Simulations Thermo-Élasto-Plastique de la formation de cavités dans la silice fondue 

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Mécanismes d’ionisation et de recombinaison électronique

Lors de l’interaction du laser avec le matériau, des électrons de valence peuvent être portés en bande de conduction. Après un certains temps de relaxation de l’énergie ab-sorbée, ces derniers vont retourner progressivement à leur état d’équilibre en bande de valence. Ainsi, la densité électronique du matériau en bande de conduction va évoluer en fonction des processus d’ionisation mis en jeu, tels que la photoionisation (PI) et l’io-nisation par impact (IPI), mais également en fonction des processus de recombinaison (REC) des électrons. L’ensemble de ces phénomènes en compétition vont alors jouer un rôle plus ou moins important en fonction des différents paramètres laser et du matériau, et apporter leur contribution au terme source de l’Eq. (1.14) selon la relation : Ω = ΩPI + ΩIPI − ΩREC (1.18)
Les processus de photoionisation
De manière générale, le terme photoionisation caractérise une excitation d’un élec-tron de la bande de valence vers la bande de conduction sous l’effet d’un rayonnement.
Cependant, deux processus peuvent être distingués (Fig. 1.3 (a et b)) : l’ionisation mul-tiphotonique (IMP) et l’ionisation par effet tunnel (IET).
Dans le visible et l’infrarouge, l’absorption de l’énergie d’un photon unique par un élec-tron n’est pas suffisante pour l’exciter en bande de conduction, l’énergie d’ionisation d’un matériau diélectrique étant bien plus grande. Dans le cadre de cette étude par exemple, les photons ont une énergie ~ωL environ égale à 1,55 eV à 800 nm, tandis que la valeur de la bande interdite de la silice est d’environ 9 eV [52–55]. L’absorption simultanée de plusieurs photons est donc nécessaire. Pour cela, le rayonnement doit être suffisamment intense pour induire un régime d’absorption non-linéaire et la somme de l’énergie des N photons absorbées doit être supérieure à la valeur de la bande interdite. On parle d’ioni-sation multiphotonique à l’ordre N telle que présentée Fig. 1.3 (a). La probabilité que ces
N photons soient simultanément absorbés est approximativement proportionelle à ILN . En particulier, dans le cas de la silice et avec les paramètres lasers choisis, une absorption à 6 photons est requise pour exciter un électron en bande de conduction et franchir la bande interdite. La valeur importante de cette dernière est notamment à l’origine de la transparence dans le visible et l’infrarouge des matériaux diélectriques. Seuls les rayonne-ments ultraviolets sont absorbés en régime linéaire, un photon unique étant suffisant pour exciter les électrons et les promouvoir en bande de conduction. Dans le cas de la silice, avec des lasers dont les longueurs d’onde sont inférieures à 140 nm (domaine ultraviolet extrême), un photon unique a assez d’énergie (environ 9,2 eV à 135 nm) pour exciter un électron en bande de conduction.
Lorsque l’intensité du champ laser augmente, la barrière de potentiel générée par le réseau ionique s’abaisse transitoirement, c’est à dire que la valeur en énergie de la bande interdite diminue (Fig. 1.3 (b)). En effet, plus le champ électrique du rayonnement est fort, plus le potentiel de Coulomb qui lie l’électron à son atome est abaissé. Une suppression complète de la barrière de potentiel est même possible si l’intensité est suffisante. Ainsi, un électron de la bande de valence a une probabilité (au sens quantique) non nulle de passer en bande de conduction. On parle dans ce cas d’effet tunnel. De plus, puisque dans ce cas l’ionisation nécessite moins d’énergie absorbée, un autre phénomène (moins probable mais possible) peut être envisagé, celui de l’absorption d’un photon unique qui augmente l’énergie de l’électron suffisamment pour l’amener en bande de conduction, tel que le décrit l’effet Franz-Keldysh [56, 57]. Il est à noter que la probabilité d’une transition par effet tunnel est maximale lorsque l’amplitude du champ électrique est elle aussi maximale, c’est à dire tous les demi-cycles optiques. Ce processus a donc une dynamique sub-femtoseconde [58, 59].
Ces deux processus de photoionisation sont plus ou moins probables selon le matériau, la longueur d’onde λL et l’amplitude du champ laser E0. Ce comportement est décrit par √ le paramètre d’adiabaticité de Keldysh [60] γ = ωL me∗EBG . Lorsque (γ   1), l’ionisation eE0 multiphotonique est plus importante que l’ionisation par effet tunnel. Á l’inverse, lorsque (γ 1) l’ionisation par effet tunnel est prépondérante devant l’ionisation multiphoto-nique. Enfin, pour les cas intermédiaires où γ ‘ 1 les deux processus d’ionisation sont en compétition.

Rhéologie des matériaux

Une dizaine de picosecondes après le passage de l’impulsion laser dans le matériau, le dépôt d’énergie précédement défini a chauffé les ions de façon isochore et augmenté localement la pression. Cependant, le temps de diffusion de la chaleur étant beaucoup plus important (de l’ordre de la microseconde), la matière environnante est toujours froide et dans l’état solide. Une importante différence de pressions entre la zone chauffée (de l’ordre du GPa au TPa) et le solide froid (de l’ordre de la pression atmosphérique) est donc créée, induisant une force de surpression et conduisant à une discontinuité des vitesses de déplacement dans le matériau. Cet effet est qualifié de choc et initie des ondes mécaniques qui vont se propager dans le solide, induisant des transitions de phase et déformant de manière réversible ou permanente le matériau, en fonction de leur amplitude. Ces ondes mécaniques, qui sont des oscillations de la matière, transportent, restituent et dissipent l’énergie laser initialement absorbée. La considération de la réponse des différents états de la matière aux pressions et contraintes appliquées est donc indispensable pour décrire les processus hydrodynamiques et mécaniques en jeu lors de la structuration par laser du matériau diélectrique. En effet, tandis qu’au niveau de la zone chauffée, le matériau aura un comportement fluide, son comportement autour de celle-ci sera, de manière générale, de type visco-élasto-plastique, i.e. présentant des caractéristiques à la fois visqueuses (comportement d’un fluide idéal) et élasto-plastiques (comportement d’un solide idéal).
Dans un premier temps, les différentes ondes mécaniques sont présentées. La réponse de la matière à ces sollicitations mécaniques est ensuite détaillée au travers des phéno-mènes viscoélastiques et élasto-plastiques. Dans un deuxième temps, le modèle thermo-élasto-plastique utilisé pour les simulations de la déformation d’un diélectrique par un laser femtosconde est présenté. Enfin, un modèle de prédiction de rupture du matériau est proposé afin d’évaluer, en fonction des contraintes calculées, les zones de fractures potentielles au cours de l’interaction laser-solide.

Ondes mécaniques

Trois types d’ondes peuvent être différenciées : les ondes longitudinales ou de com-pression/détente, les ondes transverses ou de cisaillement et les ondes de surface.
Ondes de compression et de raréfaction
L’onde de compression est une onde longitudinale, c’est-à-dire que les déplacements de matière induits s’effectuent dans le sens de propagation de l’onde (Fig. 1.6(a)). En se propageant, cette onde va comprimer localement de proche en proche le matériau en augmentant sa pression et sa densité. Or d’après le principe de conservation de la matière, puisque une partie du matériau est comprimée et que sa densité augmente localement, immédiatement derrière l’onde de compression, la densité diminue ainsi que la pression. Une onde de raréfaction (similaire à une onde de détente) est ainsi formée et reste dans le sillage de l’onde de compression.
Onde de cisaillement
L’onde de cisaillement est une onde transverse, c’est à dire que les déplacements de matière induits s’effectuent perpendiculairement au sens de propagation de l’onde (Fig. 1.6(b)). Elle accompagne très souvent les ondes de compression/détente et constitue le deuxième mode de propagation de l’énergie dans les solides qui contribue fortement à sa dissipation. Ce type d’onde s’observe généralement dans les solides et intervient rarement dans les liquides et jamais dans les gaz. En effet, bien que certains liquides visqueux, comme le miel, résistent à un écoulement en cisaillement, dans la majorité des cas, les viscosités étant plutôt faibles, on suppose qu’une onde de cisaillement ne se propage pas dans les fluides.
Onde de surface
Une onde de surface est, de manière générale, une onde se propageant à la surface d’un matériau élastique avec une amplitude qui décroît exponentiellement avec la profondeur du solide. Différents types d’ondes de surface existent. L’onde de Rayleigh [68], première-ment observée, est une onde semblable à une vague, composée à la fois d’un mouvement longitudinal (onde de compression/détente) et d’un mouvement transverse vertical (onde de cisaillement dans le plan perpendiculaire à la surface). L’onde de Love est un autre type d’onde de surface [69]. Il s’agit d’une onde transverse horizontale, i.e. d’une onde de cisaillement dans le plan de la surface, notamment, à l’origine de nombreux dégâts maté-riels durant les séismes. De nombreuses autres ondes de surface existent, plus complexes, combinant ondes longitudinales et transverses (verticale et horizontale). Cependant, dans le cadre de cette thèse, les applications présentées étant en volume, aucune onde de surface ne sera traitée.
Ainsi, l’ensemble de ces ondes mécaniques vont soumettre les matériaux à différents types de sollicitations : traction, compression et cisaillement. Selon le matériau et sa réponse à de telles sollicitations, les déformations induites ne sont pas les mêmes et peuvent présenter des comportements particuliers.

La viscoélasticité

Un matériau viscoélastique (plasticité à part) soumis à une sollicitation en contrainte va à la fois présenter un comportement élastique instantané (déformation très rapide du matériau et réversible), élastique différé ou anélastique (déformation retardée et réver-sible) et visqueux (déformation irréversible dépendant de la vitesse ou de la fréquence de sollicitation). Ce type de matériau a donc un comportement intermédiaire entre un solide et un liquide visqueux. Les phénomènes de fluages et de relaxation de contrainte, ci-dessous présentés, sont caractéristiques des matériaux viscoélastiques et permettent de mettre en évidence l’ensemble de leurs comportements. Dans ce qui suit, la sollicitation considérée est une traction pure entraînant un étirement du matériau. Un autre type de sollicitation, telle qu’une contrainte en cisaillement pure, entraînant un glissement du ma-tériau, aurait également pu convenir. En effet, le choix du type de sollicitation n’enlève rien au caractère général des phénomènes et modèles présentés ci-dessous [70].
Fluage et relaxation de contrainte
Lorsqu’une contrainte en traction constante σ0 est appliquée à un matériau viscoélas-tique, celui-ci va subir une déformation (un étirement) ε(t) variable dans le temps. Ceci est le phénomène de fluage et peut être caractérisé par une fonction, appelée souplesse de fluage ou fonction de fluage, définie par : F (t) = ε(t) (1.25) σ0
De la même manière, lorsqu’une déformation constante ε0 est appliquée à un matériau viscoélastique, la contrainte induite σ(t) va diminuer au cours du temps. Il s’agit du phé-nomène de relaxation de contrainte qui peut être également caractérisé par une fonction, appelée rigidité de fluage ou fonction de relaxation, définie par :R(t) = σ(t) (1.26)
Afin de simplifier les modèles, les lois de comportement présentées ci-après sont li-néaires et la sollicitation considérée reste une traction pure.
Etat de l’art expérimental et théorique
Bien que les premières expériences sur les micro-explosions et les dommages induits par laser dans le volume de matériaux transparents soient entreprises au début des années 1970 [97], il faut attendre la fin des années 90 pour que les premières études spécifiques à la formation de cavités apparaissent. Les travaux de E. N. Glezer et al. [96] peuvent être mentionnés, avec notamment la mise au point d’une nouvelle méthode de stockage de données optiques tridimensionnelles. Dans la plupart des expériences menées sur les micro-explosions et les formations de cavités [15–17, 20] (Fig. 2.1), les lasers de type Ti : saphir sont employés. Ce dernier confère une longueur d’onde λL de 800 nm et des énergies variant de quelques dizaines de nJ à quelques µJ avec des durées d’impulsion paramétrées de l’ordre de 100 fs. Quant aux matériaux utilisés, le saphir, le quartz, la silice ou encore le BK7 sont favorisés. Bien que ces derniers puissent être très différents de par leur nature (cristalline/amorphe) ou encore de par leurs propriétés mécaniques, les tendances et les comportements observés sont très similaires.
Pour focaliser très fortement le laser à l’intérieur du volume des matériaux diélec-triques, des objectifs de microscope sont utilisés avec des ouvertures numériques (NA) d’environ 0,4 à 1,4. Ces conditions de focalisation extrêmes amènent à des volumes fo-caux et des surfaces focales 2 de l’ordre de quelques dixièmes de µm3, dont les largeurs sont comparables à la longueur d’onde. De cette manière, pour des impulsions de 100 fs avec des énergies de plusieurs dizaines de nJ à 100 nJ, les intensités obtenues sont de l’ordre de 1014 W/cm2 au point de focalisation, excédant le seuil de claquage optique du matériau, i.e. son seuil d’endommagement. Le volume focal est situé, en fonction de la distance de focalisation choisie, entre 5 et 50 µm sous la surface du matériau. L’impulsion laser est supposée ne pas induire de dommage entre la surface et le point de focalisation, où les intensités plus modérées (faisceau pas assez focalisé), i.e. inférieure au seuil de claquage optique du matériau. De plus, afin d’éviter les phénomènes d’auto-focalisation et donc dans l’optique de déposer l’énergie laser à une position bien particulière à l’intérieur du matériau transparent, la puissance laser requise doit être inférieure à la valeur critique Pc d’auto-focalisation. Dans le cas de la silice Pc = 2 MW [17].
Les intensités atteintes dans ces conditions excitent la matière solide via l’ionisation multiphotonique et l’ionisation par impact. Ces deux phénomènes qui sont, par ailleurs, à l’origine du claquage optique du matériau, vont transformer la zone irradiée par le spot laser en un plasma (Fig. 2.2(a)) de densité solide (densités d’électrons de l’ordre de 1023 cm−3 à densité standard du matériau solide et à 800 nm). Cette densité d’électrons de l’ordre de la densité critique du plasma (dépendante de la fréquence du laser), la longueur d’absorption et le volume d’absorption diminuent [16].
Evolution du code hydrodynamique CHIC et hy-pothèses de la simulation thermo-élasto-plastique
CHIC est un code hydrodynamique 2D axisymétrique développé au laboratoire CELIA [99]. Ce code de simulation numérique est utilisé notamment pour l’étude de la fusion par confinement inertiel, en physique des plasmas et pour l’étude de l’interaction laser-matière. Différents modèles physiques sont intégrés dans le code et couplés au modèle hydrodynamique (Fig. 2.3) de sorte à traiter un grand nombre de phénomènes. Ainsi, le code prend en compte la diffusion de la chaleur avec un modèle à deux températures, le transport radiatif et la propagation du laser via un algorithme de ray tracing (optique géométrique). Un modèle de magnétohydrodynamique (MHD) est également implémenté.
Dans ce travail de thèse, le modèle thermo-élasto-plastique, présenté dans le premier chapitre (Sec. 1.2) a été inclus au code CHIC. Plus exactement, le modèle d’élasto-plasticité (Sec. 1.2.4) développé dans une géométrie 2D plan et validé par P. H. Maire et al. [74] a été ajouté au modèle hydrodynamique tandis qu’un modèle de diffusion de la chaleur monotempérature a été développé. En effet, l’hypothèse de l’équilibre ther-mique (Te = TL) étant vérifiée après le passage de l’impulsion laser dans le matériau et l’établissement du dépôt d’énergie (voir Sec. 1.1.4), un modèle de diffusion de la chaleur tenant compte seulement de la température du matériau peut-être considéré. Enfin, le modèle de ramollissement (Sec. 1.2.5) a également été implémenté afin de tenir compte des changements de phases solide-liquide et ainsi assurer le passage sans discontinuité d’un comportement solide à fluide du matériau considéré.
Le modèle de diffusion de la chaleur monotempérature a été validé dans le cas où aucun processus hydrodynamique n’était en jeu (voir Annexe D) et les résultats ont été comparés à des solutions analytiques [100]. L’ensemble de la simulation thermo-élasto-plastique a ensuite été validée au travers de différents tests, notamment par l’utilisation du code ESTHER 1D [80–84] qui a fourni des résultats identiques pour des cas de validation similaires (non montrés).
La géométrie 2D planaire considérée dans cette étude suppose une invariance du dé-pôt d’énergie le long de l’axe de propagation du laser. Dans les expériences [15–17], les cavités générées sont en forme de larme dans cette direction avec des longueurs carac-téristiques deux fois plus grande que leurs diamètres, comme en atteste la Fig. 2.4. Ici, seule l’évolution du diamètre de la cavité est considérée dans le plan perpendiculaire à la direction de propagation du laser. Le modèle 2D permet dans un premier temps de décrire les comportements généraux de l’évolution des rayons de cavités. L’ajout d’une troisième dimension devrait seulement réduire légèrement les tailles des structures et modifier fai-blement les dynamiques, dû à l’ajout de contraintes dans la direction de propagation du laser (une contrainte longitudinale σz et deux contraintes de cisaillement τxz et τyz). De plus, il est à noter que la simulation prend en compte implicitement une longueur d’un cm (unités CGS) dans la troisième dimension et non pas infinie. Ainsi les valeurs d’énergie sont exprimées en J/cm de manière implicite dans la suite du document. Enfin, il est à noter que la géométrie 2D n’a pas de conséquences dans l’utilisation de la loi de Weibull à propos des volumes considérés. En effet, ceux-ci ayant une longueur l0 = 1 cm dans la troisième dimension, V0 = S0l0 et V = Sl0, ne modifiant donc pas les rapports des volumes puisque S/S0 = V /V0, où S et S0 correspondent, respectivement, à la surface (coupe) de matériau soumis à des contraintes non nulles et à l’échelle caractéristique d’espace dans la géométrie 2D.
Les temps d’interaction d’une impulsion laser femtoseconde dans un volume de silice étant bien plus courts (de l’ordre de la centaine de femtoseconde jusqu’à quelques pi-cosecondes) que les temps hydrodynamique de modification du matériau (supérieurs à une dizaine de picosecondes jusqu’à la nanoseconde), la physique de l’interaction laser-diélectrique (donnant lieu à un dépôt d’énergie) et la dynamique de formation d’une cavité peuvent être étudiés de manière séparée. Le dépôt d’énergie devient dans ce cas un pa-ramètre initial de la simulation thermo-élasto-plastique. Dans un premier temps, afin de comprendre et de décrire les mécanismes de déformation d’un matériau irradié par un laser femtoseconde fortement focalisé en volume, un dépôt d’énergie gaussien, homogène, est considéré afin de simplifier les études dans ce chapitre. Celui-ci, n’étant pas calculé à l’aide de la résolution des équations de Maxwell couplées à l’ionisation du matériau, ne rend donc pas compte des effets de propagation du laser, des potentiels défauts d’éclai-rement ou encore des défauts du matériau tels que des légères variations des propriétés optiques ou de la densité du solide, qui peuvent conduire à des dépôts moins homogènes mais plus réalistes. Cependant, dans le cas de la formation de nano-cavités, la forme du dé-pôt d’énergie n’étant pas un paramètre prépondérant, contrairement à la densité d’énergie absorbée ou encore à la taille caractéristique du dépôt, l’hypothèse d’un dépôt homogène est une bonne approximation. En effet, la forme du dépôt d’énergie est en grande partie perdue lors de la déformation du matériau dans le cas de la génération de micro-explosion et des conditions physiques considérées ici (argument vérifié dans l’étude de la formation d’une double cavités Sec. 2.4.1).
Les tailles caractéristiques (rayons) de chaque dépôt d’énergie dans les cas présentés ci-dessous, sont tous supposés inférieurs à la longueur d’onde du laser à cause des processus non-linéaires (ionisation multiphotonique et par impact) mis en jeu lors de l’interaction laser-diélectrique. L’énergie laser est alors absorbée dans un volume, inférieur au volume focale défini plus haut, dont le rayon est égal à 0,13 µm à mi-hauteur [16, 17]. Pour des énergies absorbées considérées de l’ordre de 10 nJ [16, 17] les densités d’énergie obtenues sont alors de l’ordre de quelques centaines de kJ/cm3, suffisante pour induire des tempé-ratures et des pressions menant à la formation de cavités [16, 17]. Les densités d’énergie de chaque dépôt seront choisies en particulier pour obtenir des cavités dont les tailles sont d’environ 0,4 µm, les dynamiques menant à de telles tailles étant régies par plusieurs mécanismes physiques intéressants tels que l’apparition de transitions de phases due à la force du choc ou encore d’un régime plastique en phase de compression et de détente (onde de raréfaction derrière le choc). Pour des dépôts trop faibles, le choc ne transporte pas assez d’énergie pour localement fondre le matériau et induire un régime plastique en phase de détente et inversement pour des dépôts trop importants la matière solide autour de celui-ci est en grande partie fondue et perd son caractère élasto-plastique.
Enfin, il est à rappeler que la réponse solide du matériau prise en compte dans le modèle présenté Sec. 1.2.4 est celle d’un solide idéal. Dans le cadre de cette thèse, les gradients de températures induits par les dépôts d’énergie dans les différentes applications présentées sont très grands. Les tailles des rayons des dépôts d’énergie sont de quelques dixième de µm et les tailles transverses des structures finales observées expérimentalement sont de l’ordre du µm. Les températures observées du plasma dense créé, au centre des dépôts, avoisinent 104 à 105 K tandis qu’à l’extérieur de la zone de dépôt le matériau est froid et est supposé à température ambiante. Les gradients de températures sont donc de l’ordre de 104-105 K/µm. Puisque la déformation de la matière prend place sur une échelle de temps de l’ordre de la centaine de picoseconde jusqu’à la nanoseconde et que la diffusion de la chaleur commence juste à entrer en jeu à cet instant 4, les gradients de températures sont supposés rester du même ordre de grandeur durant la structuration du matériau. Ainsi, la zone où les températures du matériau sont comprises entre 900 K et 2000 K (voir Sec. 1.2.2) est très petites (estimée autour du nm) devant la zone totale de déformation. C’est pourquoi, dans les conditions physiques considérées ici, les effets de viscosité lors de la déformation du matériau par une contrainte sont négligés et le comportement élasto-plastique d’un solide idéal est seulement pris en compte.
Simulations d’une cavité unique
La simulation de la formation d’une cavité unique dans la silice, générée par un laser femtoseconde fortement focalisé, est présentée dans cette section. La densité initiale de la silice est égale à 2.2 g/cm3, sa limite d’élasticité et son module de cisaillement dans les conditions standards sont respectivement Y0 = 7.1 GPa, G0 = 22.6 GPa. L’EOS utilisé est la table SESAME 7386.
Comparaison du modèle fluide et élasto-plastique dans le cas 1D
Afin de comparer le modèle développé et implémenté dans CHIC au modèle fluide sans comportement solide, le cas simplifié à une dimension de la formation d’une cavité est examiné. Le tableau 2.1 résumé l’ensemble des paramètres de la simulation. La densité d’énergie absorbée initiale est ici de 90 kJ/cm3 soit environ 0.9 nJ d’énergie absorbée et placée au centre du domaine. Cette énergie est plus faible que celles annoncées au début de ce chapitre dû à l’absence des deux autres dimensions en espace. En effet, dans ce cas, l’énergie dans le domaine ne pouvant être relaxée que dans deux directions (au lieu de six), il est nécessaire d’injecter une quantité d’énergie plus faible pour obtenir une structure de taille identique (d’environ 0,4 µm) à celle obtenue dans un espace à plusieurs dimensions
0.025 µm avec λth = 1.381 W.m−1.K−1 la conductivité thermique, ρ = 2.2 g/cm3 la densité du matériau et cV = 1000 J.kg−1.K−1 la capacité thermique massique à volume constant du matériau (supposé égale à la capacité thermique massique à pression constante cV dans le cas d’un matériau solide). Cette longueur de diffusion thermique est donc très petite devant les longueurs caractéristiques de déformation, rendant négligeable les effets de diffusion de la chaleur et les variations de conductivité thermique. λth est supposée constante. avec une énergie plus élevée. Dans le cas 1D, le maillage cartésien est constitué d’un millier de mailles le long de l’axe x et d’une seule maille le long de l’axe y. La taille du maillage est donc de 20 µm de long et 20 nm de large pour des mailles carrées de 20 nm de côté. Il est important de noter que le domaine est donc mille fois plus long que large, approchant ainsi une géométrie purement 1D. Dans ce cas la contrainte σx est la seule composante du tenseur des contraintes (qui se réduit donc à un scalaire), les contraintes le long de l’axe y étant négligeables (σy = τxy ‘ 0).
L’énergie absorbée induit une pression initiale d’environ 100 GPa et une température initiale d’environ 2.104 K au centre du domaine. La relaxation de la zone chauffée et entourée de solide, à température et à pression ambiantes (T = 300 K et P = 1 bar), amène à la formation d’un choc qui se propage dans le matériau. La Fig. 2.5 présente
Figure 2.5 – Profils spatiaux de la pression et de la contrainte longitudinale σx tels que prédits respectivement par le modèle fluide (traits en pointillés) et le modèle élasto-plastique (traits pleins) à 50, 100, 150, 200, 300, 500 ps (respectivement, courbes 1-6) dans une géométrie 1D. Des différences de formes et de vitesses notables entre les deux ondes de choc prédites par les deux modèles sont observées. Notamment, un précurseur élastique et une vitesse plus importante de l’onde de choc sont visibles avec le modèle élasto-plastique.
l’évolution spatiale de la pression (modèle fluide) et de la contrainte longitudinale σx (modèle élasto-plastique) pour différents temps. Il est à noter que la contrainte est définie positive en compression dans un souci de clarté et de compréhension.
La propagation du choc, induit par la relaxation de la matière chaude, est observée dans les deux cas. Cependant, la forme et la vitesse du choc diffèrent en fonction du modèle utilisé. Tout d’abord, la vitesse du choc est plus rapide dans le modèle élasto-plastique que dans le modèle fluide, puisque celui-ci se propage dans de la matière solide où les vitesses du son sont plus grandes (voir Eqs. (1.44) et (1.45)). Au bout de 500 ps, le front de l’onde se situe à environ 3.3 µm du centre du domaine avec le modèle élasto-plastique, soit une vitesse moyenne d’environ 6,6 km/s, tandis qu’il se situe à environ 2,7 µm du centre du domaine avec le modèle fluide, soit une vitesse moyenne d’environ 5,4 km/s. Ensuite, dans le cas du modèle fluide, le choc se propage avec un front d’onde raide sans changement significatif de forme. Il est à noter que le front d’onde est défini par la hauteur de l’onde depuis son pied jusqu’à la valeur maximale de son amplitude (dans le sens opposé à sa propagation). Seule l’amplitude du choc diminue au cours du temps en