Pendant la seconde guerre mondiale le besoin d’un terme particulier s’est fait sentir pour désigner un ensemble de méthodes utiles pour l’étude systématique et quantitative de tous les facteurs susceptibles d’influencer une décision. Qu’il s’agisse de mise au point de nouvelles armes, de détermination des tactiques les plus efficaces ou même de décisions d’ordre stratégique supposant un choix entre différentes politiques. Ainsi, la Recherche Opérationnelle est née, et a donc pour but de résoudre des problèmes de décision ou d’optimisation à l’aide d’outils mathématiques et informatiques.
La Recherche Opérationnelle s’est ensuite étendue à d’autres domaines tels que l’industrie, les finances, le transport ou encore le domaine de la santé. En ce qui concerne l’optimisation en transport, elle correspond souvent à l’organisation et à l’optimisation des tournées d’un ou de plusieurs véhicules. Par ailleurs, dans le domaine de la santé, les chercheurs s’intéressent beaucoup à la planification des personnels ou encore à la gestion des blocs opératoires. Les méthodes de résolution développées pour ces deux domaines sont en général soit des méthodes exactes, dont le but est de trouver une solution optimale du problème posé, soit des méthodes approchées, dont le but est de trouver une solution de bonne qualité mais pas forcément optimale en des temps de calcul raisonnables.
La recherche opérationnelle est connue pour fournir des outils informatiques d’aide à la décision qui permettent une bonne gestion de ressources dans différents secteurs (industriels ou autres), c’est pourquoi elle est beaucoup utilisée par les chercheurs dans différents domaines et notamment dans le domaine de la santé. Il existe plusieurs travaux qui résument les études utilisant la recherche opérationnelle dans le domaine de la santé en général, l’un des premiers fut de [Fries, 1979], puis [Rosenhead, 1978, Boldy and O’Kane, 1982, Datta, 1993]. D’autres chercheurs se sont concentrés sur des problèmes spécifiques dans le domaine comme l’ordonnancement des blocs opératoires [Cardoen et al., 2010, Guerriero and Guido, 2011], la planification des infirmiers [Burke et al., 2004], les critères de mesure de performance d’un système de santé [Li and Benton, 1996], ou encore le processus d’analyse hiérarchique pour la prise de décisions dans le milieu médical [Liberatore and Nydick, 2008]. L’application de la simulation aux événements discrets au sein d’un système hospitalier permet de modéliser les détails des flux complexes des patients, [Jacobson et al., 2006] présentent une liste de mesures qui doivent être faites rigoureusement pour modéliser chaque scénario de soins de santé avec succès en utilisant la simulation.
L’affectation et l’admission des patients est un problème qui peut être abordé de trois manières différentes : 1 d’une manière stratégique dès lors que le problème est un problème d’organisation générale à long terme et que le but des études sur ce genre de problème est de dimensionner au mieux les ressources dans les différents services de l’hôpital. 2 Le problème peut également être abordé au niveau tactique, généralement lors de la planification à moyen terme, ce qui permet d’allouer au mieux les ressources aux différents patients en prenant en compte les aléas prévisionnels. 3 Enfin l’approche opérationnelle dans le cas des problèmes de décision à court terme ou en temps réel, dans le but de gérer au mieux les aléas dans les plannings déjà établis [Vissers et al., 2007].
Parmi les problèmes considérés comme problème à long terme, on peut citer le problème d’ouverture de service, d’ajustement et de redistribution de lits ou encore l’étude des performances d’un hôpital. Pour résoudre ces problèmes, différentes méthodes de la recherche opérationnelle ont été utilisées par les chercheurs : la simulation [Ramis et al., 2001, Harper et al., 2002], la programmation stochastique [Utley et al., 2003], les files d’attentes [Huang, 1998], le modèle markovien [Akkerman and Knip, 2004] et les méthodes heuristiques [Akcali et al., 2006].
Pour les problèmes à moyen terme, nous avons la planification des rendezvous, l’estimation des besoins futurs en ressources ou encore la planification des admissions. La plupart des méthodes utilisées sont soit des heuristiques, soit de la programmation stochastique ou bien elles sont basées sur des modèles de simulation. Nous citons quelques articles traitant de ces problèmes : [Cayirli et al., 2006, Littig and Isken, 2007, Jebali, 2004].
Les problèmes du pilotage des services d’urgences, d’insertion de patients dans un planning ou encore l’affectation des patients sont des problèmes de planification à court terme et la plupart des méthodes utilisées sont de type système multi-agent [Daknou et al., 2010], programmation linéaire [Ben Bachouch et al., 2007] ou encore heuristique [Demeester et al., 2010].
Durant ces dernières années le nombre de lits dans les établissements hospitaliers et les cliniques privées n’a fait que diminuer entraînant la naissance de nouveaux besoins et de nouvelles demandes des patients. Plusieurs facteurs ont contribué à l’apparition et au développement de l’hospitalisation à domicile :
– Une espérance de vie qui augmente de plus en plus avec une durée de vie moyenne dépassant actuellement 80 ans,
– Le vieillissement de la population engendrant une augmentation du nombre de personnes atteintes de maladies chroniques dégénératives donnant lieu à des incapacités fonctionnelles et à des handicaps,
– Des patients souhaitant une prise en charge qui les soustrait le moins possible à leur environnement familial pour des raisons de confort personnel.
Par ailleurs, la situation du système de santé a nécessité la recherche de moyens de régulation pour répondre aux problèmes économiques et organisationnels qu’il subit. L’hospitalisation à domicile est apparue comme un levier potentiel permettant de réduire les dépenses du domaine de la santé tout en maintenant un niveau de qualité de service satisfaisant. Les besoins traités en HAD sont ceux qui ne nécessitent pas des soins qui mobilisent un plateau technique de haut niveau et dont une prise en charge lourde à l’hôpital n’est pas nécessaire. La circulaire No DH/EO2/2000/295 du 30 mai 2000 relative à l’hospitalisation à domicile affirme que : « L’HAD concerne les malades, quel que soit leur âge, atteints de pathologies graves aiguës ou chroniques, évolutives et/ou instables qui, en l’absence d’un tel service, seraient hospitalisés en établissement de santé. ». Puis, la circulaire No DHOS/O/2004/44 du 4 février 2004 relative à l’hospitalisation à domicile précise que l’HAD « est chargée d’assurer au domicile du malade, pour une période limitée mais révisable en fonction de l’évolution de son état de santé, des soins médicaux et paramédicaux continus et nécessairement coordonnés. Ces soins se différencient de ceux habituellement dispensés à domicile par la complexité et la fréquence des actes. ».
Ainsi l’hospitalisation à domicile est donc une structure hospitalière spécifique. Elle est adaptée à la prise en charge des patients dont le profil ne correspond plus à celui des patients requérant une hospitalisation conventionnelle de très courte durée, tels que les patients atteints de maladies chroniques ou encore la vieillesse. Ce paradoxe trouve ses origines, mais aussi ses résolutions, dans l’évolution historique et réglementaire de l’HAD.
L’HAD prend en charge des soins pluridisciplinaires, et fait intervenir plusieurs professionnels, relevant de spécialités ou de disciplines différentes (médicaux, paramédicaux), comme par exemple des infirmiers, des cardiologues, des cancérologues, des puéricultrices, des masseurs kinésithérapeutes, ou encore des spécialistes de la gériatrie. Ces intervenants sont soit des professionnels de l’HAD (salariés), soit des professionnels de santé libéraux. La collaboration de ces derniers avec les structures d’HAD doit être formalisée dans un contrat dans lequel ils s’engagent à respecter les pratiques de l’HAD. Pour plus de détails voir la circulaire No DH/EO2/2000/295 du 30 mai 2000 relative à l’hospitalisation à domicile.
Le médecin coordinateur est le praticien salarié relevant de l’hospitalisation à domicile. Il est le référent médical de la structure. Il fournit un avis médical pour toute admission et sortie de l’HAD, il est responsable de l’évaluation et de la prise en charge du patient. Selon l’article D 6124-308 du code de santé publique : « Dans tous les cas, le médecin coordinateur organise le fonctionnement médical. Il veille notamment à l’adéquation et à la permanence des prestations fournies aux besoins des patients et à la bonne transmission des dossiers médicaux et des soins nécessaires à la continuité des soins » Le médecin traitant est le praticien exerçant à titre libéral. Il est choisi librement par le malade. L’admission du patient en HAD ne peut se réaliser qu’avec son accord. Il est responsable du suivi du malade. Les infirmiers assurent le suivi des patients et le relais avec les médecins hospitaliers ou traitants. Généralement, les soins pris en charge en HAD sont classés en 3 catégories : des soins ponctuels, pour les maladies non stabilisées (exemple : chimiothérapie ou antibiothérapie), des soins de réadaptation au domicile, notamment après la phase aiguë d’une maladie neurologique ou cardiaque. Enfin des soins continus (cancer, maladie cardiaque ou pulmonaire). En HAD, il existe 24 modes de prise en charge. Les pathologies cancéreuses (tumeurs des bronches, tumeurs du sein et tumeurs du colon) représentent à elles seules 33% des journées en 2008. Les soins majoritairement pris en charge en HAD sont des soins palliatifs, de cancérologie et de périnatalité. Les autres modes de prise en charge représentent un faible pourcentage des soins : les pansements complexes et les soins spécifiques (9.94% des séjours), les traitements intraveineux (9%), l’assistance respiratoire (7.16%), les traitements de rééducation, de réadaptation du patient et de son entourage (4.44%). [Ben Bachouch, 2010] .
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Table des matières
1 Introduction
1.1 La Recherche Opérationnelle
1.2 La Recherche Opérationnelle dans le domaine de la santé
1.3 L’hospitalisation à domicile
1.3.1 Organisation au sein de l’HAD
1.3.2 Historique
1.3.3 Quelques chiffres
1.4 Objet et plan de thèse
2 Problème de routage et de planification des personnels pour l’hospitalisation à domicile
2.1 Contexte
2.2 État de l’art
2.2.1 Problème de planification
2.2.2 Problème de tournées de véhicules
2.2.3 Problème de routage et de planification pour l’hospitalisation à domicile
2.2.4 Problèmes similaires
2.2.4.1 Problème de routage et de planification des techniciens
2.2.4.2 Problème de tournées des agents de sécurité
2.3 Conclusion
3 Problème et modélisation
3.1 Notations et modélisation du problème
3.2 Résolution exacte via un solveur
3.3 Définition des instances
3.4 Résultats expérimentaux
3.5 Conclusion
4 Conclusion
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