La résolution numérique des équations intégrales nécessite de borner la surface. Pour la méthode des moments (MdM) [14], [15] par exemple, le bornage de la surface nécessite la troncature du domaine d’intégration en calculant les équations intégrales. Cette tronca-ture engendre des problèmes numériques. Cette coupure non physique crée une diffraction de bord qui peut perturber le calcul des courants de surface et par suite contribuer au champ diffracté. En effet, les courants de surface sont calculés pour une surface de taille finie, ils sont donc supposés nuls en dehors. Cette annulation brutale des courants de surface engendre une discontinuité. Pour limiter ce problème, il faut donc éviter les effets de bords. Il existe plusieurs méthodes pour faire ceci.
L’utilisation d’un faisceau borné est la technique la plus couramment utilisée pour évi-ter les effets de troncature de la surface. Un exemple beaucoup employé dans ce cas est celui du faisceau Gaussien [16], [17] qui consiste à utiliser l’onde dite de Thorsos [18]. Le faisceau permet ainsi d’éclairer la surface de telle sorte que les courants s’annulent naturellement avant la troncature [9].
Une deuxième solution, plus utilisée, est de considérer l’onde incidente comme la super-position de plusieurs ondes planes (représentation de Weyl) [12]. Le champ incident est donné par : Z Ei(x, z, t) = i eiωt q f (kx) = kα2 − k2x q f (kx) = i k2x − kα2 dkx e(ikx x+i f (kx)z) (1.42)
où kα est le nombre d’onde dans le milieu α et kx est la composante horizontale du vecteur d’onde incidente. L’inconvénient majeur de l’utilisation de cette technique est que la taille de la tache éclairée varie avec l’angle d’inclinaison. Cette tache est définie pour une surface unidimensionnelle par la relation suivante [19] :2k(1 − sin θ) L = 16 , (1.44) où θ est l’angle d’incidence et k est le module du vecteur d’onde de l’onde incidente. Nous remarquons d’après l’équation (1.44) que pour les angles d’incidence proches de 90˚, la longueur de la tache éclairée devient très grande et par suite le nombre d’inconnues devient beaucoup plus important de telle sorte que la résolution du problème devient très difficile voire impossible. Par contre pour des angles d’incidence modérés cette technique est efficace.
Il existe d’autres techniques pour résoudre le problème de diffraction par les bords comme sur la surface l’utilisation des bandes résistives ajoutées à chacune des extrémités de la surface éclairée par une onde plane [20] [21].
Nous nous intéressons dans notre thèse à la deuxième technique. En effet, l’onde émise par les antennes de l’expérimentation peut être interprétée comme une somme d’ondes planes dans la zone de Fraunhoffer.
L’approximation de l’optique physique consiste à assimiler chaque point de la surface à un plan infini, correspondant au plan tangent de la surface au point considéré. Sous cette hypothèse, le champ réfléchi par la surface peut s’exprimer simplement à partir du champ incident sur la surface à l’aide des lois de Snell-Descartes et des coefficients de Fresnel qui permettent de connaître respectivement la direction et l’amplitude du champ diffracté. Le problème revient alors à calculer le champ total ψ(r) et sa dérivée normale ∂ψ(r) ∂n ∂ψ(r).
L’approximation de l’optique physique spécifie que le couple {ψ(r), ∂n } en un point M(x, z) quelconque de la surface S , est le même que celui qui existerait sur une surface plane tangente de taille infinie dont les propriétés électromagnétiques seraient celles carac-téristiques de la surface limitée au point considéré (x, z) (figure 1.7). Cette approximation est considérée valide si ρc cos3 θi >> λ [10], où ρc est le rayon de courbure de la surface et θi est l’angle d’incidence.
Coefficient de diffusion monostatique
Le coefficient de diffusion de la portion éclairée de la surface est définie par la quan-tité théorique du pouvoir réflecteur de celle-ci. Elle correspond à la surface d’une cible fictive qui, illuminée par la même densité de puissance d’une source réelle, re-rayonne l’onde électromagnétique d’une façon isotrope en produisant un écho de même puissance que celle effectivement reçue par le récepteur. Le coefficient de diffusion est une fonction intrinsèque de la surface diffractante et dépend :
• de la fréquence de l’onde émise par le radar,
• des états de polarisation à l’émission et à la réception,
• des caractéristiques géométriques de la surface éclairée,
• des propriétés électromagnétiques de la surface éclairée.
