Spectropolarimétrie et connexion vent-photosphère

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Observation de P Cygni par la Haute Résolution Angulaire

Ce chapitre constitue une illustration du potentiel d’une approche globale de l’environnement circumstellaire par une étude multi-longueur d’onde et multi-résolution spatiale dans le cas de l’étoile massive P Cygni. Je situe d’abord P Cyg dans le contexte des Variables Lumineuses Bleues (LBV) et celui plus large de l’évolution des étoiles massives. Je développe ensuite les différentes imageries utilisées jusqu’alors, en insistant sur le travail accompli au cours de cette thèse. J’en souligne les implications sur la nature et l’évolution des LBV dont P Cygni a longtemps été un prototype. J’insisterai sur les difficultés d’assembler ces informations en un tout homogène, et sur la nécessité d’une démarche cohérente des moyens d’observations. Enfin, j’évoquerai les possibilités ouvertes par de telles observations, et discuterai de l’opportunité d’un suivi temporel à grande résolution spatiale de l’environnement proche de P Cygni.

Les Variables Lumineuses Bleues (LBV) en tant que groupe

Caractéristiques des LBV

Je vais me concentrer sur l’étape méconnue des Variables Lumineuses Bleues (LBV), classe représentéetout au plus par une dizaine d’individus dans la galaxie, et les nuages de Magellan. J’appliquerais l’abréviation anglaise LBV dans le sens global, mais en gardant à l’esprit toute l’ambiguïté et l’imprécision qui s’attache à une telle dénomination.
Ce type spectral, présentant de fortes instabilités, serait une étape de transition extrêmement brève (20000 ans, Langer et al 1994), entre la sortie de la séquence principale et le stade de Wolf-Rayet (WR) mais déterminante quant aux conséquences sur l’évolution de la perte de masse de l’étoile. La désignation des « Luminous Blue Variables » provient d’une proposition de Peter Conti en 1984. Elle a succédée à de nombreuses autres, citons les dénominations « étoiles de type P Cygni » ou « Variables de Hubbles et Sandage » (Hubble, Sandage 1953).
Le fait est qu’il est aussi difficile de trouver un nom à ce tte classe que de trouver un groupe dont les caractéristiques sont suffisamment homogènes pour être le reflet d’un seul et même état évolutif ou physique. Récemment, la dénomination d’étoile de type S Dor (du nom du prototype) semble de plus en plus s’appliquer pour désigner la classe d’appartenance de P Cygni, celle des LBV dormantes ou « en veille ».
Le trait commun et fondateur de cette classe LBV est une forte activitéde type éruptive liée à l’apparition d’instabilités radiatives dans l’atmosphère de ces supergéantes chaudes et très lumineuses. Les critères de sélection d’un tel type spectral doivent être énoncés avec précision car ces étoiles cô toient, dans une même région du diagramme Herztprung-Russel, des supergéantes en évolution vers de plus basses températures qui ne manifestent pas cette activité(Humphreys & Davidson, 1994). En période de quiescence, ces critères sont difficiles
à ce rner sans en référer à l’historique de l’étoile : une magnitude absolue Mv entre -8 et –10, une température effective Teff dans l’intervalle 10000-35000 K (types A-O), un enrichissement chimique, un spectre lié au type Ofpe/WN9, et un vent relativement lent (V 100 200km / s ) et dense ( Ne 1011 cm1 ), mis en évidence par les profils de type P Cygni (Wolf, 1992). Le taux de perte de masse est dans tous les cas particulièrement élevé (10-4 à 10-5M /an)~.
On distingue deux types d’éruption, sans que l’on puisse affirmer pour autant si cela reflète deux populations distinctes :
– Les éruptions accompagnées d’une variation photométrique (en V) de 1-2.5 sur une échelle de l’année, à magnitude bolométrique quasi-constante (activité de type S Dor, ou AG Car).
– Les éruptions géantes avec des variations photométriques avérées de plus de 6 magnitudes (Car), et dont l’impact est tel que la magnitude bolométrique est affectée (c’est-à -dire la stabilitémême de l’étoile en profondeur).
Ces éruptions semblent intimement liées au franchissement d’une limite (observationnelle) dans le diagramme HR appelée limite de Humphrey-Davidson (1979). Là encore, certaines supergéantes B cô toient cette limite sans pour autant présenter les caractères d’une LBV.
La nature réelle de cette (ou ces) instabilité est encore très incertaine, et de nombreuses pistes sont explorées: la pression de radiation, des instabilités sub-photophériques (pic d’opacité, mode de vibration… ), des instabilités de cœ ur, la pression turbulente et l’effet de la rotation ou de la binarité(voir thèse de Najarro pour une revue de ces mécanismes).
Par analogie à la dénomination LBV, Lamers (1986) a introduit la classes des étoiles de « Types P Cygni » (PCT), qui dans une large mesure regroupe les membres les plus brillants de la Voie Lactée et des galaxies voisines en vue de recenser toutes les LBV potentielles ou dormantes dont les caractéristiques spectrales se rapprochent plus ou moins de P Cygni. Le trait commun de ce groupe élargi est un taux de perte de masse 3-10 fois supérieur aux supergéantes normales, un vent 2 à 10 fois plus lent et une accélération radiative très progressive2. Dans ce groupe P Cygni est l’archétype de LBV dormante, qui, comme l’a souligné Hillier en 1992, ne pourrait être considéré avec les critères de variabilité comme LBV sans la donnéehistorique de son explosion (1600 et 1655).

