Séparation acoustique et de son application à des objets biologiques

Force agissant sur une sphère dans une onde acoustique

   La première investigation théorique concernant la force acoustique a été effectuée par Rayleigh, et concernait la pression acoustique moyennée sur une période d’oscillation sur un objet absorbant enfermé dans un tube, connue sous le nom de pression de radiation de Rayleigh [25]. Peu après, Bjerknes a publié une étude concernant la force de radiation acoustique sur des objets sphériques, et plus précisément la force exercée sur une bulle d’air dans un fluide en oscillation [26] La première description théorique réellement complète et rigoureuse de la force acoustique exercée sur une sphère incompressible plongée dans un fluide non-visqueux a été donnée par King [23]. Dans son modèle, la force est calculée en déterminant le champ de pression résultant à la fois de l’onde incidente et de l’onde diffractée sur un objet sphérique, dans les cas particuliers d’une onde plane progressive ou stationnaire. Ensuite, sa théorie a été étendue pour prendre en compte le cas de sphères compressibles [27], puis le cas d’objets de forme quelconque [28] et de champs acoustiques plus élaborés, mais toujours axisymétriques [29, 30, 24]. Une expression très simple et très utile de la force acoustique a été établie par Gor’kov, sous la forme d’un potentiel acoustique U(~r) dont dérive la force selon l’expression F~ac = −∇~ U, pour un champ acoustique quasiarbitraire 1 [31]. Nous allons ici donner cette expression, que nous appliquerons immédiatement au cas d’une onde stationnaire plane, qui est le cas qui nous intéresse le plus.

Résonateur réel

   Au cours des expériences menées, nous avons utilisé un résonateur constitué d’un empilement de plusieurs couches de matériaux différents, dont les caractéristiques acoustiques peuvent être différentes de celles d’un résonateur plan comme celui considéré au paragraphe précédent. Toutefois, l’étude acoustique d’un tel résonateur montre que celui-ci présente des résonances pour lesquelles les champs de pression et de vitesse au sein du canal sont très proches des champs associés à une onde stationnaire plane. Au voisinage de ces résonances (caractérisées par des fréquences spécifiques de l’onde acoustique), la force acoustique exercée sur une particule aura donc une expression proche de celle donnée par l’équation (1.14) [35]. La complexité introduite par les nombreuses interfaces, auxquelles sont associées des coefficients de réflexion et de transmission complexes, rend la prédiction de la valeur de l’énergie acoustique au sein du canal très difficile. De plus, les fréquences pour lesquelles auront lieu les résonances ne sont plus données par l’équation (1.9), mais doivent être déterminées expérimentalement. En revanche, dans le cas d’une onde à plusieurs nœuds, la distance entre ceux-ci reste bien sûr fixée par la longueur d’onde (ce qui se comprend très bien physiquement, puisque c’est l’échelle de variation des champs).

Forces en présence dans le canal

   Les particules vont être influencées par plusieurs forces : la force acoustique, la force de flottabilité, la force de traînée, les interactions hydrodynamiques et les forces interparticulaires (comme les forces acoustiques secondaires – cf § 1.1.3). Cependant, les suspensions de particules que nous allons manipuler expérimentalement sont très diluées, avec une concentration maximum de l’ordre de c ∼ 106 part/mL (cf chapitres 4) : la distance moyenne entre particule vaut donc R¯ = n−1/3 ∼ 100 µm r ∼ 5 µm. Nous allons donc négliger ici les interactions hydrodynamiques et les forces interparticulaires. Mentionnons pour terminer que les parois perturbent également le mouvement des particules par l’intermédiaire des forces de portance hydrodynamique [37] ; toutefois, les situations étudiées sont telles que les particules ne sont jamais très proches des parois (en raison de la focalisation acoustique – cf § 1.1.2 et chapitre 2), nous pouvons donc négliger ces forces. Nous allons donc considérer dans la suite de cette section une particule unique de rayon r dans un écoulement de Poiseuille, en présence d’une onde acoustique stationnaire.