Le coefficient de diffusion est dit monostatique si l’émetteur et le récepteur sont situés au même endroit (colocalisés) ; dans une telle configuration, on parle de la rétrodiffusion. Le théorème de Poynting relie le coefficient de diffusion aux champs électrique et magné-tique incidents (Ei, Hi) en polarisation q et diffusés vers le récepteur (Ed, Hd) en polarisa-tion p. Dans le cas où la cible est située dans la zone de Fraunhoffer (les ondes incidente et diffusée au point d’observation sont localement planes), l’équation du coefficient de diffusion est donnée par l’équation suivante en 3D :
σpq = 4πR2 kEpHp∗ ddEqVHq∗k.(1.50)
L’équation précédente se réduit en 2D àkiVik qk2kHqk2 σpq = lim 2πR kEd = lim 2πR d . (1.51)
Surface illuminée par l’antenne
Nous nous intéressons dans ce paragraphe au calcul de la surface éclairée par l’antenne cornet introduite dans le paragraphe précédent. Cette surface est appelée aussi fauchée. La connaissant, le but est de calculer dans un deuxième temps sa réponse électromagnétique en champ lointain. Les dimensions de cette surface dépendent des angles d’ouverture de l’antenne à −3 dB, dans les plans E et H, appelés aussi angles de site et de gisement ainsi que de la distance séparant l’antenne de la surface. Dans la suite, nous déterminons théoriquement les angles d’ouverture de l’antenne à −3 dB.
Sur la figure 1.10, on note 2θ l’angle d’ouverture à −3 dB et θ1 l’angle du premier zéro [7].
• pour le plan E : 2θ = 51λ/b,
• pour le plan H : 2θ = 51λ/a,
où λ est la longueur d’onde et a et b sont respectivement les dimensions de l’antenne suivant les plans H et E.
L’angle du premier zéro permet de donner une estimation sur la forme du diagramme de rayonnement et de la directivité. Il est donné par [7] :
• pour le plan E : θ1 = 57λ/b,
• pour le plan H : θ1 = 57λ/a.
Rugosité électromagnétique d’une surface et paramètre de Rayleigh
Introduction
La rugosité géométrique d’une surface rugueuse est liée à l’écart type des hauteurs. Plus celui-ci est grand et plus la surface est irrégulière donc plus rugueuse. D’autre part, nous allons introduire dans la suite la rugosité électromagnétique d’une surface rugueuse. A noter que dans la littérature, lorsque la rugosité d’une surface est évoquée, il s’agit de la rugosité électromagnétique et non de la rugosité géométrique.
La rugosité d’une surface n’est pas une propriété intrinsèque de celle-ci. Elle est aussi définie par rapport aux caractéristiques de l’onde qui vient illuminer cette surface (telle que la longueur d’onde, l’angle d’incidence). Intuitivement, une surface est dite très peu rugueuse ou encore lisse si l’ordre de grandeur des irrégularités est très petit par rapport à la longueur d’onde incidente. Elle est qualifiée de rugueuse dans le cas contraire. Toutefois, l’angle d’incidence de l’onde est aussi un paramètre déterminant. Pour mieux comprendre comment il intervient dans cette discrimination, il convient d’introduire le paramètre de Rayleigh.
Paramètre de Rayleigh
Considérons une surface monodimensionnelle définie par x 7→z(x) illuminée par une onde plane incidente de direction ˆ ki = sin θi x − cos θi z. Choisissons un point arbitraire de cette surface, M(x, z), et calculons la différence de phase, Δφ, entre ce point illuminé et le plan moyen de la surface (figure 1.12). Pour plus de facilité, nous nous bornerons à l’étude dans la direction spéculaire. D’après la figure 1.12, la différence de phase s’écrit Δφ = 2kz cos θi, (1.54) avec k = 2λπ le nombre d’onde incident. Si la surface est plane, alors z = 0 ∀x et Δφ = 0. Contrairement à une surface plane, la phase peut prendre des valeurs plus ou moins grandes selon le rapport 4λπ cos θi et la hauteur z.
Notons que si la différence de phase est très faible,( |Δφ| π ), les deux rayons diffractés interféreront constructivement. Si, au contraire, |Δφ| ‘ π, les rayons seront pratiquement en opposition de phase, donc interféreront destructivement et, ainsi, très peu d’énergie sera réfléchie dans la direction de kd. L’étude ci-dessus, menée dans le cas de deux points seulement, peut être étendue à la surface entière. On définit ainsi le paramètre de Ray-leigh : Ra = 4π σh cos(θi) (1.55) où σh désigne l’écart-type des hauteurs de la surface. Ra est le paramètre de Rayleigh. si Ra < π/4, la surface sera dite lisse ou peu rugueuse, et si Ra > π/4, elle sera dite rugueuse. Le critère Ra > π/4 est connu sous le nom de Critère de Rayleigh.
D’après l’équation (1.55), le paramètre de Rayleigh dépend de l’écart-type des hauteurs de la surface, de la longueur d’onde et de l’angle d’incidence de l’onde. Cependant d’autres paramètres de la surface (l’écart-type des pentes, la courbure… par exemple) influent implicitement aussi sur la diffusion de l’onde et ceci d’après les équations reliant ces paramètres avec l’écart-type des hauteurs de la surface.
