Une cinquantaine d’années après l’accès à l’indépendance de beaucoup de pays du continent africain, le problème de la réduction de la pauvreté se pose toujours et est encore d’actualité. Beaucoup de pays africains ainsi que plusieurs économistes ont cru à l’ajustement structurel prescrit par le consensus de Washington pour régler ce problème. Mais il apparait évident aujourd’hui que cette approche néo-libérale sous-tendu par ce consensus n’a pas produit les résultats escomptés. Contrairement à ce que l’on attendait, la recherche de l’efficacité allocative par le désengagement de l’Etat, les privatisations, la libéralisation du secteur financier, l’ouverture aux échanges internationaux ainsi qu’aux investissements étrangers n’ont pas suffi pour éradiquer la pauvreté. Pareillement, les recours à l’aide financière extérieure n’ont eu que peu d’effet sur le relèvement du niveau de vie de la population des pays bénéficiaires. IL existe, certes, des exemples de pays ayant réussi à décoller économiquement grâce à ces aides dans le continent asiatique, mais dans le continent africain le recours à l’épargne extérieure n’a fait qu’augmenter la dette extérieure du continent, entravant davantage sa croissance.
Source de financement selon les pensées économiques
L’accumulation de capital des classiques
Adam Smith est la division du travail
Adam Smith est reconnu comme étant le père de la science économique moderne lorsqu’il mettait en avant ce que devrait être la principale préoccupation de la science économique, la mobilisation du travail. Dans son œuvre, richesse des nations (1776) A. Smith analysait le fonctionnement de l’économie marchande caractérisé par une division du travail. Partant de l’observation de l’usine d’épingle, il avance que plus la division du travail et poussée plus l’usine pouvait produire d’épingle. Au niveau macroéconomique donc, la division du travail aura pour conséquence l’augmention de la production, ou la richesse de la nation. La division du travail est un mode d’organisation sociale permettant des gains de productivité et ainsi donc permet de ne pas gaspiller des ressources telles que le temps ou la main d’œuvre. A cause de cette division du travail, aucun ouvrier ne peut à lui tout seul produire tout ce dont il aura besoin, car étant occupé à contribuer à la production d’autres biens, mais il doit laisser à d’autres ouvriers le soin de fabriquer bon nombres d’autres biens qui lui sont utiles. Le contexte dans lequel la science économique moderne était née était marquée par cette division du travail, d’autant plus que cette période se trouve en plein début de la première révolution industrielle (1765-1845) durant laquelle les paysans commencèrent à quitter peu à peu leur terre pour émigrer vers les villes, constituant ainsi une réserve de main d’œuvre important.
Ces mains d’œuvres cherchent à être mobilisée et c’est effectivement là que se pose le problème de Smith. Le problème est le fait que, « ne peut travailler qui veut, ne peut employer qui veut». A. Smith constate que dans une société caractérisée par la division du travail de plus en plus poussée, la mobilisation des forces de travail est conditionnée par quelque chose mais elle n’est en aucun cas ou du moins n’est plus, un acte volontaire de l’homme cherchant à survire par ses propres moyens. Combien même les hommes auront la volonté de travailler, ils ne le peuvent pas sans que cette condition soit satisfaite. Cette condition nous intéresse car elle permet la mobilisation du travail entrainant ainsi des gains de productivités nécessaires à l’amélioration progressive du niveau de vie de la population, en d’autre terme le développement économique.
L’existence d’un fonds préalablement accumulé
La richesse des nations est obtenue par le travail qui lui à son tour ne peut se mobiliser qu’à une condition: l’existence d’un facteur mobilisateur. A. Smith a clairement affirmé son choix sur ce sujet en avançant qu’un fond préalable permettant à l’entrepreneur de financer le décollage de son entreprise est nécessaire . Ce choix ne ferait que rejoindre ce qui est constaté à certain niveau par tout le monde car ce fond préalable correspond à ce qu’on appel couramment le capital. Smith avance que ce fond provient de « la sage conduite » de certains particuliers qui aiment épargner .
Chez les classiques le capital est au centre de l’économie, c’est par le capital que se finance la croissance économique. Il permet de mobiliser la main d’œuvre disponible dans l’économie, et donc de dégager une croissance économique qui, soulignant-le, est une condition nécessaire au développement économique. Développement et croissance sont liés à l’importance de l’investissement or il faut disposer du capital nécessaire pour pouvoir investir .
Le processus d’accumulation du capital
Dans son état primitif, la société n’est pas encore marquée par la division du travail, les échanges se limitent au troc où chaque individu satisfait lui-même ses besoins par ses propres moyens. Il n’est pas nécessaire qu’il existe un fonds accumulé pour faire fonctionner la société. Avec l’évolution de la société, la division du travail commençait à se mettre en place et nul ne pouvait subvenir à ses besoins d’une manière autonome. Les travailleurs devaient focaliser leur effort dans la production d’un nombre limité de biens et acheter les autres biens dont ils ont besoin grâce à leur salaire, le prix de son travail. Dans ce cycle de production vente-production il y a un délai plus ou moins long entre chaque étape. Durant ces délais intermédiaires, les ouvriers devraient être dans la possibilité de subvenir à ses besoins. L’accumulation préalable de valeurs permet le paiement des ouvriers afin que ces derniers puissent satisfaire à leur besoin tout au long du cycle et de maintenir ainsi sa continuité.
Le libéralisme est caractérisé par sa répulsion à toute intervention de l’Etat, qui pourrait modifier le comportement d’épargner des sages particuliers. Le libéralisme accorde ainsi une place importante à l’action privée et son calcul économique pour faire des profits. Dans son calcul, le capitaliste compte faire des profits lorsqu’il décide d’investir les valeurs qu’il a accumulées. La personne qui investite son capital cherche nécessairement à l’employer de manière à ce qu’il produise la plus grande quantité possible. Cette quantité sera ensuite échangée contre de la monnaie sur le marché. Le montant de l’argent ainsi reçu représente la valeur de la production totale et une partie de cet argent sera consommée et une autre épargnée pour être réinvestit plus tard.
A l’échelle d’une entreprise, une partie de cette production sera mise de coté pour accroitre le capital. Le capital initialement utilisé dans un premier processus de production est plus faible mais il augmentera car le capitaliste est un sage qui aime épargner. Le capital va donc en augmentant, cela devrait permettre à l’entreprise d’accroitre sa production. Ce processus peut être schématisé par le cycle de la circulation marchande A-M-M’-A’ où A désigne les valeurs accumulées, M les marchandises achetées grâce à une partie de A, M’ correspond à la marchandise M transformé et A’ est le revenu de la vente du produit M’, A’ étant supérieure à A. Pour faire plus simple A correspond au capital accumulé par le capitaliste, M les matières premières qu’il achète, M’ les produits finis ou semi finis obtenus grâce à l’application du travail, et A’ le prix auquel il vend la marchandise M’. A’ peut être compris comme A augmenté du profit (ou plus-value pour les marxistes). Une partie de ce profit va être ensuite épargnée et accroitre ainsi le capital. Plus de capital signifie pour le capitaliste une accessibilité aux nouvelles technologies, une possibilité d’accroitre le nombre de ses ouvriers, en bref, la possibilité d’accroitre sa production. Le processus d’accumulation suit toujours la même logique et le même schéma que dans la circulation marchande capitaliste et cela quel que soit le lieu géographique, la forme d’accumulation ou la période. Elle acquiert ainsi un caractère universel.
A plus grande échelle, cette logique d’accumulation nous amène à dire que le niveau de PIB actuel est le résultat de la production qu’une accumulation antérieure a permis. A l’échelle nationale, pour les libéraux, il faut mettre de coté une plus grande partie du PIB afin d’accroitre la production plus tard. Plus la proportion de l’épargne national dans le PIB est importante plus la croissance est à la porté de l’économie et plus elle est apte à élever le niveau de vie de la population. Le passage de ce raisonnement microéconomique au niveau macroéconomique est explicité par A. Smith lui-même dans son œuvre lorsqu’il avance que « non-seulement la quantité d’industrie augmente dans un pays en raison de l’accroissement du capital qui la met en activité, mais encore, par une suite de cet accroissement, la même quantité d’industrie produit une beaucoup plus grande quantité d’ouvrages ». Le financement de la production de la richesse dans les nations provient donc en grande partie de la capacité de ces derniers à épargner une importante partie de leur PIB.
L’existence d’une accumulation préalable nécessaire pour mobiliser le travail à des fins productives est admise par la plupart des économistes. Le problème de l’accumulation a fait ressortir l’importance de l’épargne et celle de la répartition.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
I. Cadre théorique
I.1 : Source de financement selon les pensées économiques
I.1.1 L’accumulation de capital chez les classiques
I.1.1.1 Adam Smith et la division du travail
I.1.1.2 L’existence d’un fonds préalablement accumulé
I.1.1.3 Le processus d’accumulation du capital
I.1.1.4 Problème de répartition et accumulation
I.1.2 L’alternative monétaire à l’accumulation
I.1.2.1 Retour à la réalité d’une économie marchande
I.1.2.2 Le capital n’existe pas au niveau macroéconomique
I.2 : La création monétaire pour créer de la croissance
I.2.1 Courant monétariste, prolongement de la pensée libérale
I.2.2 Courant keynésien
I.3 : Mesure du besoin de financement à partir du modèle postkeynésien
I.3.1Le modèle postkeynésien de Harrod et Domar
I.3.1.1. Présentation du modèle
I.1.3.2 Détermination du besoin de financement
I.3.2Les limites de ce modèle
I.4 : Le sous développement vu par quelques théoriciens
I.4.1 Adam Smith et les classiques
I.4.2 J. Schumpeter
I.4.2 Les keynésiens
I.4.3 Les marxistes
II. Les sources de financement de Madagascar
II.1 : L’épargne intérieure
II.1.1 Les déterminants de l’épargne intérieure
II.1.1.1 Le revenu
II.1.1.2 L’ouverture économique et la mondialisation
II.1.1.3 Le cours mondiaux des produits agricoles et la démographie
II.1.2 L’évolution de l’épargne intérieure
II.1.2.1 L’épargne privée
II.1.2.2 L’épargne publique
II.2: Les apports extérieurs
II.2.1 Les formes de ces apports extérieurs
II.2.1.1 Les aides publiques bilatérales et multilatérales
II.2.1.2 Les financements par emprunt bancaire
II.2.1.3 L’Initiative pour les Pays Pauvres Très Endettés
II.2.1.4 Aide triangulaire et Aide liée
II.2.1.5 Les dons et les transferts
II.2.1.6Les Investissements Directs Etrangers ou IDE
II.2.2 L’évolution du recours à l’aide extérieure
III. Financer les investissements : clé du développement
III.1 : Banques et financement des investissements
III.1.1 Le système bancaire
III.1.1.1 Généralité sur le rôle du système bancaire
III.1.1.2 Le système bancaire Malgache
III.1.1.3 Evolution du crédit à l’économie
III.1.1.4 Le taux d’intérêt bancaire des banques Malgaches
III.1.2 La microfinance
III.1.2.1 Donner un droit à l’initiative économique
III.1.2.2 La microfinance à Madagascar
III.2 : L’allocation productive des ressources
III.2.1 Evolution globale de l’investissement
III.2.1 Les investissements publics
III.2.2 Les investissements privés
III.3 : Réflexion sur le financement actuel du développement
III.3.1 Financement interne du développement
III.3.1.1 Le système bancaire n’incite pas à l’investissement
III.3.1.2 Limiter l’inflation par des taux d’intérêt élevé est contre productive
III.3.1.3 Les limites de la microfinance
III.3.1 L’efficacité des apports extérieurs
III.3.1.1 Bonnes institutions et bonne gouvernance
III.3.1.2 Incohérence de l’aide avec l’objectif de croissance et de développement
III.3.2 L’accumulation du capital en question
III.3.3.1 L’accumulation ne peut financer efficacement de développement
III.3.3.2 La théorie de l’accumulation rend notre économie dépendante
III.3.3.3 La théorie de l’accumulation est la source de pauvreté des PED
III.3.3.4 Suggestions
CONCLUSION GENERALE
Bibliographie