LBV, masse et perte de masse

Un des paramètres le moins connu des LBV est leur masse. Il existe de nombreuses manières de déterminer celle-ci, mais les résultats ne sont pas homogènes. Cette forte incertitude se répercute sur la détermination des diagrammes évolutifs rendant l’appréciation de la masse initiale et des conditions physiques internes aléatoires.
Depuis quelques années, les observations de la microvariabilité du vent radiatif des étoiles massives ont démontré la faiblesse des modèles de vents homogènes à géométrie sphérique (St Louis et al, 1993, Hamann et al, 1998, Felldmeier, 1998… ). La conséquence immédiate de la prise en compte de l’inhomogénéité intrinsèque du vent radiatif est qu’il faut réviser à la baisse tous les taux de pertes de masse déduits par des méthodes optiques par un facteur entre 2 et 3 (Moffat& Robert, 1994). Or il était largement admis que les stades évolutifs présentant le plus de perte de masse intégréepour les étoiles très massives étaient le stade de la séquence principale3et le stade Wolf-Rayet4, étant entendu que le stade supergéante rouge est soit inexistant, soit très bref pour ce type d’étoile (Maeder, Meynet, 1994, 1996, Crowther 1995, Puls 1996). Si on se réfère aux masses initiales supposées des progéniteurs O (>40 M )~ et aux masses réduites observées chez les étoiles WR ( 5-10 M ),~ l’étape LBV, très brève, semble dans ce nouveau contexte présenter des pertes de masses impressionnantes (supérieures à 15 M ),~ et ce dans un laps de temps très réduit (<20000 ans).
La masse est le paramètre clé qui semble différencier les LBV de supergéantes moins évoluées ; alors que les LBV ont déjà perdu plus de la moitié de leur masse initiale, la masse des supergéantes B serait plus grande. Toute la question est de savoir si une phase de supergéante rouge a pu précéder le stade LBV, et quelle est la masse initiale inférieure critique pour que les instabilités qui se développent inhibent l’apparition de la phase supergéante rouge. Cette limite se situe aux alentours de 30 M ~5.
Les nébuleuses autours des LBV sont massives et de forme caractéristique (bipolaire en majorité). La plupart des LBV montrent un excès dans l’infrarouge thermique, révélateur de grandes quantités de poussière autour de ces astres, et les mesures radios et optiques révèlent un milieu circumstellaire extrêmement massif (plusieurs masses solaires).
Comme le montre le tableau de la figure 4 tiré de Nota et al (1995), nombre de paramètres fondamentaux des LBV sont très mal connus. Depuis lors, des progrès notables doivent être rapportés (surtout dans l’imagerie infrarouge): Car dont la masse de gaz dans la nébuleuse est évaluéemaintenant au minimum à 3M ~et la masse du disque à environ 15M !~ (Morris et al 1999). Il en est de même pour WRA 751 (Mpoussière ~0.017 M )~ ou AG Car, dont l’évaluation de la masse de poussière a étémultipliéepar 20 ! (Voors, Waters et al, 2000).
L’imagerie donne une estimation indépendante de la masse présente dans le milieu circumstellaire. De plus, la configuration spatiale des reliquats d’éjections antérieures permet d’accéder à une information sur des étapes évolutives souvent inaccessibles à l’échelle historique. Cela est d’autant plus vrai pour les LBV car l’échelle de temps relativement
 » courte » de cette étape est telle que très peu d’astres présentant cette phase sont statistiquement observables. La nébuleuse entourant certaines WR contient de l’information sur les étapes antérieures de pertes de masse telles les éruptions LBV ou le vent de l’étoile O (Langer et al, 1994, Garcia-Segura et al, 1995a, 1995b, 1996a, 1996b, Grosdidier et al, 1998, Langer et al, 1999), mais l’interprétation des éjectats reste problématique. C’est pourquoi il est absolument nécessaire d’étudier en profondeur les mécanismes d’éjection pour les quelques LBV connues, dont l’historique P Cygni.
La résolution spatiale est déterminante pour augmenter la résolution temporelle des phénomènes observés et ainsi, contraindre plus efficacement les mécanismes à l’origine de la perte de masse. Mais seule une approche « multi-résolution » spatiale est à même de fournir un ensemble d’observables suffisamment cohérent pour contraindre efficacement les modélisations. Pour les longueurs d’onde radio, une telle multi-résolution spatiale est désormais aisée et repose sur la maturité des techniques d’imagerie par synthèse d’ouverture. Le visible/proche infrarouge dispose par ailleurs d’un fort potentiel de résolution lié à la longueur d’onde et à sa récente accessibilité à la Haute Résolution Angulaire par le biais de l’optique adaptative et de l’interférométrie à longue base.

Paramètres contraints par les modèles

Le modèle de Najarro et al (1997) du vent de P Cygni, développé à partir du code de J. Hillier (1987a) est le plus récent et le plus complet.
Les conclusions de la comparaison des modèles avec des spectres optiques et infrarouges (ISO) sont les suivantes:
– Le vent de P Cygni est très dense ( M ~ 3.6.10-5 M /an)~
– Le vent n’est pas totalement ionisé, mais recombine dans les régions extérieures (équilibre HII/HI atteint à e nviron 300 R*, soit 120 mas).
– La région de recombinaison est très sensible à toute variation du flux Lyman et Balmer, ainsi qu’à une variation du taux de perte de masse,
– L’abondance d’hélium (He/H~0.4 en nombre) indique que l’étoile est évoluée, et brûle un cœ ur d’hélium.

Activitétemporelle

P Cygni est une étoile extrêmement active. Cette activité se manifeste à toute les échelles temporelles, et la multiplicité des phénomènes observés en rend très difficile l’interprétation : suivi photométrique UBVR, variations de largeurs équivalentes et des profils des raies, polarisation …
Je vais distinguer par la suite de manière formelle plusieurs types d’activités par une approche purement phénoménologique :
– Une modification lente à l’échelle humaine et supposée non-périodique, révélatrice de l’évolution irréversible de l’étoile vers le stade WR. Elle touche les fondamentaux de l’étoile tels la température effective ou la magnitude, mais est difficile à isoler à petite échelle temporelle, car masquée par l’activitéplus rapide.
– Une activité à l’échelle de l’année (100-700 jours, Markova, 2000). Le terme activité implique récurrence du phénomène et souvent recherche d’une possible périodicité. A cette échelle, cette recherche s’avère souvent difficile faute d’un volume d’observations homogènes suffisant. Toutefois, pour P Cygni de telles mesures sont amplement disponibles et aucune périodicité claire n’apparaît pouvant être reliée à la récurrence stricte de processus éruptifs comme l’émission de coquilles ou de clumps (Lamers, 1985 ; van Gent, 1986).
– Une activité à des échelles plus courtes (~15-100 jours, Markova, 2000). Cette activité à court terme pourrait être reliée à la rotation de l’astre. Comme pour les WR, aucune raie photosphérique suffisamment pure ne permet de déterminer cette rotation cependant une grossière estimation du Ve.sini, entre 35 et 75km/s (40 km/s, Markova 1997), et le rayon de 76 R ,~implique une période de rotation maximum d’environ 50-110 jours (P[j]=50.6 R[R ]/V[km/s])~. Ce nombre est aussi compatible avec l’échelle caractéristique d’environ 28 jours qui caractérise potentiellement des pulsations non-radiales dans les supergéantes (van Gent, 1986). A ce jour, aucune périodicité n’a été détectée à cette échelle, mais une détection marginale pour une période de 40 jours (avec harmoniques) semble prometteuse (Percy, 1996).
P Cygni est une source intrinsèquement polarisée et qui montre une variation importante du taux et de la direction de polarisation (Taylor, 1991). Ces importantes variations d’une nuit à l’autre suggèrent que la polarisation est issue de régions localisées et proches de l’étoile (voir plus loin).
P Cygni fut une des premières radiosources thermales détectées (Wenker, Baars et Altenhoff, 1973). Cette radiosource s’est révélée étonnamment variable sur une échelle de temps très courte d’un mois, voire moins (Abott, 1981, van den Oord, 1985). Cette variabilité est aussi attribuée aux inhomogénéités, par l’intermédiaire des processus d’émission des radiations libre-libre très dépendants de la densité électronique.
Un fait est incontournable : P Cygni continue d’éjecter de la matière à un rythme soutenu et de manière erratique. Durant les années 80, les observateurs se sont évertués à c ontraindre cette activité qui a été modélisée par Lamers comme l’éjection récurrente de coquilles de matière. Cette modélisation présuppose une symétrie sphérique, et Lamers lui-même laissait amplement ouverte la possibilité d’une éjection localisée sur l’étoile, donnant naissance à un grumeau de matière6. L’information provient alors exclusivement de données spectroscopiques et photométriques, et n’autorise pas une telle différenciation.
