règles de sélection et décomposition en sous niveaux Stark
Références
Chapitre II : Dispositifs expérimentaux et propriétés des matrices étudiées
II. 1 Choix de la matrice étudiée
II. 2 Elaboration des monocristaux de CdF2
II. 3 Structure de la matrice CdF2
II. 4 Caractéristiques physiques et structurelles des matrices
II. 4 Activation du CdF2 par les ions lanthanides
II. 5 Compensation de charge et sites interstitiels
II. 6 Montages et appareillages de caractérisation
II. 6.1 Difractions par rayon X (DRX)
II. 6.1.1 principe loi de Bragg
II. 6.1.2 Dispositifs expérimentales
II. 2 Spectroscopie d’absorption à température ambiante
II. 6.3 La photoluminescence à température ambiante
II. 6.3.1 Fluorescence
II. 6.3.3 Spectromètre monochromateur
II. 6.3.4 Enregistrement des spectres d’excitation et fluorescence
II. 6.3.5 Enregistrement des déclins de fluorescence
Références
Chapitre III : Présentation du formalisme de Judd-Ofelt
Introduction
ІІІ. Formalisme de Judd-Ofelt
III. 1 Approximation du Judd-Ofelt
III. 1.2.1 Forces de transition dipolaires magnétiques
III. 1.2.2 Forces de transition dipolaires électriques
III.4 Grandeurs physique déduites de l’analyse de Judd-ofelt
III. 4.1 Paramètres d’intensité de Judd-Ofelt
III. 4.2 Probabilités de transitions radiatives
III.5 Eléments de matrice réduits:
III. 5.1 Eléments de matrice réduits de l’opérateur U (t)
III. 5.2 Eléments de matrice réduits de l’opérateur
III. 5.3 Cas des doublets
III.6 Calcul des sections efficaces d’émission
III. 6.1 Méthode de réciprocité
III. 6.2 Méthode de Füchtbauer-Ladenburg
Références
CONCLUSION