raison de la restitution et de la dissipation de l’énergie qu’il transporte. Dans le cas du modèle élasto-plastique, le choc se propage de manière identique au modèle fluide jusqu’à un temps d’environ 50 ps. À partir de cet instant et jusqu’à 300 ps environ, un changement de forme est observée et le choc ne présente plus de front d’onde raide. Ce comportement est dû au passage du choc de la phase liquide (chauffée) du matériau à la matière environnante froide qui est dans l’état solide. Comme expliqué dans la Sec. 1.2.3, le solide étant soumis à de fortes contraintes (supérieures à la limite d’élasticité Y ), celui-ci va subir des déformations élasto-plastiques, i.e. des déformations réversibles et permanentes menant à la formation des structures observées exprimentalement (Sec. 2.1). Puisque les vitesses d’écoulements (de déplacements) dans les régimes élastiques et plastiques sont différentes, dû à des vitesses du son différentes dans ces régimes (voir Sec. 1.2.4), le choc se sépare en deux ondes distinctes : une onde plastique et un précurseur élastique. Tandis que la première, induisant des déformation permanentes dans le matériau, se propage à la vitesse du son hydrodynamique ch (dépendante de la densité locale du matériau), la seconde, induisant des déformations réversibles, se propage avec une vitesse longitudinale cl plus grande. Ainsi, le précurseur élastique étant plus rapide que l’onde plastique, le choc se sépare en deux. De plus, il est à noter que le précurseur élastique a une amplitude égale à YLEH qui est d’environ 12 GPa pour SiO2 telle que prédite par l’EOS et les propriétés mécaniques du matériau 5. Finalement, après 300 ps, seule une onde acoustique (élastique) se propage car σx < YLEH (équivalent à σeq < Y ) et plus aucune déformation permanente n’est induite.
Le front d’onde du choc, qui présente une structure particulière à deux ondes, com-presse le solide qui se déforme d’abord de manière élastique puis de manière plastique. Le matériau précédemment compressé va ensuite subir, à l’arrière de l’onde de choc, une dé-tente (onde de raréfaction) et ainsi subir une traction, telle que montré Sec. 1.2.1. Si cette dernière est suffisamment intense, elle peut alors déformer (étirer) de manière plastique le solide une deuxième fois. Ce scénario est illustré Fig. 2.6 avec le profil spatial de la contrainte longitudinale σx au temps t = 400 ps après le dépôt d’énergie. Cette deuxième plastification du matériau est visible dans la zone de traction où la courbe spatiale du critère de von Mises fournissant les valeurs de σeq/Y est égale à 1, indiquant un régime plastique.
Ces différences présentées ci-dessus entre le comportement fluide et élasto-plastique ont des conséquences sur l’évolution de la densité telle que montrée en Fig. 2.7 où les profils spatiaux de densité sont présentés pour différents temps. Tout d’abord, dans les deux cas,

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Table des matières

Introduction et contexte de l’étude
1 Modélisation des mécanismes physiques de la structuration par laser femtoseconde 
1.1 Interaction laser-matériau diélectrique
1.2 Rhéologie des matériaux
2 Simulations Thermo-Élasto-Plastique de la formation de cavités dans la silice fondue 
2.1 Etat de l’art expérimental et théorique
2.2 Evolution du code hydrodynamique CHIC et hypothèses de la simulation thermo-élasto-plastique
2.3 Simulations d’une cavité unique
2.4 Simulation de la formation de multiple cavités
3 Simulations de la structuration de la silice fondue par un faisceau de Bessel-Gauss femtoseconde 
3.1 État de l’art expérimental et théorique de l’interaction de faisceaux de Bessel-Gauss avec les matériaux
3.2 Simulations du dépôt d’énergie induit par un faisceau de Bessel-Gauss dansla silice
3.3 Simulations Thermo-Élasto-Plastique de la déformation d’un volume de silice par un faisceau de Bessel-Gauss
Conclusion et perspectives 
A Fonctions spéciales
B Modèles de viscoélasticité linéaire
C Critères de plasticité
D Validation de la diffusion de la chaleur monotempérature
E Modèle de prédiction du rayon de cavité final
Liste des communications

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