La différence entre éjection localisée et/ou générale revêt une certaine importance car elle précise et contraint le mécanisme d’éjection à l’œ uvre. Signalons toutefois que la question n’en est pas forcément tranchée. A titre d’exemple, l’action d’un champ magnétique peut se manifester à grande échelle (dipô le), ou être très localisée(reconnection de lignes de forces) ; de même l’action de pulsations non-radiales, généralement à grande échelle, pourrait donner naissance à des manifestations très locales par le battement entre certaines fréquences.

Imagerie de la nébuleuse

La nébuleuse entourant P Cygni est singulièrement absente de ce tableau. La nébuleuse est très faible et semble peu massive. Faute de pouvoir retrouver les reliquats des éruptions du XVIIème siècle, la masse éjectée et le taux de perte de masse durant la phase éruptive restent très incertains.
Dès 1956, alors que des nébuleuses avaient été détectées autour « d’étoiles P Cygni », les recherches autour de P Cygni se soldaient toujours par un échec, malgré la donnée historique de l’éruption (Voir Feibelman, 1995). Beals en 1939, avec comme paramètres t=350ans, d=1200pc, et V~200km/s, prédisait une mince coquille de 12,5 secondes d’arc. Les tentatives se heurtaient à la magnitude de l’astre et à la faiblesse relative de l’émission nébulaire.
La première mise en évidence par l’imagerie de l’existence d’une nébuleuse a été apportée par le travail de Leitherer et Zickgraph (1987), mais la réalité d’une telle détection a par la suite été contestée par Wolf (1992). L’observation consistait en une longue exposition sur un CCD avec l’utilisation de filtres centrés respectivement sur H, son continu proche, la raie interdite [NII], et la comparaison avec une étoile de référence (55 Cygni). Un écart à la distribution du point source est visible dans les observation en H et [NII]6584, sur un champ d’environ 4″, et attribué par les auteurs à la présence de la nébuleuse. L’existence de la nébuleuse est confirmée en 1992 par des observations en longue fente de raies interdites telles [NII]6584 et [NiII]6667 à 9″ de l’étoile centrale (Johnson, 1992).
Une première coquille est mise en évidence par Barlow et al (1994) (H, [NII]6584, [NiII]6667) avec des mesures longues fentes et des images coronographiques obtenues aux télescopes Isaac Newton et William Hershell puis confirmée par les observations du coronographe du STScI en [NII]6584 (Nota et al, 1995) et par les mesures radios de Skinner et al (1998). Les observations optiques ont été confrontées au rapport de flux défavorable avec la source centrale. Les images ont étéprises grâce à l’utilisation d’un masque coronographique circulaire de 4.8″ pour le STScI, et de 4.3″ par Barlow; et avec des masques supplémentaires (orientés N-S et E-O) pour éliminer les artefacts de diffractions dus essentiellement aux araignées des télescopes supportant le miroir secondaire. Les mesures révèlent une coquille de diamètre moyen 11.3″ présentant un aspect très inhomogène. Dans tous les cas, le nord de la nébuleuse est plus intense, et la taille des grumeaux est d’environ 1″ à 2″ (0.022 pc, D=1.8 kpc). Les deux raies interdites montrent des vitesses radiales de 140km/s et 110 km/s respectivement, la différence étant attribué à deux sources différentes, d’une part un vent ambiant rapide et des inhomogénéités plus denses et lentes subissant un choc. L’â ge dynamique d’une telle coquille est évalué à environ 800 ans.
A plus grande échelle, une coquille de 1.6′ d’arc de diamètre est observable en H et en radio (Meaburn et al, 1996, 1999, 2000; Skinner et al, 1998). La quantité de matière est très importante et suppose une manifestation éruptive de grande ampleur il y a environ 2000 ans (très supérieure en perte de masse à l’éruption du XVIIème).
Enfin, une structure de grande ampleur 7′ (3.7 pc!) a étémise en évidence par le coronographe MOMI (O’Connor et al, 1998) puis l’association d’un tel objet avec P Cygni a été prouvée par Mearburn et al (1999, 2000) à partir d’une analyse en vitesse radiale en H. Là e ncore, la contrepartie radio est détectable dans les mesures de Baars et Wendker (1987) et Skinner (1998). L’â ge dynamique d’une telle structure, 20000 ans au moins, ne peut que se situer avant le début du stade évolutif LBV.

