Situation de la prématurité dans le monde
Beck et al ont conduit, pour l’OMS, une revue systématique sur la prématurité durant la période 1997-2007 (Beck, Wojdyla et al. 2010). D’après cette étude, au cours de l’année 2005, les auteurs ont recensé 115,3 millions de naissances parmi lesquelles 12,9 millions de naissances prématurées donnant ainsi une prévalence mondiale de 9,6% pour la prématurité. La grande majorité de ces nouveau-nés prématurés (10,9 millions) était retrouvée en Afrique et en Asie, soit environ 85%. Concernant les autres régions du monde, 0,5 million de prématurés étaient recensés en Europe et en Amérique du nord respectivement. Près du double était décompté en Amérique latine et dans les Caraïbes, soit environ 0,9 million.
En Afrique le taux de prématurité connaît également une variabilité géographique importante puisqu’il variait de 14,3% en Afrique de l’Est à 8,7% en Afrique du Nord. En Afrique de l’Ouest, région où s’est déroulé le présent projet de recherche, la prévalence était de 10,1% (Beck, Wojdyla et al. 2010). En 2010, Blencowe et al ont noté une augmentation de la prévalence de la prématurité en recensant au total 14,9 millions de naissances prématurées au cours de cette année. Cette étude s’est basée sur l’analyse globale des données de registres nationaux de naissances de 184 pays. La prévalence mondiale était de 11,1% variant très largement de 5% en Europe du nord à 18 % au Malawi en Afrique. En Afrique justement, la prévalence notée était de 12,3%. Ces auteurs pointent également l’Asie du sud et l’Afrique sub saharienne comme les zones les plus touchée (60% de l’ensemble des naissances prématurées) (Blencowe, Cousens et al. 2012).
Si l’on reprend l’étude plus récente (2013) de Katz et al précédemment citée portant sur les données de 1982 à 2010, provenant de plusieurs pays de continents différents, la prévalence de la prématurité semble fluctuer entre, et au sein, des continents.
En Afrique
Sur le continent africain la situation est assez disparate et des zones de fortes prévalences coexistent avec des zones moins exposées. En zone rurale au Burkina Faso, la prévalence de la prématurité est passée de 16% à 18% entre 2004 et 2006. En 2008 en Tanzanie elle était de 5% alors qu’elle atteignait 6% en Ouganda en 2005, en zone rurale. En milieu urbain sud africain, il y avait 4% de prématurité en 2004.
En Amérique Latine
La situation au Brésil semble préoccupante puisque la prévalence de la prématurité a connu une forte progression, passant de 6% en 1982 à 16% en 2004. Ceci contraste avec le taux assez bas relevé au Chili, 7% en 2000.
En Asie
La situation en milieu rural semble plus sévère puisqu’au Népal le taux de prématurité est passé de 22% à 18% entre 1999 et 2004. Toutefois au cours de cette étude, le plus fort taux était noté au Pakistan, 28%, alors que les prévalences observées en Inde en 2000 (14%) et au Bangladesh en 2005 (19%) étaient relativement proches et plus basses. Le plus faible taux a été retrouvé en Thaïlande en 2001, 9%.
La définition de la prématurité repose sur une mesure de durée de gestation (ou âge gestationnel), en semaines d’aménorrhées. Si le seuil permettant de définir la prématurité (37 SA) est admis, c’est la mesure même de l’âge gestationnel et sa précision qui pose un certain nombre de problèmes. Il nous semble important de revenir sur ces différents points qui peuvent être à l’origine de la grande variabilité des prévalences observées dans les enquêtes présentées ci-dessus puisque, comme nous l’avons dit, l’âge gestationnel peut avoir été estimé par des méthodes différentes.
Age gestationnel
Définition
La gestation est la période qui s’écoule entre la fécondation et l’accouchement pendant laquelle la femme est en aménorrhée. Lorsqu’on décompte à partir du 1er jour des dernières règles, cette période dure en moyenne 280 jours ou 40 semaines. L’âge gestationnel, combiné avec la vitesse de croissance fœtale, détermine la morphologie du bébé à la naissance. Etant le seul critère utilisé pour identifier les nouveau-nés prématurés, son estimation revêt un caractère primordial puisqu’elle peut entraîner des décisions thérapeutiques médicales ayant des risques et des coûts financiers parfois élevés.
Mesure de l’âge gestationnel
Plusieurs techniques ont été proposées pour mesurer l’âge gestationnel. Aucune n’est parfaite et chacune comporte sa part d’imprécision et son risque d’erreur. Depuis les années 1980, beaucoup d’études ont été réalisées, évaluant et comparant les différentes méthodes, dans le but d’estimer l’âge gestationnel de la façon la plus précise et la plus juste possible (Alexander, Petersen et al. 1989; Emery, Eaton et al. 1997; Blondel, Morin et al. 2002; Feresu, Gillespie et al. 2002; Savitz, Terry et al. 2002).
La date des dernières règles
La datation du début de grossesse se base sur le cycle menstruel normal de la femme. Il existe un intervalle théorique de 14 jours entre le 1er jour des dernières règles du cycle précédent et le moment de l’ovulation. Si la fécondation se produit à ce moment là, c’est donc le début de l’embryogenèse. Le 1er jour des dernières règles est donc le point de référence clé pour la datation d’une grossesse par cette méthode. Dans les centres de santé et les maternités, les sages femmes et les gynécologues s’aident d’un outil pour estimer l’âge gestationnel à partir du 1er jour des dernières règles. Cet outil s’appelle le gestogramme.
