Sentiment d’appartenance et intelligence territoriale

Face aux différents défis, les territoires se trouvent au cœur des stratégies de développement. Sujet principal des actions publiques, terrain de contributions de décideurs institutionnels et non institutionnels, ainsi que de praticiens du développement, le territoire suscite depuis toujours l’intérêt des chercheurs appartenant à diverses disciplines (géographes, sociologues, économistes, juristes…). Un territoire attractif suppose la mise à contribution de divers acteurs pour une intelligence collective signifiant la collaboration et la concertation des acteurs. Assurer son attractivité signifie la mise en avant d’un trait distinctif, une valorisation identitaire, par notamment le choix de la mise en œuvre de projets authentiques. (Goria, 2009 ; Meyer, 2012). Tout acteur revendiquant son appartenance au territoire, signifiant son identité, son attachement et sa solidarité envers sa région contribuerait à son développement à travers certains dispositifs d’intelligence territoriale.

La multi-dimensionnalité du sentiment d’appartenance ainsi que celle de l’intelligence territoriale, a également donné lieu à une littérature abondante. (Di Méo, 2006 ; Guérin Pace, 2007 ; Guermond, 2009 ; Frisou, 2011). Le sentiment d’appartenance au territoire est une prédisposition non variable de l’individu signifiant son identité et son attachement et le préparant à une attitude positive envers ce territoire (Frisou, 2011). S’identifier, être attaché et manifester de la solidarité envers la région peut conduire les acteurs institutionnels, non institutionnels ou encore la population locale vers des choix de développement pour la région. Une mise en réseau de différents partenaires avec le déploiement d’instruments ou de dispositifs informationnels et communicationnels et de management permet une prise de décision adéquate pour le développement régional. Le processus d’intelligence territoriale suppose ainsi le recours à divers instruments de communication ou de management à l’échelle territoriale. Assurer l’attractivité et la compétitivité du territoire implique une préalable instrumentalisation du développement signifiant le déploiement de dispositifs et de pratiques mettant en réseau divers partenaires pour une concertation et une collaboration à l’échelle territoriale (Gardère, 2009).

Une nouvelle approche pour le développement territorial ne peut atteindre ses objectifs que si elle se fait dans le cadre d’un projet communicationnel. Ce dernier comme le confirme Gino Gramaccia (2009 : 267) « a pour objectif de transformer l’information en savoir au service de l’action publique ». La mise en œuvre des technologies de communication facilite la transformation de l’information en connaissance, et son appropriation par les citoyens, pour le déploiement d’actions en faveur du territoire. Servir une action publique au niveau du territoire suscite la mobilisation de différents acteurs dont le citoyen pour faciliter la transformation de l’information en connaissances utiles et utilisables pour un développement durable.

Identité, attachement, solidarité et territoire 

Notion nouvellement introduite, l’intelligence territoriale est un paravent à la montée des incertitudes concurrentielles, économiques, sociales, ou managériales, du fait qu’elle permet une coordination bénéfique d’intelligences des acteurs dans un espace donné. Cette coordination est un condensé de recherches et d’activités fondé sur la base d’une veille d’informations et de connaissances riches et variées.

Le territoire a une identité liée à l’histoire humaine, industrielle, géographique et physique (Vincent Meyer, 2010). Confronté à une concurrence accrue, il ne doit pas être délaissé en raison des valeurs ajoutées économiques et environnementales qu’il peut procurer pour le développement des sociétés. Pour Pierre Veltz (2002), c’est l’intelligence de la combinaison des ressources qui fait la différence entre les territoires. Un territoire attractif et compétitif est une combinatoire de ressources qui donnent naissance à des compétences et des stratégies. C’est là le signe d’une intelligence territoriale (Marc-Urbain Proulx et Dominic Trembley, 2006). Chaque territoire dispose d’une culture, de représentations et de croyances spécifiques. Les individus en réfèrent à des modèles explicites ou implicites qui inscrivent leurs comportements passés, présents et futurs dans une symbolique propre (Alfred Kroeber et Clyde Kluchon, 1952). La culture, ayant un impact sur les valeurs, les comportements, les habitudes et les attitudes, implique la variation de l’intensité du sentiment d’appartenance défini comme « le lien affectif positif entre un individu et un lieu particulier » (Delfosse, 2009 :112) qui peut être mesuré à travers l’attitude envers la région, « qui est une disposition stable de l’individu, qui lui fait percevoir ce lieu comme une composante de son identité, lui fait ressentir un attachement pour ce lieu, et le prépare à des comportements en faveur de ce lieu » (Frisou, 2011 : 6).

Le sentiment d’appartenance, traduit par l’attitude envers la région qui englobe l’identité, l’attachement, et la solidarité envers cette dernière constitue, par excellence, le moteur de réussite de l’intelligence territoriale, qui est à la base de toute compétitivité et attractivité d’une région. Ce sentiment est en mesure de faire réagir la population locale avec ses responsables institutionnels et non institutionnels et de les impliquer dans le processus de développement régional.

Intelligence territoriale et dispositifs d’information et de communication 

La gestion des dispositifs d’intelligence territoriale est délicate. Les décisions inhérentes à la mise en place du Knowledge Management (KM) supposant l’acquisition, la capitalisation, le partage et la diffusion de connaissances, ainsi que l’Intelligence Économique (IE) reposant sur un ensemble d’actions coordonnées de recherche de traitement et de diffusion de l’information utile aux acteurs économiques sont particulièrement étudiées par plusieurs auteurs comme Goria (2006) et Dumas (2007), en prenant en compte la spécificité des attitudes envers la région. Toute région ayant des particularités pouvant influencer le comportement de sa population locale.

L’intelligence territoriale vise à engager la communauté territoriale, les acteurs et chercheurs du terrain pour mieux connaître leur territoire et maîtriser les moyens de son développement. Afin que les acteurs entrent dans un processus d’apprentissage qui leur permettra d’agir d’une manière efficace et efficiente, ils doivent s’approprier les diverses technologies de l’information et de la communication ainsi que l’information en elle-même (Girardot, 2000). En outre, le développement économique régional est fortement dominé par l’intervention des bureaux régionaux de développement, ce qui traduit un partenariat entre le secteur public et le secteur privé à travers les entreprises ou clusters d’entreprises présents localement ainsi que l’implication de la population locale.

Les dispositifs de valorisation du territoire dans le cadre du programme LOTH

Les territoires sont diversement attractifs. Certains se trouvent même défavorisés avec une compétitivité limitée, tant par rapport à leur localisation géographique que de par leur contexte culturel, social, touristique et économique. Ceci pose plusieurs questions : Comment peuvent-ils mettre en valeur leurs ressources spécifiques ? Comment mesurer leur potentiel de développement territorial? Par quels moyens et dans quelles conditions peuvent-ils mettre en place des démarches collectives de valorisation? Comment assurer la participation des acteurs locaux? En tant que facteur mobilisateur de communication territoriale, s’agit-il aussi d’identifier et de mesurer le sentiment d’appartenance de ces acteurs à leur territoire ? Toutes ces questions sont actuellement posées dans le cadre d’un programme « Langages, Objets, Territoires et Hospitalités » et ont permis de consolider les savoirs en communication publique et territoriale sur des régions notamment arides, fragiles et menacées et de faire bénéficier les décideurs des résultats de recherche en les opérationnalisant sur différents terrains.

Notre recherche s’inscrit dans le cadre d’une étude comparative entre deux territoires, une région du Nord-est, et une région du Sud tunisien, dans le but d’interroger l’existence et l’impact d’un sentiment d’appartenance envers une région sur la mise en place de dispositifs d’intelligence territoriale (IT).

Approches de développement et réalités du terrain

La mondialisation qui entraine l’adoption de politiques de développement standardisées ne prenant pas en compte les spécificités culturelles, est considérée comme destructrice des identités locales : les mêmes objectifs sont fixés, les mêmes stratégies sont visées, les mêmes actions sont mises en places, au profit d’une seule et même culture. Face à ces appréhensions générées par une mondialisation poussée à l’extrême, les habitants d’une région ayant un sentiment d’appartenance assez intense adoptent une attitude positive envers leurs régions. Dans un contexte tunisien, diverses politiques de développement régional ont été adoptées à l’échelle nationale durant des décennies. Ces politiques ne prenaient en compte ni les spécificités culturelles régionales ni le sentiment d’appartenance qui conditionne l’attitude des habitants envers la région que ce soit en terme d’identité à la région, d’attachement à la région ou de solidarité envers la région, ce qui a abouti à l’échec de ces politiques, et à l’amplification des disparités traduite par divers écarts comme celui du seuil de pauvreté qui peut varier de 0,9 à 30,2 des régions du Sud aux régions du Nord, ou encore les vagues de migration interrégionales qui sont de plus en plus importantes.

La prise de conscience de la nécessité de nouvelles modalités et de dispositifs variés de développement en Tunisie est due aux disparités multiples ressorties et publiquement commentées depuis 2011. Malgré les différentes politiques adoptées pour désenclaver les zones fragiles et menacées, le déséquilibre entre les territoires n’a fait qu’amplifier les inégalités territoriales et attiser le sentiment d’injustice entre les populations.

Aujourd’hui, la mise à niveau des régions délaissées et défavorisées est un défi et une priorité. L’introduction et la mise en œuvre de nouvelles modalités de gestion des territoires sont de vigueur. Renforcer le sentiment d’appartenance et faire interagir la population locale et ses responsables institutionnels et non institutionnels seraient tributaires d’une nouvelle forme de communication publique et territoriale. Une telle assertion génère de nombreuses questions : jusqu’où peut-on instrumentaliser la mise en place de l’Intelligence Territoriale (IT), et selon quelles techniques ou modes managériaux ? Quelle sélection de dispositifs communicationnels de l’IT peut assurer une attitude positive envers une région? Comment faire interagir la population locale et les responsables institutionnels et non institutionnels grâce aux modalités communicationnelles de l’IT? Toutes ces questions soulignent l’importance du rôle de différents acteurs ayant un sentiment d’appartenance à la région, et souhaitant la développer. En ce sens, et avec la collaboration de plusieurs acteurs dans les gouvernorats de Nabeul et Médenine, des programmes de développement sont mis en place misant sur des ressources naturelles, humaines, l’amélioration de l’infrastructure régionale l’impulsion et l’encouragement des investissements privés.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PARTIE I. SENTIMENT D’APPARTENANCE ET INSTRUMENTALISATION DU DÉVELOPPEMENT TERRITORIAL
CHAPITRE I. SENTIMENT D’APPARTENANCE ET INTELLIGENCE TERRITORIALE : IDENTITE, ATTACHEMENT ET MANIFESTATIONS DE SOLIDARITÉ
1. Culture identitaire et sentiment d’appartenance
2. Intelligence territoriale : territorialisation de l’intelligence économique et du Knowledge Management
CHAPITRE II. MANAGEMENT COMMUNICATION PUBLIQUE ET TERRITORIALE ET INTELLIGENCE COLLECTIVE
1. Intelligence territoriale : quelle conformité aux pratiques managériales
2. Communication publique et territoriale et développement régional
3. Synthétisation et modélisation du lien entre le sentiment d’appartenance et l’intelligence territoriale
CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE
PARTIE II. VALEURS CULTURELLES D’APPARTENANCE ET INTELLIGENCE TERRITORIALE À L’ÈPREUVE DU TERRAIN
CHAPITRE III. RÉGIONS, ACTEURS TERRITORIAUX ET PRATIQUES DE DEVELOPPEMENT
1. Zones d’étude et méthodologie de recherche
2. Acteurs territoriaux et dispositifs communicationnels
3. Sentiment d’appartenance et sélection des actions de développement
CHAPITRE IV. RESULTATS ET DISCUSSIONS
1. Attitude envers la région et sélection de dispositifs de développement
2. Analyse bi-variée
3. Analyse confirmatoire
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
CONCLUSION GÉNÉRALE
BIBLIOGRAPHIE

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