Mécanismes de variabilité en imagerie

Dans cette section, je vais discuter de la variabilité de P Cygni en tant que moyen pour contraindre les paramètres physiques de son environnement. Dans la première partie, je traite de la vitesse et l’accélération du vent et des structures inhomogènes. Dans la seconde, je traiterai particulièrement de la variabilité attendues dans le domaine radio du fait du temps de recombinaison. Ce dernier point est particulièrement polémique, car les variabilités observées et théoriques sont loin d’être en accord. Dans le troisième point, j’évoquerais succinctement le mécanisme d’interaction vent-vent. La constante de temps d’un tel phénomène et son échelle spatiale rendent hypothétique la détection d’une variabilité à l’échelle de plusieurs années.

Déplacement des structures

Nous allons nous intéresser particulièrement à la variabilité induite par le déplacement des structures visible car il concerne plus particulièrement l’optique. En effet, en optique, le temps caractéristique de déplacement est inférieur au temps de recombinaison.
Si on se place dans le modèle de Drew (1985), on suppose une loi d’accélération du vent de la forme: v(r) v0 (v v0 )(1 R* / r).
Les paramètres utilisés sont=4, v0 15km / s , v 300km / s .
La vitesse terminale est atteinte à 50 rayons stellaires (10 mas).
Le modèle Najarro et al (1997) utilise une loi adaptée pour converger vers la solution hydrodynamique vers la photosphère (Pauldrach et al 1994) tandis qu’elle se comporte comme une loi classique aux environs du point sonique. Les meilleurs paramètres sont v 185km / s et=4 dans le domaine optique. Une étude ultérieure dans l’infrarouge moyen
converge vers une accélération plus sensible avec=2.5 (Lamers et al, 1996). La vitesse terminale est atteinte alors à partir 10 rayons stellaires (fig. 11).
A partir de ces modèles, on obtient les temps caractéristiques de déplacement pour ce que l’on peut définir comme le « vent moyen ». Les lois de vitesse attribuées aux structures inhomogènes, notamment par la détection de composantes en absorption dans l’ultraviolet par Lamers (1983), et l’optique par van Gent et Lamers (1985) sont beaucoup plus progressives que celles déduites par modélisation.

Description de l’observation en O.A. de P Cygni

BOA (Banc d’Optique Adaptative) a étédéveloppée à l’ONERA et est décrit en détail dans la thèse de C. Dessenne (1998). Munie de 88 actuateurs, et avec une cadence correction de 150 à 1 kHz, cette Optique Adaptative (OA) réponds aux difficiles contraintes d’une correction dans le visible pour un télescope de 1.5m. L’analyse de front d’onde utilise la bande spectrale 0.45-0.6m par la méthode de Shack-Hartmann. La correction de tip/tilt (basculement du front d’onde) est découplée des ordres supérieurs. Le nombre de tavelures qu’on est en droit de s’attendre pour une observation sans optique adaptative avec un r0 de 5 cm est de l’ordre de 900 (D2/r02), ce qui en temps normal exclu toute tentative de pose longue pour une résolution supérieure à 2.5″ d’arc (r0/). Cependant, comme le nombre de degrés de liberté requis pour une bonne correction est de l’ordre de celui du nombre de speckles, la correction dans notre cas ne peut être que partielle.
La FEP est caractérisée par plusieurs paramètres dont le rapport de Strehl qui représente l’écart de la FEP observépar rapport à la FEP sans atmosphère. Il se définit comme le rapport d’intensité des maxima entre la FEP observée et théorique pour une énergie normalisée dans les images. Les rapports de Strehl accessibles avec BOA oscillent entre 10 et 30% à cette longueur d’onde, dépendant des conditions atmosphériques. La FEP se caractérise par un pic d’énergie cohérente qui se superpose à un halo d’énergie incohérente basse fréquence.
Le détecteur est la caméra à c omptage de photon CP20 avec des temps de poses de 20 ms. Une caméra à comptage de photons offre la possibilité de sommer de très courtes poses, et ainsi d’éviter les problèmes de saturation inhérents à l’observation d’étoiles brillantes. Elles permettent donc d’éviter l’utilisation de masque coronographique, la dynamique atteinte dépendant du nombre de courtes poses obtenue et de la qualitéde la FEP de référence.
Un filtre H de largeur à mi-hauteur 100 ? à étéutilisé. Une étude des transmissions relatives des dichroïques dans le système optique donne un rapport continu/raie sur le détecteur de 0.81, et ce en supposant un continu normalisé à 1 même dans la raie. En fait, compte tenu de l’absorption photosphérique, ce rapport doit être inférieur.
Le correcteur de Wynne (fig. 12 ) réduit ?la taille de la pupille vers le bleu tout en l’augmentant vers le rouge, la référence étant 6350 . Cette opération permet de créer une tache d’Airy quasi-monochromatique en sortie au prix d’une réduction du champ de vue utilisable à 1.7″ d’arc.

Qualitéde la Fonction d’Etalement de Point (FEP)

C’est le point crucial , sur lequel repose toute la crédibilité des résultats obtenus. Pour des raisons techniques, nous ne disposons que d’une observation de P Cyg et 59 Cyg, dans laquelle le filtre H est en position. Nous n’avons donc pas de moyen direct d’authentifier la qualitéde notre Fonction d’Etalement de Point (FEP).
Cela nous a conduit à développer une démarche minutieuse de manière à c ontraindre le plus possible les conditions d’observation. Cette démarche présente plusieurs étapes :

Suivi des conditions atmosphériques et de la correction de l’optique adaptative

Les paramètres de l’optique adaptative, tant en boucle ouverte (signal de l’analyseur de front d’onde), que boucle fermée (signal de correction) sont des indicateurs directs de la turbulence atmosphérique. On peut ainsi obtenir une mesure du paramètre de Fried, et des différents paramètres de l’atmosphère, échelle interne, externe, angle d’isoplanétisme…
L’étude des fichiers de paramètres nous fournis l’évolution de ces paramètres tout au long de la nuit. Ainsi, le seeing est resté remarquablement stable pendant les mesures, 2.5 seconde d’arc environ correspondant à un paramètre de Fried de 5.4 cm à ce tte longueur d’onde (seeing=/r0). Les fluctuations de seeing sont la source la plus importante de variabilité de la PSF (Conan et al, 2000, SPIE). Elles déterminent le rapport de Strelh, qui à ce s longueurs d’onde se dégrade rapidement.
Les fichiers de commande contiennent aussi tous les éléments nécessaires pour permettre la reconstruction d’une FEP très proche de la FEP réelle qui peut être utilisée comme confirmation des résultats obtenus avec l’étoile de référence. Cette technique très récente est cependant coûteuse et assez délicate à mettre en œ uvre et n’a pas été appliquée à nos données faute de temps et d’outils suffisamment achevés pour le faire. Elle a déjà été utilisée pour un analyseur de courbure (Veran 1997), mais est difficile à mettre en œ uvre pour un Shack-Hartmann.

Utilisation des fichiers de photons

L’utilisation d’une caméra à comptage de photon est sans conteste le point fort de cette observation. En plus de ses qualités tant en temps de réponse que de bruit, elle permet une analyse fine de l’évolution de la FEP au cour du temps, car elle contient l’information temporelle de la création de l’image de science et de référence.
Le premier test à été la mesure de la constance du flux sur une plage définie du détecteur (environ 1 seconde carré) . Le flux, parfaitement poissonnien, reste stable tant pour l’exposition de la référence que de P Cygni.
Le second test est révélateur de la stabilité atmosphérique sur de courtes périodes. La pose longue est d’une durée de quelques minutes, et si on la découpe en plusieurs sous-expositions, on peut détecter des évolutions parfois rapides qui montrent que la FEP ou l’image n’est pas assez lisséepour être qualifiéede « longue pose ».
On a séparé les fichiers de photons en 2 sous-fichiers, pour la référence et l’image et on a déconvolué chaque sous-partie de P Cygni par chaque sous-référence obtenue. Les résultats sont raisonnablement identiques et nous permettent de préciser plus avant la marge d’erreur de l’image déconvoluée.
Soulignons que les fichiers de photons permettent aussi de sélectionner les courtes expositions présentant les meilleures conditions atmosphériques. Cette technique peut s’avérer efficace pour de mauvaises conditions d’observations où les changements rapides de la turbulence dégradent la FEP. Elle n’a pas été employée dans notre cas car le nombre total de photons n’autorisait pas un trie draconien.

Comparaison de l’image déconvoluée et la FEP

La vérification incontournable est de comparer le résultat de la déconvolution (fig. 14) et la FEP, c’est à dire l’image de la référence 59 Cygni. Dans ce type de déconvolution, dominépar une source centrale recevant une partie conséquente du flux, les erreurs de déconvolution, proviennent majoritairement de la mauvaise qualité de la FEP expérimentale et sont donc dépendante de la position (voir Harder&Chelli pour une étude expérimentale de ces erreurs sur ADONIS).
La première constatation, c’est que les bas niveaux sont dominés par les résidus de FEP. Ils sont donc directement lié au fait que l’image de 59 Cygni n’est qu’une approximation de la FEP lors de l’exposition de P Cygni.
La seconde constatation, c’est que malgré l’imperfection de la FEP expérimentale, l’image déconvoluée de P Cygni montre des structures à hautes fréquences spatiales qui sont aucunement imputable la FEP:
1. La taille du cœ ur de P Cygni est supérieure à la référence, et montre une asymétrie alors que le cœ ur de la référence est symétrique.
2. Les structures localisées sont brillantes, et ont un gradient d’intensité élevées. La plupart n’a pas de contreparties dans la FEP.
3. Plusieurs structures intenses sont visibles loin du centre de la FEP, là où l’erreur est minimale, attribuables sans doute possible à P Cygni.

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Table des matières

1 Introduction
1.1 Contexte astrophysique
1.2 Contexte observationnel
1.3 Contexte du travail de thèse
2 Observation de P Cygni par la Haute Résolution Angulaire
2.1 Introduction
2.2 Les Variables Lumineuses Bleues (LBV) en tant que groupe
2.2.1 Caractéristiques des LBV
2.2.2 LBV, masse et perte de masse
2.3 P Cygni
2.3.1 Bref historique
2.3.2 Paramètres fondamentaux
2.3.3 Activité temporelle
2.3.4 Imagerie de la nébuleuse
2.3.5 Apport de la polarisation
2.3.6 Nature des inhomogénéités
2.3.7 Mécanismes de variabilité en imagerie
2.4 L’observation de P Cyg au télescope de 152cm de l’OHP
2.4.1 Rappels théoriques sur la formation des images astronomiques
2.4.2 Description de l’observation en O.A. de P Cygni
2.4.3 Traitement des données
2.4.4 Qualité de la Fonction d’Etalement de Point (FEP)
2.5 Résultats
2.5.1 Facteur de remplissage
2.5.2 Axe préférentiel
2.5.3 Connexion avec l’interférométrie optique à longue base
2.6 Perspectives observationnelles
2.6.1 Champ profond de la nébuleuse
2.6.2 Suivi temporel à la base du vent
2.7 Article parus dans Astronomy&Astrophysics Sup. Ser
3 Recherche de champs magnétiques dans les étoiles massives par Spectropolarimétrie
3.1 Spectropolarimétrie et connexion vent-photosphère
3.2 Observables de la spectropolarimétrie
3.3 Effet Zeeman
3.3.1 Phénomène
3.3.2 Mécanisme
3.3.3 Approximation du champ faible
3.4 Méthodes de détection directe de champ magnétique
3.4.1 Méthode en lumière naturelle
3.4.2 Polarimétrie et spectropolarimétrie classique
3.4.3 Polarimétrie des raies de Balmer
3.4.4 Zeeman Doppler Imaging (ZDI)
3.4.5 Application aux étoiles chaudes
3.5 Champ magnétique dans les étoiles chaudes
3.5.1 Détections directes
3.5.2 Preuves indirectes de champ magnétiques dans les étoiles chaudes
3.5.3 Caractéristiques du champ
3.6 Observations de février 1999
3.6.1 Choix des cibles
3.6.2 Réduction de spectres échelle
3.6.3 Redressement du continu
3.6.4 Franges
3.6.5 Contraintes sur l’existence de champ magnétique
3.6.6 Interprétation des données en lumière naturelle
3.7 Perspectives
3.8 Article soumis à Astronomy and Astrophysics
4 Spectro-Polarimétrie INterférométrique
4.1 Principe
4.2 Interférométrie optique à longue base
4.2.1 Interférences avec atmosphère en mode multitavelures
4.2.2 Visibilité
4.2.3 Interférogramme
4.3 Interférométrie Différentielle
4.3.1 Pratique de l’ID
4.3.2 Mise en oeuvre pratique
4.3.3 Décorrélation spectrale
4.3.4 Déplacement de photocentre
4.3.5 Effet de supersynthèse
4.3.6 Effet de la binarité
4.3.7 Effet de la rotation
4.4 Spectro-Polarimétrie INterférométrique (SPIN)
4.4.1 Analyse par intercorrélation de deux interférogrammes polarisées
4.4.2 Gestion de la polarisation instrumentale
4.4.3 Comparaison techniques SPIN/Spectropolarimétrie
4.5 Application de SPIN au GI2T
4.5.1 Le GI2T
4.5.2 Table de recombinaison REGAIN
4.5.3 Mode polarimétrique
4.5.4 Séquences d’observation
4.5.5 Référence en lumière polarisée
4.6 Perspectives
4.6.1 SPIN et le taux de perte de masse des supergéantes
4.6.2 SPIN et la perte de masse des Be
4.6.3 SPIN et les structures en corotation (CIR)
4.7 Article paru dans SPIE (vol 4006, p 531)
5 SPIN et magnétisme stellaire
5.1 Introduction
5.2 Signal attendu pour un champ magnétique global: approche qualitative
5.2.1 Visibilité en polarisation circulaire
5.2.2 Déplacement de photocentre en polarisation circulaire
5.2.3 Cas de la polarisation linéaire
5.3 Modélisation numérique
5.3.1 Détection du champ magnétique
5.3.2 Effet de rotation stellaire
5.3.3 Conclusions de l’étude théorique
5.4 Programmes d’observation au GI2T
5.4.1 Les étoiles Ap et Bp
5.4.2 Les étoiles du programme
5.4.3 Choix de la bande spectrale
5.5 Détection du signal
5.5.1 Etoiles sans rotation
5.5.2 Etoiles en rotation
5.5.3 Etoiles binaires
5.5.4 Variations photométriques dans le continu et les raies
5.6 Simulation des mesures
5.7 Inversion du signal
5.7.1 Comparaison avec les observables spectropolarimétriques
5.7.2 Vers une ZDI interférométrique?
5.8 Perspectives
5.9 Article parus dans Astronomy&Astropysics
6 Conclusions et Perspectives
6.1 Optique adaptative et coronographie
6.2 Spectropolarimètres
6.3 Interféromètres et polarimétrie
7 Bibliographie

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