Spécificité de l’expertise chez l’enfant et l’adolescent

Généralités

Lorsque des faits criminels sont commis, une plainte est déposée, souvent par la victime ou sa famille, puis l’enquête judiciaire débute. Le magistrat a pour rôle de dire le droit en s’appuyant sur les différentes règles et articles de notre société. Pour autant, en procédure criminelle, il est question d’hommes et de femmes avec un passé, ayant des fragilités et des blessures dont il faut tenir compte dans leurs actes. Il devient difficile pour le magistrat d’appliquer certaines règles au-delà du rationnel, sans pouvoir comprendre ou essayer d’adapter les choses. L’article 427 du code de procédure pénale fixe le principe sur lequel repose le prononcé des décisions de justice en France : « Hors les cas où la loi en dispose autrement, les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve et le juge décide d’après son intime conviction. » .

Lorsque les faits sont de nature criminelle, c’est le juge d’instruction qui va procéder à l’enquête. L’article 81 du code de procédure pénale lui permet de procéder à toute évaluation qui lui semble nécessaire pour arriver à la vérité. « Le juge d’instruction procède, conformément à la loi, à tous les actes d’information qu’il juge utiles à la manifestation de la vérité. Il instruit à charge et à décharge. » Le juge peut donc faire appel à un expert, mais n’est pas obligé d’utiliser les conclusions de l’expertise. Et l’expertise n’est en rien une conclusion au dossier. Elle est réalisée pour aider le magistrat, rien de plus.

Expertise judiciaire

Cadre historique et légal

Antérieurement à 1789, l’ancien droit français connaissait peu l’expertise, à fortiori psychiatrique. Les travaux de Pinel , à la fin du XVIIIème siècle, inspirèrent en 1810 l’article 64 du code de procédure pénale ouvrant la voie à une irresponsabilité pénale du « dément » sans toutefois définir en tant que telle l’expertise psychiatrique. Le XIXème siècle constitua un tournant dans l’histoire de l’expertise de santé mentale. Sous l’impulsion d’Esquirol, le père de la loi du 30 juin 1838 sur les malades mentaux, la psychiatrie connaît un essor majeur ; cette loi permet, entre autre, un accueil soit si la personne le demande, soit le tuteur, soit une autorité publique avec un certificat médical expliquant l’intérêt pour la personne ; prémice des hospitalisations libres ou sous contraintes. En 1835, le juge d’instruction instruisant l’affaire Pierre Rivière, suspecté d’avoir égorgé sa mère, sa sœur et son frère, sollicita un psychiatre aux fins d’évaluation de sa responsabilité pénale . Cette démarche, novatrice, invita la psychiatrie dans le champ du droit ; rejointe formellement en 1945 par la psychologie. L’expertise psychiatrique, appliquée en matière pénale au XIXe siècle, visait alors à déterminer une éventuelle irresponsabilité pénale de l’accusé. Depuis, l’expertise psychiatrique s’est largement développée, les magistrats instructeurs ayant recours facilement à cette mesure prévue par le code de procédure pénale, d’ailleurs rendue obligatoire pour certaines catégories de crimes . La détermination du degré de responsabilité pénale et l’exigence d’individualisation de la peine, tendent à rendre nécessaire ce procédé.

Pour Anne Breton , expert-psychiatre de la Cour d’Appel de Reims, « L’expertise judiciaire psychiatrique est donc la demande d’un avis technique qu’adresse une juridiction judiciaire à un psychiatre pour connaître son point de vue notamment sur l’état des facultés mentales d’un sujet et sa responsabilité. Il s’agit d’une mesure d’instruction ordonnée par l’autorité judiciaire ».

L’expertise psychiatrique vise d’abord à l’établissement d’un diagnostic de pathologie mentale, si celui-ci existe, et à la mise en lien éventuelle du passage à l’acte criminel avec cette pathologie. L’article 64 depuis remplacé par l’article 122-1 et 122-2 du Code de procédure pénale et distingue l’abolition (122-1) de l’altération (122-2) du discernement, avec une graduation de la responsabilité pénale. L’alinéa 1 ouvre à l’irresponsabilité pénale dans le cas où « la personne (…) était atteinte au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes» . L’arrêt de la procédure entraine un arrêt du procès et une hospitalisation d’office en hôpital psychiatrique.

En revanche, si l’atténuation du discernement est retenue par un expert ou par un collège d’experts, la procédure pénale continue. Jusqu’en 2014, une altération importante du discernement au cours du passage à l’acte, impliquait une atténuation de la responsabilité pénale avec théoriquement, une atténuation de la peine prononcée. Pourtant, et contre l’esprit de la loi, l’atténuation du discernement occasionnait souvent une aggravation de la peine , en raison du caractère perçu comme prévalent de la dangerosité régulièrement associée au tableau clinique ; certains juristes allant jusqu’à considérer que le législateur ne prévoyait pas explicitement le sens (aggravation ou minoration) dans lequel il devait être tenu « compte de cette circonstance ». C’est pourquoi une adaptation de l’article 17 de la loi n°2014-896 du 15 août 2014, a réécrit le second alinéa de l’article 122-1, précisant : « Toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance, lorsqu’elle détermine la peine et en fixe le régime. Si est encourue une peine privative de liberté, celle-ci est réduite du tiers ou, en cas de crime puni de la réclusion criminelle ou de la détention criminelle à perpétuité, est ramenée à trente ans ». Le sens dans lequel il doit être tenu « compte de cette circonstance » se trouve non seulement clarifié mais également quantifié à hauteur du tiers de la peine prononcée.

La loi du 12 décembre 2005 a tendu, sous la pression d’affaires largement médiatisées, à systématiser un tel recours, complété par la loi de février 2008 relative à la rétention de sûreté. Cette expertise dite « de dangerosité » vise à éclairer le juge sur la mesure la plus opportune quant au risque de réitération. Cette seconde forme d’expertise, plus récente que la première, bien que la notion de dangerosité se trouvait déjà présente dans les libellés de mission antérieurement à 2005, s’appuie sur plusieurs dispositifs. La loi du 12 décembre 2005 (sur le traitement de la récidive), a initié le placement sous surveillance électronique mobile (P.S.E.M.). Pour être prononcée, cette mesure doit constituer un « appareil indispensable pour prévenir la récidive du jour où la privation de liberté prend fin » et se fonder sur une « expertise médicale constatant la dangerosité » du prévenu. Le plus souvent, le P.S.E.M. est accompagné d’une peine privative de liberté, n’entrant en application qu’à l’issue de celle-ci.

Cependant, au plus tard un an avant la date de libération, le juge d’application des peines (J.A.P.) se trouve tenu d’organiser un « examen destiné à évaluer la dangerosité et mesurer le risque de commission d’une nouvelle infraction ». Dans ce cas, le J.A.P. missionne un expert-psychiatre pour évaluer la dangerosité. La dangerosité dite « psychiatrique » se trouve toutefois à différencier de celle dite « criminologique » quoiqu’une certaine confusion entre ces deux notions puisse exister, notamment chez les juristes, faisant pourtant consensus dans la communauté des experts-psychiatres. La dangerosité psychiatrique est liée à l’évolution de la maladie, alors que la dangerosité criminologique a été défini par Grispini en 1920, comme « un état de devenir auteur d’un méfait ».

Spécificité de l’expertise chez l’enfant et l’adolescent 

Contrairement à une expertise d’adulte, il est nécessaire de prendre en compte les aspects spécifiques liés au fonctionnement mental d’une personnalité en construction. On ne peut utiliser la nosographie psychiatrique seule, il faut absolument situer l’acte délictueux ou criminel en regard du stade de développement du sujet, en n’omettant pas que chaque enfant du même âge peut avoir des capacités et compétences forts différentes . Il ne doit pas être question de rechercher des preuves de la culpabilité du mineur mais d’expliquer la trajectoire de développement dans ses diffférentes composantes biologique, psychologique et sociale, et de la mettre en lien ou non, avec les faits supposés. Il ne doit pas davantage être question, pour l’expert, de dire si le mineur dit ou non la vérité, ni quelle est son opinion, mais seulement de recueillir la parole de l’enfant et d’analyser son comportement. Des procès récents tels que l’affaire Outreau . en France ou Dutroux en Belgique ont pu montrer la complexité des expertises d’enfants. La recherche de la crédibilité de la parole de l’enfant dans ses affaires ont montré la complexité de la place de l’expert et du témoignage.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : Revue de la littérature
I. Généralités
A. Expertise judiciaire
1. Cadre historique et légal
2. Spécificité de l’expertise chez l’enfant et l’adolescent
B. Responsabilité pénale
1. Définition
2. Abolition du discernement
3. Altération du discernement
4. Notion de libre arbitre
C. Experts psychiatriques judiciaires
1. Missions légales de l’expert
2. Formation
3. Demandes et chiffres
4. Déontologie du médecin expert
5. Secret médical et difficultés éthiques
D. La démarche de l’entretien d’expertise
E. Prise en charge psychiatrique au sein de la justice
1. Généralités
2. Mesures d’accompagnements pour les mineurs
3. Spécificités des auteurs de violences sexuelles, CRIAVS
II. Altérations du développement psycho-affectif et cognitif
A. Troubles du neurodéveloppement
1. Troubles du spectre de l’autisme
a) Historique
b) Définition actuelle
c) Epidémiologie
2. Trouble du développement intellectuel
a) Historique
b) Notion de handicap
c) Définition actuelle
d) Comorbidités
3. Troubles des apprentissages
4. Trouble déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH)
a) Définition actuelle
b) Description clinique
5. Connaissances actuelles
a) Sur le plan neuropsychologique
b) Sur le plan neurobiologique
B. Enfant carencé et/ou maltraité
1. Principales difficultés rencontrées
2. Théorie de l’attachement
a) Définition
b) Les différents types de carences
c) Clinique de l’enfant carencé
3. Développement psychique et neurobiologique des enfants carencés
4. Dysruptive Mood Dysregulation Disorder – DMDD
5. Trouble de stress post-traumatique (TSPT)
6. Enfant traumatisé
7. Connaissances actuelles sur les enfants insécures
a) Sur le plan neuropsychologique
b) Sur le plan neurobiologique
C. Passage à l’acte
1. Dysrégulation émotionnelle et trouble du comportement
2. Interactions sociales et théories de l’esprit dans le passage à l’acte
D. Allégations de violences
1. Violences physiques, psychiques et maltraitance
2. Violences sexuelles
E. Développement et risque de passage à l’acte
1. Risque de passage à l’acte et troubles du neurodéveloppement
2. Risque de passage à l’acte et environnement
DEUXIEME PARTIE : Revue de cas clinique
III. Cas cliniques
A. Expertise pédopsychiatrique numéro 1 : Dylan
1. Les faits et le contexte de l’expertise
2. Les faits qui ont motivé l’expertise psychiatrique
3. Principaux éléments biographiques
4. L’examen psychiatrique
5. Les éléments à caractère général
6. Réponse aux questions posées
B. Expertise pédopsychiatrique numéro 2 : Tom
1. Les faits et le contexte de l’expertise
2. Les faits qui ont motivé l’expertise psychiatrique
3. Principaux éléments biographiques
4. L’examen psychiatrique
5. Réponse aux questions posées
IV. Discussion
A. Expertise pédopsychiatrique de Dylan
1. Réponse de l’expert
2. Remarques
B. Expertise pédopsychiatrique de Tom
1. Discussion de l’expert
2. Remarques
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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