Lorsqu’elle est connue avec précision, la date des dernières règles est le moyen le plus sûr et le plus fiable d’estimer la durée de gestation (Berg 1991). Toutefois son utilisation peut être compliquée du fait de plusieurs éléments (Berg 1991; Waller, Spears et al. 2000):
♦ Les femmes ayant un cycle irrégulier qui ne respecte pas cet intervalle de 14 jours
♦ Un saignement en début de grossesse pouvant être confondu avec des règles en retard
♦ Les femmes qui n’ont pas une mémoire précise de leur DDR.
Dans les PED, il est souvent difficile d’estimer de manière précise la date des dernières règles. En effet, les femmes en milieu rural utilisent des référentiels de temps spécifiques (saison, travaux aux champs, évènement dans le village, fête coutumière, etc.) qui ne correspondent pas forcément aux référentiels utilisés par le personnel de santé qui les interroge (en général sur la base d’un calendrier grégorien).
La hauteur utérine
C’est une méthode d’examen clinique qui mesure la hauteur de l’utérus de façon externe par l’abdomen en partant de la symphyse pubienne. En pratique, les repères sont le haut de la vessie et le fond utérin comme le montrent les illustrations ci après.
Elle est souvent utilisée lors des consultations prénatales dans les maternités rurales des pays du sud peu équipées. Cette méthode comporte un risque élevé d’erreur car elle dépend fortement de l’opérateur et de son instrument de mesure. De plus elle n’est pas adaptée en cas de croissance fœtale anormale ou restreinte ni en cas de grossesses multiples. Au final la mesure de la hauteur utérine n’est pas une méthode d’estimation de l’âge gestationnel, même si elle conserve un intérêt lors du suivi clinique gynécologique d’une femme enceinte.
L’échographie
Elle fait partie intégrante de l’examen gynécologique, apporte une confirmation plus précise à l’information issue de la date des dernières règles et vient en complément de celleci. Mais même cette méthode, en plus du fait qu’elle est opérateur-dépendante, a une précision qui peut varier selon le moment ou elle est réalisée. De plus l’échographie de datation pour être le plus précis possible doit être faite vers la fin du premier trimestre de la grossesse, entre la 9ième et la 11ième .
Dans les pays du Nord, c’est une méthode systématisée dans le suivi d’une grossesse. En France par exemple, 3 échographies sont obligatoires à la demande du Ministère de la Santé. La première échographie dite de datation se déroule entre la 10ème et la 14ème SA. L’échographie de morphologie est la deuxième et est faite entre la 20ème et la 22ème SA et enfin la troisième échographie dite biométrique est réalisée en fin de grossesse entre la 32ème et la 34ème SA. En cas de complications ou de suspicion de complications d’autres examens échographiques sont faits pour opérer un suivi plus serré et plus attentif.
Au cours de l’échographie, des mensurations fœtales sont prises notamment la longueur crânio-caudale, le diamètre bipariétal, la longueur fémorale et le périmètre abdominal. De nos jours, l’échographie est de plus en plus fréquemment utilisée dans les pays en développement en milieu urbain au sein des populations plutôt aisées disposant des moyens financiers nécessaires. Par contre dans les populations défavorisées de ces pays, et pas seulement en zones rurales, l’échographie précoce en début de grossesse est assez rare par manque de moyens financiers, par défaut d’accès aux soins ou, en milieu rural, par indisponibilité de techniques d’imagerie médicale ; elle est donc peu utilisée en pratique courante au sein de ces populations. Outre les méthodes exposées ci-dessus permettant d’estimer l’âge gestationnel lors de la grossesse, et donc d’agir de façon préventive sur l’issue de celle-ci en cas d’anomalie, il existe des méthodes basées sur l’appréciation de la maturité du nouveau-né à la naissance, estimant donc l’âge gestationnel uniquement en rétrospectif, permettant le diagnostic de prématurité (et de RCIU).
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Table des matières
INTRODUCTION
GENERALITES
I- FAIBLE POIDS DE NAISSANCE
1.1 Définition, classification
1.2 Situation du Faible Poids de Naissance dans le monde.
1.3 Mécanismes
II- PREMATURITE
2.1 Définition et classification
2.2 Situation de la prématurité dans le monde.
2.3 Age gestationnel
2.3.1 Définition
2.3.2 Mesure de l’âge gestationnel
2.4 Causes de prématurité
2.4.1 Causes générales
2.4.2 Causes gynéco-obstétricales
III- RETARD DE CROISSANCE INTRA UTERIN (RCIU)
3.1 Définition et classification
3.2 Situation du RCIU dans le monde.
3.3 Mesure du RCIU et problèmes posés par les courbes de références
3.4 Causes du RCIU
3.4.1 Les causes d’origine maternelle
3.4.2 Les causes placentaires
3.4.3 Les causes fœtales
IV- CONSEQUENCES DU FPN
4.1 Conséquences du faible poids de naissance sur la morbidité
4.1.1 Conséquences du FPN dû à une prématurité sur la morbidité
4.1.2 Conséquences du FPN dû à un RCIU sur la morbidité
4.2 Conséquences du faible poids de naissance sur la mortalité
4.2.1 Conséquences du FPN dû à une prématurité sur la mortalité
4.2.2 Conséquences du FPN dû à un RCIU sur la mortalité
4.3 Conséquences du faible poids de naissance sur la croissance
4.3.1 Conséquences du FPN dû à la prématurité sur la croissance
4.3.2 Conséquences du FPN dû à un RCIU sur la croissance
CONCLUSION
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