Techniques et instruments
Les techniques et instruments utilisés dans l’étude varient du qualitatif au quantitatif.
• Ainsi pour la recherche qualitative il y’ a eu différentes étapes. La phase d’exploration a consisté à cerner et définir le contexte de la zone afin de circonscrire le cadre de l’étude. Elle a permis de voir aussi les différentes caractéristiques et composantes de la zone autrement dit une monographie du milieu avec l’aide des autorités administratives, des orateurs traditionnels, des chefs de quartier dans le cadre d’une étude historique de la zone et de l’entreprise. Il y’a eu aussi une phase de recherche qualitative sur le terrain. Des entretiens libres avec des questions non formulées d’avance ont été effectués avec des personnes ressources telles que le personnel des structures de santé, des associations de jeunes, les réseaux de personnes vivant avec le VIH. Les entretiens libres avec les prostitués cherchaient à avoir des informations sur leurs clients et les moments les plus intenses de leurs activités, ils visaient également à collecter des informations sur leurs connaissances sur les IST et sur le VIH/SIDA. Ces questions avaient aussi intégré aussi la dimension genre qui a permis de voir le niveau d’éducation de ces femmes. Les différents personnels sanitaires ont constitué de véritables sources d’information concernant les chiffres et les statistiques sur la prévalence du VIH dans les différentes structures de santé. On a eu à faire aussi des entretiens avec des saisonniers, des camionneurs, des restauratrices pendant les moments d’arrêts de l’usine. Des histoires de vie avec des familles affectées par le SIDA ont servi dans le cadre de l’enquête ethnographique. Ces familles ont été choisies à partir des données préliminaires de l’enquête sur la situation épidémiologique en collaboration avec certains médecins du privé et du public.
• Pour l’enquête qualitative, un questionnaire comprenant différentes sections a été utilisé. Ainsi après la partie d’identification nous avons les différentes sections suivantes :
– Intégration socio-professionnelle
– Connaissances du VIH
– Attitudes et représentations
– Comportements sexuels
– Dépistage et statut sérologique
Présentation des ICS (Industrie Chimique du Sénégal)
Dés la fin du siècle dernier, la présence de phosphate était décelée au Sénégal, mais il a fallu attendre 1950 pour qu’une prospection systématique fut entreprise d’abord par le Bureau de Recherche Géologique et Minière BRGM puis par la Société d’Étude et de Recherche Minière au Sénégal SERMIS. Ainsi en 1957 la Compagnie Sénégalaise des Phosphates de Taïba (CSPT ) nouvellement créée reprenait l’ensemble des droits miniers de la SERMIS et mettait sur pied l’exploitation du gisement. Ce dernier est localise à 85km au Nord Est de Dakar, dans la région de Thiès ( plus particulièrement dans le département de Tivaouane). A l’époque, la CSPT était une société anonyme répartie entre le gouvernement du Sénégal et des groupes d’investisseurs français et américains. Sa concession valable jusqu’au 31 décembre 2033 et renouvelable par la suite tous les 25ans, porte sur 10500 ha, avec des extensions du jugement couvertes par 8 permis d’exploitation couvrant 19500 ha. En 1971 la production a dépassé 1.400.000 tonnes de phosphates sur des réserves évaluées à 60 Milliards de tonnes. Vers les années 80, avec la « sénégalisation » du personnel d’encadrement (avec l’emploi d’ingénieurs et de cadres sénégalais), un projet fut mis sur pied et aboutit à la création d’une industrie chimique basée sur la transformation du phosphate en acide phosphorique et en engrais destinés, pour la plupart, à l’exportation. En 1996 les deux entreprises (mine et chimie) ont été fusionnées avec le rachat de la CSPT par la chimie, d’où la dénomination ICS (Industries Chimiques du Sénégal.) Aujourd’hui les ICS se sont développés avec la coopération Sud-Sud notamment la rencontre entre les besoins en acide phosphorique de pays comme l’Inde, le Cameroun, la Cote d’Ivoire, le Nigeria et la disponibilité d’une mine de phosphate au Sénégal. Ainsi, le complexe industriel des ICS a été bâti autour de différents sites dont la mine et la chimie avec un effectif d’environ 2000 employés. La production des engrais est de plus en plus destinée à l’exportation vers l’Inde ( principal partenaire) et dans d’autres pays producteurs de coton comme le Mali, le Bénin et le Burkina. Les ICS sont implantées dans une zone administrative couvrant la commune de Mboro, avec les communautés rurales de Taïba Ndiaye, de Darou Khoudoss et de Méouane. L’extraction minière et de la production d’acide constituent l’une des contraintes les plus importantes en termes d’environnement dans toute la zone riveraine. Il faut noter l’extension de la mine vers d’autres zones ayant comme conséquence le déguerpissement des populations ou leur déplacement, ce qui crée une atmosphère de tension et de conflits permanents entre les populations et les ICS mais aussi entre populations déplacées et les autochtones avec comme problème déterminant la gestion des terres. Néanmoins, le pole d’attraction que constituent les ICS continue de faire de ces lieux des points de chute de toute une population venant de régions différentes ou d’autres pays à la recherche d’emploi.