Cellule de Hele–Shaw

  Le canal que nous utilisons est une cellule de type Hele–Shaw disposant d’une entrée (e) et d’une sortie (s). Son épaisseur est d’environ 400 µm et sa surface de 12 mm × 50 mm. Il est représenté en vue de dessus sur la figure 2.1. Il a été fabriqué par nos soins au laboratoire et est constitué de la superposition de plusieurs éléments (cf figure 2.2) :
• la paroi du haut est une lame de plexiglas dont la surface mesure environ 60 mm × 30 mm pour 1 mm d’épaisseur. Ce matériau, facilement usinable, s’est avéré pratique pour percer les trous correspondant à l’entrée (e) et la sortie (s) du canal ;
• la paroi du bas est une lame de verre. Nous avons préféré ce matériau au plexiglas car il a une impédance acoustique plus proche de celle du transducteur, ce qui assure une meilleure transmission de l’onde du transducteur dans le verre. De plus, l’utilisation d’une lame de verre fait du canal un meilleur résonateur acoustique car le coefficient de réflexion à l’interface eau/verre est plus grand que le coefficient de réflexion eau/plexiglas (63 % contre 14 %, cf § 1.2) ;
• entre les deux parois se trouve le canal proprement dit, délimité par trois feuilles de mylar superposées, de 100 µm d’épaisseur chacune. Le mylar est un matériau indéformable, et nos feuilles ont une épaisseur constante, à mieux qu’un µm sur toute leur longueur : elles conviennent donc parfaitement à nos desseins. Nous déposons entre chaque élément une couche fine de colle en spray, dont l’épaisseur, qui a été mesurée à l’aide d’un micromètre de précision 2, est comprise entre 17 µm et 20 µm suivant la couche. L’épaisseur du canal sec est donc connue à 12 µm près. Ces couches ont été déposées dans le but de faciliter la procédure de fabrication (en évitant les décalages involontaires des feuilles de mylar), mais ne permettent malheureusement pas d’éviter les fuites ! Pour cela, un dépôt de colle de type araldyte tout autour de la cellule est nécessaire. Au final, nous mesurons au microscope une distance entre la paroi du haut et celle du bas d’environ 400 µm lorsque le canal est empli d’eau. Ces 20 µm supplémentaires par rapport à ce que l’on attendait (entre 368 µm et 380 µm) signifient qu’une fine pellicule d’eau s’est infiltrée malgré la colle entre les différentes couches constituant le canal, ce qui n’est pas gênant pour nos expériences, car cette épaisseur mesurée est restée constante tout au long de nos expériences.

Microscope holographique digital

   Pour observer les particules dans le canal, nous utilisons un microscope holographique digital (MHD), dont le schéma optique est présenté sur la figure 2.4. Son originalité par rapport à un microscope classique réside dans l’enregistrement d’hologrammes par la caméra CCD, et non de simples images d’intensité. Notre MHD est en fait un interféromètre de Mach-Zender : le faisceau laser servant à faire l’image des particules est séparé en deux bras, l’un servant de référence, l’autre traversant l’échantillon. Ces deux bras sont ensuite recombinés et le motif d’interférence produit est enregistré par la caméra. Nous avons ainsi accès à la fois à l’amplitude et à la phase de l’onde électromagnétique ayant traversé notre échantillon, ce qui nous permet de reconstruire le front d’onde le long de l’axe du faisceau autour du plan focal par propagation numérique et donc d’avoir accès à une visualisation tridimensionnelle des objets présents dans le canal. On se reportera à la référence [38] pour plus de détails. Ce processus de propagation numérique du front d’onde enregistré est appelé reconstruction holographique et nous permet d’obtenir des images de la distribution d’intensité lumineuse à une altitude arbitraire dans le canal, comme si nous avions placé le plan focal d’un microscope classique à cette position. Bien sûr, nous ne pouvons pas propager le front d’onde trop loin de la position de focalisation initiale en raison de l’accumulation d’erreurs, provoquant une dégradation des images reconstruites. En pratique, nous avons accès à une épaisseur d’environ 500 µm, ce qui est suffisant pour nos observations compte-tenu de l’épaisseur de notre canal.

Détermination de l’énergie acoustique

  Nous présentons dans ce paragraphe une méthode originale permettant de mesurer l’énergie acoustique moyenne au sein du canal. Pour effectuer une telle mesure, plusieurs stratégies sont envisageables. La plus directe consiste à insérer des capteurs de pression dans le canal comme c’est souvent le cas dans les montages utilisant des champs acoustiques macroscopiques. Cette méthode est intéressante puisque c’est la seule permettant d’accéder directement à l’énergie. Malheureusement, elle s’avère irréalisable pour des champs acoustiques microscopiques, car trop intrusive. Il faut donc se résoudre à une mesure indirecte de l’énergie en observant ses effets sur des objets au cours de leur passage dans le champ acoustique. Une possibilité est de mesurer l’évolution de la position des particules sous le transducteur en fonction du temps, par une technique de micro-PIV par exemple. On aurait alors accès à l’accélération instantanée de la particule et donc à la somme des forces appliquées, ce qui permet d’en déduire l’intensité locale de la force acoustique. Toutefois, dans nos types de micro-canaux, il est impossible d’effectuer des observations directes dans l’épaisseur et nous ne pouvons donc pas appliquer cette méthode. Une autre possibilité est de mesurer les positions d’équilibres des particules, situées sous le noeud de pression. La condition d’équilibre de la force de flottabilité et de la force acoustique nous permet alors de déterminer l’énergie acoustique dans le canal. Toutefois, pour pouvoir le faire, il faut connaître la position exacte du noeud de pression, qui est a priori décalée par rapport au centre du canal par les déphasages introduits par les diverses interfaces et que l’on doit donc mesurer expérimentalement. Pour cela nous avons deux solutions :
• soit appliquer un champ acoustique très intense, afin que le poids soit négligeable devant la force acoustique, et ainsi avoir une position d’équilibre des particules sur le noeud de pression. Malheureusement, de telles intensités acoustiques sont difficiles à réaliser, en raison de l’échauffement des transducteurs et du risque de déformation ou de destruction du canal ;
• soit éliminer la gravité. Pour cela, nous pouvons mettre l’ensemble de notre dispositif verticalement. Cela s’est avéré impraticable ; en effet, au cours de l’opération, il est impossible d’empêcher des déplacements de l’ordre de quelques dizaines de µm de la cellule relativement au plan focal du microscope. Or, la distance que nous cherchons à mesurer est de cet ordre ! La solution retenue a été d’embarquer le dispositif dans l’airbus A300-0g de la société Novespace, pour réaliser cette expérience en micropesanteur.

