Les matériaux de structure des centrales nucléaires sont exposés à un flux de neutrons qui créent du dommage dans le matériau et qui entraînent une modification des propriétés du matériau à l’échelle macroscopique. On observe par exemple une évolution des propriétés mécaniques, comme le durcissement, ou encore des changements dimensionnels comme le gonflement. Ces phénomènes s’expliquent par les évolutions de la microstructure, notamment par la germination et la croissance de cavités et boucles de dislocation. Par exemple, le gonflement, qui est une augmentation isotrope du volume du matériau, est dû à la croissance des cavités. La prévision de l’évolution des microstructures sous irradiation est donc nécessaire à la prédiction des changements dimensionnels ou mécaniques et de la durée de vie des matériaux irradiés.
La germination et la croissance de cavités et de boucles de dislocation sont liées au comportement des défauts ponctuels d’irradiation (atomes auto-interstitiels et lacunes) qui s’agglomèrent du fait de leur sursaturation provoquée par l’irradiation. Les interstitiels et les lacunes étant produits en nombre égal, la croissance de cavités et de boucles requiert des mécanismes physiques supplémentaires à la simple diffusion aléatoire des auto-défauts.
Plusieurs modèles ont été proposés pour expliquer les phénomènes observés sous irradiation, dont le modèle du biais des dislocations. Ce dernier suppose une absorption préférentielle d’interstitiels par les dislocations et amas interstitiels. Cette absorption préférentielle est en général due au couplage des champs élastiques générés par les défauts avec ceux générés par les puits (dislocations, cavités, joints de grains, etc.). On parle alors de biais élastiques. Dans le cas du gonflement, il est généralement admis que c’est l’absorption préférentielle des interstitiels par les dislocations et les amas interstitiels qui permet l’apparition d’un excès de lacunes dans la matrice, permettant la formation de cavités, aboutissant au gonflement. Pour pouvoir prédire précisément l’évolution des matériaux sous irradiation, il est donc important de décrire précisément le comportement des défauts ponctuels vis-à-vis des puits .
La simulation de l’évolution des matériaux sous irradiation nécessite de considérer des volumes importants et des temps longs. De ce fait, les méthodes permettant une description explicite des défauts et de leur migration, comme les méthodes de Monte Carlo cinétique (KMC), sont inadaptées car trop limitées aux petits volumes et faibles temps.
On a donc recours à des méthodes en champ moyen, comme la dynamique d’amas (DA). Dans ce type d’approche, les défauts et puits ne sont considérés qu’au travers de leurs concentrations. Les interactions élastiques entre les défauts et les puits ne sont prises en compte que de manière effective, au travers de paramètres appelés forces de puits. Ils permettent en particulier d’intégrer les biais d’absorption dans les équations en champ moyen. Ce sont ces paramètres qui représentent la capacité des puits à absorber les défauts ponctuels, et donc incluent les effets des interactions élastiques et les propriétés des défauts ponctuels. Cette approche permet de simuler efficacement l’évolution des microstructures et également de prédire les taux de gonflement des matériaux sous irradiation. Ce formalisme impose cependant des limites conséquentes. En effet, les résultats de DA sont très sensibles aux valeurs des forces de puits. Or, ces paramètres sont mal connus, leur détermination reposant la plupart du temps sur des hypothèses concernant les interactions élastiques ou les propriétés des défauts ponctuels. De plus, ce formalisme, négligeant les corrélations spatiales, aboutit le plus souvent à des distributions trop piquées par rapport aux observations expérimentales. Une évaluation précise des forces de puits prenant en compte les propriétés des défauts, les interactions élastiques et les corrélations spatiales semble donc nécessaire.
Les matériaux de structure des centrales, pour la plupart des alliages métalliques, sont exposés à des irradiations aux neutrons. On observe alors des évolutions, visibles et mesurables à l’échelle macroscopique. Ces évolutions dépendent de la dose reçue par le matériau, qui est mesurée en « déplacements par atome » (dpa). Il s’agit d’une mesure du nombre moyen de déplacements effectué par chaque atome du fait de l’irradiation.
|
Table des matières
Introduction
Chapitre 1 – Microstructures sous irradiation : modèle du biais des dislocations et forces de puits
1.1 Évolution des microstructures sous irradiation : influence des biais élastiques
1.2 Diffusion des défauts ponctuels dans un champ élastique
1.3 Forces de puits
1.4 Résumé et définition des premiers objectifs de la thèse
Chapitre 2 – Techniques de modélisation des microstructures
2.1 Introduction
2.2 Calcul ab initio – Théorie de la Fonctionnelle de la Densité
2.3 Monte Carlo Cinétique
2.4 Dynamique d’amas
2.5 Objectifs et démarche
2.6 Résumé
Chapitre 3 – Étude de l’influence des interactions élastiques et des dipôles élastiques sur les forces de puits
3.1 Introduction
3.2 Méthodes
3.3 Dislocation droite
3.4 Cavité sphérique
3.5 Boucle de dislocation
3.6 Influence des polarisabilités diaélastiques
3.7 Conclusion
Chapitre 4 – Étude des effets de voisinage
4.1 Introduction
4.2 Création des microstructures
4.3 Étude des forces de puits dans les microstructures
4.4 Amas sphériques sans interactions élastiques
4.5 Amas toriques sans interactions élastiques
4.6 Amas toriques avec interactions élastiques
4.7 Résumé
Conclusion
Télécharger le rapport complet