Effets sur le capital humain et sur la productivité
Il y’ a des impacts de la maladie du SIDA sur le capital humain et la productivité de l’entreprise. La maladie a des répercussions sur le rendement et la qualité du travailleur vivant avec le virus. Concernant l’entreprise, le SIDA est considéré comme ayant un impact très négatif car la maladie s’attaque à des travailleurs qualifiés, instruits et qui sont souvent, des soutien de famille. Ceci renvoie à des pertes de compétence : le SIDA a tendance à frapper des individus productifs qui ont accumulé un capital d’expérience qui s’est constitué au cours de longues années de travail. Une étude menée au Zaïre en 1988 montre que l’infection à VIH/SIDA avaient atteint des individus dont les niveaux d’instruction et de revenus de qualification étaient les plus élévés . Ces répercussions sont ressenties à la fois dans l’entreprise et au niveau de la famille. On note que, selon les données du questionnaire, la moyenne d’age des personnes vivant avec le VIH/SIDA est de 36 ans. Ces personnes appartiennent aux différentes catégories socioprofessionnelles de l’usine, comme le montre le tableau ci-dessous. A travers le tableau on peut lire que le SIDA touche aussi bien les cadres que les ouvriers et les journaliers. Pour l’entreprise, l’enquête montre certains indicateurs à partir desquels on peut identifier et analyser des effets du SIDA sur la productivité. Le SIDA menace la productivité de l’entreprise notamment avec l’augmentation du taux d’absentéisme. Le problème consiste en une perte de plusieurs heures de travail comme le montre le tableau. En générale les personnes infectées s’absentent le plus souvent pour des raisons de maladie. A un certain stade de la maladie, ces absences peuvent s’accentuer et les congés de maladie deviennent de plus en plus fréquents. Selon les informations que nous avons reçues, à l’usine, les travailleurs vivant avec le VIH/SIDA, sont souvent reclassés dans des postes considérés comme moins contraignants et plus compatibles avec leur état de santé avec, parfois, des créneaux horaires réduits. Ce qui pourrait, certainement, entraîner une baisse de leur productivité.
CONCLUSION
Cette étude sur le SIDA a nécessité la construction d’une approche conceptuelle qui permet une analyse multidimensionnelle (tout à la fois social, économique et biologique) de la maladie. Cette approche a été empruntée à la démarche générale des sciences sociales. En effet, l’approche des sciences sociales sur la question du SIDA dépasse généralement le cadre d’une simple évaluation pour entrer dans l’analyse de la complexité des facteurs associés à la maladie. Il fallait établir des liens entre les facteurs culturels, sociaux, économique et la progression du SIDA. Notre recherche sur le SIDA en zone minière a soulevé des questions liées à la dynamique économique et sociale qui caractérise le milieu. Plusieurs recherches sur le SIDA ont été menées en partant du concept de vulnérabilité à l’infection VIH et ont ciblé des groupes dits à risque, en l’occurrence, les travailleuses du sexe, les homosexuels, les migrants. Ces groupes, isolés parfois dans un souci de recherche épidémiologique, se révèlent, être, sous l’angle de la recherche socioanthropologique, des agents sociaux en interrelation permanente avec leur environnement social. L’étude nous montre que la vulnérabilité et le risque d’infection au VIH se reproduisent dans le contexte de la zone des ICS. Des facteurs associés à la propagation du SIDA ont été montrés par les enquêtes. Ainsi le lévirat est apparu comme un facteur de risque de transmission du virus, de même que le multipartenariat sexuel. Une large proportion de la population semble avoir entendu parler du SIDA mais les changements de comportement sexuel ne semblent pas avoir eu lieu. Les facteurs de risque et de vulnérabilité semblent résulter d’interactions complexes entre les réalités socio-économiques et les perceptions et les types de comportements. Par ailleurs, l’enquête par questionnaire révèle une prévalence du VIH de 5%. Ce qui est un taux très élevé par rapport à la moyenne nationale, qui elle, est estimée à 1,4% chez les adultes. Ces données du questionnaire vont d’ailleurs, dans le sens des données épidémiologiques recueillies à travers différentes structures de santé implantées dans les ICS et dans la zone. On retiendra que la majorité des personnes vivant avec le VIH/SIDA telle que l’a montré les enquêtes sont des hommes mariés. D’après les données des structures de santé, les hommes mariés vivant avec le VIH n’avaient pas informé leurs conjointes. Dans les milieux du travail comme le montre cette étude sur l’entreprise des ICS, le SIDA s’avère être une menace très importante. Pour l’essentiel l’impact du SIDA dans l’entreprise apparaît à différents niveaux. La perte de productivité ainsi que la perte d’une main d’œuvre qualifiée pourraient être des conséquences qui résultent de l’absentéisme des personnes infectées du fait que l’épidémie s’attaque à la population la plus active. A cela s’ajoute les dépenses financières liées à la prise en charge médicale des travailleurs infectés. L’étude a soulevé des points de réflexion qui, dans le souci d’une approche holistique pourrait, compléter l’analyse de la situation du VIH/SIDA dans l’entreprise par des recherches sur les cultures et relations sociales avec des communautés locales qui sont en interaction avec les ICS. La mise en œuvre de cette approche pourrait s’appuyer sur l’approche qualitative telle que posée dans l’étude (notamment par la reconstitution et l’analyse des cas de personnes et de familles infectées ou directement affectées par le VIH).
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Table des matières
PARTIE I : Cadre générale et méthodologique
Chapitre 1 Cadre général
1.1 Justification
1.2 Plan de rédaction
1.3 Problématique
1.4 Questions de recherche
1.5 Hypothèses
1.6 Revue de la littérature
1.7 Modèle d’analyse
1.8 Objectifs
1.9 Définition des concepts
Chapitre 2 Cadre méthodologique
2.1 Méthodologie
2.1.1 Techniques et Instrument
2.1.2 Echantillonnage
2.1.3 Déroulement de l’enquête
2.1.4 Plan d’analyse
2.2 Caractéristiques générales de l’échantillon
PARTIE II : Présentation du cadre d’étude
Chapitre 1 Contexte socio-économique
1.1 Présentation des ICS
1.2 Contexte général de la zone
Chapitre 2 Situation épidémiologique
2.1 Les données des structures de santé
2.2 Les données du questionnaire
2.3 Profil des personnes vivant avec le VIH/SIDA
2.4 Présentation de quelques cas
PARTIE III : Représentations et Impact du VIH
Chapitre 1 Attitudes et comportements
1.1 Perceptions et moyens de prévention du SIDA
1.2 Comportements sexuels
Chapitre 2 Identification des impacts sur l’entreprise
2.1 Effets sur le capital humain et sur la productivité
2.2 Les dépenses de santé
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE
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