Modèle théorique du SPLITT

  Une cellule de SPLITT est un canal rectangulaire d’épaisseur faible (en général inférieure au mm) dans laquelle diverses forces sont utilisées pour faire migrer différentiellement les composants selon l’épaisseur du canal, en général, depuis l’une des parois principales vers l’autre paroi (cf figure 3.1). En même temps, un écoulement de fluide entraîne les espèces sur toute la longueur du canal. L’utilisation d’un séparateur de flux à l’extrémité aval de la cellule permet de séparer les matériaux en suspension en deux flux secondaires (ou fractions) dont la composition dépend du réglage fin des débits des deux flux secondaires et des forces de migration. Ce type de dispositif de séparation est caractérisé par un pouvoir de résolution important, une vitesse importante de séparation (en raison de la faible distance de transport nécessaire pour séparer) et par une grande adaptabilité en raison du large choix de forces de migration et de configurations de flux pouvant être utilisées. De plus, une cellule de SPLITT peut être utilisée pour effectuer des fractionnements en continu, ce qui distingue cette méthode de la technique de fractionnement par FFF (Field Flow Fractionation [48]) qui est limitée à des opérations discrètes dans le temps. Les techniques de SPLITT continu et de FFF ont été comparées dans les publications [49, 50].

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
1 Force associée à un champ ultrasonore stationnaire 
1.1 Expression de la force acoustique 
1.1.1 Force acoustique primaire
1.1.2 Effet sur une particule dans un résonateur plan
1.1.3 Forces acoustiques secondaires
1.2 Résonateur réel 
1.3 Écoulement laminaire dans une cellule de Hele–Shaw 
1.4 Trajectoires de particules 
1.4.1 Forces en présence dans le canal
1.4.2 Positions d’équilibre en présence de la force de flottabilité
1.4.3 Temps de relaxation
1.5 Conclusion
2 Expériences de focalisation acoustique 
2.1 Les outils utilisés 
2.1.1 Cellule de Hele–Shaw
2.1.2 Transducteurs
2.1.3 Microscope holographique digital
2.2 Mesure d’une vitesse de sédimentation 
2.2.1 Dispositif expérimental
2.2.2 Résultats
2.2.3 Conclusion
2.3 Focalisation acoustique à un noeud 
2.3.1 Dispositif expérimental
2.3.2 Recherche de la fréquence de résonance
2.3.3 Influence du débit et de la tension
2.3.4 Conclusion
2.4 Focalisation acoustique à deux noeuds
2.5 Détermination de l’énergie acoustique 
2.5.1 Principe d’un vol parabolique
2.5.2 Dispositif expérimental
2.5.3 Résultats
2.5.4 Conclusion
2.6 Amélioration des mesures de vitesse par micro-PIV
2.7 Conclusion
3 Séparation acoustique 
3.1 Modèle théorique du SPLITT
3.1.1 ISP, OSP, zone de transport
3.1.2 Critère de séparation et résolution
3.1.3 Limites du SPLITT
3.1.4 Le canal de Step-SPLITT
3.2 Principe de la séparation acoustique 
3.2.1 Principe : mise en série des transducteurs
3.2.2 Modélisation numérique
3.2.3 Résultats
3.3 La programmation spatiale : un principe général 
3.4 Conclusion
4 Séparation de particules de latex 
4.1 Dispositif expérimental
4.1.1 Le canal
4.1.2 Le circuit hydraulique
4.1.3 Les transducteurs
4.1.4 La visualisation
4.2 Séparation de particules de 5 et 10 microns 
4.2.1 L’échantillon initial
4.2.2 Visualisation in situ
4.2.3 Collectes des échantillons aux sorties
4.3 Séparation de particules de 7 et 15 microns 
4.3.1 L’échantillon initial
4.3.2 Fréquences de résonances
4.3.3 Conditions expérimentales
4.3.4 Résultats
4.3.5 Conclusion
4.4 Conclusion
5 Applications biologiques 
5.1 Les vésicules
5.1.1 Qu’est-ce que c’est ?
5.1.2 Comment les fabriquer ?
5.1.3 Comment les observer ?
5.2 Focalisation de vésicules 
5.2.1 Dispositif expérimental
5.2.2 Résultats
5.3 Preuve de principe : séparation de vésicules 
5.3.1 Dispositif expérimental
5.3.2 Observations in situ
5.3.3 Conclusion
5.4 Application aux globules rouges 
5.5 Conclusion
Conclusion
Bibliographie

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *