Origine de la notion
La notion du secteur informel a été citée pour la première fois par K.Hart en 1971 à la conférence sur le chômage urbain en Afrique (Institute of Development Studies, University of Sussex). Ensuite, le BIT reprend le terme «secteur informel» en 1972 dans son rapport. La notion servait à décrire les activités des travailleurs pauvres qui exerçaient «un travail très pénible mais dont les activités n’étaient ni reconnues, ni enregistrées, ni protégées, ni réglementées par les pouvoirs publics». Parfois, on utilise le terme «secteur non structuré» pour designer le secteur informel.
Entre 1991 et 1999, le BIT a utilisé l’expression «secteur non structuré» pour traduire «informel sector». Tandis que dans certains livres ou débats, certains auteurs utilisent les termes «économie non officielle» (E.Archambault et X.Greffe), «économie souterraine» (Prix Nobel: Lewis 1979, BECKER 1992, SEN 1998), ou encore «économie parallèle» ou «secteur de subsistance» quoique leur terminologie ne soit nécessairement équivalente. Selon le terme de la définition internationale du secteur informel adoptée à Genève, par la XVème Conférence Internationale des Statisticiens du Travail, en janvier 1993, le secteur informel comprend l’ensemble des unités économiques non érigées en sociétés ou ne tenant pas de comptabilité complète et constituées par des entreprises familiales (n’employant pas de salariés permanents) ou des micro-entreprises (employant des salariés permanents non enregistrés ou en dessous d’un certain seuil de taille), le critère du non enregistrement de ces unités pouvant en outre être éventuellement pris en compte comme critère d’inclusion.
Aspect définitionnel du secteur informel
La notion du secteur informel par K.Hart en 1973 soulève de façon empirique l’économie informelle. Il définit l’économie informelle comme «les actes (ou ensemble d’actes) économiques marchands qui échappent à la norme légale en matière fiscale, sociale, juridique ou d’enregistrement statistique». Le secteur informel est un ensemble de production qui ne possède pas de numéro statistique, ou, dans le cas des patrons et des travailleurs à leur propre compte, qui ne tiennent pas de comptabilité (INSTAT). Le terme large d’«économie souterraine» couvre les activités accomplies en marge ou en dehors des obligations fiscales et sociales à savoir le travail au noir, la fraude fiscale et leurs variantes (Prix Nobel : LEWIS 1979/ Becker 1992/ sen 1998).
a) La définition multicritères de 1972 :
-facilité d’entrée
-utilisation de ressources locales
-des marchés de concurrence non réglementés
-propriété familiale des entreprises
-petite échelle des opérations
-des technologies adaptées et à forte intensité de travail
-des formations acquises en dehors du système scolaire
b) La définition internationale de 1993 :
Ensemble d’unités économiques faisant partie du secteur institutionnel des ménages en comptabilité nationale et produisant, au moins, en partie pour le marché.
a- entreprises informelles de travailleurs à leur propre compte, enregistrées ou non
b- entreprises d’employeurs informels :
employant moins de 5 salariés permanents
ou/et non enregistrées
ou/et n’ayant pas enregistré leurs salariés
Economie informelle et pauvreté
Etant donné l’hétérogénéité du secteur informel, il n’est pas possible de généraliser quoi que ce soit. Il faut constater qu’il n’existe pas de corrélation directe entre l’économie informelle et la pauvreté. En fait, on peut proposer trois cas de figure:
Les petites et moyennes entreprises qui échappent à la réglementation sociale, fiscale. Dans bien des cas, les employeurs de ce secteur gagnent bien leur vie, et même les travailleurs peuvent y trouver des salaires convenables. Cependant, ils ne bénéficient pas de droits sociaux et ne jouissent d’aucune protection. Ils se trouvent donc dans une situation extrêmement vulnérable, tout en échappant provisoirement à la pauvreté.
Un deuxième cas de figure est celui où le secteur informel est à l’origine de la pauvreté. Il peut s’agir de petites entreprises, de toutes sortes d’activités à productivité peu élevée où les revenus sont minimes et ne permettent pas d’échapper à la pauvreté. Ces travailleurs n’ont pas de droits, ni de protection sociale. Il faut souligner toutefois que l’économie informelle n’est pas toujours la cause de la pauvreté. Beaucoup de salariés du secteur public et du secteur privé sont bien plus pauvres que les travailleurs informels, dû à la précarité des salaires.
Un troisième cas de figure est celui où c’est la pauvreté qui est à l’origine du secteur informel. Les petits boulots ne sont que des stratégies de survie. Privés de droit et de protection sociale, ces travailleurs n’ont d’autre issue que d’essayer par tous les moyens de se maintenir en vie.
La stratégie de l’Organisation Internationale du Travail (OIT), orientée vers « le travail décent » offre bien plus de possibilité pour une sortie vers le haut et une lutte contre la précarité et la vulnérabilité du travail. Il faut également souligner la possibilité d’une évolution du secteur informel vers différents types d’économie solidaire (coopératives,…).
Secteur informel et développement économique
Plusieurs pays tels que le Pays Bas, la Chine ont déjà bénéficié d’une «croissance par le bas» : croissance générée par le dynamisme des petites et micro entreprises au niveau local. Cela correspond à une création d’emplois et de revenus contribuant à la richesse nationale. Privée de toute forme d’impôts, l’économie informelle préserve la compétitivité des entreprises et contribue à la motivation des différents acteurs économiques. Sans le secteur informel, un ensemble d’activités pourtant utiles ne seraient plus entreprises parce que dans les circuits officiels, leurs coûts sont prohibitifs. De plus, la croissance par le bas correspond aux éléments clés qu’un véritable développement exige. La création d’emplois implique la satisfaction des besoins fondamentaux tels que l’éducation, l’alimentation… ; une réduction du chômage et de la pauvreté. Ensuite, le secteur informel fait participer une grande partie de la population dans le processus de développement, c’est-à-dire, une participation réelle au flux du développement et de la production. La croissance bénéficie de ce fait à une grande majorité de la population, plutôt que de la petite minorité prospère ou étrangère.
Probabilité de contrôle et sanctions financières
La probabilité de connaître un « problème » avec des agents de l’Etat, c’est à dire de subir un contrôle et de devoir ensuite payer une « amende » ou un « cadeau », dépend en partie de la taille de l’Unité de Production Informelle (UPI). En cas de « contrôle », les unités de production les moins importantes (en termes de CA) ne versent aucune somme d’argent aux agents de l’Etat. La sanction pour les informels ambulants par exemple, si elle existe, se traduit par l’obligation d’évacuer l’emplacement qu’ils occupent. Seules les entreprises des deux plus hauts quintiles de chiffres d’affaires annuels sont amenées à verser une amende et/ou un « cadeau ». Toutefois, leurs montants restent très modestes, puisqu’ils ont été de 16,8 mille Fmg en moyenne sur l’ensemble des entreprises contrôlées en 1995.
Ces sommes n’ont représenté qu’environ 0,03% du chiffre d’affaires annuel de ces entreprises. Parmi les entreprises contrôlées, seules 10% ont dû payer une amende et 17% un « cadeau». D’une manière paraît a priori un peu paradoxale, les résultats d’enquête montrent qu’aucune entreprise non enregistrée n’a eu à payer d’amende, malgré leur illégalité. Les UPI non déclarées les plus importantes (CA annuel supérieur à 4,2 millions de Fmg en 1995) ont par contre dû verser un « cadeau ». En moyenne la charge représentée par ce cadeau a représenté 0,02% du CA annuel de ces entreprises. En revanche, les entreprises déclarées auprès des contributions directes ont dû verser des amendes et des cadeaux pour des montants moyens relativement plus importants. Ceux-ci restent néanmoins dans des dimensions très modestes puisqu’ils ont représenté 0,06% du CA de ces entreprises.
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE I: GENERALITES SUR LE SECTEUR INFORMEL ET LE DEVELOPPEMENT
Chapitre 1: les concepts du secteur informel et du développement
I – La notion du secteur informel
1- Historique
2 – Origine de la notion
3 – Aspect définitionnel du secteur informel
a) La définition multicritères de 1972
b) La définition internationale de 1993
4 – Étendue de l’économie informelle
a) Le petit commerce
b) L’artisanat
5 – Traits caractéristiques de l’économie informelle
II – La notion du développement
1-définitions
2-Les indicateurs de développement
Chapitre 2 : Secteur informel : une entrave pour le développement
I- Economie informelle et pauvreté
II- Le déséquilibre des finances publiques et de la sécurité sociale
III- Emploi informel et effets bénéfiques du commerce
Chapitre 3 : Les apports du secteur informel au développement
I- Secteur informel et développement économique
II-Poids important de l’économie informelle dans les pays en développement
1-La part du secteur informel dans les politiques d’emploi
2-La part du secteur informel dans les richesses nationales des pays
3 – Secteur informel et formation professionnelle
PARTIE II: CAS DU SECTEUR INFORMEL
Chapitre 1 : Les caractéristiques du secteur informel
I- La population du secteur informel
II- Le financement du capital informel
III-Les conditions d’exercice
Chapitre 2 : Contexte macro-économique et social
Chapitre 3 : Les motifs du non enregistrements fiscaux
a) Le surcoût de l’informel et son insertion
b) Probabilité de contrôle et sanctions financières
PARTIE III: ANALYSES ET REFLEXIONS
Chapitre 1 : Les causes du secteur informel
I- Au niveau économique
1-Politique macroéconomique de l’Etat
2- La succession des enfants et moyen de tâtonner une activité
3- La baisse du pouvoir d’achat
5- Lourdeur des procédures, surcoûts dus aux impôts et cotisations sociales
II- Au niveau social
1- Exode rural et survie
2- Pauvreté
3- Renforcement du lien familial (Les attaches avec le cercle familial)
Chapitre 2-Les conséquences du secteur informel
I- Ses apports au niveau économique et social
1- L’apport au niveau de l’économie
2- L’apport au niveau social
a)Rôle d’adoption pour les migrants (exode rural)
II- Les problèmes engendrés par le secteur informel
1- Au plan fiscal
2- Au plan social
a) Le secteur informel, la santé publique et le civisme
Chapitre 3 : contraintes et perspectives
I- Les contraintes
1- Contraintes non-financières
a. La faiblesse des débouchés
b. Les problèmes liés au marketing
c. Les problèmes d’ordre technique ou organisationnel
d. L’absence d’une différenciation des produits
e. Les problèmes de main-d’œuvre
f. Les problèmes avec l’Etat
g. Les problèmes sur l’infrastructure
2- Contraintes Financières
II- Les perspectives
1- Utilisation d’un prêt
2- Réaction en cas de réduction de la demande
3- Une tendance à l’optimisme malgré tout
III- Suggestions
1- L’Etat et les micro-entreprises
2-Entre le secteur informel
Conclusion
BIBLIOGRAPHIE
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