L’abcès cornéen ou kératite bactérienne est une infection grave de la surface oculaire car elle peut évoluer en moins de 24 heures vers une perforation cornéenne[1], une destruction complète de la cornée [2], voire une perte de l’œil [3]. Il constitue donc uneurgence diagnostique et thérapeutique [4]. Il s’agit d’une des causes majeures de cécité monoculaire et reste un problème de santé publique important dans le monde [5]. Les abcès cornéens d’origine bactérienne représentent 9,96% des cas d’hospitalisation en Ophtalmologie du Centre Hospitalier Universitaire Joseph RavoahangyAndrianavalona (CHUJRA), avec 17,92% de cas d’éviscération, suite à des complications comme l’endophtalmie, la panophtalmie et la perforation [6].
Pourtant, ces morbidités visuelles peuvent être réduites si la prise en charge est rapide et adéquate. L’identification des germes responsables, ainsi que le test à la sensibilité aux antibiotiques sont des éléments indispensables et essentiels à la prise en charge des abcès cornéens, afin d’adapter le traitement antibiotique et améliorer le pronostic visuel [7]. Malgré de nombreuses études menées à ce sujet, la sensibilité aux antibiotiques des germes oculaires n’est cependant pas connue à Madagascar. De plus, les infections oculaires bactériennes sont maintenant compliquées par une multirésistance qui se développe progressivement [8, 9], posant un problème majeur dans leur prise en charge [10-12].
RAPPELS ANATOMIQUE ET PHYSIOLOGIQUE
L’appareil de la vision comprend trois parties, qui sont :
– le globe oculaire, organe de réception ;
– les annexes ;
– les voies et centres optiques, qui assurent la perception.
Le globe oculaire
Le globe oculaire est composé d’une paroi et d’un contenu [13].
La paroi
La paroi du globe oculaire est faite de trois tuniques qui sont, de dehors en dedans :
– la tunique externe protectrice, constituée par la sclèreou sclérotique et la cornée
– la tunique moyennenutritive ou uvée : la choroïde, le corps ciliaire et l’iris ;
– la tunique interne sensorielle : la rétine.
Les annexes de l’œil
Les annexes sont chargées de protéger, nourrir et assurer la mobilité du globe oculaire [14]. Ils comprennent :
– l’orbite ;
– les paupières ;
– la conjonctive ;
– l’appareil lacrymal, constitué par les glandes lacrymales et les canaux excréteurs
– les muscles oculomoteurs, dont quatre muscles droits et deux muscles obliques.
Les voies optiqueset centres visuels
Les voies optiques permettent la transmission de l’influx nerveux aux centres corticaux de la vision. Elles comprennent :le nerf optique, le chiasma optique, les bandelettes optiques, les corps genouillés externes et le cortex visuel [15].
Anatomie et physiologie de la cornée
Macroscopie
La cornée mesure 11-12 mm horizontalement et 10-11 mm verticalement. Elle est asphérique et le rayon de courbure moyen de la cornée centrale est de 7,8 mm (6,7-9,4 mm). Son indice de réfraction est de 1,377 et sa puissance de 42 dioptries. La cornée présente l’une des plus grandes densités de terminaisons nerveuses et sa sensibilité est 100 fois supérieure à celle de la conjonctive [16].
Microscopie
Elle est constituée de 5 couches histologiques : l’épithélium, la membrane de Bowman, le stroma, la membrane de Descemet et l’endothélium, avec un film lacrymal en pré-cornéen [17].
Le film lacrymal pré-cornéen
La surface cornéenne et du globe oculaire est couverte par le film lacrymal qui se compose de trois couches :
– une couche lipidique superficielle, produite principalement par les glandes de Meibomus, glandes lacrymales accessoires situées au niveau de la conjonctive
– une couche aqueuse moyenne produite par les glandes lacrymales principales et accessoires ;
– une couche mucineuse profonde dérivée des cellules caliciformes conjonctivales.
Le maintien du film lacrymal pré-cornéen est vital pour une fonction cornéenne normale. En plus de la lubrification de la surface de la cornée et de la conjonctive, les larmes confèrent une surface optique lisse, fournissent de l’oxygène et d’autres éléments nutritifs, et utilisent des immunoglobulines, du lysozyme et de la lactoferrine. Les aberrations dans le film lacrymal résultent d’une variété de maladies (comme la sècheresse oculaire par exemple) qui affectent profondément l’intégrité de la surface [18].
L’épithélium
L’épithélium cornéen est un épithélium pavimenteux stratifié non kératinisé qui comprend cinq à sept assises de cellules dans sa partie centrale, et huit à dix à sa partie périphérique. Il représente 10% de l’épaisseur cornéenne totale avec 50 à 60 μm. Outre les cellules épithéliales réparties en trois couches : superficielles, intermédiaires et basales, on retrouve au sein de cet épithélium cornéen : des lymphocytes (essentiellement T et de phénotype T8), des cellules de Langerhans présentatrices d’antigènes qui interviennent dans la réponse immunitaire, et des mélanocytes dans la couche basale. Ces cellules non épithéliales sont présentes à la périphérie, dans la région limbique, montrant la grande activité de cette région anatomique cornéenne.
– les cellules superficielles : ce sont les cellules les plus différenciées de l’épithélium cornéen, qui finiront par desquamer vers le film lacrymal avec lequel elles sont en contact.
– les cellules intermédiaires : ce sont des cellules de transition.
– les cellules basales : ces cellules représentent la couche germinative de l’épithélium.
– la membrane basale, faite de cellules épithéliales, sépare la membrane de Bowman de l’épithélium. Ses principales fonctions lui permettent de jouer le rôle de guide pour la migration cellulaire, de support pour l’adhésion cellulaire, l’émission ou transmission d’informations, et de membrane semi-perméable.
La membrane de Bowman
La membrane de Bowman est une couche dure acellulaire de 8 à 14 μm d’épaisseur, composée essentiellement de fibrilles de collagène, dispersées de manière aléatoire dans la substance fondamentale. Sa bordure postérieure se confond avec le stroma cornéen. Elle est synthétisée par les cellules basales de l’épithélium pendant la vie embryonnaire et contrairement à la membrane de Descemet, elle n’est pas restaurée après une blessure mais remplacée par un tissu cicatriciel [18].
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I- RAPPELS ANATOMIQUE ET PHYSIOLOGIQUE
I.1. Le globe oculaire
I.2. Les annexes de l’œil
I.3. Les voies optiques et centres visuels
I.4. Anatomie et physiologie de la cornée
II- EPIDEMIOLOGIE
II.1. Incidence et prévalence
II.2. Aspect microbiologique
II.3. Facteurs de risque
III- PHYSIOPATHOLOGIE
III.1. Moyens de protection de la cornée
III.2. Pathogénie
IV- DIAGNOSTIC
IV.1. Diagnostic positif
IV.2. Diagnostic étiologique
IV.3. Diagnostic de gravité
IV.4. Diagnostic différentiel
V- TRAITEMENT
V.1. Buts
V.2. Moyens
V.3. Indications
VI- EVOLUTION, ISSUE ET COMPLICATION
DEUXIEME PARTIE : METHODES ET RESULTATS
I- CADRE DE L’ETUDE
II- OBJECTIFS
III- PATIENTS ET METHODES
III.1. Type d’étude
III.2. Période de l’étude
III.3. Durée de l’étude
III.4. Population de l’étude
III.5. Mode de collecte des données
III.6. Variables étudiées
III.7. Ressources
III.8. Techniques de prélèvement oculaire
III.9. Techniques microbiologiques
III.10. Mode d’analyse des données
III.11. Limites de l’étude
IV- RESULTATS
IV.1. Résultats du recrutement
IV.2. Résultats de la sélection
IV.3. Caractéristiques de la population
IV.4. Caractéristiques cliniques
IV.5. Caractéristiques microbiologiques
IV.6. Etude descriptive des cas positifs
IV.7. Complications
IV.8. Evolution et issue
IV.9. Durée d’hospitalisation et sortie
TROISIEME PARTIE : DISCUSSION
I- METHODOLOGIE
II- RESULTATS DU RECRUTEMENT ET DE LA SELECTION
III- NOTRE POPULATION
III.1. L’âge
III.2. Le genre
III.3. La géographie
III.4. La profession
IV – ASPECTS CLINIQUES
IV.1. Agent responsable
IV.2. Côté atteint
IV.3. Délai de consultation
IV.4. Traitement pré-hospitalier
IV.5. Facteurs de risque
IV.6. Diagnostic
IV.7. Types de prélèvement
IV.8. Traitement hospitalier
IV.9. Examen microbiologique
IV.10. Evolution et issue
IV.11. Séquelles
IV.12. Durée d’hospitalisation
V- PROFIL BACTERIOLOGIQUE
V.1. Bactéries à Gram positif
V.2. Bactéries à Gram négatif
V.3. Champignon
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES