SEPARATION DE PARTICULES SUBMICROMETRIQUES PAR FILTRATION HYDRODYNAMIQUE

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Rôles biologiques et pathologiques des EVs

Les exosomes sont présents en grande quantité (environ 3.106 exosomes/mL de sérum [32]) dans les fluides biologiques, participent à la communication intercellulaire et entrent en jeu dans les processus physiologiques. Les exosomes peuvent alors avoir plusieurs rôles biologiques selon leur origine cellulaire.
Ainsi, la sécrétion des exosomes peut être vue comme un mécanisme de nettoyage des cellules permettant de se débarrasser de cargaisons non utiles. Cette sécrétion peut permettre la propagation d’agents pathogènes tels que des prions ou des virus dans l’organisme. Il a été démontré que les exosomes, peuvent déclencher des signalisations et délivrer une cargaison de miARN dans ces cellules. Grâce à cette interaction particulière et ciblée, les exosomes permettent de jouer un rôle de messager entre les cellules distantes les unes des autres dans l’organisme. Dans le cas de pathologies, comme le cancer, les exosomes peuvent ainsi transmettre les oncogènes (secrétés par les cellules tumorales) à des cellules saines et ainsi engendrer le transfert de la maladie [36]. De par leur rôle de transporteur d’information et par leur capacité à transférer des messages à travers les membranes cellulaires d’une cellule à l’autre, il est possible d’imaginer le potentiel intéressant que peuvent avoir les exosomes d’un point de vie thérapeutique. En effet, les exosomes permettraient de cibler spécifiquement des cellules et pourraient servir de traitement local sur ces cellules cibles, bloquant ainsi la migration et la prolifération des cellules tumorales. En connaissant la composition des différents fluides biologiques (en protéines, acides nucléiques, lipides, etc …), les exosomes pourraient donc servir de biomarqueurs de nombreuses maladies et ainsi permettrait de surveiller de l’état de santé en fournissant des informations cliniques précoces d’un patient. Ils pourraient servir de diagnostic plus rapide et entrer en jeu dans des aspects thérapeutiques de nombreuses pathologies. Ainsi, un prélèvement de sang, de salive ou d’urine serait la meilleure alternative aux biopsies actuelles, invasives pour le patient [37].
Tout comme les exosomes, les microvésicules, après être libérées de leur cellule hôte et vont pouvoir se déplacer et transporter leur contenu à d’autres cellules distantes. Elles rentrent donc en jeu, tout comme les exosomes, dans la communication entre cellules. Des microvésicules isolées du sang ont permis de mettre en évidence le rôle des microvésicules dans diverses pathologie (cardiovasculaire, cancer, …)

Les techniques de purification et d’isolement des EVs

Comme déjà présenté précédemment, les EVs sont contenues dans les fluides biologiques [39] et les liquides complexes contenant d’autres espèces moléculaires et cellulaires (cellules, débris membranaires, protéines, etc…). Il est donc délicat, dans ces milieux (Figure I.7), de les distinguer de façon exacte.
Ainsi pour remédier à ce problème, il existe à ce jour différentes méthodes permettant de purifier [40] [41] [42] [43] et d’isoler les EVs à partir de ces liquides. Dans cette partie, nous nous contenterons de rappeler les méthodes les plus couramment utilisées.
Figure I.7 – Études comparatives, réalisées en 2015 et 2019, portant sur les différents fluides biologiques à partir desquels les EVs peuvent être purifiées. Résultats obtenus à partir de 357 réponses d’après les sondages réalisés par Gardiner et al. (Possibilité de réponse multiple).

Méthode de purification par la taille

Chromatographie d’exclusion par la taille (SEC)

La chromatographie d’exclusion par la taille ou Size Exclusion Chromatrography (SEC) est une technique utilisée dès 2014 [44] permettant l’isolement des EVs à partir de biofluides. Le principe de la chromatographie d’exclusion par la taille [45] [46] [47] est basé sur la séparation des particules en solution selon leur rayon hydrodynamique. En transportant l’échantillon à travers une colonne remplie d’un matériau poreux (souvent à base de polymère ou de silice) il est possible de séparer les particules selon leur profil d’élution. De ce fait, les petites molécules seront ralenties en entrant dans les pores du polymère tandis que les plus grosses, c’est-à-dire celles possédant une taille supérieure aux pores du polymère, circuleront plus rapidement dans la colonne et par conséquent, seront éluées plus rapidement. Ainsi, il existe plusieurs kits commerciaux utilisant cette approche (qEV chez Izon Science [48], Omnisec chez Malvern Panalytical [49], etc…). De plus, cette technique peut être utilisée en complément d’autres méthodes de purification (ultracentrifugation par exemple).
Les kits commerciaux de chromatographie d’exclusion par la taille ont pour avantages de préserver la structure et l’intégrité biologique de l’échantillon. Sa mise en œuvre est simple et rapide d’utilisation (quelques minutes) comparée à d’autres techniques de purification et ne nécessite qu’un faible volume initial d’échantillon (compris entre 150 µL et10 mL). Cependant, des étapes de prétraitement doivent être réalisées avant l’analyse afin d’éviter d’éventuels bouchages des pores durant le processus de purification.

Fractionnement par écoulement de champ (FFF)

Le fractionnement par écoulement de champ ou Flow Field-Flow Fractionation (FFFF) [50] [51] est une technique permettant d’isoler les vésicules et les exosomes selon leur taille. Pour ce faire, un échantillon, dans lequel les vésicules à séparer sont en suspension, est injecté dans une chambre contenant une membrane semi-perméable. Cet échantillon est soumis ensuite à un flux parabolique. Un champ externe (par exemple une force élastique, un gradient thermique, etc…), transversal à l’écoulement, est appliqué dans cette chambre, conduisant ainsi à l’isolement des vésicules selon leur taille (Figure I.8). Les grosses particules, affectées par l’écoulement perpendiculaire, seront repoussées vers les parois de la chambre où la vitesse d’écoulement est la plus faible. Les vésicules les plus petites, resteront, elles, au centre du flux et seront éluées plus rapidement. L’écoulement asymétrique FFF (AF4) [52]
[53] est souvent utilisé pour fractionner les exosomes à partir d’un milieu de culture ou dans les fluides biologiques.
Cette technique est cependant rarement mise en œuvre dans les laboratoires de biologie du fait des multiples d’instruments nécessaires (application de champs externes) et de leur optimisation complexe.

Filtration et ultrafiltration

Une autre technique, utilisant la taille des objets pour séparer les EVs à partir d’un milieu biologique, est la filtration et l’ultrafiltration [54] [55]. Cette technique se réalise à l’aide d’une membrane semi-perméable adaptée. Il s’agit d’une méthode de séparation rapide et facile d’utilisation et non limitée par le volume d’échantillon. Nordin et al. [56] proposent une filtration en plusieurs étapes, en utilisant des filtres de tailles différentes comme indiqué en Figure I.9.
Figure I.9 – Schéma explicatif de l’ultrafiltration permettant la séparation des exosomes. A) Microfiltre « en tandem » avec des limites d’exclusion entre 20 et 200 nm. B) Ultrafiltration séquentielle. Le premier filtre permet d’éliminer les grosses particules, puis le filtrat passe au travers d’un second filtre pour éliminer les protéines. Le troisième filtre permet la récupération des exosomes inférieures à 200 nm.
Cependant, la filtration, ne permet pas le fractionnement des différentes vésicules, peut engendrer un colmatage ou un piégeage et même provoquer une déformation des vésicules au travers des filtres. De ce fait, l’ultrafiltration est souvent couplée à d’autres techniques [57] de purification comme l’ultracentrifugation ou la SEC.

Ultracentrifugation

La technique de purification actuellement la plus utilisée pour isoler les EVs est l’ultracentrifugation. Avant 2015 [58], 90 % des études portant sur l’isolement des vésicules impliquait cette méthode de séparation. Cette technique, repose sur le principe de la densité des particules. En effet, les espèces les plus denses (comme les cellules, débris cellulaires, etc…) seront isolées en premier en appliquant des forces de centrifugation [59] adéquates. Ces forces sont dépendantes de (1) la vitesse de rotation, (2) du type de rotor [60] (godets oscillants ou à angle fixe) et (3) de la viscosité du milieu (elle-même dépendante de la température, par exemple à 20°C, le plasma est plus visqueux que le sérum et le milieu de culture [61]).
Plusieurs étapes de centrifugation [62] (dans ce cas, il s’agit de centrifugation différentielle) sont nécessaires pour séparer les EVs à partir d’un milieu complexe (Figure I.10). Aussi, trois premières ultracentrifugations permettent d’éliminer les grosses particules (cellules, débits cellulaires, etc…) se trouvant dans la partie inférieure (culots) en gardant les surnageants. Enfin, les deux dernières étapes permettent de purifier [63] l’échantillon en exosomes, en récupérant cette fois-ci le culot. Figure I.10 – Procédure de purification des exosomes par des étapes d’ultracentrifugation (UC) d’après [63]. La première centrifugation permet l’élimination des cellules. En récupérant le surnageant une seconde étape permet d’éliminer les débris cellulaires. Le nouveau surnageant est passé de nouveau pour récupérer les pellets d’EVs. Les dernières étapes de centrifugation permettent de purifier l’échantillon en EVs ou petits EVs.
Même si l’ultracentrifugation reste aujourd’hui encore l’une des méthodes les plus utilisées et si elle ne nécessite que très peu de réactifs supplémentaires (peu ou pas de prétraitement avant d’effectuer une ultracentrifugation) et ne demande que peu d’expertise, celle-ci comporte néanmoins quelques inconvénients comme (1) un grand volume nécessaire (jusqu’à 1 mL), (2) un temps de séparation long et (3) un équipement coûteux. De plus, il a été observé que les vésicules isolées par ultracentrifugation posséderaient une gamme de taille pouvant être hétérogène, ceci pouvant être lié à l’agrégation ou à la déformation des vésicules (ou même à la lyse des exosomes) en raison des forces de cisaillement durant la centrifugation.

Précipitation

La purification des EVs peut également être réalisée par précipitation [64], c’est-à-dire en fonction de la solubilité des particules, en introduisant un polymère (souvent du PEG PolyEthylène Glycol) dans l’échantillon. Du fait de ces propriétés hydrosolubles, l’utilisation du PEG augmente le nombre d’interactions hydrophobes et contraint les particules les moins solubles à s’éloigner, engendrant ainsi leur précipitation. Cependant, une étape de centrifugation peut être nécessaire pour permettre de séparer correctement les vésicules. Pour effectuer la purification des EVs à partir de fluide, il existe aujourd’hui de nombreux kits commerciaux [65] (ExoQuick [66] de System Biosciences, Total Exosome Isolation Kit de chez ThermoFischer, etc…). Cette technique de précipitation des EVs possède plusieurs avantages, tels que (1) sa simplicité d’utilisation et (2) son volume initial assez large, compris entre 100 µL et 1 mL. Néanmoins, il s’agit d’une technique non spécifique, c’est-à-dire que la précipitation des vésicules inclut la précipitation de molécules comme des protéines extracellulaires ou des agrégats de cellules. Aussi, elle nécessite potentiellement un second traitement en amont (ultracentrifugation ou filtration par exemple) pouvant dénaturer les vésicules d’intérêts. Cette technique peut donc demander un certain temps de préparation et de réalisation.

Les méthodes d’immunocapture

Cette technique de séparation des vésicules par immunoaffinité repose sur l’utilisation d’anticorps correspondant aux antigènes présents à la surface de celles-ci et fonctionnant comme des marqueurs spécifiques de l’isolement [67]. La présence de nombreuses protéines et de récepteurs membranaires permet un large potentiel de développement de ces techniques de séparation, pour les exosomes, par interactions entre protéines (antigènes) et anticorps correspondants. Un test immuno-enzymatique ELISA [68] a été développé pour capturer et quantifier [69] des exosomes à partir de fluides biologiques (plasma ou urine). Une application de dispositif d’immunocapture sera donnée dans le chapitre IV. L’atout majeur de cette technique est la séparation spécifique des sous-espèces à partir d’un milieu complexe, ceci conduisant à une forte pureté en vésicules après la capture. Cependant, cette séparation n’est possible que dans les cas où les couples protéines/antigènes sont exprimées à la surface des vésicules et dépend, ainsi, grandement des anticorps choisis. De ce fait, cette technique possède un rendement plus faible que les autres techniques de purification et peut être perturbée par des interactions non spécifiques. Il peut alors être nécessaire d’utiliser d’autres techniques de purification avant cette technique de capture. Toutefois, dans le cas des techniques de capture par billes magnétiques ou magnéto-capture, les anticorps, contre les antigènes d’intérêts, sont fixés à la surface de billes magnétiques. En utilisant ces billes, l’efficacité de capture est augmentée du fait de la surface de capture plus importante et permet ainsi une visualisation des vésicules plus aisée.

Les dispositifs microfluidiques

La microfluidique est un domaine en expansion depuis plusieurs années, presque 226 000 publications entre 2012 et 2021 (source Google Scholar), que ce soit dans les domaines [70] de l’ingénierie, la médecine ou encore la biologie. Les avantages d’utiliser des dispositifs microfluidiques sont la réduction (1) de la consommation d’échantillon et (2) du temps de réaction, notamment en raison de la faible dimension des canaux ou des chambres de réaction. Le domaine du tri cellulaire fait partie des domaines qu’exploite la microfluidique (on compte environ 18 000 publications entre 2012 et 2021, source Google Scholar). Il intervient souvent dans la préparation d’échantillon dans le but d’établir un diagnostic. Il existedifférentes techniques de tri en microfluidique que l’on peut classer en deux catégories : les 18 techniques actives et les techniques passives. Les techniques dites actives ont l’obligation d’utiliser un champ extérieur pour fonctionner (par exemple magnétique, optique, acoustique, mécanique, etc…). Les techniques passives, comme leur nom l’indique, n’ont, elles, pas besoin de champ supplémentaire et utilisent la taille, la forme ou les propriétés mécaniques ou chimiques de l’échantillon pour établir la séparation. Il en existe plusieurs types : la filtration physique, le déplacement latéral déterministe, etc…

L’acousto-fluidique

Les méthodes d’acousto-fluidique [71] [72] [73], comme leur nom l’indique, utilisent des ondes acoustiques pour fractionner des particules selon leur taille. En effet, en appliquant un champ acoustique adapté, souvent généré à l’aide de matériaux piézoélectriques, il est possible d’isoler des particules avec précision (Figure I.11). Cette technique possède plusieurs avantages (1) traitement d’une large gamme de volume (du nano au millimètre), (2) biocompatibilité (fluide natif), (3) simple de conception et (4) facilement intégrable avec d’autres dispositifs microfluidiques. Figure I.11 – Exemple de séparation par champ acoustique d’après [72]. Deux transducteurs (IDTs) génèrent des champs d’onde acoustique stationnaire. Un mélange de particules (10, 8,5 et 1 µm) est injecté dans le dispositif et est soumis aux forces acoustiques. Les grosses particules (10 et 8 µm) subissent des forces plus importantes que les petites (5 et 1 µm) et sont attirées plus rapidement vers le nœud de pression (PN) et sortent par le canal de sortie centrale, tandis que les autres particules se dirigent vers les sorties latérales.
Récemment, une plateforme acousto-fluidique [74] a été mise en place dans le but de séparer des exosomes à partir de sang complet. Pour cela, deux modules sont nécessaires : un premier éliminant les composants sanguins et un second permettant la séparation des EVs. Cependant, ce type de séparation, courante pour les cellules et pour les particules, reste aujourd’hui peu utilisé pour les exosomes et nécessite, dans la plupart des cas, une étape de préparation (ultracentrifugation, par exemple).

Déplacement latéral déterministe (DLD)

La technique de déplacement latéral déterministe, mise en œuvre en 2004 [75], permet la séparation des EVs [76] sur la base de leur taille avec une résolution allant jusqu’à 10 nm. Il s’agit d’une technique de séparation passive, sans marquage et particulièrement adaptée aux particules de tailles micro et nanométriques. La structure générale d’un dispositif DLD se compose d’un canal microfluidique dans lequel un réseau de piliers, disposés régulièrement, permet d’orienter le chemin du fluide. La trajectoire (Figure I.12) des particules injectées [77] dans le dispositif sera influencée par leur taille, c’est-à-dire, que des particules de grande taille, supérieure à un rayon de coupure, seront déviées le long des rangées de piliers, tandis que les plus petites (de taille inférieure au rayon de coupure) resteront dans l’axe du canal microfluidique. Ainsi, il est possible de récolter, aux sorties appropriées, les deux populations de particules [78].

Principe de la filtration hydrodynamique

La filtration hydrodynamique a été introduite en 2005 par Yamada et Seki [83]. Son but est de séparer des particules selon une taille définie. Cette technique, passive, utilise le principe illustré sur la Figure II.1. Pour cela, une canalisation principale est connectée à une ou plusieurs canalisations secondaires. Le flux étant laminaire, le débit de fluide qui va être dévié dans la (ou les) canalisation(s) secondaire(s) définit une ligne séparatrice. La distance entre cette ligne et la paroi de la canalisation principale définira ce que l’on va nommer le rayon de coupure (noté Rc, en rouge sur la Figure 1). Ainsi, les particules dont leur centre se situe entre cette séparatrice et la paroi de la canalisation principale, c’est-à-dire dont leur rayon est inférieur au rayon de coupure Rc, seront déviées dans les canalisations secondaires. Il est alors possible de récupérer dans la partie « solution filtrée », une partie de liquide correspondant à l’écoulement présent entre le bord de la canalisation principale et le centre de la particule. Toutefois, les particules de plus grosse taille et possédant un rayon supérieur au rayon de coupure Rc, resteront, elles, dans la canalisation principale et seront récoltées dans la partie dite « non filtrée ».
La position de la ligne séparatrice par rapport à la paroi, est définie par le rapport des débits entre la canalisation principale (noté QIN) et les canalisations secondaires (noté QLAT). Les débits, dans les différentes canalisations, étant fonction de leur résistance hydrodynamique, il est donc possible, en choisissant des dimensions appropriées pour les différentes canalisations, de concevoir un dispositif microfluidique présentant une fonction séparatrice à un rayon de coupure Rc donné. Cette technique présente un avantage essentiel par rapport aux autres techniques de filtration : elle n’est pas sujette au colmatage. En effet, les dimensions minimales des canalisations peuvent être très supérieures à la taille de tri fixée. Elle est donc une des rares techniques permettant de travailler directement avec des échantillons denses et complexes comme le sang complet.
Nous allons déterminer les différents paramètres du flux dans un canal de section rectangulaire. Nous notons respectivement w, h et L la largeur, la hauteur et la longueur du canal avec ∆p la différence de pression appliquée, µ la viscosité dynamique. Nous émettons les hypothèses suivantes :
– Écoulement stationnaire et unidirectionnel (régime permanent)
– Fluide Newtonien incompressible (suivant l’axe x)
– Différence de pression appliquée de façon constante (selon x)
– Régime à faible vitesse
– Vitesse nulle aux parois (conditions aux limites)

Présentation de la technologie « films secs »

Le procédé de fabrication par laminage de films secs photosensibles se décompose en trois principales étapes schématisées sur la Figure II.8. La première étape consiste à préparer un substrat de verre sur lequel sera laminé le réseau de canalisations. La deuxième repose sur la structuration des canalisations à proprement parler et enfin, la dernière, permet le scellement du dispositif afin de rendre celui-ci étanche.

Préparation du substrat et des ouvertures fluidiques

Nous avons choisi de travailler sur un substrat de verre AF-32 de 4’’ et de 500 µm d’épaisseur, commercialisé par la société Schott. Nous avons choisi d’utiliser ce type de wafer, transparent, car nous travaillerons par la suite en microscopie optique. La première étape consiste à percer les wafers afin de réaliser les orifices d’entrées et de sortie des fluides. Une première solution utilisée a été le perçage du verre à l’aide d’une sableuse. Cette étape peut se réaliser directement au laboratoire. Le wafer de verre doit toutefois être préalablement protégé par un film (utilisation de la résine photosensible PH-2040, Photec PH-2000 Series). En effet, les projections des grains de sable, provoquées par la sableuse lors de l’utilisation de celle-ci, peuvent détériorer la surface du verre. Ainsi, ce film photosensible, est laminé sur les deux faces du substrat, puis seulement l’une des deux faces est insolée à l’aide d’un masque de photolithographie dans le but de reproduire les motifs des ouvertures fluidiques. Une fois les ouvertures imprimées sur la résine, le substrat de verre peut alors être percé aux endroits voulus. Enfin, pour être utilisé, le wafer de verre doit être nettoyé à l’aide de différents bains :
(1) un premier d’acétone permettant d’enlever le film photosensible du substrat, puis (2) dans un bain de H2O2/H2SO4 afin d’éliminer toutes les impuretés encore présentes en surface. Le perçage des ouvertures microfluidiques à l’aide de la sableuse (Figure II.9A) présente un aspect comportant peu d’éclat et dans les dimensions attendus (diamètre entre 1000 et 1200 µm, selon la buse utilisée). Cependant, cette technique de perçage présente un défaut majeur : un manque de précision de la position des perçages. En effet, cette imprécision peut rendre les dispositifs microfluidiques inutilisables (Figure II.9C).
L’ensemble des étapes de fabrication des capots de verre percés à la sableuse sont résumées dans le tableau Annexe II.1.
Figure II.9 – Observations au microscope électronique des différents perçages. A) Perçage réalisé à l’aide de la sableuse (réalisé au LAAS-CNRS), ouverture sans éclat de verre, à la taille attendue. B) Perçage réalisé à l’aide d’un laser UV (réalisé par l’IEMN), éclat de verre observé. C) Décalage entre l’ouverture fluidique du motif et l’ouverture percé, la puce fluidique est inutilisable.
Ainsi, pour pallier le problème de positionnement des ouvertures fluidiques, nous avons sollicité l’IEMN (Institut d’Electronique et de Microélectronique Nanotechnologie) de Lille qui dispose d’une technique de perçage par laser UV. Ainsi, en leur fournissant le masque de photolithographie des ouvertures, le perçage se fait de façon automatique et sans aucun décalage lié à la manipulation. Cependant, comme le montre la Figure II.9B, le contour des ouvertures réalisé au laser comporte de nombreuses imperfections notamment dues aux éclats du verre lors du passage du laser. Ces défauts pourront poser problème lors du montage fluidique final. Une fois le substrat percé dans ces nouvelles conditions, il est nettoyé dans un bain de H2O2/H2SO4 avant d’être utilisé.

Réalisation du réseau de canalisation

Une fois les capots prêts à être utilisés, il est possible de monter, sur ce substrat de verre, la partie fluidique. Pour cela, nous avons repris et adapté un procédé de fabrication innovant, développé au LAAS-CNRS, utilisant le laminage successif de films secs [85].
Ce type de fabrication possède plusieurs avantages. Il permet un gain de temps de fabrication : environ 1h30 pour la structuration de résine SU-8 50 µm et 30 minutes pour du film sec et est plus économique (16 € pour la SU-8 contre 1,6 € pour le film sec) [86]. Les films DF (commercialisés par la société Engineered Materials Systems), sont disponibles au laboratoire, aux épaisseurs suivantes : 5 µm (DF-1005), 20 µm (DF-1020), 25 µm (DF-1025), 50 µm (DF-1050) et 100 µm (DF-10100). Ils sont basés sur une résine négative de type époxy similaire à la résine SU-8. Ainsi, lors des étapes de photolithographie, les zones qui auront été insolées réticuleront et ne seront pas dissoutes lors du développement.
Pour la réalisation des deux dispositifs de tri à 1 et 10 canalisations secondaires, les films photosensibles DF-1005 et DF-10100 ont été utilisés. Sur un substrat de verre, préalablement nettoyé et activé par plasma O2, est laminée (utilisation de la plastifieuse Shipley 3024) une première couche de DF-1005. Ce niveau de résine est réalisé dans le but d’avoir le même matériau sur les différentes parois des canalisations. Une fois laminée, la résine est insolée (à l’aide de l’aligneur SUSS MicroTec MA6 Gen4) et recuite afin d’être réticulée. Ensuite, une étape de plasma O2 est de nouveau réalisée pour permettre l’adhérence d’une nouvelle couche de résine. Une seconde étape de laminage est réalisée afin de créer les motifs fluidiques. Pour cela, une couche de DF-10100 µm est laminée. Lors de l’insolation de cette couche, une étape d’alignement est nécessaire afin de positionner correctement les ouvertures présentes sur le masque de photolithographie et les ouvertures percées dans le substrat de verre puis un recuit est nécessaire pour terminer la structuration des canalisations. La dernière étape, schématisée Figure II.8C, consiste à fermer la structure des canalisations fluidiques. Le protocole de fabrication du réseau de canalisations des dispositifs à 1 et 10 canalisations secondaires est expliqué dans le tableau Annexe II.2 et illustré en Figure II.8C.

Scellement des dispositifs

Afin de fermer les canalisations fluidiques, une étape de scellement est nécessaire. Pour cela, nous avons réalisé deux types de capotage (Figure II.8C) : (1) un premier capot utilisant la résine DF et (2) un second capotage réalisé à l’aide d’un substrat de verre. Pour réaliser le premier capot, une nouvelle couche de DF est laminée sur le montage fluidique préalablement préparé. Cette couche est ensuite soumise à une exposition UV plus longue et à un recuit sur plaque chauffante avec une rampe de température afin de bien réticuler la résine. Nous avons testé différentes épaisseurs de DF (DF-1005, DF-1025 et DF-10100) afin de jouer sur la rigidité et l’étanchéité de cette couche. Toutefois, pour contourner le problème de décollement des couches de films secs obsevés au moment de la découpe des différentes puces, nous avons mis au point un second type de capotage des canalisations fluidiques. Pour cela, un second susbtrat de verre est utilisé pour venir sceller les structures. Sur celui-ci, une couche 48
de DF-1005 a été préalablement laminée sans toutefois être insolée. Ensuite, les deux substrats, sont mis en contact, puis mis sous pression à l’aide d’un équipement de nanoimpression (Nanonex) permettant une insolation UV simultanément. Les différentes étapes des techniques de scellement des dispositifs sont détaillées dans le tableau en Annexe II.3.
Les dispositifs à 1 et 10 canalisations ainsi réalisés et présentés en Figure II.10.

Techniques de fabrication 3D des puces microfluidiques

Nous allons maintenant discuter des différents protocoles mis en place afin de réaliser les dispositifs composés de 100 canalisations secondaires. Cette réalisation comportera un niveau microfluidique supplémentaire ce qui complexifie la technologie de fabrication. La technique utilisée pour fabriquer ces dispositifs à 100 canalisations est semblable à celle présentée précédemment.
Dans un premier temps, sur un substrat de verre préalablement percé et nettoyé par plasma, une fine couche de DF-1005 est laminée, isolée et recuite. Puis, deux couches de DF-1050 sont laminées. Ce niveau de 100 µm sera insolé à l’aide d’un masque de photolithographie afin de structurer la canalisation principale ainsi que les canalisations intermédiaires. Une étape de recuit et de développement est nécessaire afin de faire apparaitre les motifs des canalisations. Une nouvelle étape de traitement plasma est réalisée avant de monter deux nouvelles couches de DF-1005, qui permettront la réalisation du réseau des canalisations secondaires. La résine est réticulée par PEB et les structures des canalisations secondaires sont dévoilées après développement. Une nouvelle couche de DF-1025 est laminée dans le but de faire un pré-capotage du système. Pour éviter les risques d’effondrement de cette nouvelle couche, la température de laminage est diminuée tandis que le temps de réticulation est augmenté et le PEB rallongé en appliquant une rampe de température. Enfin, nous avons eu, comme lors de la réalisation les dispositifs à 1 et 10 canalisations secondaires, deux possibilités de capotage : un capotage DF et un capotage à l’aide d’un autre substrat de verre. Toutes les étapes de fabrication de ces puces sont schématisées Figure II.11 et détaillées Annexe II.4.
Lors de la mise en œuvre de cette technologie en « 3D », deux difficultés majeures ont été rencontrées : (1) lors de l’alignement des deux niveaux de canalisation et (2) lors du capotage final des dispositifs. Le premier problème a pu être résolu de façon rapide. En effet, en laissant un temps de relaxation suffisant (minimum 4 heures de repos), la contrainte du film sec, générée lors de l’étape de laminage, diminue et facilite l’étape d’alignement des deux niveaux. En plus de ce temps de pause, le design a été modifié dans le but de d’améliorer l’alignement. En effet, des ouvertures en forme de poire ont été ajoutés aux extrémités des canalisations intermédiaires et permettent, ainsi, une marge d’erreur plus importante lors de l’alignement semi-automatique. Nous avons vérifié l’effet de cet ajout de réservoir entre la canalisation principale et les canalisations secondaires, par simulation de l’écoulement à l’aide du logiciel COMSOL. Nous en avons conclu qu’il n’y avait pas, à priori, de perturbation significative liée à la présence de celui-ci. Cependant, un réservoir en forme de poire et présents aux extrémités des canalisations secondaires semble, toutefois, préférable (Figure II.12).
Concernant les difficultés rencontrées durant l’étape de scellement des dispositifs, plusieurs tests de collage utilisant une association d’exposition UV et de pression ont été réalisés. En utilisant une couche de DF-1005 sur un substrat de verre non percé, celle-ci a flué (Figure II.13A) dans les canalisations secondaires bouchant partiellement ou complétement les canalisations secondaires. Ainsi, il a été choisi de pré-capoter le dispositif à l’aide d’une fine couche de film sec (DF-1025). Or, malgré cette étape, la présence de nombreuses bulles d’air a été observée après insolation UV et application de pression (Figure II.13B). De plus, une dose d’insolation UV, trop importante, a provoqué le fluage du film sec, rendant les dispositifs totalement inutilisables (Figure II.13C). Aussi, afin de contourner le problème de scellement avec un capot de verre, nous avons également réalisé un capot à l’aide de films secs de différentes épaisseurs. Toutefois, ce type de scellement, trop fragile, se décolle lors de la découpe des dispositifs à l’aide d’une scie diamantée, ou fendille lors de l’injection de flux.

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Table des matières

CHAPITRE I : SEPARATION DES VESICULES EXTRACELLULAIRES : ETAT DE L’ART ET POSITIONNEMENT DU PROJET
Les vésicules extracellulaires
I.1. Découverte des vésicules extracellulaires
I.1.a. Les exosomes
I.1.b. Les microvésicules
I.2. Rôles biologiques et pathologiques des EVs
I.3. Récapitulatif des différentes classes d’EVs
Les techniques de purification et d’isolement des EVs
II.1. Méthode de purification par la taille
II.1.a. Chromatographie d’exclusion par la taille (SEC)
II.1.b. Fractionnement par écoulement de champ (FFF)
II.1.c. Filtration et ultrafiltration
II.2. Ultracentrifugation
II.3. Précipitation
II.4. Les méthodes d’immunocapture
II.5. Les dispositifs microfluidiques
II.5.a. L’acousto-fluidique
II.5.b. Déplacement latéral déterministe (DLD)
II.6. Récapitulatif des différentes techniques de purification des EVs
CHAPITRE II : PRINCIPE DE LA FILTRATION HYDRODYNAMIQUE ET TECHNOLOGIES DE FABRICATION DES DISPOSITIFS
Principe du dispositif de tri
I.1. Principe de la filtration hydrodynamique
I.2. Calcul des dimensions des puces microfluidiques
I.2.a. Dispositif 2D – Premier dispositif à 1 canalisation secondaire
I.2.b. Dispositif 2D – Dispositif à 10 canalisations secondaires
I.2.c. Dispositif 3D – Dispositif à 100 canalisations secondaires
I.2.d. Dispositif 3D – Dispositif adapté au tri des exosomes
I.3. Récapitulatif des différents dispositifs microfluidiques réalisés
Technologie de fabrication des puces microfluidiques
II.1. Présentation de la technologie « films secs »
II.1.a. Préparation du substrat et des ouvertures fluidiques
II.1.b. Réalisation du réseau de canalisation
II.1.c. Scellement des dispositifs
II.1.d. Techniques de fabrication 3D des puces microfluidiques
II.2. Technologie PDMS
Conclusion
CHAPITRE III : SEPARATION DE PARTICULES SUBMICROMETRIQUES PAR FILTRATION HYDRODYNAMIQUE
Protocole et observation des dispositifs de tri
I.1. Présentation du banc expérimental
I.2. Préparation des échantillons synthétiques : billes fluorescentes
I.3. Tests microfluidiques de validation des dispositifs à 1 et 10 canalisations secondaires
I.4. Tests microfluidiques sur les dispositifs à 100 canalisations secondaires à l’aide de billes synthétiques
I.5. Étude de la filtration de solutions de billes monodisperses
I.5.a. Mesure « témoin »
I.5.b. Caractérisation de la filtration des NP 480-OVA
I.5.c. Caractérisation de la filtration des NP 920
I.5.d. Caractérisation de la filtration des NP 140-CAS
I.6. Filtration de mélanges de billes synthétiques
I.7. Caractérisation des mélanges de billes synthétiques
I.7.a. Mélange 1 : NP 480-OVA et NP 920
I.7.b. Mélange 2 : NP 140-CAS et NP 920
I.8. Interprétations des résultats
Tests de filtration d’échantillons biologiques
II.1. Préparation et tests de filtration d’échantillon de plasma
II.1.a. Préparation des échantillons
II.1.b. Tests de filtration d’échantillon de plasma
II.2. Caractérisation des échantillons de plasma
II.2.a. Analyse par cytométrie en flux et calibration des différents NPs
II.2.b. Analyse par cytométrie du mélange de NP 480-OVA avec des NP 920
II.2.c. Analyse par cytométrie du plasma dilué 10 fois avec des NP 480-OVA
II.2.d. Analyse par cytométrie du plasma dilué 2 fois avec des NP 480-OVA ou NP 920
II.2.e. Conclusion
II.3. Préparation et test de filtration d’échantillon de sang
II.3.a. Filtration d’un mélange de sang complet et de billes
II.3.b. Caractérisation des tests de filtration par comptage de cellules
II.3.c. Analyse de la filtration d’un échantillon de sang dilué 100 fois
II.3.d. Analyse de la filtration d’un échantillon de sang dilué 10 fois
II.3.e. Conclusion
Conclusion et perspectives
CHAPITRE IV : LABORATOIRE SUR PUCE DE TRI ET DE CAPTURE DES VESICULES EXTRACELLULAIRES
Laboratoire sur puce MADNESS : association des modules de tri et de capture pour la séparation et la qualification des EVs
I.1. Description du module NBA
I.2. Connexion des modules de tri et de capture : présentation du laboratoire sur puce de séparation et d’immunocapture complet
Tri et capture de mélanges contenant des NPs, présentation des conditions expérimentales de complexité croissante
II.1. Présentation des expériences réalisées par SPRi en conditions idéales
II.2. Présentation des expériences réalisées avec le LOC complet
II.2.a. Résultats de filtration-capture
II.2.b. Comparaison des résultats avec la plateforme NBA et conclusion
Expériences en milieu biologique : mélange de nanoparticules NPs diluées avec lysat plaquettaire et en plasma
III.1. Étude d’un mélange de NPs en présence de PPL
III.1.a. Présentation des densités surfaciques des différents spots
III.1.b. Comparaison des expériences en PPL et en PBS
III.2. Étude d’un mélange de NPs et de plasma
III.2.a. Présentation des densités surfaciques des différents spots
III.2.b. Comparaison des densités surfaciques des échantillons en plasma
sanguin et en PBS-Tween20
Conclusion et perspectives
CONCLUSION GENERALE
Annexes
Références bibliographiques

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