Pour une surface contrôlée, la mesure des effets de ces paramètres est possible. Nous aborderons les effets de ces paramètres dans le troisième chapitre.
Si la surface est diélectrique on peut écrire sous certaines hypothèses que le champ diffracté ψd = ψiR(θi) exp( jΔφ), où ψi est le champ incident. hψdi =ψplanexp( jΔφ) =ψjk cos θz) planexp(2(1.56) où ψplan correspond au champ diffracté par une surface plane. Ce champ peut être exprimé par ψiR(θi), où R est le coefficient de réflexion de Fresnel.
La figure 1.13 présente qualitativement l’influence du paramètre de Rayleigh sur la puis-sance diffusée par une surface rugueuse. Elle montre que plus la surface est rugueuse et plus la contribution de la composante spéculaire, reliée à la valeur moyenne du champ diffracté, diminue alors que la puissance diffusée dans les autres directions augmente (mo-ment statistique d’ordre 2 centré). La composante spéculaire est alors appelée composante cohérente du champ diffusé, tandis que l’autre composante est appelée composante inco-hérente du champ diffusé.
Houles contrôlées
Introduction
La diffusion des ondes électromagnétiques par une surface rugueuse, notamment la mer, est un sujet abordé depuis longtemps. Jusqu’à maintenant, la caractérisation exacte
de la surface maritime reste une tâche difficile puisqu’il s’agit d’une surface complexe où plusieurs paramètres entrent en jeu comme par exemple la vitesse du vent et sa direction. Ceci rend difficile la maîtrise des caractéristiques de cette surface. La particularité du cas de cette surface est qu’elle est décomposable en deux régimes : la capillarité et la gravité correspondant respectivement à des vaguelettes de rugosité à courte échelle et des houles de rugosité à grande échelle. Récemment, plusieurs modèles de spectres pour la surface de la mer ont été développés tenant compte de ces deux régimes ; notons par exemple le spectre d’Elfouhaily [22] qui est le plus utilisé vu sa simplicité et sa pertinence. Validé expérimentalement, ce spectre dépend d’un paramètre important qui est la vitesse du vent Uz (m/s) à une altitude z de la hauteur moyenne de la surface de la mer. Cependant, une comparaison directe entre les simulations issues des modèles de diffusion et des données expérimentales est une tâche très difficile, étant donné que les paramètres caractérisant la surface de la mer ne sont pas parfaitement connus. Pour cela, une expérimentation de mesure de champ électromagnétique diffusé par une houle contrôlée est mise en place afin de comparer les simulations avec des mesures bien déterminées. Un capteur mesurant le champ rétrodiffusé d’une houle contrôlée dans un bassin de houle est mis en place. Le dispositif est placé dans un milieu clos. Les surfaces sont générées dans un tel bassin situé à l’École Centrale de Nantes. Dans ce paragraphe le processus de propagation des houles dans un bassin est décrit. Les surfaces contrôlées sont générées par un batteur à 48 volets placé à une des frontières du bassin. L’autre frontière, en face du batteur, est une zone absorbante permettant d’atté-nuer la réflexion des vagues, qui produit cependant, d’une manière résiduelle, de petites vaguelettes. Les surfaces générées peuvent être régulières ou irrégulières selon les instruc-tions qui font fonctionner le batteur. Les houles régulières sont des houles périodiques quasi-sinusoïdales caractérisées par une amplitude qui est la mi-distance crête-creux et une période spatiale qui est la distance entre deux crêtes consécutives. D’autres sont ir-régulières, suivant le spectre de Bretschneider.
L’étude des ondes se propageant sur la surface, dite ondes de surface, revient à étudier le mouvement oscillatoire de l’interface entre deux fluides [23]. Dans notre cas, les fluides sont l’eau et l’air. Soulignons ici que le milieu est dispersif. Cela signifie que la vitesse varie avec la longueur d’onde de la houle. La relation de dispersion liant la pulsation ω = 2π/T et le nombre d’onde k = 2π/L, T étant la période de la vague et L sa longueur d’onde, est donnée par l’équation suivante : ω2 = (gk + γk3/ρ) tanh(kh), (1.57) où γ est le rapport des chaleurs massiques des milieux et h la profondeur.
Partant de l’équation de dispersion, nous remarquons deux régimes distincts :
Un régime des ondes gravitationnelles (grandes longueurs d’onde) où la pesanteur et la vitesse constituent la force de rappel de l’oscillation. On montre dans ce cas que la vitesse cg = ω/k décroît avec la racine carrée de la longueur d’onde (Fig.1.14). On a : k tanh(kh)cg = r g . (1.58).